samedi 6 février 2016

Passage de la frontière Birmane et Yangon : la première et grandiose claque

Enfin nous y voilà. Cela fait des semaines que j'attends impatiemment de commencer à écrire sur cette fantastique Birmanie. C'est vous dire si cette contrée nous a plu!

Par où commencer? Et bien disons qu'il y a des pays qui nous ont fait marrer, d'autres qui nous ont laissé indifférents ou qui nous ont déçu. Il y a des pays que nous avons aimé, et d'autre que nous avons adoré. Et puis il y a le haut du panier, la crême, les élus. Ces rares pays, pour de multiples et différentes raisons, ont eu le ou les petits quelques-choses qui nous ont emporté au-delà du simple émerveillement. Ils nous ont remué, nous ont fait réfléchir, ont transcendé les attentes que nous avons du voyage en nous laissant des souvenirs pas seulement bons mais uniques, formidables et profonds. Et comme vous vous en doutez, la Birmanie fait à présent partie de ces coups de coeur dont nous parlerons longtemps avec passion.

De nombreuses questions nous ont été posées sur cette contrée, qui commence tout juste à ouvrir complètement ses frontières au monde, et nous avons décidé de vous faire partager tous les détails des deux bien trop courtes semaines que nous avons passé là-bas. D'aucun dirait que nous partageons déjà beaucoup de détails sur nos pérégrinations, ce à quoi je répondrai : crotte.

Dans un souci d'aération, et histoire d'éviter un interminable pavé, nous allons publier une série de trois articles sur le pays, à commencer par celui-ci, consacré au passage de la frontière terrestre depuis la Thaïlande et à la découverte de la capitale, Yangon (anciennement Rangoon). Je ne fais pas preuve en temps normal d'autant de sollicitude, alors on en profite!

Pour résumer simplement, disons que ces quelques premières dizaines d'heures ont suffit au pays pour nous rentrer de plein fouet dans le coeur et faire remonter nombre des plus formidables souvenirs que nous ayons éprouvés au cours de nos vadrouilles...

Pour répondre aux questions qui nous ont le plus été posées, chaque article sera complété d'un encadré résumant toutes les informations pratiques concernant les lieux évoqués : prix, transports, hébergement, sight seeing, nourriture, activités etc... Que de nouveautés, pas vrai?

Vous trouverez tout ça en fin de page. Si vous n'y trouvez pas de réponses à vos questions, n'hésitez pas à nous contacter.

En attendant, et avant d'entrer dans le vif du sujet, une courte introduction nous a paru nécessaire.


La Birmanie dans le Petit Tour


Je me triture les méninges pour trouver une entame épique à ce récit, mais la chaleur asiatique m'a visiblement grillé quelques neurones. Commençons donc par le plus simple : le nom du pays.

Simple mais représentatif d'une histoire encore très récemment houleuse sur laquelle nous reviendrons plus tard, l'appellation de ce territoire compris entre l'Inde, la Chine, le Laos et la Thaïlande est déjà sujet à quelques controverses. Le pays portait jadis le nom de ''Birmanie'', jusqu'à ce que le pouvoir dictatorial de la junte militaire, à travers ses généraux, ne le change pour ''Myanmar'' en juin 1989.

Cette modification n'est pas reconnue par de nombreux pays, ainsi que par l'opposition pro-démocratique qui s'est battue durant des années contre la dictature.

De notre côté, nous avons donc décidé d'utiliser l'ancien nom : la Birmanie.

L'histoire encore très récemment houleuse sus-nommée fait partie des choses qui ont attisé notre intérêt pour ce pays, et une petite parenthèse (rapide, promis!) nous a paru importante, tant cette histoire est emplie de violence et de répression, mais aussi de héros et de révoltes. Tant les événements sont récents. Tellement récents que leurs derniers rebondissements significatifs se sont déroulés seulement quelques semaines avant que nous arrivions dans le pays...

Remontons un instant quelques années après la fin de la seconde guerre mondiale...

Après l'assassinat du héros national, Aung San, et l'indépendance du pays sur l'Angleterre le 4 janvier 1948, le gouvernement provisoire alors formé ne parvient pas à calmer les troubles qui éclatent un peu partout, causés par une multitude de groupes ethniques, indépendantistes, séparatistes, barons de la drogue, et autres groupuscules extrémistes. Le chef du gouvernement de transition, Thakin Nu, est contraint de faire appel au général Ne Win pour redresser la situation. Ce dernier renverse le pouvoir en place le 2 mars 1962. Ceci marque le début de 48 ans de dictature militaire...

Ne Win nationalise les entreprises et les commerces birmans, réduisant rapidement le pays à la pauvreté (C'est encore de nos jours le plus pauvre d'Asie du sud-est), et commence à le couper du monde extérieur, en expulsant les organismes d'aide internationales et en bannissant les publications étrangères. Il interdit également tous les partis politiques et supprime les libertés d'expressions. Les manifestations qui éclatent alors sont sévèrement réprimées.

En 1988, la vindicte et les troubles atteignent des sommets, tandis que le Ne Win cède la place au général Saw Maung et à son parti, le bien nommé Conseil d'état pour le rétablissement de la loi et l'ordre. Les mouvements pro-démocratiques sont alors écrasés dans le sang. Les morts se comptent par centaines, les blessés et les prisonniers par milliers... La plupart des droits sont abolis, mais la nouvelle dictature militaire promet néanmoins des élections libres sous peu... Aung San Su Kyi, la fille d'Aung San, fonde la National League for Democracy (NLD), et rassemblent de plus en plus de sympathisants grâce à son ardeur à faire face au régime.

Les élections promises, les premières dans le pays depuis trente ans, se tiennent en 1990, et voient le NLD remporter une victoire éclatante. Ce qui n'est bien sûr pas du goût des militaires : ils invalident les résultats, récupèrent le pouvoir, bannissent le NLD et assignent Aung San Su Kyi à résidence.

Elle reçoit le prix Nobel de la paix en 1991, pendant sa captivité, pour ses actions de désobéissance civile et sa lutte pour l'instauration de la démocratie en Birmanie (certains la surnomment la Gandhi Birmane!), tandis qu'un vague projet de nouvelle constitution voit le jour sans donner de résultats.

Au fil des ans, le pays subit plusieurs sanctions de la part de la communauté internationale, mais le régime militaire survit grâce au soutient de la Chine, de la Thaïlande et d'autres pays de l'ASEAN. Le traffic de drogue et le gazoduc du groupe Total dans le pays maintiennent l'économie à flot.

En 2007, le gouvernement annonce une hausse de 500% du prix du carburant. Les manifestations se multiplient, et de nombreuses arrestations ont lieu. Les bonzes mènent les défilés, la protestation gagne en violence, et après plusieurs menaces, la junte lance la répression sur les moines bouddhistes, causant au minimum une trentaine de morts dans leurs rangs.

Finalement, entre 2010 et 2011, la junte est officiellement dissoute, et Aung San Su Kyi est libérée. Le général Thein Sein, alors premier ministre, prend la tête d'un gouvernement composé presque exclusivement de militaires, mais montre des signes d'ouverture : rétablissement du droit de grève, du droit de se syndiquer etc... Le pays s'ouvre au capitalisme et se libéralise, les frontières s'ouvrent, et les prisonniers politiques ayant participé aux manifestation de 1988 sont relachés.

Des élections partielles, portant sur seulement 7% des sièges du parlement, sont organisées. Le NLD les rafle haut la main, faisant son entrée au gouvernement.

Et nous arrivons à 2015. Le 8 novembre, quelques semaines seulement avant notre arrivée, se sont tenues en Birmanie les premières élections législatives libres depuis 1990. Et le 13 novembre, nous avons appris la victoire écrasante de la National League for Democracy, qui a raflé 390 sièges sur les 485 que comporte le parlement, devenant le parti majoritaire détenteur du pouvoir législatif.

Les discussions sont en cours pour organiser la transition démocratique du pays, et Aung San Su Kyi devrait normalement prendre la tête du nouveau gouvernement dans un futur proche, même si les antécédents historiques montrent que rien n'est gagné d'avance... L'avenir seul nous dira comment vont évoluer les choses, mais c'est un fait : nous allons arriver en Birmanie à une période charnière de son histoire!


Il y a une autre raison pour laquelle je vous parle de tout ça : l'histoire récente du pays a eu un impact conséquent sur sa place dans le cadre de notre voyage, notamment à cause de l'état de ses frontières. Et c'est déjà un petit péplum...

Il y a trois ans, tandis que nous préparions l'itinéraire de notre petit tour, c'est-à-dire que nous listions grossièrement les pays que nous ne voulions surtout pas rater, la Birmanie faisait déjà partie du lot de nos immanquables, grâce à tous les récits que nous lisions sur son atmosphère formidable, sur la gentillesse de ses habitants et la beauté de ses sites ou de ses paysages.

Malheureusement, passé l'enthousiasme de premiers aperçus plus qu'alléchant, nous nous sommes renseignés un peu plus sur les conditions d'accès au pays. Nous sommes alors début 2013, et le seul moyen de pénétrer sur le territoire birman est l'avion. Il faut arriver par les airs à l'aéroport de Yangon et posséder un billet de retour pour obtenir le visa...

Or dans nos esprits, nous étions déjà résolus à limiter au maximum le nombre de vols en avion durant notre voyage, préférant les voies terrestres. Décidant d'attendre de voir comment évolueraient les choses, nous avions rangé la Birmanie bien au chaud dans un coin de nos têtes...

Le 1er octobre 2013, le petit tour débutait. Au fil des mois de voyage, régulièrement, nous jetions un oeil plein d'espoir sur les conditions qui régnaient le long des frontières birmanes, pour voir les choses s'améliorer ou se détériorer. Tantôt les frontières terrestres s'ouvraient aux étrangers, tantôt elles se fermaient. Nous lisions les récits de baroudeurs qui tentaient d'entrer dans le pays par voie terrestre et se retrouvaient bloqués plusieurs jours à la frontière.

A côté, les rencontres sur la route se succèdant, nous écoutions avec des étoiles dans les yeux les récits d'autres voyageurs qui avaient parcouru  les étendues birmanes. Les avis étaient unanimes, et faisaient état d'un pays magnifique à la population désarmante de gentillesse.

Pour notre plus grand bonheur, au fil des mois, suivant la politique d'ouverture du pays, l'inconstance de la situation aux frontières a progressivement disparu, tandis que nous comprenions que suivant notre itinéraire, si nous nous rendions dans le pays, nous entrerions par la Thaïlande. Plusieurs points de passage se sont ouverts, au début seulement quelques jours par semaines, puis un jour sur deux dans le sens des entrées, à cause de l'étroitesse des voies d'accès qui ne permettaient qu'à une seule file de véhicules de circuler, soit dans le sens de l'entrée, soit dans celui de la sortie. Enfin, très récemment, à la suite de nombreuses rumeurs, nous avons enfin reçu la confirmation que nous attendions depuis longtemps : la nouvelle route du point de passage le plus facilement accessible depuis la Thaïlande, raliant Mae Sot à Myawaddy, était terminée. L'accès au pays était enfin définitivement et complètement ouvert!

Nous étions enfin fixés, et positivement qui plus est : nous allions y aller!

Après l'obtention de nos visas depuis Bangkok, nous avons profité de nos quelques premières semaines thaïlandaises pour préparer un minimum notre périple birman. Nous avons d'abord envisagé d'entrer par le nord de la Thaïlande, au-dessus de Chiang Rai, au niveau de Tachileik, avant de nous apercevoir qu'il était impossible de rejoindre le reste du pays en arrivant par sa région est, les routes vers l'ouest étant interdites d'accès aux étrangers... Nous nous sommes donc rabattus sur le poste Mae Sot-Myawaddy quelques jours seulement avant de nous mettre en route. Coup de bol, ce point de passage est aisément ralliable depuis notre quartier général thailandais, Phitsanulok...


Préparation


Nous venons donc de rentrer de Chiang Mai à Phitsanulok, et passons deux jours à la London Guest House, cravachant sur le blog et préparant notre incursion en terre birmane...

Fidèles à nos méthodes laissant libre cours à la découverte surprise, nous limitons volontairement la préparation au minimum vital.

Il faut noter que nous avons, comme cela nous est arrivé en de rares occasions par le passé, une contrainte de temps à prendre en compte. Nous avons décidé de rejoindre la Birmanie le 24 décembre, et nous devons rejoindre mes parents aux alentours du 12 janvier 2016 en Thaïlande. De plus, nous prenons en compte le facteur financier : la Birmanie est fameuse pour ses hôtels surtaxés qui ne permettent que rarement de trouver une piaule à moins de 15$, et il faut savoir que le couchsurfing y est interdit, les habitants accueillant des étrangers chez eux s'exposant à de sévères sanctions.

Et niveau pognon, notre situation commence à redevenir intéressante point de vue chalenge : selon nos estimations, nos finances ont désormais atteint le seuil critique, passant sous la barre des 1000 euros alors qu'il nous reste presque deux mois à tirer avant d'aller ressourcer nos comptes en banque en Nouvelle Zélande... Nous ne voulons pas passer trop de temps dans un pays où le seul fait de dormir va déjà vampiriser nos maigres économies...

Nous décidons de vadrouiller deux semaines en Birmanie pour limiter les dégats. Un bien court séjour évidemment, mais nous nous souvenons que nous avons déjà de la chance de pouvoir y aller.

Afin de rentabiliser au maximum ces quinze jours, nous décidons d'appliquer la redoutable technique que nous avions utilisée en Iran : limiter le nombre de sites visités mais les explorer correctement pour ne pas tomber dans le rush malgré le peu de jours dont nous disposons, et optimiser notre temps sur place tout en économisant sur les chambres en favorisant les trajets de nuit. Cette tactique complètement épuisante qui tient en grande partie de l'épreuve d'endurance et qui avait été la notre chez les perses, avec un bon timing, permet de passer deux jours complets quelque part en ne prenant qu'une nuit en chambre.

Partant de là, en fouinant à droite à gauche, nous établissons un itinéraire qui nous fait passer les sites les plus célèbres du pays en ajoutant un ou deux spots un peu moins conventionnels. Quand je dis itinéraire, je parle d'une simple liste de noms sur notre cahier. En gros, nous comptons vadrouiller la capitale, puis filer au nord vers le célèbre lac Inle avant d'aller nous balader quelque part. De ce côté là, deux endroits retiennent notre attention : Hsipaw et Kalaw. Nous envisageons ensuite, sans nous être bien décidés, de passer à Mandalay, capitale culturelle du pays, avant de rejoindre Bagan et son fameux parc archéologique.

En ce qui concerne les transports, notre seul travail de programmation se résume à nous apercevoir que les trains ne coûtent rien dans le pays. A savoir que jusqu'à récemment, les billets de train étaient vendus une blinde aux étrangers et payables uniquement en dollars, rendant les bus plus abordables. Ce n'est plus vrai aujourd'hui. Les trains peuvent désormais se régler en monnaie locale, et les tarifs sont les mêmes pour tout le monde, c'est à dire trèèès bon marché. Une initiative que nous considérons comme incroyable, tellement habitués que nous sommes à voir les politiques tarifaires fonctionner plutôt dans le sens inverse! Pour les détails de nos trajets, nous comptons utiliser la meilleur source de conseil qui soit (la plupart du temps...) : les habitants.

Comme d'habitude, nous débarquerons sans guide papier.

Et bien il n'y a plus qu'à! Le 23 au matin, nous quittons la London Guest House à Phitsanulok, surexcités et impatients, pour nous mettre en route vers l'ouest.


Mae Sot-Myawaddy


Au lever du soleil, nous attrapons un tuk-tuk commun près de la place du marché de nuit pour la station de bus de Phitsanulok, depuis laquelle nous avions rejoint Sukothai il y a quelques temps. Nous visons donc Mae Sot, au nord-ouest de la Thaïlande, à 7 kilomètres de la frontière Birmane, et embarquons en fin de matinée pour un long voyage de plus de 7 heures...

Forcément, nous arrivons à Mae Sot à la tombée de la nuit, sans aucun renseignement sur la ville, et décidons de faire étape ici. Inutile de nous crever avant de commencer un périple birman qui s'annonce déjà sportif!

Nous tournons un bon moment, suants, aidés par des habitants aux petits soins qui ne nous laissent jamais bien longtemps indécis au bord d'un trottoir sans venir nous proposer de l'aide, et parcourons une grande avenue pour découvrir un panneau au fond d'une ruelle qui nous conduit à la Lusy Guest House, où nous échouons avec un soupir de soulagement pour 200 bath.

En générale, dans toutes les pays du monde, les villes frontalières, tout comme les capitales, présentent une ambiance très différentes des autres, et nous passons la soirée à explorer Mae Sot, qui visiblement ne déroge pas à la règle.

La cité constitue le centre de la contrebande transfrontalière entre la Thaïlande et la Birmanie, et il s'y négocie plus ou moins légalement, la plupart du temps au marché noir, cargaisons de bois et de pierres précieuses ou semi-précieuses, entre autres denrées.

Très animée, véritable melting pot culturel rassemblant chinois, birmans aux joues fardées et thais, nous y croisons des hindoues en sari, des sikhs arborant fièrement leur turban, des musulmans en route vers la mosquée pour la prière du soir au milieu des étals de pierreries et des marchés.

Déambulant dans cette joyeuse atmosphère de bazar oriental, nous ne tardons pas à trouver de quoi grignoter au bord de la route avant de rentrer.

Demain, nous rejoignons enfin la Birmanie qui nous tend les bras à quelques kilomètres de là. Une journée chargée s'annonce...


Nous jaillissons du plumard au lever du soleil, surexcités et frétillants, bouclons les sacs et cavalons dans la rue en direction de la station de bus après avoir fait quelques prévoyantes provisions de flotte et de biscuits. La route est incertaine, et nous n'avons aucune idée sur la nature du trajet qui doit nous conduire à Yangon!

Avant tout, nous allons tâter un peu cette frontière terrestre toute neuve.

A la station de bus, nous demandons partout comment rejoindre le point de passage, et on nous aiguille dans le centre-ville, au marché de jour, d'où partent apparemment les transports pour la frontière.

A nouveau, nous cassons les pieds de toutes les personnes de la zone, et finissons par dénicher un minibus pour nous conduire au poste, à 50 baths par personne. Un prix qui nous parait un chouia exagérer pour parcourir 7 malheureux kilomètres, mais en laissant traîner un oeil discret, nous nous apercevons que les locaux payent la même somme que nous... Ce qui n'enlève d'ailleurs rien au fait que le prix nous parait excessif!

Quelque minutes plus tard, passées au milieu des cagettes, des sacs et des légumes, nous débarquons à quelques encablure de l'arche marquant la sortie de la Thaïlande. Le bazar qui y règne est monumental : quatre files de véhicules encombrées de camions de marchandises et de voitures fumantes et pétaradantes entrent et sortent au milieu d'une horde de piétons qui se pressent devant les nombreux étals et gargottes qui bordent la chaussée.

Nous nous frayons un chemin parmis la multitude pour faire tamponner nos passeports. Alors en générale nous n'apprécions pas des masses les discriminations positives dont nous bénéficions parfois en terre étrangère, mais là, considérant la longueur de la file devant le bureau de l'immigration, nous sommes bien content de profiter du guichet réservé aux étrangers, d'autant que nous sommes les seuls de la zone...

Coup de tampon. Nous quittons la Thaïlande. A dans deux semaines!

Nous franchissons à pied le pont au-dessus de la rivière qui marque la frontière entre les deux pays et arrivons bientôt du côté birman. Nous sourions en constatant que le changement de règle de conduite, à gauche en Thaïlande mais à droite en Birmanie, s'applique de manière totalement anarchique au milieu du pont! Plus que quelques formalités...

A nouveau, un bureau nous est réservé pour le contrôle des visas, et le pays nous souhaite déjà la bienvenue, quand l'agent souriant (fait extraordinaire et notable pour un douanier!) qui vérifie nos passeports s'exclame ''french!'' avant de nous offrir des pièces en chocolat avec un grand '' Welcome to Myanmar!''. Un douanier qui nous offre des friandises? Voilà autre chose! Nous voyons dans ce cadeau offert alors que nous ne sommes même pas encore dans le pays un signe de très bon augure.

Après la paperasse, le coup de tampon, la photo et la poignée de main avec notre douanier, nous entrons en Birmanie, au milieu des klaxons et des gazs d'échappement, dans la petite mais agitée bourgade de Myawaddy. Et paf!

Enfin, nous y voilà!

Bon, il faut dire que le panorama que nous avons sous les yeux tandis que nous entrons dans la ville n'est pas des plus jouasses... Nos quatre files de camions et de véhicules en tous genres sont toujours là, entre deux rangées de petits immeubles aux façades noircies par la pollution dont les rez-de-chaussée sont occupés par tous les magasins imaginables. Au bord de la route s'alignent d'interminables rangées de taxis et de minibus.

Bref, c'est un joyeux chantier qui nous parait très actif après le calme thaïlandais et dans lequel nous plongeons vaillamment, pour nous retrouver interpellés de tous les côtés par les dizaines de chauffeurs présents. Pas évident de réfléchir posément au milieu de la tourmente et des ''where are you going?''... On nous propose toutes les destinations possibles par tous les types de transports...

Heureusement, dès que les gars voient que nous nous concertons, ils nous lâchent la grappe. Délicate attention!

Considérant ce qu'on nous propose et les maigres informations dont nous disposons, deux choix s'offrent à nous : rejoindre Hpa An, petite ville à quelques centaines de bornes fameuse pour ses formations karstiques, et y prendre un train pour Yangon, ou tracer directement pour rejoindre cette dernière en bus.

Nous optons pour la deuxième solution. Si nous avons le temps, nous pourrons toujours passer à Hpa An sur le chemin du retour vers la Thaïlande.

Nous passons retirer nos premiers kyats, la monnaie locale birmane. A savoir qu'à l'heure où nous écrivons ces lignes, 1 euro vaut environ 1500 kyats.

Nous faisons ensuite la tournée des chauffeurs, dont la plupart conduisent des taxis, ce qui n'est pas sans jouer sur les prix, forcément : on nous propose le trajet pour 50000 ou 60000 kyats...

Un taxi privé n'est bien entendu pas ce que nous cherchons, nous demandons tant bien que mal autour de nous si il n'y a pas une station de bus dans le coin, et on nous aiguille vers l'une des agences qui bordent la route. L'alphabet latin étant totalement absent du décors, nous ne risquerions pas de les trouver tout seuls...

Les prix y sont déjà plus raisonnables. Deux bus peuvent nous conduire à Yangon : un minibus, dès ce soir, pour 15000 kyats chacun, ou un car, demain matin, pour 10000.

Le calcul est vite fait : en comptant le prix de la chambre dans le seul hôtel du coin, la deuxième option est la plus coûteuse. Nous prenons deux billet pour le soir même, avec un départ prévu pour 20h30. Il est 10h. Raaa! Une longue journée d'attente se prépare...

Nous remontons le cirque de l'avenue, slalomant entre les étals, les vendeurs, les mendiants et la foule, pour trouver une terrasse de troquet où nous affaler.

C'est le moment d'effectuer une première prise de température des prix pratiques dans le pays! Le tenancier nous accueille avec un sourire radieux, et nous annonce une nouvelle bonne surprise : le café ne coûte que 500 kyats, environ 30 centimes! C'est-y pas chouette ça? Espérons qu'il en sera de même partout.

Nous soufflons enfin, observant la frénétique activité de la rue tandis qu'on nous sert des cafés à la mode birmane : épais et plein de marc.

Nous constatons que quasiment tous les hommes portent le longyi, équivalent du sarong, cette espèce de grande jupe nouée à la taille qui descend jusqu'aux chevilles, tandis que les femmes arborent, étalée sur leurs joues, une substance non-identifiée jaune pâle. Il faudra nous renseigner là-dessus!

Notre hôte revient pour charger notre table de victuailles, beignets, nems, et autres samossas. Nous n'avons pourtant rien commandé... Devant nos mines interrogatrices, il nous explique que nous ne paierons que ce que nous mangerons, avant de nous annoncer les prix de ce que nous avons sous les yeux, qui se mettent à pétiller tandis que nous calculons : le festin qu'il nous a ramené coûte moins d'un euro!



Nous profitons des quelques bases d'anglais de notre gentil tôlier pour lui demander de nous apprendre un peu de vocabulaire de survie birman, puis prenons notre mal en patience... Ca fait déjà 10 minutes que nous sommes posés, nous avons assez soufflé, nous voulons bouger! Qu'ils sont impatients ces petits voyageurs...

Les heures s'écoulent lentement tandis que nous grignotons, discutant Birmanie et voyage en engloutissant des litres de thé (gratuit ici!), durant l'une de ces grande séance de prise de recul où nous prenons conscience des proportions qu'a pris notre petit tour. 2 ans et trois mois... Et nous voici aux portes de notre 16è pays! On en fait des choses décidément...

Nous songeons aux deux semaines suractives qui nous attendent, et luttons pour ne pas regarder la montre toutes les trentes secondes, pressés de plonger enfin dans cette Birmanie qui, même alors que nous sommes déjà sur son sol, se fait encore désirer. Ce n'est pas le tout d'y être entré!

Finalement, le temps passe doucement. En fin d'après-midi, ne tenant plus en place, nous partons nous balader pour découvrir le stupa principal de la ville. Apparemment, les grands stupas dorés sont l'apanage du pays, majoritairement bouddhiste, et ce premier aperçu attise encore un peu plus notre impatience! Nous n'y croisons personne en dehors des moines.



Nous passons nos dernières heures d'attente devant l'agence après avoir fait provision d'eau et de biscuits.

Un minibus vient enfin nous récupérer, pour nous déposer dans une petite rue défoncée et plongée dans la pénombre, dont la seuls lumières provient des vieilles ampoules accrochées au-dessus des devantures en terre battue des dizaines d'échoppes en bambou et aux toits de bâche qui bordent la chaussée, et des phares des nombreuses voitures et mobilettes qui déboulent à toute berzingue en klaxonnant dans un monstrueux capharnaum.

Nous voilà assis sur des chaises en plastiques, au milieu de la poussière et des ombres projeté par l'une des ampoules grésillantes qui se balance au-dessus de nos têtes. On nous demande nos passeports pour les photocopier. Une sensation qui nous avait quitté depuis notre entrée en Thaïlande fait son retour : celle de ne pas savoir ce qu'il se passe, cette impression bordélique que tout s'organise au fur et à mesure, sans aucun plan. Nous adorons ce genre de bazar anarchique et plein de fantaisie où rien n'est carré, et nous sourions de toutes nos dents aux dizaines de paires d'yeux qui nous dévisagent.

Et nous sommes toujours les seuls étrangers de la zone. Par où passent tous les autres?

On nous demande d'où nous venons, où nous allons, tandis que tout le monde guette nos réponses, mais la barrière de la langue ne favorise pas les échanges plus profonds. Alors on communique par geste. On fait des cadeaux. Un homme nous propose une bière. La curiosité et les sourires sont sincères, bienveillants et affichés.

Nous sentons une attitude générale qui fait remonter de flous mais délicieux souvenirs, des impressions fugaces et insaisissables, quelque chose d'ouvert et de franc que n'avions plus rencontré depuis de nombreux, très nombreux mois.

L'heure du départ est passée depuis longtemps lorsque notre minibus arrive enfin. Dans la cohue, on nous aide à mettre nos sacs sur le toit, puis les autres passagers se serrent et s'entassent pour nous libérer toute la banquette du fond. Ca fait pas mal de délicates attentions pour une première journée!

Nous partons enfin. Mais attendez, nous sommes le 24 décembre! En riant, nous sortons notre dîner du réveillons : 2 paquets de biscuits secs.

Ballotés de tous côtés par la conduite de psychopathe du chauffeur, nous nous souhaitons un joyeux noël en trinquant à l'eau minérale et nous étalons sur notre immense banquette, tandis que nos compagnons de route s'assurent que nous sommes bien installés.


Arrivée nocturne


Le début du voyage verra notre bus s'arrêter 6 fois pour passer les différents checkpoints, parfois armés, qui jalonnent la route. A 23h et à 2h du matin, on nous tire de notre somnolence : tous les passagers doivent descendre tandis que le véhicule est minutieusement nettoyé. Curieuse pratique! Et pourquoi ne pouvons-nous pas simplement rester dans le bus en attendant? La réponse à cette question nous sera donnée quelques jours plus tard : en cas de vol dans un transport public, le chauffeur est automatiquement considéré comme responsable. Et ça ne rigole vraiment, vraiment pas : les sanctions qu'il encoure en cas de plainte vont de l'emprisonnement... A la torture. Pour éviter tous problèmes, tout le monde descend à chaque arrêt.

Nous en profitons pour demander à tous les voyageurs qui liraient ces lignes de bien réfléchir avant d'accuser quelqu'un de vol ou d'arnaque en Birmanie. Voir de s'abstenir. Les sanctions sont très, très sévères, en particulier quand le déli concerne un touriste, et il faut se demander si la disparition de quoi que ce soit justifie le fait d'envoyer quelqu'un se faire ébouillanter les mains.

Nous réussissons à somnoler pendant une heure ou deux avant d'arriver... On ne sait pas trop où!

Il est 3h30 du matin, nous débarquons la tête dans le pâté, sans aucune idée de l'endroit où nous sommes. Pas en ville en tous cas.

Personne ne parle anglais, mais à force de signes, de mimes et grâce aux efforts des gens qui nous entourent, nous comprenons que nous sommes dans le terminal de bus de Yangon, à une dizaine de kilomètres du centre-ville, et que les bus locaux ne circulent pas avant 8h. On nous propose une place dans un taxi partagé à 8000 kyats, et exténués nous acceptons, après avoir vérifié du coin de l'oeil que la troisième passagère, birmane, paie le même prix que nous. Le chauffeur nous demande où nous allons, et se marre devant notre haussement d'épaule avant de nous inviter à monter. Nous nous en remettons à lui.

Et c'est parti. Nous ne savons pas où nous allons, mais nous y allons! Délectable incertitude...

Nous sommes déposés dans ce qui paraît être le centre. Il est 4h du matin, nous sortons de 20h d'attente et de transport, nous voilà largués en pleine nuit dans le centre de la plus grande ville du pays sans guide, sans carte, sans adresse, sans personne pour nous renseigner, sans point de chutte... Et nous jubilons, exaltés, ne sentant plus la fatigue, en plein dans notre élément.

Comme il n'y a pas grand-chose d'autre à faire, nous lançons une reconnaissance des environs pour repérer d'éventuels hôtels, nous enfonçant dans les avenues et les ruelles sombres.

Et c'est le premier grand frisson : nous tombons au milieu dun rond point sur un grand stupa joliement illuminé, la Sule Pagoda, derrière lequel nous découvrons une église dégoulinante de guirlande en ce matin de noël. Tandis que nous marquons une pause pour admirer l'édifice, une mosquée toute proche lance son appel à la prière, qui s'élève en résonnant, rebondissant sur les façades d'immeuble.



Comment décrire une situation pareille? Seuls dans la nuit, une grande église chrétienne encombrée de décorations de noël devant nous, un impressionnant stupa bouddhiste brillant d'une lumière dorée derrière, le tout enlacé par la voix envoûtante de l'imam musulman qui jaillit depuis un minaret. 3 religions qui se télescopent sous nos yeux, et tout va bien! On se croirait a Jaipur tiens...

Nous sortons de notre rêverie et marchons, marchons encore, traversant places et rues au hasard, tournant, quadrillant méthodiquement le quartier dans la joie et la bonne humeur, tout en notant mentalement la position des hôtes que nous croisons pour y revenir plus tard.

Les bâtiments qui nous entourent ne sont encore que de grosses formes noires, mais nous croisons les premiers habitants qui se rendent au travail.

L'un d'eux nous arrête, et dans un anglais hésitant nous demande d'o ùnous venons et si il peut nous aider. Nous avons à peine le temps de lui expliquer que nous cherchons une piaule que déjà il est en route, nous demandant de le suivre. Il nous emmène devant une guest house, fermée à cette heure-ci... Et se met à tambourriner sur le rideau de fer jusqu'à ce que quelqu'un vienne nous ouvrir! Nous voilà un brin gênés...

Malheureusement, l'hôtel n'est pas autorisé à accueillir des étrangers. Notre bienfaiteur doit se rendre au travail, et il se confond en excuses tandis que nous nous confondons en remerciements...

Avec 6 ou 7 hôtels en mémoire, il ne nous reste plus qu'à ous affaler sur le trottoir en attendant que la ville s'éveille.



Tandis que le ciel s'éclaircit, les rues se remplissent, et plusieurs personnes s'arrêtent pour nous demander si nous avons besoin d'aide avant de papoter un peu. A nouveau, le parler est franc et prompt est l'éclat de rire. Et à nouveau, de vieilles et formidables impressions resurgissent sans prévenir dans nos esprits, et nous ne tardons pas à leur associer des images qui remontent à bien longtemps... Des images de mosquées bleues, de faïences ouvragées, de gravures couvertes de neige, et surtout de sourires chaleureux et de rencontres formidables... Quel-est donc l'étrange enchantement qui paraît être à l'oeuvre ici?

Nous laissons le soleil se lever paresseusement et attaquons la tournée des hôtels repérés plus tôt.

Alors nous étions préparés à nous prendre une claque à cause du tarif des chambres ici, mais le choc n'en est pas pour autant attenué lorsque nous la prenons dans la poire...

Pif, 20$, paf, 30$... Ils pourraient faire gaffe quand même, nous sommes fragiles à ce niveau là!

Ce qui nous turlupine, c'est que nous ''espérions'' grincer des dents en payant 15 balles pour une chambre, mais nous n'en trouvons même pas à ce prix là... Pour en rajouter une couche, plusieurs hôtels n'acceptent tout simplement pas les étrangers.

C'est pas vrai?! On ne va pas claquer 20$ dans une piaule!

Finalement, le gérant du dernier établissement que nous passons (35$! Mais bien sûûûr!!!) nous indique une rue qui avait échappé à nos recherches, bien cachée entre deux rangées d'immeubles juste à côté de la pagode Sule.

Et sur place, nous trouvons enfin une guest house qui nous propose un misérable clapier avec salle de bain partagée pour 12$. J'ai envie de dire ''et bien voilà!'', mais j'ai encore notre piaule bien meilleur à 2 euro 50 de Phitsnulok dans la tête... Enfin bon, nous étions prévenus!

Pas le temps de traîner! Nous comptons partir dès demain pour le lac Inle, et nous comptons bien profiter de la journée pour parcourir correctement Yangon. Nous larguons nos sacs, jetons un regard d'excuse au matelat qui espérait sans doute qu'après tout ce bazar, nous allions nous effondrer sur lui, et ressortons en faisant la sourde oreille aux sirènes d'un bon repos. La moindre pause risque de nous casser définitivement,


Yangon


Nous photographions la carte touristique de la ville placardée dans le hall miteux de la guest et nous mettons en route.

Yangon est à présent bien réveillée, et il y a de l'action!

Au milieu d'une circulation dense, nous rejoignons le stupa Sule, puis suivons une grande avenue bordée de petits immeubles et de quelques hauts buildings tout neufs. Nous croisons pas mal de chantiers de construction, on sent que le développement s'amorce et que la modernisation est en marche.  La ville s'agrandit, et nous apercevons même une ou deux grandes tours de verre qui dominent les environs.



La diversité religieuse qui nous avais déjà frappé ce matin nous revient de plein dans la courge. Après avoir passé le stupa Sule, nous croisons une, puis deux mosquées. Nous découvrons ensuite un temple hindou, qui nous rappelle bougrement ceux du sud de l'Inde avec sa débauche de couleur.




Quelques centaines de mètres plus loin, c'est une église au haut clocher qui nous attend, la Holy Trinity Cathedral.



Nous rejoignons le marché Bogyoke, le plus grand bazar de Yangon, construit en 1926 par les britanniques. Malheureusement, il est encore très tôt, et tout est fermé.



Nous nous enfonçons ensuite dans les étroites ruelles des quartiers indiens et chinois, et... C'est fou. Juste fou.

Autour de nous virevoltent saris, burkas, djellabas, shalwar kameez, sarongs et robes safrans.

Les visages, présentant toutes les nuances d'un mélange de traits indiens, asiatiques et mongoloïdes sont surplombés de turbans hindous et sikhs, de voiles, de kufi.

Les sourires qu'on nous lance de toutes parts dévoilent des dents rougies par la mastication du bétel.

Tout ce petit monde fourmille dans ce qu'on pourrait audacieusement comparer à un mélange entre un bazar turc et les rues d'une ville indienne, le tout saupoudré d'Asie du sud-est. Les ruelles forment d'interminables marchés où se vendent nourritures et fournitures en tous genres, et les voitures ont bien du mal à se frayer un chemin parmis les nombreux étals de samossas, de pâtisseries arabes, de nems et autres nouilles. Le mélange de toutes ces influences est extraordinaire à observer.

Le dédale de ruelles est surplombés de petits immeubles de 5 ou 6 étages, parfois simples blocs grisâtres et sales hérissés d'antennes, plus souvent d'architecture coloniale, décrépis et délabrés, arborant des couleurs pastels écaillées grisonnantes et assombries par la pollution. Les plantes qui poussent un peu partout dans les nombreux trous et failles qui s'ouvrent dans les façades complètent le tableau.



Ca bouge, ça crie, ça bouscule, c'est génial! Comme nous le disions il y a quelques temps, la nonchalance et le calme de l'Asie du sud-est commençaient à nous peser, nous sommes en manque d'action, et nous nous gorgeons de cette furieuse et bruyante activité, vagabondant un bon moment dans ce décors surprenant. Formidable! Non parce que c'est mignon le calme asiatique, mais il faut avouer qu'au bout d'un moment, on s'y ennuie un peu.

Les estomacs gargouillent, nous quittons l'animation des ruelles pour grignotter un morceau, nous nous remplissons de nems et de nouilles pour moins d'un euro à la terrasse d'une gargotte, puis mettons le cap au nord pour rejoindre l'édifice le plus célèbre de la ville : la pagode Shwedagon.

Sur le trajet, nous constatons que tous les trottoirs sont rouge-orangés, repeins par les milliards de crachats rouge vifs des habitants, qui doivent décidement avoir une consomation de bétel ahurissante! L'odeur qui s'en dégage, mélangée aux délicates senteurs d'ordures et d'on-ne-veut-pas-savoir-quoi, fait elle aussi remonter pas mal de souvenirs...

Après quelques kilomètres de marche sous une chaleur torride, nous voilà devant l'entrée de la pagode, richement ouvragée et gardée par deux énormes statues de lions.

La pagode Shwedagon est le sanctuaire bouddhiste le plus sacré du pays, et l'un des plus révérés au monde. Et pour cause, selon les légendes, il renfermerait les reliques de 4 anciens bouddhas, dont huits cheveux du bouddha gautama, le premier bouddha fondateur de la religion...

Celle-ci donne sur un majestueux couloir décoré de fresques et rempli de magasins vendant statuettes, fleurs et autres offrandes. La foule qui nous entoure est majoritairement composée de pélerins qui viennent se recueillir dans la joie et la bonne humeur, et Comme en Thaïlande, nous retrouvons un petit côté ''parc d'attraction'' religieux. Nous n'y ressentons pas trop de spiritualité, mais il y a de l'animation! Il y a également, comme on pouvait s'en douter, pas mal de touristes, même si nous sommes loin de la fréquentation des sites thaïlandais.




A savoir que l'entrée du sanctuaire coûte 8000 kyats (oui, ils ne s'en font pas!). Comme dans tous les temples bouddhistes, il faut se déchausser et être convenablement vêtu avant d'entrer. Exit les débardeurs et les shorts au-dessus des genoux!

D'après les textes religieux, le stupa principal de Shwedagon aurait été construit du vivant du Bouddha Gautama. Les archéologues situent quand à eux son érection entre le 6è et le 10è siècle. L'édification du sanctuaire qui l'entoure s'est étalée de 1360 à nos jours.

Lorsque nous passons son mur d'enceinte, nous tombons sur un spectacle éblouissant. Au sens propre du terme : le stupa principal, intégralement couvert de 27 tonnes de plaques d'or (!), est tellement brillant qu'il nous faut plisser les yeux pour l'admirer!

Après nous être habitués à la luminosité ambiante, nous explorons le site, tournant autour du stupa, (toujours dans le sens des aiguilles d'une montre!) émerveillés. L'or, le marbre blanc et les mosaïques de verre qui couvrent parfois des pans de mur entiers, les dizaines de temples incroyablement décorés, les statues, les tours, les dizaines de stupas secondaires. les dévots accomplissant leurs rituels et les nombreux moines en robe pourpre ou orange... Je me connais, je vais tomber en rade d'adjectifs si j'essaye de vous décrire la chose. Quelques images valent mieux qu'un long discours...




Grandiose et resplendissante, la Shwedagon est incroyable, et nous ne pouvons que recommander sa visite, la classant sans problème dans le top des édifices religieux que nous avons visité au cours de ce voyage. Notre première visite birmane est la meilleur que nous ayons vécu depuis de longues semaines, et ça fait plaisir!

Durant la balade, nous retrouvons une pratique que nous avons rencontré plus souvent que nécessaire en Inde : des groupes de visiteurs birmans nous arrêtent pour demander la permisson de nous prendre en photo! A chaque fois, la chose prend plusieurs minutes, entre les photos individuelles et en groupe, et attire d'autre prétendants. Nous nous prêtons joyeusement au jeu, d'autant que les requêtes sont beaucoup plus polies et discrètes qu'en Inde, où nous nous retrouvions souvent entourés d'une trentaine de bourrins qui ne se souciaient plus trop de notre bon vouloir et nous shootaient à tout va pendant de longues minutes. Il faut dire aussi que les jeunes filles birmanes sont quand même sacrément jolies!



Nous quittons cette débauche de lumière blanche, argentée et dorée pour nous prendre un petit café-coup-de-fouet en terrasse sous les ''hello!'' souriants des habitués du coin, après quoi nous rejoignons, juste de l'autre côté de la rue, une autre pagode plus petite : la Maha Wizaya.

Construite en 1980, elle abrite des reliques offertes par le roi du Népal.




3 kilomètres de marche nous attendent ensuite pour rallier d'autres temples toujours plus au nord. Et ça commence à devenir dur... Le thermomètre pète un cable, nous sommes exténués, dégoulinants de sueur, et le coup de grisou risque de ne pas tarder. Nous passons par des quartiers variés, remplis tantôt de magasins, tantôt d'immeubles d'habitations. Comble de lassitude, nous réussissons à nous paumer et marchons pres d'une demi-heure dans la mauvaise direction, peu aidé par notre micro-carte à l'échelle éronnée que nous essayons de décripter sur l'écran de notre appareil photo. Du courage!

Nous atteignons finalement note but : la pagode Chauk Htat Gyi, célèbre pour ses deux gigantesques bouddhas.

Grimpant à travers de verdoyants jardins, croisant moines et monastères, nous atteignons le temple qui abrite le premier. Les intérieurs sont décevants : le bâtiment n'est ni plus ni moins qu'une sorte d'entrepôt aux poutres de fer apparentes... Mais il abrite une statue absolument monumentale, énorme, du seigneur bouddha représenté en tenue d'apparat avec tous ses ornements. Une forme que nous n'avons que rarement pu admirer.

certaines peintures/gravures murales valent le coup d'oeil

Nous nous apprêtons à quitter la zone pour rejoindre le deuxième bouddha, lorsqu'à la sortie des jardins, un moine nous interpelle. Il nous demande d'où nous venons, avant de nous expliquer qu'il vit dans l'un des monastères de la pagode. Nous papotons, ramant un peu à cause de l'anglais approximatif de notre interlocuteur, lorsqu'un jeune homme arrive à la rescousse et joue l'interprète dans un anglais impeccable. Nous faisons ainsi la connaissance de Miu, étudiant en philosophie et en histoire bouddhiste à l'université de Yangon. Il a quitté l'école durant quelques semaines afin d'approfondir ses connaissances en prenant des cours directement auprès d'un bonze au monastère, et nous apprenons que le moine avec lequel nous conversons est justement son maître!

Il nous explique que si en Birmanie, comme au Laos et en Thaïlande, il est possible de rejoindre et de quitter la vie monastique à volonté, son maître a décidé quant à lui de vouer son existence au bouddhisme theravada, choisissant librement de rester moine jusqu'à la fin de ses jours pour enseigner la philosophie bouddhiste aux novices.

Nous discutons un bon moment tous les quatre, et nous évoquons nos précédentes expériences. Comme je le disais, la condition de moine n'est pas définitive dans le bouddhisme theravada, et il est très courant d'entrer au monastère pour seulement quelques temps avant de reprendre le cours de sa vie. Il est très bien vu par la société et très commun de prendre quelques semaines de vacances pour devenir moine, et la plupart des croyants renouvellent l'expérience plusieurs fois. C'est que la chose représente un très bon moyen de laver son karma! J'avais déjà évoqué le sujet dans l'un de nos articles sur le laos, parlant des paysans qui, fatigués des travaux de la ferme ou ruinés par une mauvaise saison, entraient au monastère en attendant une période plus propice. La tradition veut seulement que chaque croyant enfile, au moins une fois dans sa vie, la robe safran. Ceci explique en partie la dégaine étrange de certains moines que nous avons croisé au cours des derniers mois, clope au bec et pianotant sur leur smartphone...

Notre maître nuance un peu nos paroles. Il y a certe beaucoup des monastères où les fidèles entrent et sortent à leur guise, mais, en Birmanie en tous cas, il en est d'autres qui demandent une dévotion et un engagement bien supérieur et profond.

La plupart des monastères de Yangon accueillent ainsi beaucoup de moines qui ne s'engagent que pour quelques semaines, voir quelques jours, et leurs effectifs sont en générale élevés. Les monastères de la pagode Chauk Htat Gyi accueillent par exemple plus de 800 bonzes à eux seuls!

Il en est d'autres cependant, à Mandalay par exemple, où notre ami a suivi sa formation, qui au contraire sont beaucoup plus sélectifs, et dont les conditions d'accès et de séjour sont exigeantes et parfois très, très rudes. Ces temples, qui forment les futurs maîtres et responsables monastiques, abritent des effectifs bien plus réduits, de 50 à 100 moines.

Lorsque la discution dérive sur la politique, c'est bien sûr Aung San Su Kyi et l'éclatante victoire du NLD aux dernières élections que Miu évoque, un immense sourire aux lèvres. Tout le pays s'en réjouit, et nos amis nous parlent de leur optimisme et de leurs espoirs pour le futur, maintenant que la démocratie est enfin en train de devenir une réalité après les trop nombreux jours sombres de la dictature. Miu nous explique, pour l'anecdote, que discuter comme nous sommes en train de le faire était impossible il y a seulement quelques années sans risquer de sévères sanctions.

Nous parlons bouddhisme et voyage, et nous évoquons nos vadrouilles au Népal et en Inde. Le professeur de Miu ouvre de grands yeux quand il entend que nous sommes passés à Lumbini, lieu de naissance de Siddharta Gautama, le premier bouddha. Nous lui précisons qu'il ne s'agissait que d'un arrêt de bus de quelques minutes et que nous n'avons rien vu des temples, mais qu'importe! Lui-même n'y est jamais allé.

Finalement, il nous fait un grand honneur en proposant de nous faire visiter son monastère! Nous acceptons avec joie. Visiter un monastère en compagnie d'un maître bouddhiste, ça n'arrive tout de même pas tous les jours!

Je préviens tout de suite, il était hors de question que je me trimballe avec mon appareil photo autour du cou dans un moment pareil!

Miu nous accompagne. Nous traversons une rue et passons un portail, quittant nos chaussures et le brouhaha de la ville pour rejoindre les quartiers résidentiels du monastère. Un chemin de pierre est bordé de longues rangées de dortoirs en bois qui s'alignent à l'ombre des arbres et les moines vaquent à leurs occupations en silence, se contentant de sourire pour nous saluer. Le calme et la sérénité qui règnent ici sont absolus et nous emportent instantanément, tandis que, sans même nous en apercevoir, nous respirons plus profondement et marchons plus lentement, savourant le bruit du vent dans les arbres et le battement des pieds nus sur les dalles de pierres.

Nos amis nous montrent la bibliothèque, les salles d'étude et de prière, les temples et les autels... Inutile de dire que nous sommes les seuls étrangers du coin.

Nous quittons finalement les lieux, pour rejoindre la deuxième statue de la pagode : un bouddha allongé de 66 mètres de long! Construite en 1899, la première statue, aux proportions inapropriées et au visage jugé agressif, fut détruite et remplacée par une nouvelle figure en 1950. Si la représentation est impressionante, gigantesque et pleine de de détails, nous nous serions en revanche aisément passé du hangar d'avion qui l'entoure...



C'est Miu qui se charge de nous donner une foultitude d'explications sur l'histoire du site et la symbolique de la statue. Il nous montre aussi un autel, tout proche, représentant les 8 animaux associés aux 8 jours de la semaine bouddhiste (le mercredi est séparé en deux), équivalents des signes du zodiac dans l'astrologie birmane.

Garuda, le mythique roi des oiseaux, correspond au dimanche, le tigre au lundi, le lion au mardi, l'éléphant au mercredi matin, l'éléphant sans ses défenses au mercredi après-midi, le rat au jeudi, le cochon d'Inde au vendredi et le dragon au samedi.

L'usage, venant des anciennes traditions animistes birmanes, veut que l'on rende hommage à l'animal correspondant au jour de sa naissance en versant de l'eau sur son effigie pour s'attirer bonne fortune et protection. Lorsque son maître apprend que nous ne savons même pas quel jour nous sommes nés, il s'empresse de sortir un épais livre qui contient les calendriers détaillés des cents dernières années pour y chercher nos dates de naissance.

Alors il s'avère que je suis né un vendredi, sous le signe du cochon d'Inde donc, tandis que Léonore, née un jeudi, se trouve sous la protection du rat. Quelle belle équipe de rongeurs nous formons!

L'après-midi touche à sa fin, nous sommes terrassés de fatigue, et nous remercions du fond du coeur nos deux compagnons. Le moine nous retient alors que nous nous apprêtons à partir, et Miu nous traduit ce qu'il nous dit : il tient à nous offrir sa bénédiction pour que nos voyages se déroulent sans encombres et que nous profitions d'une longue et heureuse existence. En silence, nous l'écoutons psalmodier la rapide succession de mots caractéristique des prières bouddhistes. Un chant monocorde que nous avons entendu plusieurs fois au cours de nos vadrouilles mais qui nous fait toujours autant frissonner. Et cette fois-ci il nous est spécialement adressé.

Nous saluons nos amis selon la tradition, les mains jointes et la tête baissee, avant de nous mettre en route, rayonnants, exaltés.

Quelle journée... Alors c'est ça la Birmanie? Les éloges qu'on nous en a fait par le passé sont en fait loin de rendre honneur aux premières impressions que nous avons. Les pays qui vous rentrent dans le coeur et l'esprit aussi puissamment et en moins de 24 heures, c'est quand même très, très rare...

Malgré la joie dans laquelle nous baignons, nous ne tenons pas les 5 kilomètres qui nous séparent de chez nous... C'est le coup du lapin. Il fallait bien qu'il arrive... Harassés, nous découvrons un joli petit parc où nous poser un moment, affalés dans l'herbe au milieu des promeneurs et des couples d'amoureux.

Dans un effort surhumain, alors que nos yeux se ferment tout seuls, nous repartons à travers le parc, pour tomber sur... Un authentique marché de noël! Enfin authentique, façon de parler... Même pas un petit stand de vin chaud à l'horizon! Je vous jure, tout se perd...



Nous avalons d'une traite les quelques derniers kilomètres qui nous séparent de la pagode Sule.

Une dernière épreuve nous attend : tandis que le soleil se couche, nous faisons un crochet par la gare centrale pour nous renseigner sur les trains pour le lac Inle. La guichetière est d'une efficacité redoutable, et nous sort tellement d'informations que nous nous y perdons! Nous décidons de prendre le train de 11h demain matin, ce qui nous laisse quelques heures pour vadrouiller un ou deux derniers spots à Yangon. L'arrivée au lac est prévue pour 14h. Et bien, ils sont rapides les trains birmans! Quelques 600 bornes en seulement 3 heures? Ah non, pardon, c'est bien 14h, mais le jour suivant... Attendez, quoi? 27 heures de train? 27H ?!!! Crénom... Ca promet d'être folklorique...

Mais l'heure n'est pas à l'appréhension. Il est 18h, et enfin, notre journée touche à sa fin. Une journée commencée la veille, à 8h du matin, dans un autre pays...

Nous ne rentrons pas tout de suite. Même si noël ne signifie plus grand-chose pour nous depuis un bon moment, nous tenons ce soir à fêter l'événement histoire de nous détendre un peu, et nous nous prenons une mousse en terrasse, refroidissant doucement tandis que la température diminue tandis que la nuit tombe.

Le retour vers notre piaule est un brin chaotique : nous nous retrouvons dans les grandes avenus que nous avons traversé ce matin en plein marché de nuit, mais celui-ci est bien différent des petits alignements d'étals tout calmes auxquel nous nous sommes habitués en Thaïlande... La rue s'est transformée en un immense bazar où la foule se presse devant les étals, au milieu des voitures qui tentent de se frayer un chemin à grand coup de klaxon.

Pofitant des vendeurs de boustifaille qui parsèment le coin, nous nous prenons une énorme cargaison de samossas, de crêpes et de beignets (et oui, toujours pour moins d'un euro!) avant de rejoindre enfin notre chambre après ce colossal bain de foule. Après le diner, nous nous couchons enfin avec délice, des étoiles plein les yeux après cette fantastique et épuisante journée.


Nous nous levons tôt le lendemain, pour passer voir un dernier site avant de partir. Il s'agit de la pagode Botahtaung, l'une des plus célèbres de la ville. Bon, il faut l'avouer, cette matinée va vite se transformer en course...

Avant de rejoindre la pagode, nous dénichons un bureau de change pour échanger nos dollars américains. Apparement, ils sont assez pointilleux sur l'état des billets échangés, et nous avons pris soin de transporter nos billets bien à plat dans les ventrales.

Nous partons ensuite pour trois bornes de marche en suivant les rives de la rivière de Yangon le long d'une grosse route bien chargée à cette heure matinale. Cette petite balade nous permet d'admirer quelques marques architecturales de l'époque britannique.



Nous accélérons le pas, arrivant bientôt devant les portes de la pagode, où s'étalent une dizaine de stands proposant toutes sortes d'offrandes aux dévots, des fruits aux fleurs en passant par de faux billets de banque et des bougies.



La pagode Bautataung n'est pas tant célèbre pour son architecture que pour l'aura de mystères et de légendes qui entoure son histoire. En effet, l'édifice que nous avons sous les yeux après avoir passé la porte n'est pas celui d'origine, et par le passé, un autre Stupa se dressait au bord de la rivière. Les légendes locales racontaient alors que les Mons, la première civilisation birmane, l'avaient érigé plus de 2500 ans auparavant, pour abriter des reliques de bouddha offert par le roi d'Inde.

En 1943, la pagode originale fut entièrement détruite par la Royal Air Force birtannique. Sa reconstruction débuta le jour même de l'indépendance du pays sur l'Angleterre, le 4 janvier 1948. Et c'est la que ça devient palpitant...

Durant les travaux d'excavation destinés à préparer le terrain pour le nouveau stupa, une chambre souterraine fut découverte. A l'intérieur, les archéologues trouvèrent plus de 700 reliques en or ou en argent, couvertes de pierres précieuses.

L'une des pièces les plus importantes était une simple plaque de terre cuite couverte d'inscriptions s'apparentant à l'ancienne écriture birmane importée d'Inde des milliers d'années plus tôt. Cette plaque et ses inscriptions constituaient la preuve indiscutable que les légendes populaires disaient vrai : c'étaient bien les Mons qui, plus de 2 millénaires auparavant, avaient construit cette pagode.

Mais il est une autre découverte plus incroyable encore : parmis les nombreux trésors que recelait la chambre, les chercheurs découvrirent une pagode en pierre. Rien de bien follichon me direz-vous... Mais il s'avère que cette sculpture servait d'écrin à une autre pagode, semblable mais plus petite, en pierre également et intégralement couverte de feuilles d'or. Sa base, quant à elle, était serti de pierres précieuses. Cette deuxième pagode miniature, une fois retirée, en révéla une troisième, en or pur, reposant sur un plateau d'argent... Qui, une fois levée, révéla à son tour un minuscule cylindre de quelques centimètres, à l'intérieur duquel les archéologues découvrirent (on a le sens du suspense chez nous!)... Deux cheveux humains enroulés sur eux-même et fixe avec du vernis. 

Personne ne pourra jamais l'affirmer avec certitude, mais il est tout à fait légitime de penser que ces cheveux appartenaient bel et bien au Bouddha Gautama. En tous cas, Indiana Jones peut allé se rhabiller après une histoire pareil!

Ci-dessous, vous pouvez voir la pagode tel qu'elle est aujourd'hui, rebatie à l'identique grâce aux dons des habitants de Yangon. Inutile de dire que la piété qui y règne est palpable!




Une fantastique dernière decouverte yangounienne! Nous redescendons sur terre quand nous voyons l'heure. Il faut nous dépêcher si nous ne voulons pas rater notre train, et nous courons presque en direction de la gare...

Prochaine étape, le célèbre lac Inle, qui nous attend au bout du plus long voyage d'une traite que nous ayons jamais fait. 27 heures, tout de même, c'est quelque chose...

Au programme pour le prochaine épisode, un voyage en train pas seulement long mais dantesque, un peu de tourisme et de belles rencontres sur les eaux du lac le plus célèbre du pays, et du trecking dans les collines de... Vous verrez bien!


Nous nous arrêterons là pour le moment. Ce premier contact avec la Birmanie fut littéralement jouissif, et nous a laissé frissonnants, exultants. Il mérite bien le titre de claque, et nous quittons Yangon des étoiles plein les yeux et une formidable sensation au creux du ventre. Celle d'une flamme qui se ravive et nous ranime, une flamme qui faiblissait depuis trop longtemps. Nous avons retrouvé des impressions que nous n'avions pas éprouvé depuis un bon moment, et nous nous sommes rendus compte que l'état de flemmingite aigüe qui est le nôtre depuis quelques mois n'était peut-être pas uniquement due à une quelconque lassitude personnelle...

Nous avons finalement mis le doigt sur ce qui a provoqué la naissance de ce sentiment de renouveau et de redémarrage durant ces deux premiers jours en terre birmane : j'ai souvent comparé ce qui nous entourait à des choses formidables que nous avions rencontré dans d'autre pays, des choses qui font partie de ce que nous cherchons en priorité dans le voyage. Ces choses qui ont fait que ces quelques pays nous ont marqué à jamais. Soyons bien d'accord : ce que nous avons découvert ici n'est pas un mélange, c'est bien un tout unique, mais certaines des facettes de ce tout nous rappellent celles d'autres pays, des pays que nous avons adoré et dont nous nous souvenons encore aujourd'hui avec passion.

La désarmante gentillesse des gents, et leur propension à nous venir en aide spontanément nous ont rappelé l'Iran, la Turquie, et le Népal dans une certaine mesure. Leur curiosité est désintéressée, franche et honnête. En cela, les birmans nous rappellent beaucoup les iraniens ou les albanais, et certains côtés des indiens. L'extraordinaire animation brouillonne qui règne à Yangon, la façon qu'à la ville de stimuler les sens, nous renvoie quant à elle complètement en Inde, sans les mauvais côtés (heureusement!), tout comme la diversité, tant religieuse que culturelle, que l'on y trouve. Et il est formidable de se perdre dans le vortex, surtout après avoir passe des mois dans le calme un peu trop placide de la Thaïlande ou du Laos. C'est exactement ce dont nous avions besoin!

Et je ne parle pas du décors... Les rues aux bâtiments coloniaux décrépis et leur foisonnante animation multicolore, les stupas, les mosquées, les temples hindous sont formidables à parcourir, tandis que les milles reflets éclatants de la pagode Shwedagon resterons dans nos mémoires pour longtemps!

La modernité semble grapiller de plus en plus de terrain, une raison de plus pour se dépêcher de venir, d'autant qu'avec l'ouverture récente du pays, nul doute que les investisseurs chinois et thaïlandais qui lorgnent sur le pays depuis de nombreuses années ne vont pas tarder à y étendre leurs griffes...

J'en oublie, mais il y a beaucoup d'exemples de ce genre.

Pourquoi parler d'une claque après seulement quelques dizaines d'heures passées dans le pays? On va me dire que cela ne fait que deux jours que nous sommes là, et qu'il n'y a pas de quoi se faire une idée sur un pays en si peu de temps. Et c'est vrai. Je ne suis pas en train de décrire notre ressenti du pays. Ce que je veux souligner, c'est qu'il y a certaines choses que nous cherchons plus que d'autres dans le voyage, et que les impressions que nous avons eu après ces quelques premières petites heures en Birmanie sont de la famille de celles, puissantes et magnifiques, que nous avons éprouvé dans les rares pays qui nous ont offert tout ce que nous cherchons. Nous avons senti les petits je-ne-sais-quoi qui transforment le ''bien'' en quelque chose de beaucoup plus complexe, intéressant et jouissif. Et la voilà la fameuse claque. Nous ne savons pas ce que va donner la suite, mais nous attendons de le découvrir avec plus d'avidité que jamais.


INFORMATIONS PRATIQUES : PASSAGE DE LA FRONTIERE TERRESTRE BIRMANE DEPUIS LA THAILANDE, OU DORMIR, OU MANGER, QUOI VOIR, QUOI FAIRE ET POUR COMBIEN A YANGON.

(informations datant de décembre 2015)

-Se rendre en bus à Mae Sot, pres de la frontière birmane :

Depuis Phystanulok (gare ferrovière la plus proche) : un bus pour Mae Sot part du terminal de bus de la ville (carte ci-dessous) aux alentours de midi. Si vous arrivez en train à Phitsanulok, des tuk-tuks communs partent régulièrement de la gare pour la station de bus. L'arrêt se situe devant le 7-eleven, à gauche au rond point devant la gare. Comptez 15 baths par personne.

Coût du billet : 172 baths

Durée du trajet : entre 3 et 4 heures


-Dormir et manger à Mae Sot :

Nous vous recommandons chaudement la Lusy Guest House, dans le centre-ville, à quelques centaines de mètres de la station de bus, pour le calme et les chambres spatieuses et bon marchés

200 baths la chambre double avec ventilateur

Wifi, salle de bain privée avec eau chaude



Pour manger, nous avons comme d'habitude squatté l'un des nombreux stands de street food!


-Rejoindre la frontière birmane depuis Mae Sot :

Le poste-frontière se trouve à 7 kilomètres du centre-ville. Des minibus et des tuk-tuks communs partent du marché principal, sur la Central Market road, toute la journée. Respectivement 50 et 20 baths. Vous pouvez également prendre un taxi ou une moto-taxi depuis la station de bus.


-Passage de la frontière et trajet jusqu'à Myawaddy en Birmanie :

Certain voyageurs se sont apparemment fais avoir après le poste de sortie thaïlandais : des taxis leur ont fait payer le prix fort pour rejoindre le côté birman... Qui se trouve juste de l'autre côté d'un pont 500 mètres plus loin! Vous pouvez parfaitement rejoindre Myawaddy depuis le poste frontière à pied.


-Rejoindre Yangon depuis Myawaddy :

A noter que plusieurs ATM permettent de retirer de la monnaie locale dès l'entree de Myawaddy (1 euro pour 1500 kyats en decembre 2015).

Plusieurs options pour rejoindre Yangon : des taxis attendent tout le long de l'avenue principale de la ville, mais leurs tarifs sont élevés (50000 a 60000 kyats). Préférez les agences. Je suis bien incapable de vous donnez le nom de la nôtre, tout était écrit en birman! Fiez-vous aux photos de bus et de minibus qui ornent l'entrée de certains bâtiments bordant la route principale. Attendez-vous à des retards et à quelques balades en minibus avant de prendre le transport définitif... Pas d'affolement si on vous fait changer de bus sans rien vous expliquer, les birmans s'occupent de vous!

Coût du billet : minibus de nuit (départ à 20h) : 15000 kyats
                         bus de jour (départ à 11h) : 10000 kyats

Durée du trajet : environ 7 heures (comptez large!)

Le bus vous pose à une dizaine de kilomètres du centre-ville, que vous pouvez rejoindre en taxi partagé pour 8000 kyats ou avec la ligne de bus 102 pour 300 kyats. A noter que les bus publics circulent a partir de 8h du matin. Demandez à ce qu'on vous dépose où qu'on vous indique l'arrêt de la Sule Pagoda.


-Où dormir à Yangon :

Nous avons poser nos sacs dans une guest house misérable mais peu chère comparée aux standards birmans, située à droite juste à l'entrée de la petite rue qui débute à droite de la Garden Guest House, juste au sud-ouest de la pagode.

chambre double minuscule avec clim pour 12$ ou 19000 kyats. En considérant le taux de change, il est plus avantageux de régler en monnaie locale.

Wifi (trèèès lent...), salle de bain partagée sans eau chaude. Adresse réservée aux guerriers!





-Echanger de l'argent :

De nombreux bureaux de change se trouvent dans le quartier, proposant des taux plus ou moins équivalents, qui sont en général plus avantageux si vous avez des grosses coupures. A noter que les bureaux de change sont très regardant sur la qualité et l'état des billets que vous leur présentez, et qu'il est courant qu'ils refusent une coupure pour un simple pli.


-Visites :

-Marché Bogyoke



Ouvert à partir de 8h.

Sur la route Bogyoke, avant le marché, ne ratez pas le petit temple hindou multicolore à gauche. Quelque centaines de mètres après le marché, sur la même rue, se dresse une cathédrale plutôt sympa. Vous apercevrez son clocher de loin.


-Shwedagon Pagoda




Incontournable!

Prix d'entrée : 8000 kyats

Pensez à vous vêtir correctement : pas de débardeur ni de short. Il faut se déchausser avant d'entrer. Pour les fainéants, un ascenceur permet d'esquiver l'escalier qui conduit au sanctuaire.

La pagode Maha Wizaya se dresse en face de la Shwedagon, de l'autre côté de la rue. L'accès se trouve en face de l'entrée ouest de la Shwedagon. Entrée gratuite.


-Pagode Chauk Htat Gyi et le bouddha allongé



Deux pagode, respectivement à droite et à gauche de la rue

Entrée gratuite, dons appreciés

Petite grimpette pour rejoindre le bouddha


-Pagode Botataung



Prix d'entrée : 3000 kyats

Pas mal de bâtiments coloniaux sur la grande avenue avant la pagode


-Quartiers indiens et chinois

Ils s'étalent à l'ouest et au nord ouest de la Sule pagoda


-Manger à Yangon :

Dans le quartier indien, au lever et au coucher du soleil, vous trouverez plein de stands de nourriture. Comptez moins de 1000 kyats par personne pour un consistant repas de samossas, de crèpes et de nems (aux alentours de 100 kyats/pièce).

Prix d'un bol de nouille dans une gargotte : 300 kyats

Café sur la terrasse de cette même gargotte : 500 kyats pour un café birman, 200 pour de l'instantané.