jeudi 24 avril 2014

Nepali life


Nous y voilà. Nous sommes dans un cyber à Kathmandu et nous ne savons absolument pas par où commencer notre histoire. Une vie ne se décrit pas, elle se vit, mais nous allons tout de même essayer.

Radotons encore : c'est la même chose à chaque fois, nos articles ne sont que des résumés bien fades en comparaison du vécu, mais en ce qui concerne une chose pareille, un écrit et quelques photos paraissent tellement éloignés de la réalité que c'en est décourageant. Parce que nous avons envie de tout expliquer, de tout raconter, de tout analyser avec nos proches, mais dans un cas pareil il nous faudrait passer dans l'absolu une vidéoconférence de plusieurs jours!

En conséquence de quoi, comme à l'accoutumé, nous allons tenter d'organiser et de synthétiser tout ça. Rentrons directement dans le vif du sujet, ayant déjà introduit nos ressentis dans notre billet sur Pokhara.


Combien de fois avons nous dit ''ras le bol, un jour on partira vivre dans la montagne avec des chèvres!''? Et bien c'est fait, et au Népal en plus!

Le début de l'histoire est riche en symbolisme : le prénom de notre hôte (rencontre pile au lendemain de notre résolution d'aller nous perdre au Népal) rappelle le ''home'' anglais. Quand on le prononce, n'évoque-t-il pas ''OM'', la monosyllabe sacrée de l'hindouisme, l'absolu dans sa forme sonore, qui commence et termine toute prière védique (oui on se la pète, on est en train de lire la Gita)? Et l'estomac de Léonore qui se rebiffe le 31 mars pour nous faire décoller en direction de la jungle le premier avril, le jour de nos 6 mois de voyage... Comme nous le disions dans notre précédent article, chacun en pense ce qu'il veut. De notre côté, nous y voyons un extraordinaire concours de circonstances, et c'est amusant!

Nous voilà en train de parcourir Lakeside avec nos gros sacs sur le dos pour sortir de la ville. Juste avant d'aller se perdre dans la jungle, la traversée de ce quartier sur-huppé et touristique est irréelle.

Nous voilà bientôt dans les champs, puis dans la jungle à grimper, suant comme des yaks avec nos bardas. Et oui, pour rejoindre notre lieu de migration, plus de 2h de marche sont nécessaires! Nous croisons Hom durant l'ascencion, parti chercher un russe qu'il a rencontre la veille. Il nous donne rendez-vous directement chez lui. Nous ne sommes pas mécontent d'atteindre sa maison, en fin de matinée, où nous sommes accueillis par sa femme.
Hom rentre bientôt avec un jeune homme, Gorgy, qui va s'avérer être un excellent compagnon, et nous blablatons une grande partie de l'après-midi tous ensemble, avant de nous mettre au travail.

Rien de méchant pour ce premier après-midi : nous déplaçons des tas de feuilles et de branches pour dégager un champs qui doit recevoir des semences de maïs le lendemain. Nous faisons la connaissance de Sudip, ainé de la famille du haut de ses 10 ans, qui parle un anglais impeccable, bien meilleur que le notre, et qui s'avère gentil comme tout, curieux et attentif. Nous terminons l'après-midi en répendant (ba oui à la main! Evidemment à la main!) du compost de feuilles mélangées à du purin sur les champs en attente d'être labourés.

S'ensuit un casse-croute pour nous récompenser de nos efforts, après quoi nous gagnons notre terrasse pour poser la tente. La journée s'achève vite, et nous nous endormons au bruit de la jungle, moins de trois mètres en contrebas.

Au revoir ville, voitures, et pollution visuelle, sonore, olfactive. Nous voilà dans la jungle, nous voilà à bosser dans une ferme au Népal. Nous ne savons absolument pas ce qui nous attend, ni combien de temps nous allons rester, mais nous sommes impatients de le découvrir!


Hom's sweet home




 Plantons le décors dans lequel nous avons vécu durant trois semaines : Hom et sa famille vivent donc dans un petit village de quelques dizaines de maisons qui s’étale sur le flanc de la colline, à 20 min de Sarangkot, 2h de Pokhara.

Ils habitent dans une petite maison de trois pièces : la première sert de cuisine (un foyer pour le feu et un support pour les casseroles), une autre est occupée par la famille (un lit pour deux adultes et deux enfants! Niveau lien familiaux, ça se pose là), et la troisième pièce fait office de chambre d’ami et d’espace de rangement. Les parents de notre ami vivent avec eux, dans une autre maison jouxtant la leur. Une petite bâtisse commune est équipée de toilettes à la turc et d'un pot d'eau. Le papier toilette? Haha!
Un petit escalier de pierre mène de la terrasse en terre battue au coin des bestioles : un buffle (fournissant le lait pour les adultes), son petit et quelques chèvres (se chargeant quand à elles de donner leur lait pour les petits) se partagent un abris en tôle, en face des réserves de bois. La propriété comprend également des parcelles cultivables en terrasse, au-dessus et en-dessous de la maison. C’est beau, harmonieux, plein de verdure et de nature.

Les autres maisons du village se dressent parmis les arbres, au milieu des terrasses et des massifs de bambous. Nous les découvrirons au fil du séjour.

Elles abritent toutes des membres de la graaande famille dont fait partie Hom, les Dakhals. Les oncles, les tantes, neveux, petits cousins au deuxième degré, mère de la fille de la tante de la grand mère, même à la fin nous avions encore du mal à situer tout ce beau monde les uns par rapport aux autres! Le soir, nous tentons souvent de dresser un arbre généalogique de cette grande communauté.

Notre maison et le jardin...
De notre côté, nous avons posé nos appartements en bas du plateau, après les terrasses cultivées en lisière de la jungle qui nous a gentillement ménagé des espaces pour apprécier au réveil un formidable panorama sur le lac Pewa et les collines. 
La nuit, évidemment, l’ambiance sonore vaut son pesant de cacahuètes! 

Et il y a tous ces petits riens qui nous font rêver ou rigoler : il faut prendre garde aux singes qui viennent chaparder, ne pas hésiter à les chasser, éviter de s'aventurer de nuit dans la forêt histoire de ne pas tomber par hasard sur le tigre ou le léopard qui rôdent dans les environs... 

Côté accomodations, nous disposons à 20 minutes de marche, au milieu de la forêt, d’une source jaillissant parmis les arbres idéale pour la douche et la lessive. Inutile de préciser que l’eau chaude est un concept inexistant en dehors de la cuisine. Mais alors la douche au milieu de la jungle au soleil couchant, ça n’a pas de prix, même si l’aller retour prend près d’une heure. A POIL DANS LA JUNGLE!!! (Il fallait que je le dise!).

la salle de bain
...et la vue de la terrasse!










la cabine de douche


Hom



Hom. Ce nom restera gravé dans nos mémoires pour longtemps. Si nous avons trouvé si rapidement ce que nous cherchions, c'est grâce à lui. Difficile de décrire un tel personnage. Hom est un terrien, comme nous, profondément convaincu de la nécessité pour l'homme d'aider son prochain, de faire le bien autour de soi.

Hom prend tout avec le sourire, les bons et les mauvais côtés de la vie. Il est plein d'espoir, plein de joie, il donne sans attendre quelque chose de spécial en retour. Ce sont les gens qui décident. Pour son aide, nous avons travailler pour lui, mais il est tout à fait possible de venir vivre en vacance dans sa maison, en participant bien sur aux frais. Moins de 1000 roupies tout compris la semaine de vacances dans un village népalais, c'est tout de même mieux que lakeside, non?

Il n'est pas intéressé, il ne nous a rien demandé de plus que ce que nous avions à offrir : 4 mains, 4 bras, de l'énergie et de la joie. Il nous dit souvent qu'il est heureux parce que finalement il est riche dans son coeur, et c'est bien ça le plus important. Il préfère nos sourires et notre joie de vivre à toutes les espèces sonnantes et trébuchantes du monde, nous expliquant souvent qu'il en tire énormément.

Durant nos longues discussions autour du feu sur le sens de la réussite et du bonheur, sur les relations humaines, sur les chemins de vie, nous le voyons tel un papillon, heureux lorsqu'il est entouré de ses amis, près à tout donner pour eux. Il nous voue une confiance absolue, et nous remercie sans cesse de l'aide que nous lui apportons.

Et il nous comprend, il comprend que ce n'est pas parce que nous sommes blancs et français que nous roulons sur l'or. Il comprend que notre projet nécessite de mener une vie dénuée de tout superflu. Et ça c'est quand même quelque chose. Nous avons tout entendu au Népal : ''en France, vous ne travaillez pas et vous gagnez des fortunes'', ou celle-ci, particulièrement gratinée : ''c'est facile pour vous en Europe, le matin vous imprimez des billets et c'est bon!''. Il a fallut expliquer le cout de la vie, le prix des choses, il a fallut expliquer que l'année dernière je trimais de 7h le matin jusqu'à 21h le soir pour le salaire minimum (soit on ne nous a pas compris, soit on ne nous a pas cru). Mais avec Hom, pas besoin d'expliquer tout ça. Ca repose!

Au travail, durant la journée, Hom reste conscient de la precarite de sa situation. Il sait bien que même avec toutes les bonnes attentions du monde, sans argent du tout il est difficile de réaliser de véritables projets. Il ramène quelques roupies en accompagnant certains de ses visiteurs sur des trecks, sa réputation et sa seule publicité étant basées sur le bouche à oreille.

Il faut voir le nombre d'inconnus qui l'appellent chaque jours pour lui demander si ils peuvent venir faire un treck avec lui parce que l'un de leurs ami leur a conseillé cet homme incroyable! Si vous passez du côté de Sarangkot un jour, appelez nous, nous vous dirons où le trouver. Le rater serait une erreur énorme!

Ces quelques deniers difficilement mis de côté servent à payer l'école de Sudip (pas de scolarité gratuite au Népal! L'inscription est chère, et reste à la charge de la famille l'uniforme et le matériel). Son petit dernier va à la garderie, en revanche gratuite, mais il entre à la fin des vacances en primaire, et notre ami devra payer le double de ce qu'il payait jusqu'à maintenant.

Mais il est rempli d'espoir, de confiance, et pour cela il veut être bon. Et il rencontre un monde fou! Il a déjà été aidé à sa ferme par de braves gens du monde entier, et c'est par exemple pour cela qu'il veut construire une green house. Pour pouvoir proposer plus que deux lits!

Nous pourrions continuer à parler de Hom encore et encore, mais le mieux c'est encore d'aller le voir si vous passer dans le coin.


Nepali life

Dans un décors vous le voyez assez enchanteur, dans le village de Hom, la vie suit son cour à sa manière, et finalement nous nous y retrouvons complètement. Ca fait six mois que pas mal d’aspects de notre mode de vie sont les même qu’ici!

Côté repas, nous mangeons avec la famille, suivant un régime composé principalement de dal bhat (littéralement : lentille riz) accompagné de légumes et d’épices. Un gros plat le matin avant d’attaquer, un petit casse-croute le plus souvent composé de nouilles, de graines ou de chapatis en milieu d’après-midi, et dal bhat à nouveau le soir. La viande? Kézako la viande? Oui, si on gagne au loto on peut éventuellement acheter de la viande... Et on la stock où? La viande, c'est terminé. Nous mangeons parfois du poulet les jours de fête. Tout est cuisiné au feu de bois, il y a bien une bouteille de gaz, mais elle sert seulement à rechauffer. Côté qualité, nous ne mangeons que des produits absoluments et complètements bio. Il n’y a rien de chimique nulle part, et quasiment tout est produit par la famille. Niveau quantité, nous ne manquons de rien et sommes très bien nourris grâce à la grande générosité de la famille. Bon, ok nous travaillons pour pas un rond, mais bon, on nous rempli sacrément l'estomac. 

Pour l’eau, le système est particulier. Il y a bien une fontaine d’eau filtrée non loin de la maison, mais 6 familles doivent se la partager. 6 tuyaux sont reliés à la fontaine, et chacune à leur tour, une fois par semaine, les familles peuvent faire le plein. Autant dire qu’il ne faut pas rater le coche sous peine de devoir se décarcasser pendant une semaine pour avoir de l’eau! Le seul autre moyen est de descendre à la rivière pour remplir des bidons. C’est sur, on est loin de nos contrées européennes, où nous faisons quand même, il convient de le souligner, nos besoins dans de l’eau potable…  Alors bien sur, avec 300L pour une semaine et 8 personnes, on apprend vite à faire attention à la moindre goutte qui pourrait se renverser.

Et puis comme partout, la vie comporte son lot de corvées, et nous nous y retrouvons bien : lessive, vaisselle, ménage, bien entendu tout est fait à la main. De toute façons, le fonctionnement des lignes électriques est tellement aléatoire qu’à part les lampes ou téléphones qui se rechargent sur secteur, il n’y a pour ainsi dire pas d’appareils électriques. On s'est bien marrer en voyant juste avant de quitter Pokhara l'opération en France ‘’on éteint tout pendant une heure pour sauver la planète’’… Ici, le jus est coupé 12 à 14h par jour! 



Vous avez maintenant une petite idée de l’organisation du coin.

Le deuxième jour, après un solide petit dèj, les choses sérieuses commencent. Hom est un patron exigeant mais attentif, patient et prenant le temps de nous montrer, de nous expliquer, de nous aider. 

De notre côté, nous lui avons décrit notre état d’esprit : quand nous arrivons dans un pays ou un milieu nouveau, nous nous considérons comme des élèves studieux, ignorants mais pouvant tout apprendre. De plus, nous lui expliquons que nous pouvons accomplir n’importe quelle tâche, aussi pénible qu’elle soit, du moment qu’elle ne nécessite pas des années de savoir-faire pour être réalisée correctement. Nous ne voulons pas bousiller une récolte par erreur! 

Au programme du jour : labourer et semer du maïs dans toutes les parcelles. En effet, Hom nous explique que la première récolte a été détruite par de violentes pluies. 

On est dans le domaine de l'agriculture vivrière et de l'économie de subsistance : la famille travaille la terre pour produire ce qu’elle consomme. Hom vend parfois quelques surplus, l'argent récolté servant à payer l'école pour Sudip, mais globalement la quasi-totalité de la production sert à nourrir tout le monde. Donc si on ne replante pas, si on ne s’occupe pas de ses champs, c’est simple, on meurt de faim, il n'y a pas d'argent pour acheter à manger. 

Pour labourer, point de charrue, les bœufs sont attelés  à une barre fixée à un grand pic en bois incliné qu’un homme manœuvre comme un gouvernail et qui retourne la terre. Le gars est un pro et dirige les grosses bestioles à la voie et au baton. De notre côté, à la binette, nous labourons toute la périphérie, inaccessible aux bêtes, et brisons les grosses mottes de terre au marteau tandis que la maitresse de maison suit l’attelage en semant régulièrement le maïs. En vacances pour 2 semaines, Sudip travaille aussi avec nous. 

Le travail est techniquement simple mais bien physique, nous passons la journée pliés en deux à remuer la terre de 6 ou 7 champs et à nous relayer au marteau. Régulièrement, une pause thé ou nourriture nous permet de souffler. Hom nous répète d’aller doucement, nous demande sans cesse si tout va bien, si nous ne sommes pas trop fatigués. A trimer ainsi, la journée passe à une vitesse fabuleuse.

Pendant que nous nous échinons dans les champs, les parapentes, activité touristique phare du coin, décollent depuis le haut de la colline et sillonent le ciel. Leurs pilotes hurlent, font un bruit monstre, mais nous ne sommes qu'agacés. Nos amis népalais, quant à eux, ressentent dégout et colère : ils sont dépités à l'idée qu'on puisse dépenser 75 dollars pour 30 minutes de descente en parapente, alors que cette somme permet à un enfants d'aller à l'école pendant 6 mois... Nous comprenons parfaitement leur dégout, d'autant plus que nous connaissons la situation financière des familles qui vivent ici. Voir des blaireaux vociférants leur passer au-dessus de la tête après avoir flambé le budget d'une famille complète pour un mois les désespère...

Malgré la fatigue, nous nous appliquons, n’oubliant jamais qu’une erreur ou une négligence peut priver la famille d’une précieuse nourriture. 

Après l’effort, le réconfort, nous descendons tous à la riviére pour nous rincer et refaire le monde autour d’un feu. Hom et Gorgy sont fascinés par notre aventure et notre état d’esprit. Notre jeune ami russe est un trésor de gentillesse, son séjour au Népal lui a changé la vie, et à entendre nos histoires il est décidé à remettre les voiles dès son retour au pays. Hom se délecte de l’énergie que nous dégageons, de nos éternels sourires, de notre faculté à trouver du bonheur en toute chose tout les deux. 

Nos cœurs ont chaud, la jungle s’assombrit peu à peu et bientôt nous remontons sous un ciel étoilé. Sur le chemin, nous apercevons les lumières de Pokhara, 5 ou 6 km plus loin, en ayant l’impression d’observer une autre planète…
  













Le lendemain, Gorgy vient nous faire de chaleureux au-revoirs : il part en treck avec Hom pour deux jours, et ne repassera pas au village. Nous espérons le recroiser un de ces jours quelque part dans le monde. De notre côté, nous restons avec la femme de Hom, Bisnu, et les 2 loustics. 

La journée est beaucoup plus relax que la veille : nous parcourons la forêt avec des paniers coniques en osier sur la tête, que nous bourrons de feuilles mortes pour le compost et de petit bois. 

Bisnu connait quelques mots d’anglais, mais grâce à Sudip nous nous comprenons. Nous nous excusons pour notre népali quasi inexistant, que nous n’avons pas vraiment eu l’occasion de développer. Et oui, avec le tourisme galopant qui envahit le pays, tout le monde en ville parle anglais… 
Sudip se charge de la difficile tâche de remédier à nos lacunes. Il sera suivi par de nombreux autres, si bien qu'à l’heure où nous écrivons, après trois semaines dans le village, nous sommes à peu près capable de nous exprimer et de nous faire comprendre en népali, que nous maitrisons au final encore mieux que le turc! Nous y reviendrons. 

Bisnu est adorable, crevée et débordée, et nous mettons les bouchées doubles pour l’aider au mieux. 

En fin de journée, elle nous annonce son départ le lendemain pour un village de l’autre côté de la vallée de Pokhara pour visiter sa mère et sa grand mère, et nous propose de venir avec elle et ses enfants! Nous acceptons avec joie, ravit de pouvoir participer à cette réunion de famille.
En effet, nous avons trouvé ce que nous cherchions ici, mais nous n’oublions pas que cette découverte a été permise par la rencontre de Hom, qui a quand même vis-à-vis des étrangers un état d’esprit trèèès différent de la plupart de ses compatriotes. Nous sommes heureux d’avoir l’opportunité de rencontrer d’autre népalais. Vu la durée du trajet, nous y passerons la nuit.





Au matin, nous quittons la ferme pour une bonne grimpette jusqu'à la route de terre située au-dessus du village. 

Un premier trajet très remuant en bus nous amène dans le centre de Pokhara, où Bisnu profite d’être en ville pour aller acheter des uniformes à Sudip et au petit dernier, qui entre à l’ecole primaire à la fin des vacances. Et oui, l’uniforme est de mise dans les écoles népalaises, et il n’est vraiment pas donné… Bisnu a insisté pour payer le bus, de notre côté, lorsqu’elle nous propose une pause casse-croute dans une gargotte, nous règlons l’addition. 

Et nous voilà repartis, toujours en bus, pour l’autre côté de la vallée.
Nous atterissons dans un petit village au milieu de collines verdoyante, et devenons instantanément l’attraction, captant tous les regards à 100 mètres à la ronde. Avec Bisnu en tête, nous qui suivons en portant les sacs et les deux loustics sur nos talons, nous devons former un groupe étonnant! 

30 à 40 minutes de marches sont nécessaires pour rejoindre la maison où Bisnu a passé son enfance, et nous attaquons la grimpette. Elle est très heureuse de nous accueillir ici, et nous explique qu’il en est de même pour sa mère. Sudip nous explique que ce n’est que la deuxième fois que des étrangers sont invités ici, et nous les remercions de l’honneur qu’ils nous font. 

La maison se trouve isolée tout en haut d’un hameau, au-dessus il n’y a plus de trace de l’être humain, seulement une jungle touffue qui résonne des cris des animaux. L’endroit est magnifique, la vue formidable, et la mère de Bisnu nous accueille comme des rois. 

Sudip nous explique un peu la vie ici, et nous tombons des nues : nous avons eu en trois jours un léger aperçu de la somme de travail que répresente dans la campagne népalaise une exploitation fermière. Ici, c’est le même boulot, sauf que… La mère de Bisnu, 60 ans, et sa grand mère, 80 ans, vivent seules! 

Les deux vieilles femmes s’occupent donc seules de leur ferme, parfois en étant obligées d’embaucher des extras, ou en comptant sur la famille qui de temps en temps leur apporte vivres et… cigarettes (non, il faut le voir, les deux vieilles dames clope au bec en train de porter des tas de bois plus larges qu’elles!), mais globalement elles font tourner la baraque à elles deux! C’est juste dingue. 

La soiree s’écoule en admirant le panorama fantastique dont nous jouissons sur notre montagne et le couché de soleil, ainsi qu'en nous occupant des bêtes, après quoi la maitresse de maison s’éclipse pour tuer 4 poulets, cuisinés le soir même (ouiiiii! Du poulet!!!!). 
Nous voilà assis sur une natte dans la cuisine, à deguster la délicieuse cuisine de notre hôte. Et le poulet… Ah le poulet… Ca faisait longtemps que nous n’avions pas senti de la viande dans nos bouches, et celle-ci est délicieuse. Un merveilleux cadeau que l'on nous fait. 

On nous rassasie copieusement, après quoi nous gagnons un appenti ouvert où nous attend un lit de planche recouvert de nattes. Nous y dormirons quasiment à la belle étoile, ébahis par la gentillesse, la générosité, l’énergie et le courage de nos bienfaitrices.







Au réveil, après le thé, nous partons dans les champs, avides de donner un coup de main aux deux incroyables occupantes du lieu. 

Nous passons la matinée accroupis dans les champs, à arracher toutes les mauvaises herbes qui parasitent des plans d’oignons. Parce que c’est pareil que le reste, personne ne veut entendre parler d’herbicides, et c’est tant mieux. 

En quelques jours, nous avons appris que la terre et importante, vitale même : chaque brin d’herbe déraciné doit être débarassé de cette précieuse bienfaitrice, qui donne de quoi manger, avant d’être jeté. 

Après le repas de midi, nous mettons les voiles, quittant tristement notre cher Sudip, qui reste chez sa grand mère et son arrière grand mère pour les vacances. Dernier geste incroyable, nos deux hôtes nous font comprendre que pour nous, la porte de leur maison sera toujours ouverte, et nous serons toujours les bienvenus.  

Le retour en bus est fatiguant comme tout. A Pokhara, nous retrouvons Hom qui rentre juste de treck, et nous regagnons tous ensemble les hauteurs et le calme du village, la tête pleine de souvenirs et le cœur chargé d’émotions. 

Voilà ce que nous voulons, voila ce qui nous est cher. Et là dessus, Hom nous annonce que dans deux jours se tient dans tout le Népal le festival de Chaite dashain, qui célèbre le panthéon hindou. En plus, nous allons avoir la chance de participer au festival dans le village! Ca promet une sacrée immersion!



Après avoir été témoin de l'hospitalité et de la gentillesse débordante de Hom et de sa famille, nous avons été accueilli merveilleusement par la famille de Bisnu, et cela nous a fait plaisir. Mais nous sommes perplexe : depuis que nous sommes là, entre les champs et les trimballages de feuilles, nous avons eu l'occasion de traverser le village en long, en large, et en travers, et il faut avouer que les autres habitants sont souriants mais plutôt distants à notre égard. Parfois nous sommes observés avec curiosité, parfois nous nous heurtons à une indifférence presque complète. Pourtant nous pensions que le fait de nous voir travailler toute la journée allait peut-être adoucir la barrière ''touristique'' qui nous sépare. Nous voulons vraiment nouer des liens avec le reste du village, et voir si nous pouvons débloquer tout ça. Sans trop connaitre la langue, nous sommes résolus à bosser et é attraper toutes les opportunités d'échanges qui se présenterons.

Le jour suivant est besogneux : nous ramassons des kilos de feuilles, du bois, désherbons, et aidons Bisnu dans les tâches ménagères. Nous pensons surtout au lendemain et au festival!

Habitués au coin, nous pouvons vaquer seul à notre travail, et les gens commencent à venir nous voir. Deux femmes rigolent gentillement de nous voir avec nos paniers de travers sur la tête, et elles nous aident à les placer correctement. Lorsque nous passons chargés de sacs et les paniers remplis de feuilles, on nous montre comment répartir les charges pour moins nous fatiguer. Nous tenons le début de quelque chose, et nos rudiments de népali font sourire mais sont très appréciés.

Et nous n'avons pas vraiment le choix : seul Hom parle anglais, si nous voulons papoter il faut que nous bossions sérieusement notre nepali!

L'événement de la fin de journée sera l'invasion, par une horde d'une vingtaine de singes, des champs en contrebat de la maison. De là où nous sommes, nous voyons de loin les primates tenter d'embarquer des pousses de maïs tandis que les fermiers leur donnent la chasse. C'est fou, presque flippant! Après le raz-de-marée, nous descendons vite à la tente histoire de vérifier que tout va bien. Pas de problème, mais le constat est fait : notre maison est en première ligne pour défendre les champs! Nous passerons d'ailleur quelques instants à courser les derniers récalcitrants, avant de descendre prendre une douche.

Hom nous rejoint au bord de la rivière, et nous passons la soirée autour du feu à rêver. Il nous réchauffe le coeur : apparement, sa femme est très contente de notre aide, et espère que nous allons rester longtemps. D'après lui, ce n'est visiblement pas la seul à trouver que nous bossons comme des chefs : il nous explique que pas mal de monde, impressionné par nos allées et venues chargés comme des mulets, est venu le voir pour lui demander si nous étions disponible pour filer un coup de main! Ah? Nous nous rendons bien compte que certe nos hôtes sont très généreux en nourriture avec nous, mais aussi que deux petits français qui travaillent d'arrache-pied avec le sourire du matin au soir uniquement pour trois repas, c'est quand même une aubaine!


Au matin, nous accompagnons Hom au petit magasin près de la route pour acheter deux bouteilles de coca pour célèbrer le festival. Et bim, l'occasion d'élargir notre cercle de connaissances nous tombe dessus : nous passons devant la maison de l'oncle de Hom, où son cousin, Ram, veut bâtir un stupa (temple). Hom nous demande si nous voulons venir participer au travaux, et nous acceptons sur le champs. Rendez-vous pris pour le lendemain, nous regagnons la ferme.

 Le jour du Chaite dashain est férié au Népal. Lorsqu'on s'occupe d'une ferme, bien entendu le mot ''férié'' n'existe pas, et au matin nous partons avec le père de Hom pour ramasser des bambous. Il ne parle pas anglais mais est absolument adorable avec nous, et à force de gestes, avec patience, il nous fait comprendre ce que nous devons faire. Nous ramenons sur notre dos des tas plus grands et plus larges que nous, ainsi que des troncs qui vont servir à fabriquer le nouveau portail de la maison. Comme d'habitude, nous suons pas mal, mais sommes recompensés à la fin : grand-père nous prépare thé aux épices, chapatis et curry de légumes.

Parfait petit apéro avant le repas festivalier, en compagnie du beau-frère de Hom et de son fils de 14 ans. Le repas est féérique : non seulement il y a du poulet, mais aussi des fruits, et ça aussi c'est rare! Pour l'occasion, on nous appose à chacun un Tika rouge sur le front, composé d'un mélange de poudre de vermillon et de riz, qui représente par sa couleur le sang du sacrifice et attire la chance, le bonheur et la protection du grand Vishnu.

Après le repas, nous prenons la direction du temple du village en compagnie de grand-père. Arrivés sur place, il y'a pas mal de monde, la chêvre a déjà été sacrifiée, et elle est en train de cuire avec le riz et les légumes.

Les regards nous suivent, mais au final nous nous posons et les gens viennent nous voir, engager la conversation, et nous sommes à l'aise. Nous avons d'ailleurs l'honneur d'être les premiers servis lorsque la viande est prète! Raaa... De la viande! En dehors des rares fois où nous avons dégusté du poulet, nous n'avons pas mangé de viande depuis Kathmandu, plus de 5 semaines plus tôt! En revanche, il ne faut pas trop réfléchir sur la partie du corp d'où sont tirés les morceaux! Mais après 5 semaines, on s'en tamponne, c'est bon!

Nous quittons les lieux en fin d'après-midi pour finir la journée à tailler les bambous et à installer le nouveau portail.

Après ça, nous passons à la tente... Et devons nous précipiter à l'intérieur lorsque le ciel se déchire! Il tombe des grelons gros comme des balles de golf pendant 10 minutes, la tente tient, et le ciel d'un noir d'encre un instant plus tôt redevient bleu pur. Whoua!

La journee s'achève tranquillement. Ca y'est, tout s'accélère! Un festival avec les habitants du village, et demain nous bossons pour Ram. C'est bien, c'est beau, c'est fort.
















Et voilà, nous avons un nouvel employeur! Tôt le matin, nous rejoignons la maison de l'oncle, où Ram nous attend. Sa mère nous accueille avec biscuits et thé, tandis que Ram nous explique ce que nous allons faire. Avis aux adeptes d'hindouisme, vous allez rêver! Ram veut donc construire un stupa, temple dédié au panthéon hindou (et non pas à une seule divinité), et y organiser une fête pour célébrer les dieux. Sauf que l'emplacement est complètement en pente, et nous allons devoir niveler tout ça à la pelle. Creuser les fondations d'un temple! On fait de ces trucs décidement...
le terrain à moitié nivelé

Ram, comme Hom, est attentif et aux petits soins pour nous. Il nous repète bien que le pelletage est un travail fatiguant, et que nous devons aller doucement (bistare bistare, en népali ''doucement doucement'', une phrase que nous entendons souvent!).

Nous attaquons, bossant sur une sacrée surface, et là encore c'est techniquement simple (rabattre la terre du haut de la pente sur le bas) mais physiquement pas mal violent. Mais comme à notre habitude, c'est avec le sourire et sans ménager nos efforts que nous creusons un sol bien pourri et farci de pierres qu'il nous faut parfois (souvent...) dégager en plantant une barre en fonte en dessous pour faire levier.

Le petit truc, c'est que l'endroit est situé juste en contrebas de la seule route du village, et il y'a beaucoup de passage... Jusqu'à ce que nous nous mettions au travail. Ensuite, 5, 10, 15 personnes s'arrêtent et s'asseoient pour nous observer, lançant de temps à autre un conseil ou un ''bistare bistare''. Tout le village passe nous voir travailler. Si les autres habitants du coin, les parents et les marmots, ne nous adressent que des regards curieux quand nous attaquons, après 1h de boulot ils deviennent adorables et très amicaux. C'est Ram qui nous appelle pour les pauses, accompagnées des délicieux dal bhats préparés par sa mère.

La journée est fatiguante, mais notre boss est un ange, souriant et sympa comme tout. Sa mère ne parle pas anglais, mais elle nous couvre de sourires et nous nourrit comme des roi. Nous applanissons la moitié de la terrasse en ce premier jour, et sommes rejoins en milieu d'après-midi par une ribambelle de têtes blondes (brunes plutôt), enfants des uns et des autres, qui viennent nous donner un coup de main. Youpi! Plein de titous! Nous finissons bien sur par de franches rigolades avec eux, adorables qu'ils sont. Il y'a plein de pitchounettes, et en une heure elles nous ont trouvé de nouveaux noms : didi et dai (grande soeur et grand frère).

Ram nous propose de descendre nous rincer à la rivière, puis nous invite à revenir pour le diner.

Sur le chemin de la douche, l'attitude des gens à notre égard a changé du tout au tout. Nous mettons beaucoup de temps à traverser le village, étant appelés de toutes parts, salués, félicités, remerciés. Nous rencontrons la tante de Hom, Sorma, qui étreint Leonore et lui offre un collier. En descendant à la rivière, nous sommes sur un nuage. Visiblement, nos efforts pour faire notre place ici n'ont pas laissé indifférents. Le fait de terrasser avec le sourire pendant 5h les fondations d'un temple hindou ne doit pas non plus être étrangé à ce revirement!

La douche dans la jungle est comme toujours un bonheur, tout comme notre retour chez Ram et le dal bhat de sa mère. A nouveau, les traversées du village nous mettent le sourire aux lèvres. Nous sentons que la barrière est tombée, et nous découvrons des gens francs et chaleureux, curieux et attentifs. Que du bonheur. Le soir devant la tente, il y'a dans notre tête autant d'étoiles que dans le ciel, notre sensation de plénitude est à son comble.

Le lendemain, rebelotte. Nos boini (petites soeurs) viennent nous chercher à notre tente pour nous escorter chez Ram. Sur place, c’est reparti. 

Tout comme la veille, le travail est dur, mais les à-côtés sont formidables, la nourriture excellente et les gens adorables. Et il y'a tout ces petits événements qui nous font plaisir ou marrer : le jeune homme que nous avions rencontré au tea shop juste après Hom qui passe en nous conseillant de ‘’ne pas travailler trop vite, pas comme dans votre pays’’. Ou le responsable logistique du coin qui vient nous féliciter et nous remercier pour notre efficacité. Ou encore, lorsqu’un titou qui n’avait pas tout compris court vers nous en criant ‘’give me sweet’’, il se fait engueuler par sa soeur qui lui dit ‘’pas eux, c’est des népalis!’’. 

La journée est éreintante mais géniale, et nous terminons notre tâche en milieu d’après-midi. Nous faisons alors plus ample connaissance avec Arka, le jeune homme qui tient le tea shop sur la route de Sarangkot. Il s'avère très sympa, et nous discutons quelques instant avant qu'il nous propose de venir migrer chez lui, dans sa maison située près de celle de Ram. Arka est incroyable : avec la saison des pluies qui approche, il nous explique que les chutes de grêlons vont se multiplier, balançant des blocs de glace pouvant parfois atteindre 2kg (!), il est très inquiet à l'idée que nous dormions dehors, et veut nous accueillir dans une chambre disponible de sa maison. De plus, il a besoin d'un petit coup de main pour nettoyer et faire place nette autour de son tea shop. Nous le suivons chez lui pour un thé, le remerciant du fond du coeur, promettant d'y réfléchir. 

Lorsque nous repassons chez Hom, il n'est pas encore rentré de treck, mais sa femme l'appelle, puis nous donne une cargaison de pommes de terre pour une patates party! Après la douche, au bord de la rivière, nous les balançons dans le feu puis les dégustons sous les étoiles, avant de rejoindre la tente où Arka nous attend, avec musique, pour une petite soirée dans l'herbe. 

Nous ne trainons néanmoins pas longtemps, crevés que nous sommes, pour profiter d'un repos bien mérité après deux jours de pelletage. Demain, nous retournons chez Hom. Nous voilà à devoir organiser nos journées afin de gérer les différents boulots et invitations! 

  

La matinée suivante voit se dérouler une féroce bataille. Lorsque le soleil se lève, l'assaut sur nos positions a déjà commencé. Nous sommes réveillés par des cri et des piaillements de singes tout autour de la tente. Préparé à cette éventualité, nous enfilons un pantalon et jaillissons de notre avant-poste pour défendre notre territoire contre les primates. C'est que le maïs que nous avons semé quelques jours plus tôt pointe le bout de son nez, attirant les légions à poil, qui sont la pire plaie des récoltes. Ils sont partout, une vingtaine, autour de nous et de la tente, dans les champs, tandis qu'une vieille népalaise féraille déjà avec ardeur. Nous armant d'epées de bambou et de pierres, nous nous lançons dans la bataille, rabattant dans un premier temps les chapardeurs à l'oeuvre dans les champs vers la jungle. Commence alors une véritable guérilla forestière : nous les repoussons droit devant, mais les filous arrivent à percer sur les flancs et commencent à nous encercler. Léonore et notre soeur d'arme népalaise défendent le flanc gauche, tandis que je bombarde de caillasse la droite du champs de bataille. Les bestioles s'éloignent puis reviennent attaquer ailleur. Finalement, elles se replient dans la jungle, et pendant que Léonore et notre amie les empêchent de remonter, je descends dans la forêt pour neutraliser les dernières poches de résistance. En tout, nous combattons une heure durant la marée de singes, que nous parvenons finalement à repousser vers le bas de la colline, sauvant les champs de maïs. Voici une nouvelle chose que nous ne referons pas de sitôt! On vit de ces trucs quand même... En même temps, on prend conscience que ça va faire pas mal de temps que nous sommes dans le pays : au début, c'était ''ooooh! Un singe! Trop bien!!!'', et à présent, nous les chassons!

Oh le regard qui tue! Il faut en imaginer une vingtaine comme ça autour de vous...

Nous passons la journée aàtravailler avec Bisnu. A nouveau, nous la voyons affairée, elle ne s'arrête jamais entre 7h et 19h : trier les grains de blé ou de maïs, nettoyer, s'occuper des bêtes et des champs... Le tout avec le petit dernier, trèèès actif, qui lui court dans les pattes.

Vers midi, nous descendons dans les champs. Les parcelles de maïs, lorsque ces derniers ont atteint une certaine taille, doivent être bêchées (inutile de le dire, à la main) afin d'aérer la terre et de débarassés les mauvaises herbes qui les entourent. Un travail très technique : il faut bêcher tout autour jusqu'au ras des pousses sans les abimer, et ne pas toucher à certaines herbes, tout en dégommant les mottes de terre et virant les cailloux... Sans tout ce bazar, les épis de maïs ne sortent pas.

Là, pour le coup, c'est bien trop compliqué pour nous. Nous essayons, tant bien que mal, nous observons Bisnu qui nous montre encore et encore, mais considérant la précision et la rapidité de ses gestes, il est évident que cette tâche demande un savoir-faire qui doit nécessiter un apprentissage conséquent.

Nous remontons finalement à la ferme pour remplir des sacs de grains, blé, maïs, mélanges. Hom rentre de treck dans la soirée, et nous lui expliquons qu'Arka a besoin de nous, et qu'il préfère que nous résidions chez lui le temps que ça prendra. Hom accepte avec joie. Comme il le dit si bien, le village avant tout, c'est une communauté, aider Arka c'est l'aider lui.


Le lendemain, dernière journée de travail pour Hom (jusqu'à la prochaine!) avant de migrer chez Arka. Nous la passerons à ramasser tous les cailloux qui trainent dans les champs et à désherber les abords des parcelles, avant de nous coucher pour une dernière nuit dans la tente.

Au réveil, nous remballons donc le camps pour migrer dans les hauteurs du village. Arka vient nous trouver tandis que nous finissons de ranger. 

Au rayon des mauvaises surprises : une bestiole non identifiée a rongé la toile de la tente sur 2 cm de diamètre et a percé de nombreux trous dans nos chers, nos fidèles, nos bien-aimés gobelets retractables en silicone... Nous repensons avec émotion aux nombreux thés, platrés de purée et nouilles qu'ils ont contenu depuis notre départ de France. Ils seront morts en héros, dévorés par une bête sauvage au coeur du Népal. Nous grimpons parmis les chemins et les escaliers du village, pour déposer nos affaires dans une coquette piaule chez Arka. 

Nous faisons la connaissance de sa femme, Bindu, et revoyons 2 des pitchounes avec lesquelles nous jouons depuis 2 jours et qui s'avèrent être ses filles, toutes mignonnes et gentilles : Susmita, 7 ans, et Sunita, 4 ans. 

Après deux jours passés à déplacer des kilos de terre, nous sommes ravis d'entendre Arka décréter le repos intégral pour la journée. Nous passerons notre temps à jouer avec les petites, à apprendre le népali auprès de Polmira, qui assure la surveillance des petits avec une patience exemplaire du haut de ses 12 ans, et à tenir le tea shop avec Arka et ses amis.

Ca fait du bien de glandouiller un peu! La femme d'Arka nous remplit le ventre à craquer de dal bhat matin et soir, et il en sera de même tout les jours. Et ce n'est pas la peine de dire non lorsqu'on vous demande si vous voulez une deuxième assiette! Nous avons essayé en anglais, en francais, et en népalais (pugio, assez), rien n'y fait! 

Nous apprenons que le lendemain se tient le jour de l'an népalais, qui célèbre le passage à l'année 2071, et Arka nous invite à venir avec lui et ses amis pour une petite fête à flanc de montagne au clair de lune. 2 jour de l'an en une année, une autre des merveilles du voyage! 

Notre première journée chez Arka nous a permis de découvrir un homme d'une générosité hors normes, qui donne encore et encore avec le sourire, et qui adore ça. Nourriture, chambre, boisson, tout y passe et nous ne manquons de rien. Il fqut l'avouer, cela nous gène, car cette fois pour le coup nous ne travaillons pas, et les habitants du village ne roulent bien sur pas sur l'or... C'est incroyable. Et nous avons une ribambelle de titous à faire jouer, tous plus adorables les uns que les autres. Avec les miss, calmes et sages, c'est un bonheur!



La journée du 13, nous montons au tea shop pour attaquer le grand nettoyage. Pas mal de gens viennent la nuit déverser leurs ordures autour de l'échope, et nous nettoyons toute la zone, désherbons, balayons, bref faisons place nette, après quoi nous attendons les touristes en route pour Sarangkot pour leur proposer boissons fraiches ou café. 

La fin de journée passe tranquillement, et après quelques activités manuelles avec les pitchounes, nous rejoingons le tea shop à la nuit tombée. Les amis d'Arka ont déniché un poulet, qu'ils abattent, plument et cuisinent. Nous passons la soiree autour du feu à manger et discuter, pour rentrer au milieu de la nuit.


Le premier jour de la nouvelle année, le Naya Barsha, est un jour de repos. Pas de grasse matinée cependant, les pitchounes nous sautent dessus à 6h du matin! Après une douche à la rivière, nous repassons une journée de vacance, à glander dans notre chambre, à jouer avec les petites ou à admirer la vue au tea shop.





Le lendemain, Hom a besoin de nous pour divers boulots : nous trimballons des balles de paille, mettons les réserves de bois à l'abris en vue de la mousson qui approche et faisons des fagots de petits bois. Le soir venu, nous rejoignons Arka après la douche et le diner, bien lessivés, pour nous coucher.

Durant ces quelques jours, et depuis que nous avons travaillé chez Ram, nos vadrouillages dans le village sont ponctués de nombreuses visites chez tout le petit monde qui habite ici. Notre népali a fait un sacré bond en avant, et tout le monde veut de nos nouvelles. Léonore accumule les colliers donnés en cadeau et les tikas qu'on lui pose chaque jour sur le front, et cette intégration nous permet d'apprécier l'incroyable communauté que forme le village. 

On connait la definition de ''communauté'', mais la voir en si belle application, voir un système pareil fonctionner à merveille, ça fait frissonner. Déjà, exit les problemes d'argents : il n'y en a pas. Ensuite, tout le monde vit avec tout le monde, partout, tout le temps. 
On travaille ensemble, un coup chez l'un un coup chez l'autre, on aide, on dépanne, on débarque à l'improviste. Les portes sont
ouvertes en permanence, les murs ne sont là que pour délimiter des espaces, les gens vont et viennent dans toutes les maisons. Les temps de repas voient les familles se rassembler, sinon il n'y a pas vraiment de familles. 
Ou alors une seule. On passe boire un thé chez l'un, avant d'aider l'autre à bêcher son champs, avant de discuter dans l'herbe où sont rassemblés 10, 15, 20 personnes. Les parcelles ont tout de même leur propriétaire, afin de canaliser l'utilisation des ressources naturelles. Quasiment tout est fait ou construit sur place, par les habitants avec ce que fournit la jungle, en s'aidant les uns les autres, en faisant attention à laisser se renouveler les ressources. Personne n'oublie que si la nature se vide, le village meurt. Le résultat est extraordinaire à voir : dans cette microsociété presque autonome, où tout le monde fonctionne avec tout le monde, grâce à la générosité des gens et de la nature, la vie suit un cour finalement prospère et bien éloigné des problèmes du monde. Une vie rude, pas facile sous certain aspects, simple sur d'autres, basée sur le travail et la solidarité, le partage et l'échange. Un fonctionnement dénué de tout superflu, régi par les relations humaines et la résolution de problèmes vitaux ensemble. Inutile de dire que nous nous plaisons beaucoup ici!


et le cadre, il faut l'avouer, joue beaucoup!



Le lendemain, Arka a justement fait appel à un spécialiste chargé de couper les bambous dont il a besoin pour effectuer quelques aménagements au tea shop. 

De notre côté, nous assistons le gars en ramassant et en rassemblant les troncs. Alors un bambou de 5 ou 6m de haut à tirer des bosquets, c'est l'enfer. Ca s'accroche, c'est lourd, ça coupe, ça glisse, c'est plein de poil à gratter! Il faut près de 10 min pour dégager une section de ses semblables, et nous passerons près de 3h à tirer comme des malades ces gigantesques tiges de leur écrin pour les trainer dans un espace dégager. 

L'après-midi, non content d'avoir sorti une vingtaine d'énormes sections de leur bosquet, il faut encore nous les trimballer jusqu'à la maison d'Arka, à 10-15 min de marche du lieu de coupe. Le travail carbonise pas mal, mais encore une fois nos amis sont aux petits soins pour nous, et nous recharge abondamment en eau et nourriture, nous imposant des pauses même quand nous disons que tout va bien. 

L'après-midi touche à sa fin lorsque nous terminons, et après le diner nous nous écroulons comme des masses.





Retour chez Hom pour notre avant-dernier jour. Oui, avant dernier jour... Nous aurions très franchement adoré passer 2 mois, 2 ans, plus encore ici, mais les nécessités financières liées aux extensions de visa ne nous le permettent pas : nous sommes le 18, et nos visas arrivent à expiration le 23. Nous aurions pu faire une demande d'expansion à Pokhara, mais il nous faut aussi faire nos demandes de visas indiens. Nous ne pouvons nous permettre qu'une extension de 15 jours au Népal, et en comptant la semaine d'obtention de notre clef pour l'Inde, nous sommes obligés de retourner à Kathmandu pour tout faire en méme temps. C'est rageant : nous avons vecu 3 semaines sans dépenser d'argent (mis à part quelques menus frais, genre biscuits pour le thé), et bim, retour à la dure realite et aux 30 dollars d'extension de visas! C'est comme ça...


Et, oh joie, aujourd'hui...Nous trimballons des bambous! Ils vont servir à bâtir la green house de Hom. Alors autant hier, les troncs faisaient 5-10cm de diamètres, autant là nous allons trimballé des arbres de 20-30cm! En revanche, ce coup-ci ce sont deux bucherons professionnels armés de haches qui s'occupent de la coupe et du dégagement. De notre côté, nous les chargeons sur nos épaules et les trimballons jusqu'à la baraque. 

Nous écumons trois bosquets tout autour du village tout au long de la journée, et le soir venu tout est terminé! Les images de la greenhouse suivrons plus tard.

Nous descendons à la rivière avec Hom et quelques pommes de terre, et après la douche refaisons encore une fois le monde autour du feu. Nous sommes tristes, notre cher ami aussi. Il nous explique que la vie sera bien morne sans nous, les gens du village nous adorent et nous sommes devenus plus ou moins indispensables. Encore une fois, deux petits voyageurs pêchus qui bossent du matin au soir pour du riz, ça ne court pas les rues! Pour donner un exemple, les bucherons avec lesquels nous avons travaillé aujourd'hui recoivent en plus des repas 700 roupies par jour! Certaine personnes n'ont d'ailleurs pas compris pourquoi en faisant tout ça nous ne demandions pas d'argent. Mais passons.

En revenant le soir chez Arka, nous faisons la connaissance d'Alberto, un Argentin de 36 ans que notre hôte a invité chez lui. Le gars voyage à bicyclette depuis trois ans, dort sous tente et vit avec trois fois rien. Autant dire que nous nous entendons directement! Alberto est génial, ses histoires de voyage sont fantastiques, et c'est un plaisir de parler vadrouille avec lui. C'est le genre de gars qui vend ses histoires dans la rue quand il n'a plus d'argent, qui part en Inde pour trouver du boulot, qui dort avec des buffles si il n'y a que ça. Pour le coup, c'est un vrai, un véritable, un sacré timbré de baroudeur! 

Nous ne tardons tout de même pas à aller dormir, rêvant de bambous!

Heureusement que nous avons rencontre Alberto, qui avec son sourire, ses histoires et son esprit magnifique nous remonte le moral en ce dernier jour. 

Nous avons dès le réveil une boule au fond de la gorge, et avons décidé de refaire un creneau par le village une fois nos visas indiens obtenus avant de quitter le Népal (nooon!!!). 

Nous papotons voyage, anecdotes et chemin de vie, motivations et convictions. Arka nous invite à l'accompagner à une fête se tenant au temple sous son echoppe, et à nouveau nous voilà entouré de chaleur avec du riz et de la viande de chèvre dans des assiettes en feuilles de bananier. 

La journée coule trop vite, l'après-midi nous passons voir Hom (qui nous recquisitionne pour trimballer quelques dernières brassées de bois!) pour le thé et avons la surprise de voir déjà se dresser l'armature de la green house en bambou! Nous avons également la joie de revoir Sudip qui revient de chez sa grand-mère (avec ces histoires, les vacances sont finies). 

Nous rejoignons Arka en fin de soirée pour diner, après quoi Hom vient nous dire au revoir. Nous échangeons contacts et adresses et n'oublions pas que dans une ou deux semaines nous nous revoyons. Nous finissons la soirée avec Alberto, qui nous explique tout le bien qu'il pense de notre état d'esprit et de la beauté de notre entreprise. Nous nous nourrissons chacun de la pêche de l'autre, et c'est formidable! 

Nous sommes mélancoliques, mais il faut avouer que depuis quelques jours, l'envie de nous remettre en route se fait plus que pressante. La route nous appelle, nous voyons l'Inde approcher à grands pas, et mine de rien c'est la première fois que nous restons au même endroit plus d'une semaine. Il est grand temps de bouger, nos jambes nous démangent!


Au matin, nous passons dire au revoir à tout le monde, tout en népali s'il vous plait, et à 9h nous posons nos gros sacs au bord de la route pour attendre le bus. Toutes les pitchounes passent nous saluer sur le chemin de l'école. Lorsque le bus arrive, il n'y a plus de place à l'intérieur, et nous grimpons sur le toit. Endroit parfait pour constater que plein de monde est venu nous saluer une dernière fois! Le bras levé, nous quittons le village cheveux au vent, nous préparant à une journée de bus jusqu'à Kathmandu. 

Oui nous repasserons, mais pour un jour ou deux seulement. Notre vie ici, pour le moment, est terminée. Le trajet en bus nous amène à Pokhara, d'où nous embarquons pour Kathmandu. Après un long et fatiguant trajet, nous revoilà dans la capitale. 

Le retour dans le tourbillon bruyant et poussièreux de la ville est trèèès violent, nous nous enfermons dans nos têtes et rallions notre chère lodge miteuse à 2 balles la nuit. Les klaxonnes, la foule, l'air irrespirable... Et Thamel, punaise, Thamel... Psychologiquement, le virage secoue. Et oui, souvenons nous que depuis notre dernier séjour à Kathmandu, nous avons passé 3 semaines dans les étendues sauvages des Annapurnas, puis 3 semaines à travailler dans un petit village au milieu de la jungle. Certe nous sommes ravis de nous remettre en route, mais passer du calme absolu à l'endroit le plus bordélique du pays a de quoi remuer!

Nous avons passé trois jours à rediger ce billet, après quoi nous sommes allés régulariser nos visas. 

Plus que 15 jours à passer dans ce pays extraordinaire. Dans les jours qui viennent, nous devons investir le consulat indien pour faire nos demandes de visas. Ils devraient mettre entre 5 et 10 jours pour être disponibles, que nous mettrons à profit pour visiter Bakthapur, à 15km du centre, et pour nous évader une dernière fois avec la guitoune, les sacs et les guiboles afin de vadrouiller dans la vallée de Kathmandu. Ensuite, après un passage rapide à Sarangkot pour faire nos adieux (plutôt nos au-revoirs!), nous mettrons le cap sur Lumbini, lieu de naissance de Bouddha, avant de rejoindre l'Inde du côté du Ladak.

Nous allons en terminer là. 

D'aucun dirait que nous écrivons beaucoup, trop peut-être, mais il faut garder à l'esprit que cet article pourrait sans problème être 2 ou 3 fois plus long. Nous pourrions parler des faucons qui nous survolent toute la journée, des séances de colliers de perles avec Sudip, des cocottes en papier réalisées avec les petites et les feuilles de mon cahier, les sourires des femmes du village lorsqu'enfin nous leur parlons en népali, ou lorsqu'elles étreignent Léonore en lui disant ''tapai ramro cha'' (tu es belle). Nous pourrions raconter les courses avec les poules, les rabattages de poussins perdus, les couchers de soleil, les cabris qui bondissent de partout, les enfants qui accourent autour du grand-père qui leur sort des friandises. Les sourires, les signes de main, de tête. Bisnu qui, à notre retour de notre journée de pelletage chez Ram, pleine de solicitude, nous soumet à un interrogatoire en règle pour être sur que nous avons été bien nourri. Et il y'en a encore tant à raconter.

Nous avons déjà évoqué nos ressentis, nous dirons donc pour terminer qu'en partant chercher le Népal sans objectif particulier, nous avons trouvé quelque chose qui dépasse tout ce dont on pouvait rêver. Nous nous sommes sentis chez nous, au sein d'une communauté qui a un sens, qui mène une vie qui nous parle, une vie rude mais logique, dénuée de superflu et d'absurdités, gratifiante. Cette communauté nous a accueilli en son sein, et nous a tout donné malgré le peu dont elle dispose selon des critères conventionnels. De notre côté, nous avons trouvé là-bas des richesses et des trésors extraordinaires. Tout dépend bien sur de la définition que l'on a de ''riche''...

1 commentaire:

  1. Une très belle expérience!! Des gens chaleureux, quelque soit le continent!! Vous vivez un exceptionnel parcours!! Que votre chemin rencontre encore de tels personnes.
    Maxime est toujours au Brésil et a aussi fait comme vous de très belles rencontres; mais la vie au Brésil est quand même très différente et pas aussi simple et humble qu'au Népal, mais les gens sont aussi très chaleureux. bonne continuation. Un bonjour de Chassieu

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