dimanche 24 décembre 2017

Dernières semaines néo-zélandaises, la touche finale : Wellington, le cap Palliser, Napier, le cap Est, et un volontariat à la hauteur de l'année


Le voilà, car il fallait bien qu'il arrive un jour...

Et oui, toutes les bonnes choses ont une fin ! Aujourd'hui, c'est le cœur gros et une larmichette à l'oeil que je vous présente notre dernier article en Nouvelle Zélande.

Un article qui conclu une année formidable dans une contrée qui ne l'est pas moins. Une année qui nous aura énormément apporté à tous les niveaux, et qui nous laissera profondément attaché à ce qui est probablement le plus beau pays que nous ayons jamais traversé.

Une année que nous avons achevée comme il se doit, dans la plus pure tradition de son déroulement.

Nous avons débuté notre grand retour sur l'île nord et nos dernière semaines néo-zélandaises par une bien belle rencontre avec des voyageurs comme on en fait plus, avant de faire un petit tour parmi certaines des régions que nous avions mises de côté la première fois que nous avions sillonné l'île. Entre un petit tour à Wellington, le cap Palliser et ses phoques, Napier la ville-art-déco et les formidables plages du Pacific Coast Highway, nous nous sommes remplis une dernière fois les mirettes des sublimes étendues néo-zélandaise.

Et puis... nous nous trouvâmes forts dépourvus quand la bise fut venue... L'île nord s'est mise à nous cracher tout ce qu'elle avait de flotte sur la poire, et nous avons du reconsidérer nos derniers plans dans le pays.

Une seule chose nous manquait pour parachever dignement cette année formidable : un petit volontariat comme on les aime!

Nous avons mis moins de 24 heures à trouver un plan travail-contre-gîte-et-couvert qui nous à permis de réaliser l'un des meilleurs volontariat que nous ayons fait au cours de notre voyage, en compagnie de gens formidable afin de conclure en beauté notre grandiose vadrouille au pays des kiwis.

Bonne lecture!


Retour sur l'île nord : Belles rencontres humaines et marines, musée, et escapades peterjacksoniennes


Nous avons fait nos adieux à l'île sud, et nous voguons à présent vers Wellington, la capitale, secoués par la perspective du départ tout proche, la nostalgie de voir arriver la fin de notre voyage en Nouvelle Zélande, notre obsédante impatience de rejoindre le Chili...

La fantastique vue sur les fjords du nord de l'île sud pendant la traversée en ferry nous avait échappée la dernière fois à cause de la nuit, et aujourd'hui nous ne pouvons toujours pas en profiter à cause d'un dense brouillard... Enfin bon, nous en aurons déjà vu pas mal, des jolies choses!

Sur le pont supérieur du bateau qui nous ramène sur l'île nord de la Nouvelle Zélande, nous furetons un peu sur le net pour établir un squelette de programme pour les jours qui viennent. Nous sommes le 15 septembre, et nous devons décoller d'Auckland le 6 octobre. Entre temps, nous voulons passer au cap Palliser, une langue de terre qui s'étale à l'est de Wellington et qui abrite de jolies falaises, des colonies de phoques, et occasionnellement la Putangirua Pinnacles Scenic Reserve, qui a servi de lieu de tournage pour les scènes de la route de Dimholt du Seigneur des Anneaux. Ensuite, nous souhaitons tirer vers le nord-est, pour rejoindre la côte est et passer Napier, au bord de la Hawks Bay, célèbre pour son architecture art-déco, avant de suivre le fameux Pacific Coast Highway sur quelques centaines de bornes pour explorer les côtes de l'East Cape, qui sépare la Hawks Bay de la Bay of Plenty. Après ça, nous nous tâtons encore à rejoindre un autre lieu que nous n'avons pas encore passé mais qui nous fait de l'oeil depuis un bon moment : la région du Mont Taranaki, sur la côte ouest cette fois, pour éventuellement y faire un dernier trek. Malheureusement, les prévisions météos sont déplorables, et nous aviserons au fur et à mesure.

Mais avant ce joyeux petit programme, une petite étape nous attend à Wellington : Morgane et Tony, un couple de voyageurs franco-espagnols, nous ont contacté il y a peu pour nous proposer de passer la soirée avec eux à notre arrivée dans la capitale. En voyage depuis pas mal de temps eux aussi, ils tiennent le blog From Wonderland, et nous nous suivons depuis plusieurs années maintenant. Ils travaillent et habitent à Wellington, et c'est toujours génial quand le hasard des routes de chacun permet de rencontrer des collègues!

Au rayon des visites, nous avons aussi prévu de passer voir Paco. Notre ami a trouvé du travail dans une ferme laitière, juste en-dessous d'Auckland, et nous voulons passer le voir avant de partir.

Une autre surprise nous tombe dessus pendant la traversée : Léonore a posé une annonce pour vendre la voiture la veille, et nous recevons déjà une proposition! Il s'agit d'un voyageur français nommé Tristan, bien emballé par l'idée de récupérer une voiture pour 1000$. Oui, considérant la somme que nous avons mise de côté pendant nos semaines de turbin à la nursery, nous avons décidé de brader la voiture afin de faire un heureux tout en nous en débarrassant rapidement.

Notre acheteur habite à Waiouru, juste au sud du Tongariro National Park. Nous devrons passer dans le coin après notre virée autour de l'East Cape, sur notre route pour aller dans le mont Taranaki, nous sommes le 15 septembre, et nous prenons rendez-vous pour le 24, ce qui devrait nous laisser assez de temps pour tirer la côte est. Et voilà. Si ça se trouve, la bagnole est partie, et en moins de 24 heures en plus! Au point au nous en sommes, nous n'hurlons plus de joie : vu la facilité avec laquelle s'est gérée cette année, plus grand chose ne nous étonne!

En revanche, la vente prochaine de la voiture signifie que nous bougerons à coup de pouce durant nos deux dernières semaines néo-zélandaises. Nous allons terminer comme nous avons commencé, à grand coup d'autostop!

Nous débarquons à Wellington et mettons le cap vers les hauteurs, en direction de l'appartement de Morgane et Tony. La dernière fois, nous n'avions vu de Wellington que le centre-ville et ses hauts immeubles, mais nous avons la joie de constater que le CBD est tout petit : en deux kilomètres à peine, nous nous retrouvons dans de petits quartiers beaucoup moins imposants.

C'est Morgane qui nous accueille, Tony est encore au travail. Les deux bossent dans la restauration, suivant les horaires qui vont avec...

Nous commençons à papoter vers 19h. Nous arrêterons vers 2h du matin... C'est vous dire le nombre d'histoires que nous avons tous à partager et la bonne entente qui règne! Nos amis ont roulé leur bosse un peu partout sur la planète, en Asie, et surtout en Amérique du sud, à propos de laquelle ils nous abreuvent de nombreux renseignements qui nous seront bien utiles sur place.

Cela faisait un petit moment que nous n'avions pas rencontré de voyageurs si proches de nous dans leur façon de voyager : adeptes du pouce, ne jurant que par le slow travel, friands des volontariats et de toute autre méthode qui permet de s'immerger plus en profondeur dans un pays... Nous passons une formidable soirée.

Nous nous quittons au matin. Nos deux compagnons doivent aller travailler, et de notre côté nous voulons faire un petit tour dans Wellington. Comme je l'ai très souvent dis, nous ne sommes pas venus en Nouvelle Zélande pour visiter ses villes, mais maintenant que nous sommes là...

Nous voulons surtout passer voir le célèbre musée national de Nouvelle Zélande Te Papa Tongarewa, ou plus simplement Te Papa, apparemment le plus intéressant et complet du pays. L'un des plus gratuits aussi...

Notre petite balade à pied jusqu'au musée nous permet de découvrir un peu Wellington. La capitale a la réputation d'être très venteuse, et nous ne pouvons que le confirmer : il souffle un vent fort, permanent et épuisant. En revanche, nous sommes surpris de découvrir une ville somme toute très calme et paisible, agréable à parcourir à l'exception de son minuscule CBD.

Nous avons prévu la journée pour parcourir Te Papa, et il nous faudra bien ça : le musée, dont les collections s'étalent sur 6 étages, est immense, et nous y passons plus de 5 heures! Entre l'histoire géologique du pays, le simulateur de tremblement de terre, la galerie d'histoire naturelle et ses centaines d'animaux, l'énorme et grandiose collection d'art maori, les expositions relatant la colonisation du pays depuis l'arrivée des premières pirogues polynésiennes jusqu'aux européens, il y a de quoi faire! Comme prévu, la visite fait la part belle à l'intéractivité, et de nombreuses petites activités ludiques permettent de casser le répétitif schéma marche-lecture de panneau explicatif.



Enorme, intéressant, amusant, complet, varié, gratuit (gratuit!)... On ne peut que recommander la visite du Te Papa.

Nous faisons nos adieux à la capitale en début d'après-midi.

Prochain étape : le cap Palliser et la Putangirua Pinnacles Scenic Reserve. Le tout se trouve à quelques 140 bornes à l'est de Wellington, et il faut environ 2h20 pour rallier le cap. Vu l'heure, nous n'allons pas nous lancer dans l'exploration des lieux aujourd'hui, et nous nous contenterons de rejoindre un petit camping gratuit situé dans les environs, la Ngawi Camping Area.

En chemin, nous faisons une pause dans le Kaitoke Regional Park, à une cinquantaine de bornes de Wellington. Depuis longtemps, j'attends de découvrir ce parc, qui comprend d'incroyables forêts, des rivières aux eaux cristallines... Ainsi que tout le site de tournage des scènes de Rivendell et de Fondcombe du Seigneur des Anneaux!

Le Kaitoke a en effet servi de décors pour accueillir la cité du vénérable Elrond. Il s'agit du seul site de tournage du pays qui fait l'objet d'un aménagément informatif axé sur les films et qui soit clairement indiqué et accessible depuis la route.

Léonore ne me tient plus quand nous arrivons sur place et découvrons des piliers de bois sculptés de motifs elfiques qui marquent l'entrée d'un petit chemin s'enfonçant dans les sous-bois.



Bon, la marche dans la forêt d'une trentaine de minutes est plutôt sympa, mais sans plus, et comme dans la quasi-totalité des lieux de tournages des deux trilogies de Peter Jackson en Nouvelle Zélande, on a bien du mal à s'y représenter les scènes du film tant les décors originaux ont été retouchés numériquement, voir assemblés de toute pièce... Par exemple, nous apprenons durant notre balade que dans la Communauté de l'Anneau, si les arbres et les alentours des bâtiments de Fondcombe ont été laissés tels quels, l'arrière-plan de la forêt quant à lui provient du Fiordland et a été incrusté après coup...

Bref, le coin n'a pas grand-chose à voir avec le rendu visuel du film. Du moins jusqu'à ce que nous tombions là-dessus et que je m'effondre presque dans un gémissement de béatitude :



Bon, là encore, ce n'est pas l'arche d'origine que vous pouvez voir dans la Communauté, seulement une reproduction placée au même endroit après le tournage. Ce qui ne m'empêche pas de frissonner de la tête au pied et d'avoir l'impression d'achever un pèlerinage quand je passe en-dessous... Que voulez-vous, on ne se refait pas!

Nous nous mettons ensuite en route vers le cap Palliser. Il pleut à verse, mais la tourmente s'arrête quand nous arrivons au petit village de Ngawi, juste avant le cap, pour y découvrir un petit espace d'herbe juste à côté de la route où il est possible de passer la nuit. Nous terminons la journée face au Pacifique, à quelques mètres des vagues, apercevant au loin les côtes de l'île sud...

Au matin, sous le crachin, nous laissons la tente montée et partons vers le nord pour rejoindre la Putangirua Pinnacle Scenic Reserve, à une vingtaine de kilomètres de Ngawi.

La réserve est fameuse pour ses impressionnantes formations géologiques. Il y a 7 à 9 millions d'années, quand toute la zone était une île, des éboulements ont apporté des graviers et des rochers sur la côte. Lorsque le niveau de l'eau est descendu, la rivière qui s'est formée a creusé l'ancienne côte, exposant ces couches de sédiments à l'érosion par le vent et la pluie. Aux endroits où s'étaient déposés des rochers plus résistants que les couches de sédiments situées en-dessous, l'érosion a provoqué l'apparition de piliers de type cheminées de fée, entre autres pinacles et canyons.

Il en a résulté un décors si particulier que Peter Jackson l'a choisit pour tourner les scènes de la route de Dimholt du Retour du Roi.

Une petite balade tranquille d'une heure ou deux permet de remonter le lit de la rivière puis de grimper à travers la forêt pour atteindre un joli point de vue sur les formations rocheuses.



Nous nous demandons s'il est possible d'aller voir de plus près la chose... Nous suivons un petit sentier qui redescend avant de bifurquer pour remonter le long d'un pierrier. Après quelques minutes, nous voilà au coeur du site!



Il s'avère qu'il est parfaitement possible d'explorer librement l'intégralité du coin! Je pars ainsi fouiner dans tous les canyons que je croise, remontant éboulis et pierriers, m'engageant dans la moindre interstice que je découvre. Entre le gris sombre des parois et des tours de pierre étranges qui m'entourent, les nuages noirs qui roulent dans le ciel et le petit crachin qui n'en finit pas de tomber, l'atmosphère générale est parfaitement dans le ton du Chemin des Morts!



Léonore attend très patiemment que j'assouvisse mes pulsions de gros fan transit, puis nous commençons à descendre le lit de la rivière pour retourner à la voiture.



Alors autant je pense que si vous n'êtes pas fan du Seigneur des Anneaux, vous ne raterez rien en faisant l'impasse sur Rivendell, autant la Putangirua Pinnacle Scenic Reserve présente un intérêt certain et se parcourt agréablement. Une belle découverte, qui nous montre encore un peu plus de variété dans ce formidable pays!

Nous nous dirigeons ensuite vers le sud pour rejoindre le cap Palliser. La route, une fois passé Ngawi, n'est plus goudronnée, et traverse de belles étendues de campagne vallonnées surplombées de hautes falaises.

Nous nous arrêtons une première fois quand nous apercevons quelques phoques à fourrure étalés sur les rochers de la côte. Une bonne surprise : nous savions qu'il était possible d'observer des phoques par ici, mais pas que nous pouvions tomber sur de véritables colonies!

Mais bon, les phoques en Nouvelle Zélande, c'est un peu comme les singes en Asie : au bout d'un moment, on ne s'émeut plus vraiment de la découverte d'un énième spécimen! Ces voyageurs blasés que nous devenons...



Mais le pays a encore plus d'un tour dans son sac quand il s'agit de nous surprendre! La vrai, la grande, l'incroyable découverte nous attend en effet un peu plus loin... Nous marquons un deuxième arrêt lorsque nous croisons un panneau indiquant un espace protégé sur une centaine de mètres de côte composés de petites falaises et de grèves rocheuses, sans trop savoir ce qui nous y attend...

Nous avançons un moment, contournant quelques gros rochers et éperons, et nous découvrons la raison d'être de cette petite réserve. Alors je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais dans le récit de notre première visite à Kaikoura, je vous expliquais que nous trouvions amusant de nous être autant extasiés dans le Farewell Spit devant 5 ou 6 phoques qui se courraient après alors qu'à Kaikoura nous sommes tombés sur des colonies d'une trentaine d'individus... Et bien c'est un peu le même genre de réflexion qui nous traverse l'esprit quand nous découvrons ce qui se cache dans la réserve : et dire que nous avons fondu devant le spectacle d'un seul bébé phoque dans la péninsule d'Otago...

Les yeux écarquillés et un interminable "oooooooh" dans la gorge, nous découvrons ce qui est probablement le noyau central, la source originelle de tout ce qui est adorable et trognon sur la planète. L'endroit présentant probablement la plus grande concentration de mignonitude du monde : une véritable nurserie de bébés phoques.

Il doit y en avoir une cinquantaine, qui s'amusent sur les rochers, dorment collés-serrés les uns contres les autres, se déplacent d'une démarche pataude...

L'endroit est probablement la réponse à la question de la violence dans le monde : placez n'importe quel psychopathe ou dictateur devant ce truc, et il ne vivra plus que pour répandre l'amour et la compassion à travers le monde



Nous restons plus d'une heure à nous extasier devant ce réservoir de petites bestioles toutes mignonnes, un sourire benêt aux lèvres. Nous avons l'impression d'avoir atteint un absolu, un genre de limite indépassable, un peu l'équivalent en choupinitude de la vitesse de la lumière : jamais plus nous n'aurons de spectacle aussi adorable sous les yeux.

Une colonie de bébés phoques... On en voit de ces choses!

Nous nous arrachons à la réserve pour grimper vers le phare qui marque l'extrémité du cap et apprécier la vue depuis son pied.



Nous pensions repasser une nuit au camping de Ngawi avant de nous mettre en route vers la côte est et Napier, mais il est tôt, nous sommes gonflés à bloc, et nous décidons de partir directement.


Napier? Mouai...


Nous passons récupérer la tente et mettons les voiles vers le nord-est pour rejoindre un nouveau camping gratuit, le Kumeti Camping Ground, situé aux alentours de Dannevirke, à 120 kilomètres de Napier. Nous comptons y passer la nuit pour rejoindre la ville demain matin.

En chemin, devant le paysage qui défile, nous devons nous rendre à l'évidence : nous sommes de retour sur l'île nord! Des collines, des prés, des collines, des prés, parfois une petite forêt qui rappelle seulement que toutes les autres ont été rasées pour créer des zones de pâture... Ce n'est pas moche, mais c'est toujours pareil, et après dix mois passés sur la belle, la grandiose île sud, ça fait bizarre de retrouver un décors qui ne change pas tout les kilomètres en emportant à chaque fois un morceau de rétine!

Nous atteignons le camping en début de soirée, après une longue route, et nous posons rapidement.

Au matin, la météo déjà bien capricieuse se met vraiment à partir en vrille. Pendant que Léonore profite d'une grasse matinée, j'observe un ciel qui voit se succéder tous les temps possibles en quelques minutes : de gros nuages noirs roulent dans le ciel, des trombes d'eau s'abattent, cinq minute plus tard le soleil brille, puis le vent se met à souffler et la tempête reprend.

Après une petite heure de route, nous débarquons à Napier. La ville en question est réputée à travers le monde entier pour une raison plutôt inhabituelle : en février 1931, un tremblement de terre ravagea la ville, rasant une bonne partie de son centre. Par la suite, ce dernier fut rebâti suivant le modèle architectural en vogue à l'époque, à savoir le fameux style art-déco. Il en résulte une ville atypique aux bâtiments richement fournis en colonnades carrées et autres promontoires et bordures épurés tout en symétrie.

Pour être francs, nous passons à Napier plus par curiosité que par réel intérêt, histoire de voir ce que tout ça donne. Dès notre arrivée, nous constatons que la réputation du bled, surnommé "la ville art déco", est largement surfaite : les abords du coin sont sommes toutes très basiques. Et puis nous débarquons dans le centre-ville, et effectivement, le spectacle est plutôt intéressant, et nous avons l'impression de remonter dans le temps.

Napier se trouve sur la côte, et nous rejoignons la plage pour grignoter un morceau face au Pacifique. Nous nous mettons à discuter, et nous passerons finalement près d'une heure assis sur les galets, le regard perdu au loin, par-dessus les vagues. De l'autre côté de cette immense étendue d'eau, juste en face de nous, se trouvent les côtes chiliennes! Nous passons un bon moment à parler de l'année qui vient de s'écouler, de l'Amérique qui nous tend les bras, et du retour qui va suivre... L'un de ces moments où nous prenons conscience de l'envergure qu'a pris notre voyage. Voilà presque un an que nous sommes en Nouvelle Zélande, et dans moins d'une semaine, nous fêterons le quatrième anniversaire de notre départ... 

Nous partons ensuite pour un petit tour du centre-ville dont l'architecture a fait la renommée du coin. Comme dit plus haut, sans être transcendant, c'est assez étonnant!


Fouinant à droite à gauche, nous finissons par découvrir qu'il est possible de faire une balade de deux heures qui permet visiblement de faire le tour des spots intéressants de la ville.

Le départ de l'itinéraire se fait près de la côte. Une petite montée nous fait traverser un jardin avant de nous amener dans une petite allée toute en verdure qui grimpe vers les hauteurs de la ville. Les vingt premières minutes de la balade sont plutôt sympa !



Le problème, c'est l'heure et demi qui suit... Nous émergeons de la forêt pour nous retrouver perchés sur une colline, face à un point de vue assez spécial sur les montagnes au loin, la mer... et un superbe port industriel.



Nous constatons rapidement que le chemin qui descend de la colline arrive en plein sur le port en question, avant de suivre une portion de côte plutôt moche et décrépite, aux allures de zone industrielle. Nous débarquons ensuite dans un coin qui n'a plus seulement l'allure d'une zone industrielle, mais qui est en est belle et bien une ! Exquise cette balade décidément...

Nous nous marrons, parce qu'il vaut mieux en rire qu'en pleurer, en nous disant que nous avons vraiment bien fait de nous embarquer là-dedans. Je croyais que l'itinéraire allait nous faire passer les principaux spots art-déco de la ville, et au final il nous fait passer ses principaux spots qui ne ressemblent à rien !

Tout n'est pas à jeter non plus : nous croisons quelques grafs pas mal du tout qui ornent les murs de certaines usines...



...avant de découvrir un petit port de plaisance beaucoup plus agréable à parcourir que l'immondice aperçue plus tôt...



...et nous arrivons tout de même à dénicher quelques jolis bâtiments illustrant bien le style architectural de la ville.



Enfin bon, pas de quoi fouetter un chat non plus.

Le léger regain d'intérêt suscité par le street art et les quelques bâtiments typiques que nous avons découvert disparaît bientôt lorsque nous nous retrouvons à nouveau dans une zone industrielle... Nous vérifions la carte du tracé, et oui, nous sommes bien sur le bon chemin. J'aimerais beaucoup rencontrer la vedette qui a établi cette itinéraire. Le gars doit vraiment détester Napier pour embarquer les gens dans une balade aussi déprimante !

Nous finissons ce qui est sans doute la promenade la plus pourrie que nous ayons faite en Nouvelle Zélande par la traversée d'un quartier résidentiel qui nous rappelle beaucoup Chassieu, avant de retomber dans le centre-ville avec la sensation d'avoir proprement gâché deux heures de notre vie.

Et puis nous n'allons pas y passer la nuit non plus ! Nous faisons quelques courses avant de mettre les voiles vers le nord. Vous l'aurez compris, Napier ne nous laissera pas un souvenir impérissable, et au-delà de la curiosité que représente l'architecture art-déco du centre-ville, il n'y a pas grand-chose qui mérite véritablement le détour. Si vous avez le temps et que vous passez dans le coin, faites-y un tour, sinon zappez la chose sans hésiter !


Le cap est


De notre côté, nous nous mettons en route pour le dernier spot que nous voulons passer dans la région : l'East Cape, Cap Est en français, une pointe de terre qui sépare la Bay of Plenty, au nord, de la Hawks Bay, au bord de laquelle se trouve Napier. Le cap se visite en suivant une portion du Pacific Coast Highway, une route scénique qui court d'Auckland jusqu'à Napier, entre les villes de Gisborne et d'Opotiki. Sur les quelques 330 bornes qui suivent les côtes du Cap Est se trouvent de nombreuses plages, plein de petits villages, des étendues de campagnes apparemment sacrément jolies, des phares, des points de vue, et tout un paquet de petites criques, baies, pontons, entre autres joyeusetés maritimes.

Le tour du cap, pour nous, présente un petit côté bouclage de boucle : c'est Craig qui nous a recommandé cette virée il y a presque un an de cela, tandis que nous nous régalions d'un filet de snapper grillé chez lui, seulement quelques heures après avoir atterri à Auckland. Pour ceux qui ont oublié ou qui ne connaissent pas celui qui nous a offert l'un des plus beaux accueils que nous ayons connu dans un pays, voyez ici. Un an... Qu'elle est passée vite cette année.

Avec notre visite de Napier, la journée est déjà bien entamée, et nous visons seulement un endroit ou dormir ce soir. Coup de chance, la petite ville de Gisborne, porte d'entrée du Cap Est située à 214 kilomètres de Napier, dispose d'une aire de camping gratuite. Les règles y sont un peu particulière : il n'est pas nécessaire pour y dormir d'être équipe d'un véhicule self-contained, en revanche il est interdit d'y poser une tente ! Nous allons devoir dormir dans la voiture.

Nous atteignons Gisborne à la tombée de la nuit, rejoignons le camping, qui n'est en fait qu'un simple parking posé à quelques mètres d'une plage magnifique, et aménageons la bagnole pour la nuit.

Nuit qui se révélera très agréable ! Les sièges de la voitures se baissent complètement, et grâce à notre taille de lilliputien, nous pouvons nous étaler sans nous prendre les pieds dans le volant ou le tableau de bord. Nous chérissions déjà pas mal notre increvable véhicule, et voilà qu'aujourd'hui nous découvrons qu'en plus il est possible de dormir relativement confortablement à l'intérieur !



Nous avons décidé de prendre une journée à Gisborne avant de nous lancer dans l'exploration du Cap. Plus que par besoin de repos, cette décision est surtout due au temps exécrable qui sévit dans toute la région. Au réveil, il pleut. Quand nous rejoignons la bibliothèque de Gisborne pour bosser un peu sur le blog, il pleut encore et toujours, et quand nous sortons pour pique-niquer, la chose a dégénéré en véritable tempête ! La tourmente dure jusqu'en fin d'après-midi, et laisse place à un soleil éclatant en l'espace de quelques minutes... De retour au camping, nous profitons de l'accalmie pour admirer la vue sur l'océan.



Après une nouvelle nuit dans la voiture, nous nous engageons sur la route côtière du cap est.

Nous avons prévu de ne consacrer qu'une seule journée à notre exploration du cap. D'une part parce qu'il n'y a que 330 kilomètres à parcourir, et puis parce que bon, la virée en voiture type route côtière-enchaînement-de-plages, ça va bien 5 minutes...

Au départ de Gisborne, nous rejoignons tout d'abord l'Okitu Bush Scenic Reserve, située à une dizaine de kilomètres. Il s'agit d'un petit parc forestier qui surplombe l'océan, établi dans les années 70 pour servir de site de conservation et accueillir différentes espèces végétales natives du pays. Une petite boucle d'une trentaine de minutes permet de se balader dans le sous-bois et de profiter de quelques sympathiques points de vue sur la côte.



Nous rejoignons ensuite la Tolaga Bay, à 36 kilomètres de Gisborne, fameuse pour ses hautes falaises qu'un immense quai permet d'approcher.



A 50 kilomètres de Gisborne, une route de gravier nous entraîne à travers de grandioses étendues de collines et de pâturages jusqu'à celle que beaucoup considèrent comme la plus belle baie du Cap Est : Anaura Bay. Et il faut admettre que...



Nous débarquons sur la plage pour profiter d'un décors de carte postale!



Nous reprenons ensuite la route pour passer la baie de Tokomaru...



...avant de nous diriger vers le point le plus à l'est du pays, l'East Cape en tant que tel.

Nous avons parcouru à peu près la moitié de la distance du tour du cap. Et jusqu'à maintenant, et bien c'est plutôt la bonne surprise cette histoire! Là où nous n'attendions qu'un enchaînement de plages rapidement lassant, nous trouvons ce qui paraît être une région coupée du reste du pays, à l'écart, isolée sur son petit bout de côte. Les étendues de campagnes et de pâturages succèdent aux forêts et aux jungles, les plages de sables dorées laissent parfois la place à des falaises... Bref, c'est varié, assez sauvage, et surtout presque complètement désert! Seuls quelques villages ponctuent la route, aux petites maisons de bois perdues dans la verdure. Nous ne croisons presque personnes, exit les énormes bus des tour-opérateurs, les files de camping cars et de minivans, nous sommes tranquilles. Les habitants du coin, principalement maoris, se révèlent très hospitaliers : à chaque fois que nous marquons un arrêt, nous sommes accueillis par des sourires, et les rares personnes que nous croisons nous saluent systématiquement avec enthousiasme avant de tailler un peu le bout de gras.

Cadre original et magnifique, accueil chaleureux... Nous apprécions!

Nous atteignons le village de Te Araroa, à 174 kilomètre de Gisborne, d'où part la route en terre qui quitte le Pacific Coast Highway pour s'enfoncer dans la pampa en direction du Cap Est à proprement parler. La route en question traverse de belles étendues de campagne vallonnées bordées d'un côté par l'océan, de l'autre par des falaises et des collines escarpées, avant de s'arrêter au pied d'une pente boisée qui grimpe en direction du phare coiffant le cap.



Une petite ascension d'une vingtaine de minutes à travers la jungle sur un sentier plutôt bien aménagé (comportant tout de même quelques 700 marches!) nous amène au sommet des falaises, à 154 mètres au-dessus du Pacifique.



Au pied du phare, nous nous asseyons dans l'herbe pour grignoter un morceau face aux vagues. Un pique-nique tinté d'un brin de symbolisme : le East Cape est en effet le lieu le plus à l'est de la France sur lequel nous poserons nos derrières durant ce voyage... Notre grande course vers le soleil levant, débutée le premier octobre 2013, s'achève ici. Après ce point, nous attaquons le seconde moitié du globe, et nos pas vont globalement ne faire que nous rapprocher de la France.



Après cette pause contemplative riche en réflexions existentielles, nous redescendons. L'après-midi est déjà bien entamé, la fatigue commence à poindre, et nous achevons notre tour du cap en ne faisant qu'un ou deux arrêts supplémentaires sans grand intérêt.

Nous achevons notre virée sur la côte avec la même impression de bonne surprise qui nous a suivi toute la journée : le East Cape, c'est de jolies plages, mais pas que, et le coin présente suffisamment d'intérêts et d'originalité pour occuper correctement une bonne journée!

Nous terminons dans la petite bourgade d'Opotiki, au bord de la Bay of Plenty, et mettons directement le cap vers le sud pour rejoindre un endroit où passer la nuit. Nous visons le Boulder Camping Ground, une aire de camping du DOC gratos située dans une réserve naturelle, l'Urutawa Conservation area. L'accès à la réserve se trouve à une quinzaine de kilomètres au sud d'Opotiki, et le camping se trouve au bout de quelques 10 bornes supplémentaires d'une fatigante route en gravier. Une fois aux abords du camping, nous ne sommes pas encore tirés d'affaire : le site se trouve en bord de rivière, en contrebas du chemin, et lorsque nous débouchons sur la dernière pente qui y descend, nous tombons sur un énorme panneau indiquant "accès camping 4x4 uniquement"... Flûte!

Je part en reconnaissance dans la pente qui mène au camping, et découvre effectivement un énorme trou de deux bons mètres de long au beau milieu de la route. Des planches traînent à côté, et nous faisons une tentative de passage après avoir construit un pont de fortune avec les planches et quelques pierres... Et ça passe! Bon, le bas de caisse ronchonne un peu, mais le raclement qu'il émet se confond aisément avec le vent qui souffle dans les arbres, et nous décidons qu'il ne s'est rien passé. Une minute plus tard, nous débarquons dans l'un des plus mignons petits campings gratuits que nous ayons occupé, encaissé entre deux collines boisées, aux grands emplacements herbeux perdus au milieu de la forêt, juste au bord d'une petite rivière. Un petit paradis, qui plus est complètement désert!

Nous posons la tente et ne tardons pas dîner, après quoi je m'offre un petit bain dans la rivière à la tombée de la nuit.

Nous nous apprêtons à nous coucher et je verrouille la voiture, en laissant mon regard traîner un peu sur les étoiles qui apparaissent entre les arbres, droit devant moi. Puis... Attendez, que font des étoiles ici? Il y a une énorme colline qui s'élève droit devant moi, comment je peux voir des étoiles derrière les arbres à ma hauteur alors que nous sommes au fond d'une gorge?!

J'avance, et les étoiles se multiplient, toujours à ma hauteur. Derrière les troncs, il y en a de plus en plus! Quelques mètres plus loin, je tombe sur la raison de tous ces scintillements : le pied de la colline est couvert de vers luisant sur trois ou quatre mètres de haut!

Des milliers de minuscules points verts parsèment toute le bas de la pente! J'appelle Léonore, et nous passons un bon moment à suivre le pied de la colline, crapahutant un peu dans les buissons et contournant les arbres, les yeux écarquillés devant ce véritable ciel étoilé vertical.

Et la nuit nous offre un autre visiteur nocturne : après nous être arrachés au spectacle des vers luisants, sur le chemin de la tente, nous tombons nez-à-nez avec un opossum. Nous nous dévisageons, nous disant qu'il est bien dommage qu'un machin aussi trognon soit à l'origine d'un véritable désastre écologique en Nouvelle Zélande depuis que l'espèce a été ramenée par erreur d'Australie.

Nous commençons à nous dire que dame nature essaie visiblement de nous faire passer un message. Des milliers de vers luisants qui nous offrent un spectacle digne des grottes les plus belles du pays? Un opossum curieux? Dans un élan d'espoir un peu fou, nous sentons venir le kiwi, comme une conclusion de la soirée qui sur le coup nous paraît digne et logique. Nous marchouillons un moment dans les alentours et au bord de la rivière, les frontales en mode rouge, mais bien évidemment nous n'observons pas le moindre kiwi. L'oiseau emblématique de Nouvelle Zélande restera le grand absent de notre séjour dans le pays...


Temps pourri et plan de secours


Au matin, le 21 septembre, nous mettons le cap sur Taupo. Nous voulons établir le camp sur le camping gratuit que nous avions occupé la dernière fois que nous sommes passés dans le coin, situé à deux ou trois kilomètres du centre-ville, et nous poser quelques jours pour profiter de la bibliothèque et cravacher sur le blog. Il s'avère que je nourris l'ambition de boucler tous les articles de Nouvelle Zélande avant notre décollage pour l'Amérique du Sud (vous pouvez apprécier aujourd'hui la fulgurante réussite de ce projet...).

Ensuite, suivant la météo, nous mettrons le cap sur la côte ouest et le mont Taranaki. Voilà un bon moment que nous voulons parcourir le fameux trek de trois jours autour de la célèbre montagne, mais sur le coup nous nous sentons un peu las, d'autant plus que l'impression de fin de voyage qui nous colle à l'esprit depuis que nous avons quitté l'île sud ne facilite pas l'élaboration de nouveaux projets ambitieux de grandes randonnées sauvages. Et puis n'oublions pas que nous devons normalement vendre la voiture dans quelques jours, et que si nous voulons rejoindre la côte ouest, ce sera forcément en pouce!

En conséquence de quoi nous avons décidé il y a peu que ce projet ne se réalisera que sous une météo absolument parfaite. Nous n'avons plus le coeur à lever le pouce, et encore moins à nous enfiler plusieurs jours de rando sous les averses.

Si les prévisions s'avèrent mauvaises, notre plan B n'est pas des plus glorieux mais nous permettra au moins de rester relativement à l'abri tout en bossant sur le blog et sur la prépa de la suite du voyage : nous resterons tout simplement au camping gratuit de Taupo. C'est tout. Nous n'avons pas pris la peine de réfléchir à un plan C.

Quoi qu'il en soit, juste avant de prendre l'avion le 6 octobre, nous passerons voir Paco dans sa ferme.

Oui, en cas de pluie, nos plans de secours secours sont assez limités, et il serait dommage de finir notre petit tour néo-zélandais d'une manière aussi inactive si l'on considère la richesse de l'année qui vient de s'écouler! La motivation n'est pas vraiment au rendez-vous, mais encore une fois cela va faire un an que nous sillonnons ce petit pays, et nous commençons à en avoir fait le tour. Nous avons juste envie de terminer tranquillement, calmement, et de ne pas nous infliger d'épreuves pénibles avant de partir. Finir sur du positif, ou en tout cas ne pas finir sur du négatif. Nous pourrions trouver autre chose à faire bien sûr en cas de mauvais temps, mais nous n'y réfléchissons pas, comme si nous n'avions pas vraiment envie de trouver quelque chose à faire, que le fait d'y réfléchir ne nous vienne même pas à l'esprit.

Nous débarquons à Taupo en milieu de journée, sous un ciel noir et un crachin fatiguant, passons à la bibliothèque, et paf : la météo, déjà pas bien folichonne depuis que nous avons débarqué sur l'île nord, annonce une dégradation générale sur tout le pays pour les dix prochains jours. Quand nous faisons un tour sur le site du DOC pour passer voir les alertes concernant le mont Taranaki, nous tombons sur un véritable festival d'onglets rouge vifs. Inondations, rivières potentiellement infranchissables, montée des eaux brutales et coupant toute retraite... Bref, c'est la foire.

Et bien la question est réglée : nous allons nous poser au camping pour squatter Taupo. En chemin vers la sortie de la ville, l'ambiance est maussade, entre la grisaille, le crachin, les mauvaises prévisions, le désoeuvrement... Et puis nos réflexions connaissent soudain un regain d'optimisme : nous n'allons pas pourrir nos derniers jours en Nouvelle Zélande! Haut les coeurs, redressons la tête : nous allons effectivement nous poser deux ou trois jours à Taupo, jusqu'à la vente de la voiture, mais nous n'allons pas passer les quelques douze jours qui nous resterons alors à glander entre le camping et le centre-ville! Notre glorieux voyage néo-zélandais mérite mieux.

Nos méninges se remettent doucement à travailler, mais toute réflexion se retrouve balayée par le message que nous découvrons à l'entrée du camping, qui éteint en même temps notre petite flamme renaissante d'optimisme et bouleverse tous nos plans : le camping est fermé pour cause de réaménagements jusqu'au premier octobre. Pas moyen de nous infiltrer, les barrières fermant les chemins d'accès sont cadenassées, et nous apercevons des pelleteuses et autres machines de chantiers à pied d'oeuvre dans la boue...

La pluie tambourine sur le toit de la voiture, mais ne parvient pas à couvrir la longue plainte qui sort de notre bouche. C'est pas vrai... Notre plan B, déjà pas bien reluisant, tombe à l'eau. Nous devons trouver autre chose, quelque chose à faire sans voiture, quelque chose qui nous occupe sans nous obliger à rester sous la pluie battante annoncée pour les prochains jours.

Premier impératif : trouver un plan de secours pour dormir ce soir. Nous redescendons en ville, et repérons un camping gratuit du DOC, à une quarantaine de bornes de Taupo, au beau milieu d'une réserve forestière. Il faut apparemment plus de 40 minutes pour le rejoindre, ce qui annonce probablement de la piste en terre, et classe directement cette solution dans la catégorie des provisoires.

Nous notons l'accès au camping sur nos cartes, et tandis que la pluie et la nuit tombent, puis nous nous mettons en route.

C'est en chemin que nos cerveaux embrumés serons finalement touchés par la grâce : quand la solution concernant la fin de notre voyage en Nouvelle Zélande s'impose brutalement à nous, elle est si parfaite, et en même temps si évidente, commune et simple, que nous nous demanderons pendant longtemps comment nous n'avons pu y penser avant. Quelle est la chose que nous adorons faire dans les endroits où nous nous sentons bien, que nous avons effectué à de nombreuses reprises au fil du voyage, et que nous n'avons pas encore réalisé en Nouvelle Zélande alors que nous aimons profondément ce pays et qu'elle pourrait sans problème constituée la plus parfaite et grandiose conclusion à notre virée dans cette formidable contrée?

Un volontariat! Evidemment un volontariat! Des fois, je vous jure, y'a des branchements qui se font pas... Lorsque je relève la tête en gueulant presque le mot, Léonore lance un retentissant "ba oui, bien sûr!", et nous passons les vingt minutes suivantes à nous dire que des lanternes pareilles, faudrait les mettre sous verre...

Nous sommes tout requinqués par l'idée, qui aura mis une looongue journée à se frayer un chemin dans notre esprit démunis. Demain, nous nous lancerons dans la recherche d'un petit woofing, d'un petit plan coup de main contre gite et couvert, ou autre.

Voilà!

Après un bon moment passé à longer une sombre forêt, le chemin bifurque, et nous nous retrouvons à rouler au milieu de la jungle pendant une éternité, comme nous le craignions sur un chemin en terre rendu bien boueux par la pluie. Aucun panneau, aucun marquage n'annonce le camping. Je sors à la frontale sous la saucée pour explorer chaque moignon de chemin qui s'ouvre sur les côtés de la piste principale, et finalement nous découvrons l'aire de camping.

La soirée est enjouée. Nous avons un objectif!

Au matin, toujours sous la grisaille, nous retournons à Taupo et écumons tous les sites de petits job volontaires, Workaway, HelpX, Volunteer Base...

Pour rappel, hormis le dernier, tous ces sites sont payants : s'il est gratuit de consulter les annonces, il est en revanche nécessaire de donner une certaine somme par an pour pouvoir accéder aux détails permettant de contacter les annonceurs. Je ne vais pas revenir sur les raisons qui font que si nous sommes d'accord pour travailler sans être payés autrement que par de la nourriture et un toit au-dessus de la tête ou une petite place pour notre tente, nous refusons de donner de l'argent pour le faire. Du coup, quand nous passons par ces sites pour trouver un volontariat, nous devons ruser : il est facile, dans les annonces, de dénicher des indices qui permettent de découvrir le mail, la page facebook, voir le numéro de téléphone d'un hôte de manière détourné. La magie d'internet!

Côté organisation et timing, nous sommes le jeudi 21 septembre, et nous avons rendez-vous pour vendre la voiture à Tristan le dimanche 24, il faudrait donc que nous trouvions quelque chose qui nous permette de commencer dès le dimanche suivant pour ne pas nous retrouver en perdition sous la pluie sans véhicule. Enfin bon, faut pas trop rêver non plus... Au pire, nous nous mettrons en stand-by quelque part en attendant.

En ce qui concerne la durée du job, nous avons décidé de nous fier à notre foi dans l'humanité et dans le volontariat : nous allons donc forcément trouver quelque chose de formidable, et nous y resterons jusqu'au bout, à savoir le jour où nous devons passer voir Paco dans sa ferme laitière, qui se trouve être à moins de 200 bornes d'Auckland. Le jour en question? Là aussi, nous avons décidé de jouer l'audacieuse carte du dernier moment et de nous en remettre à l'efficacité du stop néo-zélandais et à la gentillesse des habitants. Ainsi donc, nous décollons le 6 octobre à 20h d'Auckland pour Santiago, et histoire de ne pas avoir à glander trop longtemps à l'aéroport, nous rejoindrons Paco le 5 au soir, pour partir le 6 au matin en stop. Faut oser José! Nous nous disons quand même que nous jouons un peu trop la chance sur ce coup là... Enfin nous n'y sommes pas encore. Il nous reste à trouver le job de nos rêves!

Et puis comme toujours, les choses se règlent d'elles-même de la façon la plus arrangeante qui soit. La bonne étoile qui nous aura combler tout au long de l'année nous fait son baroud d'honneur, façon bouquet final, et un nouvel enchaînement d'événements parfaits et de formidables coïncidences se déclenche...


Un final en beauté


Nous tombons sur une annonce qui retient particulièrement notre attention, posée par une certaine Michélé. Elle et son mari, Ralph, habitent en pleine campagne, aux alentour d'Ohakune, juste en-dessous du Tongariro national Park. Ils cherchent deux personnes pour effectuer quelques menus travaux sur leur grande propriété. D'après l'annonce, ils ont l'air d'être habitués à recevoir des volontaires, et leurs modalités de fonctionnement avec les gens qu'ils accueillent sont clairement établis, ce qui permet de savoir à peu près correctement ce qu'ils attendent d'eux et ce qu'ils proposent en échange : quatre à cinq heures de travail par jour pour une piaule et trois repas. Peu d'informations sont donnés sur les tâches à effectuer, mais il s'agit visiblement de ce genre de grand domaine où il y a toujours quelque chose à faire, entre s'occuper des quelques animaux, parmi lesquels des poules et des agneaux, effectuer des travaux de maintenance ou de jardinage, etc...  Nous ne savons donc pas précisément ce dont le couple a besoin, mais qu'importe. C'est surtout l'état d'esprit qui transpire de l'annonce qui nous fait tiquer : le ton est en parfaite adéquation avec ce que nous considérons comme les valeurs maîtresses et les objectifs principaux de tout job de volontaire : la libre découverte par les rencontres et l'échange, le partage de connaissances et d'expériences, la vie en communauté.

Reste le problème de contacter Michélé. Nous trouvons un moyen plutôt rapidement, et d'une manière assez tarabiscotée dont nous ne sommes pas peu fières : nous voyons dans l'annonce que le couple loue une petite cabine en Bed and Breakfast. De plus, l'annonce sur le site HelpX contient quelques photos du coin, et notamment de la cabine. Nous nous rendons donc sur le site Air Bnb, la principale plateforme de location Bed and Breakfast, et lançons une recherche des établissements situés aux alentours d'Ohakune. Nous passons le listing ainsi obtenu au peigne fin, et paf! Nous découvrons une location comportant les même photos que sur l'annonce HelpX. Il ne nous reste plus qu'à cliquer sur "contact"!

Nous envoyons un long mail, rassemblant nous nombreuses expériences de volontariat, ce que nous aimons dans le principes et pourquoi nous y croyons.

A partir de là, tout va très vite. Une heure plus tard le téléphone sonne, c'est Michélé! Nous papotons un bon moment, et le premier contact est excellent. Elle m'en dit un peu plus sur le travail que nous allons probablement devoir effectuer : sur leur propriété, Michélé et Ralph disposent de plusieurs hectares de forêt vierge native. Ils ont aménagé un sentier de randonnée de plusieurs kilomètres au travers, à l'usage des locataires de leur cabine, et après l'hiver agité qui vient de passer, il faut effectuer diverses tâches de maintenance sur le sentier pour le rendre praticable. Je lui dis que nous sommes dispo jusqu'au 5, ce qui lui convient parfaitement.

Je lui demande aussi si à tout hasard nous pouvons venir dimanche, en lui expliquant que nous devons vendre la voiture ce jour là. Il n'y a pas de problème, mais elle comptait nous loger dans la cabine, et celle-ci n'est pas dispo avant le lundi. Nous avons une tente? Et bien pas de problème!

Et les coïncidences improbables continuent : nous regardons où se trouve exactement le village où nous devons rencontrer Tristan, et rlan : il se trouve à seulement 20 kilomètres de Ohakune! Si c'est pas parfait tout ça!

Dans la foulée, Michélé nous renvoie un mail, nous annonçant que nous n'allons pas dormir sous la tente en cette saison, et qu'elle peut nous loger pour notre première nuit dans une petite piaule derrière leur maison. Nous pourrons ensuite déménager dans la cabine, libre pour la semaine suivante.

Emballé c'est pesé. En moins de deux heures. Je vous résume un peu tout ça : nous allons vendre la voiture le 24, avant de lever le pouce sur 20 petits kilomètres pour rejoindre Ohakune. Là-bas, le jour même, nous attaquons notre volontariat chez Ralph et Michélé, qui devrait durer jusqu'au 5, la veille de notre départ.

Alea jacta est. J'ai envie de dire que c'est incroyable, que nous sommes subjugués par la façon dont se déroulent les choses ici, mais pour être honnête nous ne nous en étonnons même plus. Au point où nous en sommes, nous pourrions trouver une valise contenant quelques centaines de milliers de dollars au milieu de la rue que nous hausserions à peine les sourcils!

Je vous dirais bien aussi que nous pondérons notre excitation, qu'il reste à voir si le job est sympa, mais ce serait mentir : nous sommes persuadés et convaincus que ça va être extraordinaire. Nous n'avons pas le moindre doute là-dessus. Parce que... Parce que c'est comme ça. Point.

Et bien voilà. Tout ça nous a bien pris la journée, et il est temps de nous replier vers un coin dodo, dans la joie et la bonne humeur. Nous rechignons à nous retaper le chemin de terre en pleine jungle pour aller dormir sur le spot d'hier, et nous dénichons un autre camping pour les deux nuits qu'il nous restent à passer avant de vendre la voiture et de rencontrer Michélé et Ralph. Il s'agit d'un espace mis gratuitement à disposition des campeurs par un pub-restaurant, la Tihoi Tavern. Le coin se trouve à seulement 30 minutes de Taupo, et est facile d'accès.

L'endroit est effectivement génial : un vaste espace d'herbe, des toilettes à disposition, le tout gratuit!

Nous occupons la journée suivante à régler les deux ou trois petites choses qui nous restent à faire avant d'aller nous paumer dans la cambrousse pendant une douzaine de jours. Ecriture, nettoyage de la voiture, tri des affaires, bouclage des sacs etc... Nous en profitons aussi pour faire quelques folies! Et oui, ne nous mentons pas : au-delà des aspects purement spirituels et humains, un boulot en volontariat constitue aussi une opportunité de réduire significativement ses dépenses. Avec les économies que nous allons réaliser durant notre séjour à Ohakune, nous pouvons nous permettre quelques investissement utiles. Nous en ferons un seul, le plus nécessaire après nos expériences passées et en prévisions des prochaines qui devraient nous conduire dans les hauteurs de la Cordillère des Andes : deux tapis de sol spécial rando, minuscules lorsqu'ils sont repliés, mais nous isolant du sol grâce à une rassurante couche d'air de 6 centimètres d'épaisseur une fois gonflés! A 140 balles le tapis, ils ont intérêt à être efficace... Ca y est, nous avons des tapis de sol efficaces et transportables! Il était temps...

Le soir venu, nous retournons au camping, et nous prenons un verre au pub histoire de remercier l'établissement de son accueil. Nous sommes en pleine soirée d'élection, tout le monde a les yeux rivés sur la télé, et nous bénéficions des explication et des commentaires des habitués du bar. Intéressant!

Le lendemain, au réveil, nous papotons un peu avec nos voisins de camping : Zoro, un estonien en vadrouille pour quelques mois dans le pays, et une fille avec qui il partage son van depuis quelques semaines. Zoro est un voyageur de la même espèce que nous, sans programme, sans objectifs, qui voyage au gré de ses envies depuis des années. Il est passé comme nous en Turquie et en Iran, et comme à chaque fois que nous rencontrons quelqu'un qui a eu la chance de visiter ce que nous considérons comme les deux pays les plus accueillant au monde, les anecdotes sur les rencontres incroyables et les démonstrations fantastiques d'hospitalité que chacun y a vécu déclenchent rires et bouffées de chaleur dans la poitrine! Nous parlons de nos futures vadrouilles, et surprise : Zoro atterrit au Chili seulement deux jours après nous! Nous nous promettons de nous retrouver à Santiago pour boire un verre de l'autre côté du Pacifique.

Et puis l'heure est venue : nous mettons le cap vers Waiouru.

Notre route nous fait traverser le Tongariro National Park, et nous marquons un petit arrêt pour passer voir le dernier spot de tournage du Seigneur des Anneaux du voyage : les Tawhai Falls, aussi connues sous le nom de... Gollum's Pool. Les amateurs aurons devinés qu'il s'agit du site où a été tourné la fameuse scène du lac interdit dans Les Deux Tours...



Nous débarquons dans le petit village en début d'après-midi, pour rencontrer Tristan. Au prix où nous faisons la voiture, peu lui importe de vérifier si tout va bien, mais nous lui exposons quand même toutes les spécificités de la robuste vectra. Nous papotons aussi voyage. Lorsque nous lui annonçons que nous devons rejoindre Ohakune en stop, Tristan propose de nous y déposer! Bien sympa de sa part, d'autant que la pluie ne semble pas vouloir prendre de pause...

En chemin, nous passons un coup de fil à Michélé, qui propose de venir nous chercher dans le centre-ville d'Ohakune. Sur place, nous discutons encore un moment avec Tristan, qui nous laisse bientôt. En silence, nous regardons notre cher et increvable opel qui s'éloigne, la remerciant en pensées de nous avoir traîner sans broncher ou presque sur tant de kilomètres depuis le mois de novembre.

Un quart d'heure après, une voiture se gare près de nous, et une femme toute souriante en sort et vient à notre rencontre, nous saluant d'un "bonjour" bien français. C'est ainsi que nous faisons enfin la connaissance de Michélé.

Nous papotons en allant faire quelques courses, avant de nous mettre en route en direction de la campagne d'Ohakune. Michélé est un véritable concentré de bonne humeur, de chaleur, de gentillesse et d'énergie, et nous nous sentons instantanément à l'aise en sa compagnie!

Nous faisons un petit créneau par une ferme laitière de sa connaissance où nous remplissons quelques bouteilles de lait directement à la sortie de la traite. Le proprio nous explique d'un air désabusé qu'en vertu des lois néo-zélandaise et de leur tendance à la paranoïa sanitaire, il ne peut vendre son lait aux circuits de grande distribution qu'après lui avoir fait subir une pasteurisation et tout un tas de traitements qui éliminent quasiment toutes ses qualités nutritives... Apparemment, le lait qui se trouve en grande surface en Nouvelle Zélande ne contient presque plus de protéines ni de vitamines, et ne diffère de l'eau que par sa couleur!

Nous nous enfonçons ensuite dans la cambrousse, au milieu des collines et des pâturages, pour arriver chez nos hôtes. Passé le portail en bois qui s'ouvre entre deux clôtures, un petit chemin de terre bien boueux grimpe tranquillement à travers les prés vers une jolie maison perchée sur un versant dominant la vallée et surplombée de forêt.

Le temps est exécrable, mais nous nous retrouvons vite au chaud près du poêle dans le salon, et Michélé nous prépare un thé tandis que nous faisons la connaissance de son mari, Ralph, aussi souriant et chaleureux que sa femme. Nous discutons un bon moment tous les quatre, et nos premières et excellentes impressions ne font que se confirmer : nos hôtes, avec qui nous allons partager les 12 prochains jours, sont des gens en or comme rarement nous en avons rencontrés, et la suite de notre séjour chez eux va renforcer cette idée!



Laissez-moi vous présenter un peu ceux qui vont devenir en très peu de temps les personnes les plus formidables que nous ayons rencontrées dans ce pays, et qui feront partie de ces gens qui ont marqué notre petit tour.

Comme je le disais plus haut, Michélé et Ralph, c'est la gentillesse et la bonne humeur à l'état pur. Attentionnés, le coeur sur la main, ils nous ont accueilli comme si nous faisions partie de leur famille!

Tout deux à la retraite, ils se sont installés sur la grande propriété que nous allons découvrir au fil des jours il y a plusieurs années, et en ont fait un genre de ferme-réserve forestière-hébergement de campagne. Ils possèdent plein de poules, dont Michélé s'occupe avec attention, et quatre agneaux qu'il faut nourrir au biberon car pas encore sevrés. Comme dit plus haut, la majeur partie de leur terrain consiste en plusieurs hectares de forêt native, classée et reconnue par le Departement Of Conservation, dans laquelle ils ont eu l'idée d'aménager une boucle de 6 kilomètres de chemin de randonnée. L'aménagement coûtant assez cher, ils ont décidé, pour couvrir les frais, de convertir une petite cabine proche de leur maison en hébergement Bed and Breakfast et de le louer aux vacanciers de passage. Le projet a eu tellement de succès qu'aujourd'hui, il s'agit d'une des locations les plus demandée de la région! L'argent que l'affaire a dégagé a permis à Michélé, accompagnée de deux de ses amies (toutes alors âgées de plus de 50 ans!), de travailler d'arrache pied pour débroussailler la forêt, y creuser un chemin et des marches, y placer des panneaux d'indications, entre autres aménagements nécessaires pour faire agréer le sentier et l'inscrire dans le cadre législatif du pays et de la région.

Ceci avant tout dans une volonté de partage et de sensibilisation. Car nos deux amis sont également amoureux de la nature, et Michélé est un véritable puits de connaissance sur la faune et la flore du pays, ainsi que sur tout ce qui les menaces, et le sentier, qui constitue l'attrait principale pour les locataires de la cabine, est une occasion de partager ces connaissance et de sensibiliser les visiteurs à la fragilité des écosystèmes néo-zélandais.

Globalement, tout leur mode de vie va dans le sens du partage, de l'ouverture, du respect de la nature. Michélé fait le maximum de chose par elle-même, et confectionne son pain, ses confitures etc... Tandis que les poules fournissent les oeufs. Les restes alimentaires finissent soit au compost, soit dans le poulailler.

Et cerise sur le gâteau... Michélé et Ralph sont également de grands voyageurs, et il n'y a pas un pays dont nous leur parlions dans lequel ils n'aient effectué plusieurs séjours, certains il y a près de trente ans! Il est très intéressant de comparer nos ressentis sur un pays et d'évoquer ce qui y a changé au fil des décennies. Bref, je vous laisse imaginer les nooombreuses discussions sur le voyage qui animerons nos soirée durant les jours qui viennent...

Parmi la foultitude de pays qu'ils ont visités, il y en a un dans lequel ils retournent régulièrement... La France! Ils se rendent ainsi chez nous tous les ans, pour visiter le pays et passer voir leur petite fille, mariée à un français.

Adorables, souriants, pleins d'énergie, porteurs de valeurs dans lesquelles nous nous retrouvons, leurs besaces remplis d'histoires inspirantes et enrichissantes... Michélé et Ralph font partie de ces personnes dont nous parlerons encore longtemps, celles qui marquent notre voyage et notre esprit d'une empreinte formidable et indélébile.

J'en resterais là pour le moment. Revenons-en à notre première soirée.

Michélé nous accompagne pour effectuer notre premier boulot, si on peut appeler ça un boulot : nous embarquons 4 biberons, et descendons au pré. A notre approche, quatre agneaux jaillissent de leur abri et se jettent sur nous! Nous leur tendons les biberons et les bestiaux s'y agrippent en tétant avidement, se mettant du lait de partout. De vrai morfales!

Nous dînons avec Michélé qui nous régale à nous en faire craquer le ventre, tandis que nous évoquons nos précédents volontariat. Le couple accueille des travailleurs volontaires depuis plusieurs années, Michélé a rodé son fonctionnement et nous en rappelle les règles : nous allons effectué 4 heures de travail par jour, en général de 9h à 13h, et nous disposons de tous nos après-midis. Nous pourrons avoir des jours congé à la demande, mais nous ne comptons pas forcément en prendre. Pour les repas, soit Michélé nous cuisinera quelque chose, soit elle nous fournira la nourriture et nous cuisinerons nous-même.

Demain, comme elle me l'avait annonce au téléphone, nous attaquerons le nettoyage du chemin de randonnée. Nous ne serons pas seul : Michélé nous annonce la venue au matin d'un troisième volontaire, Pierre-Emile, français lui aussi, qui restera quelques jours avec nous.

Le fonctionnement est clair et net, ce qui nous va très bien. Si l'intérêt d'un volontariat est, entre autres choses, de s'affranchir de la rigueur d'un travail salarié, il est appréciable de savoir clairement ce qu'on attend de nous.

Comme prévu, nous logeons dans une toute petite chambre derrière la maison. La cabine est occupée ce soir, et nous pourrons y déménager demain.

Lorsque nous nous retrouvons entre nous, avant de nous coucher, nous avons des étoiles dans les yeux. C'est fait, nous avons trouvé de quoi offrir une conclusion merveilleuse à notre voyage en Nouvelle Zélande, et nous allons terminé notre année dans le pays avec de gens formidables, dans un endroit magnifique. Nous nous émerveillons encore et toujours de notre chance, cette chance formidable qui n'est visiblement pas prête de nous lâcher...

Au réveil, nous prenons le petit déjeuner avant de nous préparer. Le nettoyage du chemin va impliquer de tronçonner branches et autres bouts de tronc qui se sont effondrés sur le chemin pendant d'hiver, et ayant quelques expériences en matière d'outillage et de découpe en tout genre, c'est à moi que la tâche incombe. Pendant que Léonore finit de préparer nos affaires, Ralph me montre la tronçonneuse et m'explique les spécificités de la bête.

Nous nous mettons ensuite en route derrière Michélé, chargés comme des mulets, embarquant des pelles, des gants, des lunettes de protection, un bidon d'essence et d'huile pour la tronçonneuse, ainsi que du thé, du café, de l'eau chaude, plein de biscuits maison, et j'en oublie.

Le début du sentier à proprement parler se trouve à une quinzaine de minutes de marche de la maison, au sommet d'un chemin pour 4x4 en terre qui monte en lacet le long d'un versant dégagé. Avant d'attaquer la grimpette, nous déposons les affaires pour suivre Michélé qui veut nous montrer le nouveau projet dans lequel elle et Ralph se sont lancé il y a peu : la construction d'un autre cabine, au pied de la forêt, destinée à accueillir les volontaires ou a être louée.

Nous découvrons ainsi au milieu d'un pré, entourée de verdure, une jolie cabane en bois avec terrasse. L'électricité provient de panneaux solaires installes sur le toit, et l'eau d'un gros réservoir qui récupère l'eau de pluie. La cabane est déjà totalement habitable, et à côté, encore en chantier, se dresse l'armature de ce qui accueillera la cuisine et la salle de bain.

La petite cabane perdue au pied de la jungle nous fait littéralement baver, et nous nous imaginons déjà vivant tels deux ermites loin de tout, mais c'est Pierre qui l'occupera le temps de son séjour ici. Enfin bon, vu le standing de l'autre cabine, que nous allons investir cet après-midi, nous n'allons pas nous plaindre!

Nous retournons récupérer le barda et attaquons l'ascension vers la forêt. Après une vingtaine de minutes, nous traversons un bosquet avant de déboucher dans une jolie clairière où nous déposons le matos. En attendant Pierre, qui doit arriver sous peu, nous allons redescendre sur le chemin de 4x4 pour déblayer la terre qui s'est détachée des pentes et est tombée dessus à cause des fortes pluies de cette hiver.

Nous attrapons les pelles, retournons sur nos pas et attaquons le déblayage tandis que Michélé nous laisse pour aller réceptionner Pierre. En fait de quelques mottes, ce sont carrément de petits pans de collines qui se sont détachés, et qui, emportant avec eux des souches d'arbres, ont recouvert par endroit le chemin. Nous devons dégager de gros tas de terre, et en profiter pour boucher les trous creuser par le ruissellement de l'eau.

Après une petite heure, nous voyons revenir Michélé accompagne de notre nouveau collègue. Nous achevons le pelletage an discutant, avant que notre patronne ne déclare la pause et que nous remontions nous poser dans la clairière pour boire un café et écouter les anecdotes forestières de notre hôte, qui nous explique plein de chose sur les plantes du coin et leur propriété. Ca va, jusqu'à maintenant, ce n'est pas trop bourrin!

Nous continuons ensuite a monter pour découvrir le petit sentier qui grimpe dans la forêt. Et quelle forêt! Magnifique, verdoyante et touffue, pleine de fougère de toutes tailles, de lianes, de dizaines d'espèces natives. De la belle jungle néo-zélandaise!



Et nous ne pouvons que louer le talent de Michélé et de ses amies : le sentier est très bien tracé à travers les arbres, grimpant en pente douce ou composé de marches en bois lorsque la grimpette se fait plus violente. En revanche, effectivement, il est couvert de tout un tas de débris végétaux, branches, troncs, quand ce ne sont pas des massifs de buissons ou même d'arbres entiers qui se sont déracinés et obstruent la voie. Sans parler des lianes qui dégoulinent des frondaisons et des longues feuilles de fougères qui ont pousse en travers de la voie.

Nous allons devoir avancer le long des 6 kilomètres du chemin en dégageant systématiquement tout ce qui bloque le passage.

Après avoir randonné aux quatre coins du pays, après avoir écarquillé les yeux devant la magnificence des treks néo-zélandais, voilà que nous nous retrouvons à entretenir un chemin de rando! Nous aménageons un chemin de randonnée en Nouvelle Zélande! Un rêve qui se réalise!

Michélé ne nous a jamais vu à l'oeuvre, elle ne nous connait que depuis hier, et pourtant elle nous laisse seuls, nous faisant toute confiance pour l'accomplissement de notre tâche! Elle nous invite à redescendre vers 13h, et nous attaquons.

Pierre passe devant avec un sécateur pour couper les lianes et les petites branches, je suis avec la tronçonneuse pour faire un sort aux plus grosses et aux troncs déracinés, tandis que Léonore passe derrière pour déblayer les débris du chemin.

Nous ne dégageons que le strict minimum, en essayant de ne pas toucher à ce qui n'est pas déjà déraciné. Tout ce que nous coupons fini sur les bords du sentier, ce qui permet de délimiter visuellement ce dernier tout en enrichissant la couche d'humus de la forêt. Le taf s'apparente en fait plus à un nettoyage des bois qu'à un déblayage.

Nous montons ainsi petit à petit dans la forêt, nous retrouvant parfois face à de véritables amas de racines, de branches et de troncs aussi haut que nous, sous lesquelles disparaît le sentier, résultat du déracinement d'arbres entiers. Nous devons alors couper méthodiquement tout ce qui dépasse, avant de faire rouler le tas de racine et de terre ainsi dégrossit hors du passage.

Le temps passe plutôt vite, le boulot n'est pas répétitif et nous avons le champs libre pour nous organiser. Sans parler du cadre dans lequel nous bossons, qui se trouve quand même être une sacrée forêt native néo-zélandaise! Finalement, la "fin de journée" arrive plutôt vite.

Nous quittons la forêt et redescendons à la maison en début d'après-midi, pour trouver Michélé en train de nous nettoyer la cabine. Nous récupérons nos affaires et découvrons notre nouvelle maison, et... Wahou! Une terrasse, un petit salon-salle à manger avec un poêle (que Michélé a eu la gentillesse d'allumer avant notre arrivée!) et une réserve de bois, un plumard king-size comme nous n'en avons pas vu depuis des lustres, des descentes de lit façon top-moumoute en poil d'hermine qu'on dormirait dessus, une salle de bain immaculée... Bref, un palace! Nous remercions Michélé du fond du coeur, et elle nous laisse déjeuner.

Comme si tout ça ne suffisait pas, nous découvrons sur la table du salon ce qui va devenir quelque chose d'habituel : un sacré tas de victuailles. Pour notre repas de midi, nos amis nous ont apporté de la salade, du fromage, des oeufs, du chorizo, plusieurs miches de pain, des sauces, des fruits, des biscuits, le tout en quantités gargantuesques. Même à trois, nous n'en arriverons pas à bout!

Nous passons un après-midi tranquille, à lire et écrire, avant de passer à la maison pour récupérer notre repas du soir. Et rebelote : Michélé nous remet un sac rempli de boustifaille. Notre hôte est un vrai cordon bleu, et elle nous a cuisiné un véritable festin! Nous nous souhaitons la bonne nuit et nous réfugions dans notre cabine de luxe pour faire ripaille. Notre bonheur atteint des sommets lorsqu'au fond du sac, nous découvrons une bouteille de Merlot! C'est fou...



Encore une fois, nous n'arriverons pas à finir la moitié de nos provisions.

En fin de soirée, Pierre Emile nous laisse pour rejoindre sa cabane dans les bois, et nous nous couchons, repus, dans notre énorme lit, nous enfonçant dans le matelas, baignant dans une extase complète. Ce soir, la vie est belle!

Et elle va continuer de l'être : nous nous réveillons le matin suivant pour trouver devant notre porte deux miches de pain tout juste sorties du four, tandis que nous découvrons dans les placards de la cuisine des provisions de confitures et de marmelades maisons, des thés d'une dizaine de variétés différentes, du café moulu... Cet endroit est un paradis sur terre, et ses habitants sont des anges!



Après un pti dèj pareil, même les cordes qui tombent dehors n'ont plus l'air si menaçantes! Nous montons à la maison, pour apprendre que nous n'allons tout de même pas travailler sous un temps pareil dans la forêt. Michélé ne nous demande d'effectuer qu'une heure ou deux de boulot dans les parages. Avec Pierre, nous allons nettoyer le poulailler, remettre de la paille dans les abris des poules et ramasser les oeufs, tandis que Léonore lui donne un coup de main dans la maison. Le vent souffle, la pluie tombe, et nous nous démenons pour transférer la paille sale dans les bacs à compost puis ramener des bottes de pailles propres depuis le pré des agneaux, après avoir viré laborieusement ces derniers des dites-bottes. Un grand moment!

A 10h et quelques, nous avons terminé, et nous passons en ville avec Michélé avant de profiter d'un après-midi de repos tandis que dehors, la météo se déchaîne...

Les deux jours suivant passent à la vitesse de l'éclair. Nous passons quatre heures par jours dans la forêt, à dégager le chemin à coup de sécateur et de tronçonneuse. Chaque jour, à cause de la progression de la veille, nous devons marcher un peu plus longtemps pour rejoindre l'endroit où nous sommes arrêtés, en transportant tout notre matos. Le sentier culmine, après trois kilomètres, au sommet d'une colline, avant de redescendre dans la forêt, et il nous faut bientôt près d'une heure pour grimper jusqu'à notre lieu de travail... Nous atteignons rapidement le sommet, débouchant sur un pré dégagé dont la vue porte sur le Tongariro, malheureusement couvert de nuage presque tout le temps...

Avant et après le travail, je passe du temps avec Ralph dans le garage, et il m'enseigne tout ce qu'il y a à savoir sur l'entretient et la maintenance de la tronçonneuse, de l'aiguisage au démontage en passant par le nettoyage complet de la machine et le changement des pièces. Des connaissances qui nous serons bien utiles quand l'heure sera venue de réaliser nos projets post-voyages...

Michélé et Ralph sont ravis de notre travail, rapide et efficace, et ils nous le montrent bien : les repas sont toujours aussi fabuleux et copieux!

Bientôt, c'est fait. Le sentier est complètement nettoyé et praticable!

Pierre Emile nous quitte à la fin de la semaine, après ce qui aura été le premier volontariat de son premier voyage. Nous aurons passé de bons moment avec lui, et de son côté il a tellement apprécié l'expérience qu'il a directement postulé pour un autre job en woofing dans une permaculture, sur l'île sud!

Le lendemain du départ de notre compatriote, la cabine où nous résidons est louée, et nous devons déménager dans la cabane. Nous sommes ravis! Pensez donc : nous tournons en totale autonomie en ce qui concerne l'eau et l'électricité, grâce aux panneaux solaire et au réservoir d'eau de pluie, et nous disposons de toilettes sèches. Côté facilités, nous avons un coin cuisine sur la terrasse, et l'intérieur fait office de chambre et de salle à manger. Nous avons aussi un petit poêle pour nous chauffer.

Et puis nous sommes au milieu de la verdure, entourés de forêt, avec une rivière qui glougloute à deux pas! D'après Michélé et Ralph, il arrive même que des cerfs et des sangliers s'aventurent par ici! Malheureusement, malgré tous nos efforts, nous n'en verrons pas...

Bref, nous avons trouvé notre nid douillet!

Il nous reste 6 jours à passer ici, et en plus du départ de Pierre et de notre déménagement, le début de la deuxième partie de notre séjour ici va être marquée par d'autre changements, à commencer par le travail. A présent que nous avons terminé de déblayer le chemin, nous devons y pratiquer quelques aménagements, qui concernent principalement la sécurité et la matérialisation du sentier.

Nous disposons de pelles, de maillets et d'épieux en bois, et notre tâche consiste à parcourir le chemin en localisant les endroits où ses bords s'ouvrent sur des pentes. Le cas échéant, nous cherchons des tronc d'arbres dans la forêt et les disposons de façon à former des bordures nettes et sécurisées. Nous plantons les épieux côté pente pour maintenir les troncs, et remplissons les creux avec de la terre pour former un sentier bien plat.



Quand nous terminons, nous rentrons nous poser et profiter de notre cabane. Lorsque nous arrivons, nous découvrons devant la porte un sac rempli de nourriture, et une invitation à passer à la maison le soir venu pour récupérer notre dîner. Après un repas formidable, nous nous posons en terrasse pour le café, face à la forêt. Je parlais de paradis, mais c'est encore mieux!



Nous nous adaptons sans nous faire prier à notre environnement : l'eau étant limité, nous n'utilisons que le strict minimum. Il n'y a pas de tout-à-l'égout, nous effectuons donc notre vaisselle sans produit.

L'après-midi est partagé entre thé, écriture, lecture, et séances de qu'est-ce-qu'on-est-bien-punaise-c'est-trop-cool-non-mais-regarde-ça-qu'on-est-y-pas-bien-là.

Le soir venu, nous chaussons nos bottes et marchons jusqu'à la maison, pour donner le biberon aux agneaux et récupérer notre repas du soir, toujours aussi copieux, et toujours accompagné de la sacre-sainte bouteille de merlot.

La cuisine en extérieur et le dîner dans notre petit chalet, près du poêle qui ronronne, frise la perfection point de vue complétude et satisfaction!



La dite-perfection sera atteinte peu de temps après, lorsqu'à la fin du repas, avant de nous coucher, nous nous posons dehors sous le ciel étoilé. Je précise que le ciel en Nouvelle Zélande, c'est comme en Tasmanie : il s'agit d'un des plus clairs, purs et limpides que nous ayons vu. La densité d'étoiles y est juste hallucinante!

Sous une voûte céleste incroyable, nous nous laissons couler dans la perfection de l'instant, et discutons un peu. Nous avons beau vivre ici depuis plus d'une semaine, nous n'en revenons toujours pas de la façon dont les choses ont tourné : plus nous vivons avec Michélé et Ralph, plus nous les adorons, et ils sont devenus en seulement quelques jours des amis chers. Sans parler du travail que nous effectuons, plus intéressant qu'autre chose... Nous faisons tout de même de la maintenance sur un sentier de rando au pays de la rando, dans l'une des plus belle forêt vierge native que nous ayons vue ici! Tout est parfait, de la compagnie à la boustifaille, de l'endroit où nous habitons à ses alentours. Nous n'aurions pas pu trouver mieux!

Je vous disais que nous ne nous étonnions plus de rien dans ce pays de fou, mais ce soir, sous les étoiles, au milieu de la forêt, nous voilà repartis dans l'ébahissement et l'émerveillement, tant l'expérience que nous sommes en train de vivre est grandiose et belle.

Nous dormons comme des loirs.

Le lendemain, le temps est trop incertain pour que Michélé nous laisse monter dans la forêt. Nous allons travailler chacun de notre côté aujourd'hui : pour ma part, je vais assister Ralph dans la construction de la cabine douche-cuisine qui jouxte notre petit chalet. Quant à Léonore, elle va passer la matinée avec Michélé.

Ralph me rejoint devant chez nous au petit matin, et nous nous mettons au boulot. Nous devons fixer les murs de la cabine et y placer les fenêtres. Ralph s'occupe des mesures et de la découpe de grands panneaux en bois, que nous plaçons et ajustons ensemble sur l'armature de la cabine, après quoi j'assure la fixation à coup de perceuse-visseuse.



Léonore, de son côté, fait un brin de repassage et de cuisine.

Après un nouvel après-midi tranquille, nous passons à la maison. Comme d'habitude, nous insistons pour aller nourrir les agneaux! Donner le biberon à des agneaux n'est pas vraiment ce que nous considérons comme étant du travail, et chaque soir c'est avec plaisir que nous débarquons dans le pré pour voir quatre boules de poils blanches nous sauter dessus.



Au fil des jours, nous nous sommes attachés aux bestioles, dont l'histoire concurrence sans problème, niveau tristesse, celle de la mort de la mère de Bambi : deux des agneaux sont orphelins, leur pauvre maman étant morte à leur naissance, tandis que la mère des deux autres les a abandonnés, refusant de les nourrir.

Michélé les a adoptés pour les sauver d'une mort certaine. Il faut savoir que les éleveurs de moutons ne s'embarrassent pas de bestioles qu'il faut nourrir à la main : nourrir un agneau au biberon jusqu'à ce qu'il se mette à brouter réclame en effet de dépenser une somme supérieure au prix de l'agneau lui-même. Ainsi, durant l'agnelage, les petits que leur mère refuse d'allaiter sont systématiquement abattus, et pendant cette période s'amoncellent devant les élevages des tas de cadavres de petits agneaux innocents.

Je m'abstiendrai d'émettre un jugement sur le fait de buter des agneaux sans aucune pitié, étant grand adepte de leur viande.

Fin de parenthèse. A la nuit tombée, Michélé et Ralph nous proposent de rester manger avec eux, et nous passons une excellente soirée à nous remplir la panse et à discuter, avant de rentrer à la frontale pour une nouvelle session extatique de "notre vie est belle, le monde est merveilleux, l'humanité est formidable". D'autant que nous sommes le premier octobre, et que nous fêtons aujourd'hui le quatrième anniversaire de notre départ! 4 ans...

Les jours suivants vont suivre plus ou moins le même schéma. Lorsque le temps est stable, nous partons dans la forêt réparer les bordures du sentier ou les marches, et quand la tourmente gronde, je travaille avec Ralph sur la cabine tandis que Léonore et Michélé s'occupe de l'intendance et de la maison. Bon, je sais, les filles à l'entretient et à la cuisine et les hommes en train de bricoler, ça sonne un peu clicheton vieillot, mais bon...

Ralph et Michélé nous gardent à dîner tous les soirs, et nous accumulons les bons moments passés ensemble, les passionnantes discussions et réflexions sur le voyage et la vie, les fou-rires et les instants de partages.

A ce train là, nos 6 derniers jours passent vite, très vite. Trop vite.

Nous coupons des réserves de bois pour la cabane, mettons en place un coin feu pour ses futures occupants, et bien sûr continuons nos travaux d'aménagement et de bricolage.



Et le 4 octobre arrive, et notre dernière soirée nous tombe dessus. Pour l'occasion, nous préparons notre grande spécialité pour le dîner : nouilles sautées aux crevettes! La soirée est mémorable.

Le lendemain, tout va très vite : nous rassemblons nos affaires, faisons nos adieux à Michélé, qui nous remet une petite enveloppe que nous décidons d'ouvrir plus tard, puis la serrons dans nos bras, la remerciant du fond du coeur, et nous montons dans la voiture avec Ralph, qui a proposé de nous poser à Waiouru, sur l'autoroute 1, en direction du nord. Arrivés sur place, nous lui disons au-revoir, et regardons la voiture s'éloigner tandis que la pluie se met à tomber. Au bord de la route, les sacs sur le dos, nous ne levons pas le pouce tout de suite, mais nous ouvrons l'enveloppe que nous a remis Michélé quand nous l'avons quitté. A l'intérieur, une belle lettre de remerciement, et même un petit cadeau en liquide pour nous remercier des heures supplémentaires que nous avons faites.

Nous voulions achever dignement notre séjour dans ce pays, nous avons trouvé encore mieux. Visiblement, la Nouvelle Zélande n'avait pas fini de nous surprendre! Grâce à Ralph et Michélé, nous avons une nouvelle formidable expérience de volontairiat, et ils vont beaucoup nous manquer. Nous nous consolons en nous disant que nous allons forcément nous revoir un de ces jours, et dans pas si longtemps que ça : ils passent en France tous les ans, et ils ont promis de nous rendre visite dès que possible!


The end


Nous y sommes. Le 5 octobre 2017. Demain soir, nous serons dans l'avion. Demain soir, nous quitterons la Nouvelle Zélande pour nous envoler vers le dernier continent de notre voyage.

Et il nous reste une dernière mission à accomplir. Retrouver notre cher Paco! La ferme dans laquelle travaille notre ami se trouve à Paeroa, à 290 bornes au nord de Waiouru, et comme prévu, nous allons finir notre vadrouille ici en pouce!

Il est 9h, et nous comptons bien arriver à destination cette après-midi. Nous attaquons le stop sous le crachin, et... Nous attendons un sacré bout temps! Et bien Nouvelle Zélande, qu'est-ce que c'est que cette histoire? Avec une quarantaine de minutes d'attente, nous sommes très loin de nos records, mais nous sommes en Nouvelle Zélande nom de nom! Mignons, propres, abandonnés sous la pluie que nous sommes, ça devrait rouler... Est-ce parce que les automobilistes ont peur que nous sentions le chien mouillé?

Au bout de près de 45 minutes, une vieille dame s'arrête, et propose de nous poser au nord Taupo, presque à mi-chemin donc! Pendant le trajet, nous discutons beaucoup de son pays, et elle nous parle de ses enfants, tandis que nous écarquillons une nouvelle fois les yeux sur les montagnes enneigées du Tongariro National Park. Celui-là non plus nous ne sommes pas près de l'oublier...

Nous longeons le lac de Taupo, traversons la ville, et nous faisons déposer juste après.

Nous sommes récupéré en moins de 10 minutes par un homme très sympa et bien marrant, et les discussions vont de nouveau bon train sur la Nouvelle Zélande, sa culture, et surtout sa réputation infondée de pays vert que notre homme démonte de manière hilarante! Le gars est aussi un amoureux d'histoire, et adore l'Europe.

Nous passons un excellent moment avec lui. Lorsque nous approchons de Matamata, il nous demande d'une voie dédaigneuse si nous avons visité Hobbiton, le village des hobbits, pour laisser un large sourire apparaître quand nous lui expliquons pourquoi nous avons choisi de boycotter une telle saleté. Visiblement, il nous rejoint complètement là-dessus! Il nous propose quand même...

Ouuh, c'est vrai, je n'en avais pas encore parlé d'Hobbiton! Car non, nous n'avons pas mis les pieds à Hobbiton. Jamais, au grand jamais, nous ne poserons nos pattes là-bas, respectant une décision que nous avons prise il y a plus de quatre ans.

Pour ceux qui l'ignorent, je précise que les alentours de la ville de Matamata abrite Hobbiton, le décors du village des hobbits dans le Seigneur des Anneaux et la trilogie du Hobbit. Un tel site, bien sûr, attire les foules, et représente une manne financière certaine... Ben oui mon petit Oliv, mais d'habitude ce genre de chose ne vous dérange pas trop si elle en vaut la peine, et en plus cette fois tu es un grand fan des films... Et c'est vrai ami lecteur! Mais d'une part, nous apprécions les lieux de tournages du Seigneurs des Anneaux quand ils se trouvent au coeur de décors naturels et grandioses, alors qu'ici nous sommes en présence de quelque chose qui a été créé artificiellement de toute pièces...

D'autre part, et c'est peut-être l'argument le plus décisif, l'exploitation du potentiel du site a virée au gag... Que dis-je au gag, à l'absurdité la plus totale. En effet, l'entrée de Hobbiton coûte la bagatelle de... 80$! Environ 50 euros! Aucune visite ne justifie un tel prix! Pour une sommes pareille, on pourrait au moins s'attendre au tour du siècle, avec les personnages du film, les feux d'artifice, de la bière hobbite à volonté et Gandalf qui fait pleuvoir des dragons en chantant du Metallica durant une visite de deux jours avec nuit dans un terrier de hobbit... Que néni pauvres fous! A ce prix là, vous n'êtes même pas libres de vos mouvements, vous devez suivre obligatoirement une visite guidée avec un groupe au milieu d'un site forcement blindé de monde, et il est impossible de rentrer dans le moindre trou hobbit, seules les façades ont été construites, les tournages en intérieur ayant été réalisés en studio à Wellington. Ah si, vous avez droit à une bière gratuite (AAAHAHAHA!!!) à l'auberge du dragon vert, seul bâtiment dans lequel il est possible de rentrer.

J'ai souvent gueulé contre les prix des activités en Nouvelle Zélande, et bien Hobbiton remporte la palme de la plus belle arnaque du pays. D'autant qu'il ne s'agit pas d'une activité, mais d'une pauvre visite d'une heure et demi! A ce stade, on a dépassé le "tant qu'à être ici, autant y aller même si c'est cher!". Bref, Hobbiton, jamais.

Bon bon bon... Où en étais-je? Ah oui! Notre chauffeur nous propose quand même de passer au centre d'information de Matamata, bâti sur le modèle des maisons hobbites. C'est sympa, c'est gratuit, et c'est bien fait. Dommage que le bâtiment disparaisse derrière les cars de tourisme, les hordes de visiteurs et les navettes qui font le trajet jusqu'à Hobbiton...

Nous poursuivons notre route. Notre chauffeur nous dépose à Tatuanui, à un peu plus de 30 kilomètres de Paeroa, en début d'après-midi. Il est tôt, et nous en profitons pour passer un coup de fil à Paco afin de nous organiser. Notre ami nous explique qu'il doit rattaquer le taf à 15h, pour finir à 18h. Nous ne serons probablement pas arriver avant 15h, et il nous propose d'attendre à Paeroa qu'il finisse et qu'il vienne nous chercher, ou de tenter de rallier la ferme, à quelques kilomètres du bled, et de l'attendre chez lui. Nous prenons note de son adresse avant de lever le pouce.

Après une quinzaine de minutes, un minibus s'arrête et nous sommes récupéré par une femme.

Avec cette nouvelle chauffeuse, nous initions une série de gentils allumés avec lesquels nous allons finir la journée!

Quand, seulement quelques minutes après que nous soyons montés dans le van, elle nous explique qu'elle a pris des auto-stoppeurs français il y a peu et qu'elle a sauvé leurs âmes, nous sentons le truc venir. C'est que nous en avons vu des belles durant ces quatre dernières années... Et lorsqu'elle nous demande si nous connaissons Jésus, nous sommes fixés. Alors oui, on le connait! Nous lui demandons pourquoi cette question, et elle nous répond qu'elle est évangéliste, et qu'elle répand la bonne parole du seigneur à travers le monde. Elle a voyagé partout sur la planète : en Nouvelle Zélande, en Polynésie, dans le sud de la Nouvelle Zélande, dans d'autres îles polynésiennes... Bref, absolument partout. Techniquement, elle est très sympa, intéressante et nous discutons bien. Elle nous raconte de sympathiques anecdotes sur ses différents voyage en Polynésie, et nous démontre la toute-puissance de dieu. Arrivé aux abords de Paeroa, elle nous annonce qu'elle veut nous offrir un cadeau avant de nous déposer, et nous nous garons. Une fois à l'extérieur de la voiture, elle nous prend dans ses bras et récite une prière à notre attention, avant de nous bénir. Encore une fois, ce n'est pas comme si c'était la première fois que ça nous arrivais, et nous ne bronchons pas. Venant de quelqu'un de visiblement profondément croyant, nous avons toujours pris ce genre de chose comme un véritable cadeau et un honneur, même si nous ne partageons pas les croyances en question. Et puis elle nous demande de répéter ses prières après elle. Là par contre, nous refusons, lui expliquant ce que nous expliquons toujours dans ce genre de situation : que nous sommes athés mais que nous respectons beaucoup la religion, quelle qu'elle soit, et que réciter ses prières sans y croire va à l'encontre de nos valeurs tout en constituant une marque d'irrespect envers ses croyances. Notre amie prend très bien la chose et n'insiste pas trop. Mais quand même un peu! Elle nous rappelle un peu ce jeune homme turc qui nous avais tenu la jambe pendant tout un trajet en bus, complètement paniqué par le problème du salut de nos âmes, désirant véritablement nous sauver en nous suppliant de reconsidérer nos croyances. Durant les derniers kilomètres de route, elle nous prie de ne pas nous inquiéter, un jour nous comprendrons, un jour nous connaîtrons la vérité. Peut-être, mais pas aujourd'hui! Elle nous recommande de nous grouiller d'avoir notre épiphanie, en nous certifiant que la Corée du Nord allait déclencher sous peu la troisième guerre mondiale.

Nous arrivons finalement à Paeroa, et nous remercions notre chauffeuse pour le trajet avant de grignoter un morceau, en nous disant que quand même, parfois, il y en a qui partent sacrément loin... Et en même temps, on se dit qu'on en viendrait presque à les envier, ces gens plein de certitudes, complètement convaincus d'avoir trouvé toutes les réponses aux grandes questions, au discours totalement péremptoire. Ce doit être tout de même extraordinairement rassurant! Plus de doutes, plus de questionnements, tout est expliqué, et d'une manière un peu plus simple que la physique quantique et la génétique!

Comme prévu, il est trois heure passé, et même en levant le pouce pour la ferme de Paco, nous avons du temps devant nous. Nous passons faire quelques courses avant de squatter un peu la bibliothèque du petit village pour localiser la ferme. Vers 17h, nous nous postons à la sortie de la ville le pouce en l'air, et une nouvelle poignée de minutes plus tard, un fourgon s'arrête. Et nous avons droit à notre deuxième lift totalement barré et surréaliste.

Une fille en descend, complètement surexcitée, et nous lance un grand "YOUHOUUUUU!!!" en agitant les bras avant de nous ouvrir la porte du fourgon. Nous grimpons à l'arrière, pour découvrir un spectacle assez particulier : le fourgon est rempli d'enceintes, de caissons de basse, et... de fauteuils roulants. Sur le seul siège disponible, se tient un petit garçon a l'air grave qui nous regarde les bras croisés. Une deuxième fille est au volant, et elle nous lance un "SALUT!" tonitruant avant de nous inviter à nous asseoir sur un des caisson tandis que son amie monte dans le véhicule. Elles explosent ensuite toutes les deux d'un rire à nous vriller les tympans, et nous partons à toute berzingue à travers la campagne de Paeroa...

Bien bien bien. Durant les premières minutes de trajet, nous ne prêtons qu'une attention limitée aux élucubrations surexcitées de nos chauffeuses, préférant nous concentrer pour évaluer leur état et leur conduite. Il n'est pas 18h, pourtant elles paraissent déjà sacrément perchées... Mais bon, tout va bien, le fourgon va droit, il n'y a personne sur la route, et surtout, quand nous leur annonçons le nom de la rue où nous devons nous rendre, elles le connaissent et propose de faire un détour pour nous y poser. Et bien c'est parti!

Les deux filles nous gueulent des dizaines de questions à la minutes, poussent de grands hurlements quand nous leur parlons de notre voyage, et reprennent leurs questions de plus belle. Dans un sens, notre vadrouille paraît les emballer au plus haut point!

La dizaine de minutes que dure le trajet nous épuise, entre les deux jeunes filles qui hurlent de rire à n'en plus finir, l'inconfort de notre caisson de basse, le petit garçon qui se met à crier "ils nous rattrapent! Accélère, ils nous rattrapent!" dès qu'une voiture arrive derrière nous... Lorsque nous nous faisons larguer en pleine campagne, sur la route que nous a indiqué Paco, nous sommes essouflés!

Encore une fois, il y en a qui vont loin... Nous ne pouvons nous empêcher de penser au petit garçon. nous ne connaissons rien de la vie des deux jeunes filles, mais le loustic paraissait ne pas être affecté par l'état de celle qui devait être sa mère, comme s'il y était habitué...

Il est 18h tout pile, et nous passons un coup de fil à Paco, lui expliquant la situation, et notre ami se met en route pour venir nous chercher. 10 minutes plus tard, le téléphone sonne : il ne nous trouve pas, et de notre côté nous n'avons vu passer personne... Il va continuer à nous chercher, et nous raccrochons, un sérieux doute au coin de la tête : est-ce bien la bonne rue?

Après une quarantaine de minutes d'attente et d'appels, la nuit commence à tomber... et nous le voyons enfin débarquer avec une de ses collègues! C'était bien ça : la rue dans laquelle nous ont posé nos deux jeunes filles pleine d'entrain à le même nom que celle de la ferme de Paco... A une lettre près! Bien joué...

Nous nous excusons longuement auprès de sa collègue, serrons notre ami dans nos bras, et rejoignons la ferme. Sur place, nous découvrons la maison que Paco partage avec son patron, au milieu d'immenses pâturages.

A cause du droppage hasardeux, il est plutôt tard, et nous mettons tout de suite à cuisiner. Ce soir, sushi party! Nous avons énormément de choses à nous raconter, entre notre boulot à la pépinière, notre volontariat chez Michélé et Ralph, son travail à la ferme etc... Sans parler de notre session pouce du jour!

Bref, de belles retrouvailles pleines de rires, d'histoires et de souvenirs!



Paco nous parle de la vie à la ferme. Et visiblement, gérer une production laitière, c'est du boulot! Et oui, les vaches ne connaissent pas le dimanche, ni les vacances, ni les jours fériés... Il nous explique que son patron, un jeune homme d'une trentaine d'années, travaille ainsi sans relâche, sans pauses, sans congés depuis plusieurs années, parfois à raison de plus de 12 heures par jours! On ne peut s'empêcher de se demander... Pourquoi? Ca ne gagne pas tant que ça visiblement, et même si l'activité rapportait des dizaines de milliers par mois... Que peut-on en faire quand on trime entre 10 et 15 heures par jour, 365 jours par an? C'est un choix de vie bien étrange... Apparemment, le boss considère que dans la vie, il faut travailler dur. Et c'est tout.

Nous passons une nouvelle soirée mémorable, à évoquer l'année écoulée et les projets futurs. Après son voyage en Nouvelle Zélande, notre ami désire se remettre à ses études et passer un master. Il veut aussi apprendre le français! Entre nous qui allons cravacher sur l'espagnol, lui qui va se mettre au français, plus l'anglais que nous parlons couramment tous les trois, nous aurons trois langues à dispositions pour communiquer!

En fin de soirée, nous rencontrons son patron. Il est très sympa, mais nous n'avons pas vraiment le temps de discuter, car il va se coucher presque directement, ce dont on ne peut pas vraiment lui tenir rigueur, considérant la vie qu'il mène... Avant de nous laisser, lui et Paco nous propose de passer le début de matinée avec eux le lendemain, histoire de voir comment les choses se passent à la ferme.

Nous sommes à une centaine de bornes d'Auckland, notre avion décolle à 20h, et nous devons être à l'aéroport au plus tard à 18h... Nous décidons de partir vers 10h, ce qui nous laissera le temps de faire un  tour dans la ferme.

Alors oui, ca fait un peu oser de partir en stop pour attraper notre avion le jour même. mais honnêtement il y a quand même très peu de chance pour qu'une tuile nous tombe dessus. 8 heures pour effectuer 100 kilomètres en pouce, c'est plus que large. Et dans le pire du pire des cas, il y a toujours des lignes de bus!

Paco nous laisse sa chambre, et nous dormons comme des loirs. Au matin, le réveil sonne à 7h. Nous n'allons pas nous plaindre, Paco est sur le pont depuis 5h! Nous avalons un café, puis notre ami vient nous chercher en tracteur, et nous partons nourrir les veaux tandis que le soleil se lève. Nous traversons la campagne nappée de brume au jour naissant, traversant pâturages et grands prés, pendant que Paco nous explique comment se passe la traite du matin.

Arrivés dans le pré des veaux, Paco accroche la machine servant à nourrir les bestioles au tracteur. Il s'agit d''une espèce de gros réservoir de lait relié a un dispensateur circulaire percé d'une multitude de tube que vont téter les veaux.

Nous partons ensuite à travers le champs dans une glorieuse course, sous les premiers rayons du soleil, poursuivis par une trentaine de veaux affamés!



Arrivés au milieu du champs, nous larguons la machine, recomptons les veaux avant de nous remettre en route pour aller voir comment se passe la traite, laissant les bestiaux à leur petit déjeuner.



Nous retrouvons le boss, qui nous fait enfiler des tenus de protection avant de nous montrer tout le dispositif de traite. Grosso modo, le procédé est similaire à ce qui se fait chez nous.



Il s'agit d'une exploitation assez réduite, mais industrialisée, et on sent bien que l'animal est en conséquent considéré comme un moyen de production plus que comme un être vivant, même si le patron paraît être aux petits soins pour ses bêtes.

Nous assistons ensuite à l'insémination des vaches (non, on n'a pas mis les photos!), réalisée par un professionnel, qui bizarrement ne semble absolument pas déranger les vaches! C'est quand même assez étrange à regarder... L'homme qui s'en occupe nous parle un peu de la sélection des semences de leur conditionnement.



Nous rejoignons ensuite Paco pour aller nourrir les veaux les plus jeunes, ceux qui n'ont que quelques jours et qui ne peuvent pas encore rester dans le champs.

Ici, point de machine, on verse le lait dans une grande cuve directement équipée de tuyaux.

Les veaux, tout jeunes, savent à peine marcher, et il faut parfois les porter et leur placer la bouche sur le tuyau.



Certains d'entre eux sont malades et ne se nourrissent pas, mais encore une fois nous sommes dans une exploitation agricole, et le fermier ne s'embarrasse pas de bêtes malades. On raisonne en productivité et en rentabilité, et Paco nous explique que les veaux malades vont être abattus dans les jours qui viennent.

Il serait déplacé de notre part de hurler à la révolte face au côté industriel de l'exploitation et à la réduction du statut de l'animal en simple moyen de production alimentaire, car dans un sens nous cautionnons le procédé : nous mangeons de la viande et des produits laitiers, et si nous pouvons espérer que le fromage que nous consommons en France provient du lait de vaches bien traitées, nous ne nous faisons pas d'illusions sur la manière dont sont élevés les animaux qui fournissent les saletés premiers prix que nous mangeons souvent en voyage...

Notre tour de la ferme à le mérite de nous faire réfléchir sur la question. Comme d'habitude, c'est une chose de savoir, c'en est une autre de voir...

Nous repassons à la maison pour nettoyer les taches de bouse qui maculent nos vêtements et qui, à n'en point douter, ne vont pas faciliter l'auto-stop, et puis... Il est temps de partir.

Nous saluons le patron et le remercions pour sa gentillesse, puis Paco nous dépose à l'entrée du domaine. Les au revoir prennent un bon moment. Nos routes se serons croisées à plusieurs reprises depuis le picking, et Paco est devenu un ami cher. Comme Ralph et Michélé, c'est une personne que nous n'oublierons pas et que nous espérons bien revoir, ce qui ne devrait pas poser de problèmes, car si nous nous sommes rencontrés en voyage à l'autre bout du monde, nous n'habitons pas loin les uns des autres, Paco vivant à Barcelone. Ca promet de belles vacances en Espagne tout ça!

Notre ami nous laisse finalement.

Nous y sommes. La dernière ligne droite avant le départ. Le dernier coup de pouce avant la fin de notre voyage en Nouvelle Zélande.

Nous nous postons au bord de la route, surexcités, nostalgiques, impatients, tristes, ravis, riant et hurlant "on va en Amériiique!!!", avant de répéter, comme pour bien le réaliser, "punaise, la Nouvelle Zélande, c'est déjà fini"... Je peux vous dire que le papito qui nous récupère dans cet état après quelques minutes en a eu pour sa gentillesse! Par contre, il a dû faire une bonne sieste en rentrant chez lui...

Sur le trajet, il devient l'exutoire de notre frénésie, et nous l'assommons de tout notre amour pour son pays, de toutes nos histoires sur l'année écoulée, de tout ce que nous attendons de la suite. Nous devons avoir l'air complètement dingues de pêche et d'enthousiasme, car notre chauffeur est mort de rire tout le temps que dure la course!

Lorsqu'il nous dépose à une trentaine de kilomètres de Paeroa, nous le remercions avec effusion, louant la Nouvelle Zélande et tout ceux qui y habitent.

Nous n'attendons que quelques minutes avant d'être récupéré par une jeune femme bien sympa, qui propose de nous déposer... A l'aéroport d'Auckland! Et paf!

C'est fait. Nous lui annonçons solennellement qu'elle nous offre notre ultime lift en Nouvelle Zélande, puis nous mettons à discuter.

Le trajet passe bien vite, et un peu avant midi, moins de deux heures après notre départ de la ferme, nous descendons sur le parking d'un petit parc perché sur une colline à quelques centaine de mètres de l'aéroport, comportant un point de vue sur les pistes.

Nous nous asseyons dans l'herbe, face à l'endroit où nous sommes arrivés le 14 octobre dernier, et regardons les avions atterrir et décoller en grignotant un morceau et en évoquant l'année qui vient de s'écouler, l'année qui vient de filer à une vitesse folle.

Une année de voyage et de vie à l'autre bout du monde qui a, comme je l'ai souvent répété, été parfaite d'un bout à l'autre, une année sans aucune anicroche, sans aucun problème. Depuis notre atterrissage dans le pays jusqu'au formidable volontariat que nous avons effectué chez Michélé et Ralph, toutes nos attentes, souhaits, besoins ou envies auront été transcendés. Le tout dans une contrée formidable qui nous aura marqué le cœur et l'esprit.

Le fait est qu'à la base, même sans aucune expérience, il est déjà extrêmement facile de voyager en Nouvelle Zélande! On trouve systématiquement tout ce que l'on cherche sans problème, les points informations qui pullulent de partout regorgent de cartes et de prospectus, il est presque impossible de se perdre en voiture ou à pied tant il y a de panneaux et d'indications, les services et infrastructures dans le pays sont développés et accessibles, il y a du travail de partout... Bref, la vadrouille ici, c'est du velours!

De notre côté, nous sommes venus en Nouvelle Zélande pour crapahuter à travers ses espaces naturels légendaires et pour travailler afin de couvrir nos frais dans le pays tout en consolidant nos économies en vue de la dernière partie de notre Petit Tour, en Amérique du sud.

Le résultat, d'un point de vue strictement technique?

6 mois de travail, 6 mois de voyage. Working Holiday.

Côté "working", les retombées de cette année dépassent toute nos espérances : ces 6 mois de boulot nous ont permis de générer 31133$ à deux. Nous avons débarqué ici avec 7000 euros en poche, et nous repartons avec l'équivalent d'environ 11000 euros. Le tout en aillant sillonné le pays en long, en large, et en travers. Et nous attendons encore notre retour de taxe, que nous estimons à 1000$ pour deux!

Encore une fois, l'argent en voyage, ça se trouve et ça se met de côté, même en profitant, même en se faisant plaisir. Nous constatons une fois de plus que si l'on est près à faire ce qu'il faut, le problème de financer un voyage est loin d'être difficile à régler sans forcément faire d'énormes sacrifices. L'année qui vient de s'écouler constitue une nouvelle preuve de cette réalité.

Si je démarre cette petite conclusion par des aspects strictement matériels, ce n'est bien sûr pas parce que ce sont ceux qui me tiennent le plus à coeur, mais parce qu'ils sont ainsi évacués. D'un point de vue pécunier donc, notre virée en Nouvelle Zélande est un triomphe net et sans bavures.

Du point de vue de la nourriture spirituelle des voies de l'esprit à présent!

En ce qui concerne l'aspect "holiday" de notre année ici, je pense en avoir suffisamment dit sur l'amour que nous avons développé au fil des mois pour les étendues sauvages néo-zélandaises. Je n'en dirai donc pas plus, si ce n'est que la Nouvelle Zélande est probablement le plus beau pays, du point de vue des espaces naturels, que nous ayons jamais traversé, et nous y avons réalisé ce qui compte parmi les plus formidables échappées sauvages de notre vie. Mais ça, qui en doutait encore?

Et puis il y a le reste. Tout ces petits plus qui ont fait que notre périple ici nous a apporté beaucoup, vraiment beaucoup plus que tout ce que nous espérions.

A commencer par ses habitants.

Depuis notre rencontre avec Craig, qui nous a invités à dormir chez lui seulement quelques heures après notre atterrissage, jusqu'à notre ultime conductrice, qui a effectué un détour de plusieurs dizaines de kilomètres pour nous poser devant l'aéroport, en passant par Michélé et Ralph, par David, notre voisin au Dominion Point, Brian et Tracey ainsi que leur famille, nos collègues a la pépinière, dont j'ai du taire les noms mais qui pour certains sont devenus de bons amis, toutes ces personnes qui nous ont pris en stop... Nous n'avons eu que de bonnes expériences avec tous, absolument tous les néo-zélandais qui ont croisé notre route (A l'exception d'un papy nationaliste et raciste qui nous est tombé dessus comme la misère sur le pauvre monde au détour d'un camping, mais il en fallait bien un!). Et en mettant de côté les rencontres disons approfondies, nous n'avons croisé que des sourires et des gestes aimables et serviables. Je vous parle du gars qui vient vous voir alors que vous êtes sur le trottoir carte à la main pour vous demandez si vous avez besoin d'aide, de la caissière qui vous demande d'où vous venez et qui espère que vous vous plaisez dans son pays, de la personne à qui vous demandez simplement votre chemin et qui propose de vous accompagner à destination, du père de famille qui vous embarque en voiture alors que vous ne leviez même pas le pouce et fait un détour de 60 kilomètres pour vous poser à bon port. Bref, tous ces petits gestes gratuits, toutes ces marques de sollicitudes qui interviennent sans que vous ne demandiez rien... Et qui sont omniprésentes en Nouvelle Zélande! Ces gestes qui en se répétant sans cesse vous amènent petit à petit à vous dire que tout va bien, il n'y aura pas de soucis quoiqu'il arrive, parce que les habitants sont là! Et quand cette pensée c'est installée, le voyage prend une tout autre tournure, et on se sent vraiment bien là où on est.

La gentillesse des gens fait du coup probablement partie des choses qui ont fait que tout a été facile cette année. Quand on ne tombe que sur des gens chaleureux, aidants et pleins de sollicitude, tout devient facile!

On nous demande souvent lequel des deux pays nous avons préférés, entre l'Australie et la Nouvelle Zélande, et tout le monde se doute de la réponse que donnons. Bien sûr, la Nouvelle Zélande, et de très loin! Cette réponse est en grande partie due aux habitants. Les rencontres font l'essence et la profondeur d'un voyage. C'est à travers les gens qu'on plonge véritablement dans un pays. C'est à travers les rencontres et ce qu'elles nous apportent qu'on change sa façon de penser, qu'on réfléchi. Nous nous sommes aperçu depuis belle lurette que vous pouviez nous balancer dans le pays le plus beau de monde, comportant une histoire multimillénaire, des temples de 800 religions différentes qui flottent dans le ciel et des paysages dignes d'un mélange entre Avatar et le Seigneur des anneaux (oui, tout à fait, un mélange entre l'Inde et la Nouvelle Zélande!), si nous n'accrochons pas avec les gens, notre expérience restera fade et sans goût, superficielle.

C'est à peu près ce qui c'est passé en Australie... Je ne vais pas vous refaire tout l'exposé, et j'invite donc ceux qui ne l'ont pas encore fait et qui désirent connaitre les détails de notre expérience mitigée là-bas à lire la fin de notre dernier billet au pays des kangourous. C'est fait? Très bien.

En Nouvelle Zélande, les gens paraissent se réjouir de la pluriculturalité propre au pays, ils considèrent qu'il s'agit d'une facette de sa culture et globalement, l'acceptation et la tolérance nous ont paru être à l'ordre ici. Ici, tout le monde est néo-zélandais!

Nous avons trouvé en même temps beaucoup d'authenticité, d'ouverture et de profondeur chez les habitants du pays. Le premier contact toujours très amical et chaleureux n'est pas seulement une façade, mais permet de découvrir ensuite une attitude générale... Très amicale et chaleureuse! Ici, les sacs sur notre dos signifient que nous avons des histoires à raconter et une autre culture à partager, et quand les conversations s'envolent vers d'autres pays, d'autres cultures, d'autres peuples et d'autres époques, elles le font avec intelligence et réflexion.

Je voulais au départ tirer un comparatif complet entre la Nouvelle Zélande et l'Australie, histoire de rendre justice à la première et de rabattre le caquet de la deuxième, qui a pris un malin plaisir à se moquer de sa petite voisine tout le temps que nous y étions. Mais à quoi bon? Tout le monde sait de quel côté va notre préférence, et n'aura aucun mal à en comprendre les raisons entre ces lignes et celles de l'article du lien ci-dessus.

Bien sûr certains aspects du pays nous ont fait grincer des dents... En ville, on ressent toujours le côté neuf, propret et tout carré de vitrine artificielle et ennuyeuse que nous avions déjà observé en Australie. On a l'impression qu'il ne va jamais rien se passer ici! Il faut ajouter à ça une espèce de surlégislation paranoïaque et outrageusement restrictive que de nooombreux panneaux d'interdiction ne manquent pas de rappeler à chaque coin de rue...

Le côté "pays vert" surprotégé est un fantastique monument de mensonge marketing, et cette prise de conscience a peut-être été ce qui nous a le plus dégoûté ici. La déforestation est galopante, et le pays a perdu environ 50% de ses forêts depuis sa colonisation par l'homme, et la plus grande partie de cette déforestation c'est déroulée à partir du début de la colonisation européenne, phénomène qui se poursuit à un rythme effarant de nos jours. Alors on va vous dire qu'on replante, mais d'une part on déboise beaucoup plus vite, de deux on replante des espèces qui ne sont pas natives du pays, la plupart du temps dans un but d'exploitation et non de régénération, sans parler du fait que replanter des arbres n'a jamais fait revivre instantanément les écosystèmes complexes qui sont détruits lors de la déforestation. C'est ainsi qu'on se retrouve très souvent face des collines boisées artificiellement, qui sont plus des plantations que des forêts, aux rangées d'arbres bien droites qui laisse apparaître un sol vierge de tout humus et de toute végétation. Il y a les sacs plastiques distribués à la pelle dans les supermarchés, une pollution de l'eau qui commence à affoler tous les experts, une politique de tri trèèès rudimentaire et pas du tout développée dans les campagnes, l'absence presque totale de lois et de mesures concernant l'isolation thermique par ailleurs désastreuse des bâtiments... Bref, comparée à pas mal de pays d'Europe, la Nouvelle Zélande est à la ramasse point de vue écologie et développement durable! Qui l'eu cru?

Et oui, rien n'est parfait! Mais ces derniers points ne concernent pas vraiment le pays ou ses habitants, plutôt ses dirigeants et ses entreprises. La quasi-totalité des gens avec qui nous avons discuter partageaient par exemple un point de vue commun concernant la conservation de leur pays : ses parcs et ses réserves sont leurs jardins, il convient donc de s'en occuper en conséquence.

Finalement, en Nouvelle Zélande, nous nous sommes sentis bien, tout simplement. Nous nous sommes profondément attachés à ce pays, ses grands espaces et ses habitants, à la façon dont la vie s'écoule ici. Il s'agit du premier pays d'une culture occidentale résolument proche de la nôtre pour lequel nous avons le coup de coeur, pour lequel nous éprouvons cet attachement si particulier qu'il nous est arrivé d'éprouver au cour de notre voyage, caractéristique des pays qui nous ont marqué plus que les autres. Honnêtement, nous avons même parfois évoqué brièvement la possibilité de nous installer ici. Jamais plus que brièvement bien sûr! Si nous habitons en Nouvelle Zélande, nous passerons toutes nos vacances en France pour voir nos proches, alors que si nous habitons en France nous passerons nos vacances où nous le voudrons!

Un an... C'est la première fois que nous passons autant de temps dans un pays où le déclic a eu lieu, où la sauce a pris, et ça nous fait d'autant plus bizarre de partir!

D'autant que cette fois, nous partons pour la dernière ligne droite : la prochaine fois que nos caisses serons vides, nous rentrerons, et le Petit Tour s'achèvera.

Sur notre petit carré d'herbe, face à l'aéroport d'Auckland, nous finissons de faire nos adieux à la belle. Au revoir Nouvelle Zélande! Nous nous levons, arnachons nos sacs, et partons vers le terminal et la prochaine et dernière étape de notre voyage : l'Amérique du sud!

A bientôt, de l'autre côté du Pacifique!