vendredi 15 mai 2015

Retrouvailles, apple picking, parcs nationaux, et... Good bye and thank you Tasmania!

Un nouveau pavé pour rattraper le retard pris sur le blog, publié depuis Torquay, à l'ouest de Melbourne. Il relate les événements de ces... trois derniers mois!

Nous avons donc quitté cette chère Tasmanie pour revenir sur l'ile principale, où nous allons continuer notre quête de dollars pour la suite du Petit Tour.

Je dis continuer, parce-que oui, nous avons enfin réussi à nous refaire une santé financière sur l'ile! 

Après nous être retrouvé à la fin de mon travail en permaculture, Léonore et moi avons rejoins la Huon Valley, où j'avais déjà travaillé en janvier, pour y attendre la saison de cueillette des pommes.

Après quelques déboires, nous avons finalement trouvé une ferme parfaite, et y avons travaillé comme pickers pendant plusieurs semaines. Notre superbe prestation nous a assuré un revenu plus que satisfaisant, même si l'apple picking s'est avèré epuisant.

Après ces semaines de dur labeur, nous sommes partis pour un tour de l'ile et de ses parcs nationaux. Nos ardeurs ont malheureusement été calmées après quelques jours par l'implacable et imprévisible météo tasmanienne de ce début d'automne. Nous avons quand même pu voir des parcs absolument magnifiques qui montrent une fois de plus que l'Australie, niveau nature, ne fait pas les choses à moitié!

Enfin, grande nouvelle : avant de quitter l'ile, nous avons décroché nos visas pour le Vietnam et avons acheté nos billets d'avion pour Ho Chi Minh. Le 31 juillet prochain, nous retournons en Asie!

En attendant, reprenons à partir de mon départ de la Tiger Hill Permaculture, alors que Léonore est en route pour me rejoindre...


Réunification du Petit Tour

Ivan me pose à Buckland, et je décide de rejoindre Sol et Raphael à Campania. Tout le monde se retrouve toujours à Campania! 

Le stop est comme d'habitude d'une efficacité redoutable, et je met à peine une heure à rejoindre le petit village.

Je profite du week end pour... ne rien faire du tout. Le stop, vivre dehors, les cerises, le festival, la ferme... Il y a près d'un mois que je ne me suis pas posé, et je suis épuisé. ''Tu te reposeras quand tu seras mort'' qu'il disait... Et bien je suis mort!

Le lundi arrive rapidement et avec lui ma dernière mission solitaire et mon dernier stop avant quelques temps : Léonore n'a pas encore reçu sa paye pour les fraises, et l'aménagement du van ainsi que le trajet de 2000km pour rejoindre Melbourne et le ferry l'ont laissé sur la paille financièrement. Mais réellement sur la paille : le réservoir du van est à sec et elle n'a même plus de quoi payer un plein...

D'où la mission : je dois lever le pouce pour la rejoindre et payer l'essence.

Je pars en debut d'après midi, sous la pluie et les mains dans les poches. Je met moins de 5h pour franchir les 350km qui me séparent de Devonport, durant lesquelles je fais rêver tous mes gentils chauffeurs quand je leur explique le but de mon périple. C'est tellement romantiiique!

Je débarque à Devonport en même temps que les voitures du ferry, et bientôt Léonore arrive. Nous nous sautons dans les bras, il ne manque que les violons!

Et voilà. Le ''je'' redevient ''nous'', la team Petit Tour est à nouveau au complet. C'est la fin de deux mois de vadrouille en solo, deux mois qui nous aurons permis à tout les deux de réflechir, de discuter, de comprendre.



L'expérience du voyage en solitaire aura été constructive. C'est une autre facon de vadrouiller, ni meilleur ni moins bonne, avec d'autres avantages mais aussi d'autres inconvénients.

Pour l'heure, nous repartons sur les routes tous les deux, et à bord de notre propre véhicule cette fois-ci! 

Et oui, en plus de retrouver Léonore, je découvre, ravi, le fameux van que nous avons gagné à la Gordon Country, formidablement aménagé et équipé par Léo tandis que j'usais mes semelles en Tasmanie. Le moins que l'on puisse dire, c'est que mon niveau de vie et de confort va faire un prodigieux bond en avant!

Nous retournons à Campania dans la soirée (c'est tout de même génial et bien pratique d'être véhiculé!), pour nous poser dans notre cocon, remplis de commodités. Ustensiles, boites, rangements, matelat, oreillers... Le van est tout confort, et ça fait du bien!




Nous prenons quelques jours pour nous retrouver, nous raconter nos histoires et nous organiser, profitant du bonheur d'être à nouveau ensemble, tout benêt et souriant, avant de mettre le cap vers la Huon Valley, au sud est de la Tasmanie, qui constitue le coeur de la production de pommes de l'ile.

Nous sommes tous les deux obsédés par le fait de retourner en Asie. Comme moi, Léonore est décidée à ne faire plus qu'une chose en Australie : gonfler le compte en banque. Nous décidons de passer les quelques mois qui nous restent ici à travailler.

Prochaine étape : écumer les vergers jusqu'à la fin de la saison!


Attente, espoirs et déceptions dans la Huon Valley


Je me prépare pour l'apple picking depuis plus d'un mois. La saison démarre bientôt, et en cette fin février nous sommes tout juste en avance pour ne pas rater le départ. Nous avons les adresses de tous les vergers des environs, et j'ai déjà posé une candidature pour la cueillette des pommes à la Glenburn, la ferme de Cygnet où j'avais achevé la saison des cerises il y a quelques semaines. De plus, après tout ce temps passé à vadrouiller la région et à rencontrer du monde, nous disposons à présent d'un reseau d'amis également en quête de travail à travers toute la vallée, et nous nous tenons tous mutuellement au courant des dernières nouvelles sur les opportunités et les hypothétiques dates du top départ de la saison.

Il n'y a plus qu'à trouver!

Comme je le disais, nous arrivons dans la vallée un poil en avance, et nos premières tournées des fermes nous montrent juste que la saison n'a pas débuté.

En ce qui concerne nos points de chute, nous pouvons compter sur les facilités qui abondent dans les parages! Avis aux voyageurs fauchés en perdition et en quête de coins camping gratuits (et légaux!) dans la Huon Valley (si vos standarts ne sont pas trop élévés bien sur) : Nous disposons pour patienter de deux camps de base. Si il y'a bien une chose qu'on ne peut pas enlever a l'Australie, c'est bien sa profusion de free campsites (presque) tout confort. 

Ainsi, nous squattons tout d'abord une aire de repos en bord de rivière dans le petit village de Judbury, à 10km à l'ouest de Huonville :



Pour les intéressés, première à gauche après le pont juste à l'entrée du village.

Nous migrons ensuite dans le sud de la vallée pour Geeveston, village réputé pour la coupe et le travail du bois, toujours en bord de rivière. 













Si vous êtes sur place, cherchez l'Heritage Parc.

Sans débourser un centime, nous profitons donc dans ces deux mignonnes bourgades de toutes les commodités, disons vitales, à savoir de l'eau, des toilettes et un coin où poser le van. Nous avons même en prime des barbecues électriques en libre service. Les douches chaudes ne sont bien sur pas de la partie et nous nous lavons au robinet, mais on ne va pas faire les difficiles.

Et puis... Et bien nous attendons, accumulant les allers-retours entre Geeveston et Judbury, jour après jour, en observant les vergers sur la route pour guetter le signe d'un début d'activité. Nous nous ravitaillons et profitons d'internet et de ses offres d'emplois à Huonville, la principale agglomération de la région.

Nous commencons bientôt à voir les bins, ces grosses caisses destinées à recevoir les pommes, s'aligner dans les vergers, mais les nouvelles fraiches sont toujours les même : la saison se fait attendre.

Nous envisageons de passer directement dans les fermes pour réserver nos places, mais apparemment les exploitants, excédés par le passage de dizaines de candidats chaque jour, envoient tout le monde sur les roses.

Refusant de nous griller en harcelant des fermiers visiblement déjà bien à bout, nous rédigeons de jolie petites annonces que nous distribuons dans toutes les exploitations, et repassons à Cygnet pour laisser une nouvelle fois nos coordonnées à la Glenburn.

Pour l'anecdote, c'est là que l'inévitable est arrivé : tous nos comptes en banque, français comme australiens, se sont retrouvés épuisés. Ca y'est, nous y sommes, nous n'avons plus un rond... Durant une journée, avant que la paie de Léonore pour ses jours de picking de fraise n'arrive enfin! Au poil tout ça...

Et puis... nous attendons les appels. Il n'y a pas grand chose à raconter, nous ne faisons que silloner la vallée depuis Huonville au nord jusqu'à Dover, tout au sud, à l'affut du top départ.

Fort belle vallée soit dit en passant, s'étendant de part et d'autre de la Huon River, pour la petite histoire explorée pour la première fois par des français, l'amiral Bruni D'Entrecasteaux et son second, le capitaine Huon de Kermadec (quand je disais qu'il n'y avait pas grand chose à raconter...).


Une semaine s'écoule, sans le moindre appel. Le début de la saison prend du retard, mais ça a été le cas pour tout le picking en Australie cette année, nous restons donc confiant.

Nous nous occupons comme nous pouvons en dépensant le moins d'argent possible, mais sommes quand même pressés d'attaquer. Une surprise vient neanmoins bousculer notre quotidien : nous faisons la connaissance de Nathalie et de Max, qui nous ont découvert et contacté par l'intermédiaire du blog!

Nous passons également quelques soirées avec Antoine et Ivan, qui ont eux aussi quitté la permaculture de Paul pour tenter leur chance dans les pommes.

Le temps commence quand même à nous paraitre long, quelque chose cloche... Et les messages de nos amis arrivent, tout le monde commence à bosser. Pourquoi pas nous? Et bien parce qu'en bons naifs, nous n'avons pas voulu jouer la carte du harcèlement, alors que la technique pour trouver du travail ici, c'est justement de passer tous les jours dans les fermes pour se faire envoyer paitre, jusqu'à ce que les employeurs disent que c'est bon... Il est inutile de laisser son numéro, ils ne rappellent pas. C'est pour le moins étrange.

Nous ne ferons pas deux fois la même erreur. A l'annonce du début de la saison, nous filons directement à la Glenburn. Trois fois que je postule là-bas, depuis fin janvier, il y'a quand même de grandes chances pour que l'on nous prenne!

Et bien... Non. La patronne n'a pas fait de liste d'attente, et elle nous fait poireauter près de trois heures avant de nous planter un couteau dans le dos en nous annonçant que ses équipes sont déjà complètes, ils ont embauchés au petit bonheur la chance... Je fulmine, bouillonne, mais il n'y a malheureusement rien à faire, nous l'avons dans l'os. Un mois de relances, de candidatures, d'appels et de visites... Pour rien.

En consolation, nous recevons la visite d'un ornithorinque pendant notre attente. Sa présence au milieu d'une exploitation fermière casse un peu le mythe de l'animal mystérieux dans son étang caché au fond de la forêt, mais baste, nous n'en avons jamais vu d'aussi près!




La trahison de la Glenburn plombe notre moral et notre motivation, nous craignons d'avoir raté le coche, et après tous ces jours d'attente, ça fait mal.

Dépités, nous nous posons à Huonville, silencieux, dégoutés par cette satanée recherche d'emploi, mais nous continuons d'écumer les sites d'annonces de jobs sans trop y croire. La journée est maintenant trop avancée pour attaquer une tournée des fermes, seul méthode de recherche efficace...

C'est alors que le téléphone sonne...


Apple Picking


Désolé, une seule photo pour cette partie. Le temps, c'est de l'argent!



O joie, gloire, nous n'attendrons pas la délivrance trop longtemps. Un fermier à l'annonce duquel nous avions répondu la veille nous propose une place dans son équipe de pickers! Ni une ni deux, nous acceptons.

Nous sommes recrutés par la Steevenson, petite exploitation familiale proche d'Huonville. Nous y passons dans l'après-midi, pour faire la connaissance d'Adrian, le père, et de son fiston, qui font tourner la ferme. Nous pouvons attaquer le lendemain! Le hic, c'est que le travail ne sera pas long, dix jours au grand maximum, mais nous n'allons pas faire les fines bouches.

Tout frétillant apres une bonne nuit de sommeil à Judbury, nous débarquons aux aurores dans le verger. On nous remet nos sacs, et c'est parti, sous la tendre férule de Steevenson père et fils qui prennent le temps de nous former.

La cueillette des pommes, dans le principe, est simple : on dispose d'un sac ventral qu'on rempli d'une quinzaine de kilos de pomme avant d'aller le vider dans la bin, grande caisse en bois contenant en moyenne 350 kilos de fruit. Ce sont ces dernières qui sont comptabilisées pour la paie de la journée, calculée au rendement, chaque bins remplies rapportant 35$.

Dans la pratique, le boulot nécessite un petit temps d'apprentissage. Il faut savoir manier son échelle, picker son arbre et remplir sa bin correctement et rapidement etc... Alors forcément, au début, on fait des erreurs, on perd du temps... On s'apperçoit que cueillir des pommes, c'est pas de la tarte (ça c'est fait)... Mais nos boss sont là pour nous reprendre et nous expliquer.

Le plus important reste de FAIRE GAFFE AUX FRUITS!

En effet, la plus grosse difficulté réside dans le fait que les pommes ont besoin d'amour, comme chaque chose... Et les bougresses sont délicates! Le moindre choc contre une surface dure, telle que l'échelle, le bord rigide du sac, ou une autre pomme, les marque d'une tâche brunâtre. La chose n'est pas bien méchante en elle-même qualitativement parlant, mais est bien sur suffisante pour dégouter le consommateur lambda.

Il faut donc faire attention en permanence. Dans notre situation, la difficulté est encore accentuée par le fait que nous pickons des Golden Delicious, qui font partie des variétés de pommes les plus fragiles et qui marquent le plus facilement.

Et nous nous appercevons peu à peu que nos patrons sont du genre zélé. A l'extrême. Ils n'acceptent pas plus de cinq ou six pourcents de pommes poquées. Le bon point, c'est que bien qu'exigeants, ils sont adorables et pédagogues, et nous expliquent en détail comment picker efficacement et correctement.

Il nous faut quand même aller trèèès doucement, et le rendement s'en ressent forcément : le premier jour, nous n'allignons que 4 bins, pour un revenu brut de 140$. Moins de 70$ net par personnes après 10h de travail, ça fait grincer des dents, mais nous mettons ça sur le compte de notre inexpérience. Ca va forcément augmenter!

En bien non. A notre arrivée le lendemain, nous sommes seul dans notre verger. Et pour cause, les autres pickers ont tous été virés à cause de la ''mauvaise'' qualité de leur bins! Plus que zélés, plutôt félés, Stevenson père et fils nous annoncent que nous n'étions pas loin de nous faire renvoyer nous aussi, notre picking de la veille étant à peine correct selon eux... Nous commençons à nous dire que quelque chose cloche ici. Et ce n'est pas fini...

Nous mettons plus de deux heures à remplir notre première caisse de la journée... Pour entendre le fiston nous dire qu'elle n'est pas bonne. Encore une comme ça et nous serons renvoyés... Nous essayons de comprendre : nous sommes leurs derniers pickers, ils ont renvoyé tous les autres, et nous essayons de faire du bon travail, mais nos boss veulent la perfection. Nous mettons tout nos petits coeurs dans le picking de la deuxième bin, que nous remplissons en 4 laborieuses heures... Faites le calcul : ça nous fait un peu plus de 4$ de l'heure chacun, soit une moitié de smic francais...

La motivation est au plus bas. Entre le rendement calamiteux, la fatigue, les critiques, même formatrices, nous sommes abattus. Et puis mince, nous avons nous-même quelques notions de management et avons plusieurs fois dirigés des équipes en France : la menace perpétuelle du renvoi n'est pas le meilleur moyen pour motiver ses troupes. Le moral est bas... Ce n'est pas possible, ça ne peut pas être partout comme ça...

Nous envisageons de partir. Ca peut sembler stupide et inconsidéré de quitter un travail maintenant que nous en avons, sans garantie de place ailleur, alors que nous cherchons à nous refaire une santé financière et que nous n'avons plus un radis, mais nous pensons pratique : nous n'avons plus droit à l'erreur, et nous ne voulons pas travailler avec la menace permanente du renvoie. De plus, nous sommes embauchés pour quelques jours seulement. Sans parler du fait que nous devons prendre plusieurs heures pour remplir une bin jugée satisfaisante, pour un salaire plus que ridicule. Et puis, ce ne sont que des suppositions, mais les conditions de travail doivent être forcément mieux ailleur.

Nous faisons part de nos doutes à nos employeurs en partant, qui nous proposent de vérifier notre dernière bin et de nous appeler. De notre côté, nous hésitons à partir sans attendre la réponse.

Le doute nous ronge, heureusement le retour à Judbury nous apportera la réponse. Nous récuperons un autostopeur sur le trajet, et après l'avoir déposé rencontrons ses amis (tous français bien entendu. On l'a dit, il vaut mieux parler français qu'anglais pour voyager en Tasmanie!), tous en train de travailler dans le picking.

Leur verdict après avoir écouté nos mésaventures, en comparaison de leur conditions de travail, est sans appel : nous avons supposer juste, nos employeurs sont des maniaques, il n'y a pas assez de jours de travail, le boulot est un calvaire et n'est absolument pas rentable. De leur côté, ils débutent tout comme nous mais remplissent au moins 4 ou 5 bins par jour chacun! Ils résument ça simplement : ''partez, n'importe quelle autre ferme sera meilleur''. Et bien c'est décidé!

Lorsque Steevenson nous rappelle, nous démissionons, puis laissons passer le week-end avant d'attaquer la tournée des fermes dès le lundi matin.

Le culot fonctionne plutôt bien. La saison ne fait que commencer, beaucoup de fermes manquent encore de main d'oeuvre et on promet de nous rappeler de nombreuses fois. A midi le téléphone sonne. On nous propose du travail pour l'aprés-midi même à la Scott Bros, une grande exploitation près de Geeveston. Il n'y a malheureusement que quelques jours de travail en renfort des équipes déjà embauchées, mais notre compte en banque ne nous permet plus de refuser quoique ce soit.

Une fois au travail, même si nous sommes toujours assez lents, il faut avouer que tout va mieux. Les arbres sont moins grands, les responsables beaucoup plus tolérants, et nous n'avons pas à affronter la moindre remarque sur notre travail. L'homme qui s'occupe de nous, un allemand du nom d'Helmut, est une crème et est même très satisfait de notre picking. Ca fait plaisir!

Et au fil des premiers jours, nous prenons le coup de patte. De 4 bins nous passons à 6, puis 8 par jours à deux, pour un salaire déjà beaucoup plus satisfaisant.

Le travail s'avère très physique, fatiguant, et ravage le dos... Mais nos efforts payent!

A la fin de la semaine, Helmut nous annonce que le patron nous propose de rester finalement jusqu'à la fin de la saison, dans trois ou quatres semaines. Apparemment, nos bins sont jugées ''fantastic''. Comme quoi notre calvaire à la Steevenson aura servi à quelque chose!

A partir de là, tout va pour le mieux, même si nos journées sont d'une invariabilité épuisante : nous nous levons, déjeunons, ramassons des pommes pendant 9 ou 10h, rentrons, mangeons et dormons. Mais les dollars rentrent, et c'est bien tout ce que nous demandons. Il faut avouer que tout de même, parfois, il faut vraiment penser très fort a la suite du voyage que va permettre cet argent pour continuer à ramasser, encore et encore...

Nous apprenons toutes les petites subtilités de l'apple picking, et gagnons peu à peu en rapidité.

Nous ramassons 9 ou 10 bins par jour en moyenne. Bien sur, de nombreux facteurs font varier ce chiffre. Ainsi, un verger de petits arbres où nous n'avons pas besoin d'utiliser nos échelles nous permet de picker jusqu'à douze bins dans la journée. Pour peu que les pommes soient de bonne taille et nous culminons à treize.

A l'inverse, certains arbres difficile d'accès ou plus grands font diminuer le rendement. Sans parler du fait qu'il faut parfois cueillir les pommes en les sélectionnant suivant leur couleur.

Nous travaillons 5 jours par semaine, sauf lorsque le temps est vraiment trop exécrable. J'avais déjà évoqué la météo Tasmanienne particulièrement changeante et imprévisible. Il faut savoir que la Huon Valley dispose en plus d'un microclimat qui lui est propre. Il résulte du mélange entre les deux une formidable anarchie météorologique, d'autant plus violente que nous sommes à présent au début de l'automne. Nous nous levons parfois avec du gel, pour passer une matinée venteuse sous les averses, puis suer sous un soleil de plomb dans l'après-midi...

Nous profitons de nos week-end pour visiter un peu la zone. Par souci d'organisation, nous parlerons de ces sessions de tourisme plus tard.

Les semaines se suivent, le ras-le-bol se fait plus pressant et le dos de plus en plus douloureux, mais nous continuons. Certaines journées sont de véritables calvaires, et les pommes nous sortent par les trous de nez, mais nous rentrons entre 200 et 400$ par jour, donc nous éteignons les cerveaux et serrons les dents. Les bins s'accumulent, par dizaines, et nous commencons à voir l'argent couler à flot.

Il apparait que contrairement à nos suppositions, aussi étonnant que cela puisse paraitre, nous sommes de bons pickers, rapides, efficaces et consciencieux.

Enfin, après trois semaines, vient l'heure du dépa... A non! La ferme n'a plus besoin d'autant de pickers, mais nous faisons partie des rares élus pour continuer jusqu'au bout. Il s'avère que nous sommes même très bon. Tiens donc, ainsi nous avons un don inné pour l'apple picking? Ca c'est chouette alors!

Nous en arrivons aux Pink Ladies. La Pink Lady, c'est un peu la princesse capricieuse de l'univers pommier. Si les Goldens étaient délicates, la Pink Lady représente le summum de la fragilité, la plus sensible de toute les variétés de pomme. Une infime pression, même du doigt, la marque d'une tâche brune invisible de l'extérieur. On ne peut pas la cueillir quand elle est mouillée, l'eau rendant sa peau encore plus fragile, les arbres qui la portent sont immenses, et pour compléter ce tableau dantesque de la plus insupportable des pommes, il faut sélectionner ce que l'on ramasse suivant la couleur.

Et le pire... C'est qu'elles ne sont même pas bonnes!

Leur picking étant extrêmement délicat, on le réserve à la crème de la crème du picking, en l'occurence nous. Car oui, nous voilà bombardés meilleurs pickers de la ferme...

Nous attendons notre prochaine conversation mondaine avec impatience. Dans une société d'élites intellectuelles telle que la notre, c'est quand même le top de la classe et de la réussite sociale que d'annoncer que nous... Bah nous ramassons super bien les pommes!

Ah ça, nous sommes fiers... Un sacré cadeau empoisonné... La semaine que nous passons dans les rangés de pink ladies est très éprouvante, surtout après toutes ces journées de travail. Nous ne savions pas qu'il était possible d'éprouver une haine viscérale pour un simple fruit...

Et la saison arrive à son terme. Nos doigts sont couverts de crevasses et de corne, nos dos sont des blocs de pierre douloureux, nous nous redressons tel de petits vieux, et nous ne voulons plus entendre parler de pommes, plus jamais, mais nous sommes plus que satisfait de la somme que nous avons réussi à recolter, surtout lorsqu'on pense à l'avenir du voyage.

Voici un petit bilan à destination de ceux qui voudraient se lancer dans l'apple picking :

Nous avons travaillé en tout 24 jours complets, pour ramasser 208 bins (plus de 66 tonnes de pommes!), soit en moyenne un peu plus de 4 bins par jours et par personne.

Ceci nous à rapporté, net, 6053$ (4293 euros), soit un salaire moyen de 126$ (90 euros) par jour et par personnes.

On peut donc dire que l'apple picking peu rapporter pas mal, mais qu'il faut être capable de travailler dur. Sur la durée, il est même carrément nécessaire de s'accrocher. Encore une fois, oui, il est possible de faire beaucoup d'argent, mais non ce n'est pas facile.

Nous voilà enfin renflouer. Ca faisait longtemps que nous n'avions pas disposé d'une telle somme. En comptant l'argent que devrait rapporter la vente du van à notre départ, nous avons même plus qu'à notre départ de France!

Nous sommes ravis. La suite du Petit Tour s'annonce sous son meilleur jour à présent que nous avons réussi à faire des économies significatives. Et ce n'est pas fini! Nous comptons bien mettre encore plus de côté en retournant sur l'ile principale pour la cueillette des agrumes dans le Victoria, qui commence d'ici quelques semaines.

Pour l'heure, nous avons bien mérité quelques vacances avant de quitter l'ile!


Plongée dans les joyaux naturels tasmaniens

Il est temps de faire quand même un peu de tourisme dans ce monde de brute. La Tasmanie recèle des trésors qu'il serait bête de rater, même si nous avons fait une croix sur une visite approfondie de l'Australie.

En effet, la Tasmanie est le territoire qui possède le plus grand pourcentage de sa surface classée en parc national au monde, une aubaine pour deux sauvages comme nous.

Nous commençons à profiter de ses étendues sauvages durant nos jours de repos pendant la période de picking.


Le South-east cape




Durant les premières semaines de cueillette, nous avons encore suffisament d'énergie une fois le week-end venu pour quelques escapades en pleine nature.

La première nous conduit à l'extrême sud de l'ile, pour une balade à travers la Tasmanian Wilderness Area jusqu'au South East Cape, le point le plus au sud de l'Australie.

Nous rejoignons Cookle Creek, point de départ de la rando, en traversant de sympathiques paysages.

Port Esperance



C'est parti pour une balade de 4h dans l'une des dernière région tempérée complètement sauvage du globe. La Wilderness Area est tellement préservée qu'il est nécessaire de laver et de désinfecter ses chaussures avant d'y pénétrer, pour éviter d'y apporter germes et autres champignons. 



Nous longeons la plage avant de nous enfoncer dans la forêt qui résonne de chants d'oiseaux...



...Puis débouchons sur une plaine immense battue par les vents, entourée de colline, au milieu de laquelle serpente le sentier. Le cadre est formidable, comme d'habitude lorsqu'on s'évade un peu dans ces contrées.




Après une dernier crapahute en forêt, nous approchons du cap sud et de ses hautes falaises, pour enfin descendre sur la plage et regarder l'horizon. Dire que l'antartique se trouve en face de nous, à quelques milliers de kilometres!




Nous rentrons au van dans la soirée, heureusement nous pouvons encore compter sur les emplacements de camping gratuits à l'entrée du parc pour passer la nuit. Aujourd'hui encore, comme à chaque fois que nous la retrouvons en Australie, dame nature nous a fait pétiller les yeux!


Le Hartz Mountain National Parc



Le week-end suivant, nous mettons le cap à l'ouest de Geeveston pour une virée dans le parc national des Hartz Mountains. Sculpté par le mouvement des glaciers il y a une centaine de milliers d'années, le parc regorge de lacs, de cascades et de reliefs escarpés.

Nous partons tout d'abord pour le lac Osborne, par un sentier qui traverse des étendues de végétation brousailleuse dominées par les collines.













Le lac se dévoile bientôt, et nous nous passons un moment à savourer le calme qui règne à ses abords.


Léo savourant le calme...

Nous traversons ensuite la vallée pour rejoindre les Arve Falls, cascades que nous observons depuis un promontoire offrant de plus une vue imprenable sur la vallée.






Notre dernière marche de la journée nous fait grimper le plus haut sommet du parc, très originalement nommé le Hartz Peak...

Nous traversons plaines et bosquets bordés d'étangs.







Le temps se couvre tandis que nous attaquons l'ascencion, dans un décors toujours aussi beau et sauvage.


un petit visiteur...












Arrivés au sommet, par chance toujours au sec, le panorama malgré les nuages est grandiose.




Nous rentrons à Geeveston sous la pluie, près à affronter une nouvelle semaine de labeur.

Le labeur en question, les semaines suivantes, est tellement éreintant que nous passons nos week-ends au camping à buller... Pas très aventureux, mais il faut bien récuperer.

Une fois la saison de picking achevée, nous etablissons un programme pour la suite. Le retour sur la main island approche, nous voulons rejoindre le Victoria d'ici fin mai pour trouver un nouveau travail dans la cueillette des agrumes. Il nous reste un peu de temps avant le début de la saison, que nous souhaitons mettre à profit pour un petit tour touristique de la Tasmanie.

Avant de quitter la Huon Valley, nous organisons le départ : dans dix jours, le 13 mai, Léonore prendra le ferry avec le van tandis que par souci d'économie je rejoindrais quand à moi Melbourne en avion.

Voilà qui nous laisse une semaine et demi pour vadrouiller l'ile sans contraintes. Première destination, une petite ile paradisiaque près de la côte est, qui m'est chère et sur laquelle je voulais retourner...


Retour sur la Maria Island




Et oui, rappelez-vous, nous avions découvert cette petite ile avec Rémi, sa vie sauvage incroyable (wombaaat!!!), son calme et ses décors somptueux. Malheureusement, le soleil n'était alors pas de la partie et mon pied en vrac ne nous avait pas permis de profiter des sites majeurs du parc.

Nous décidons donc d'y retourner tous les deux, quittant la Huon Valley pour rejoindre Triabunna, au nord d'Hobart, et le ferry pour la Maria.

Nous n'embarquons que la tente, quelques boites de haricots et de nouilles, abandonnons le van et prenons la mer, sous un soleil radieux. Une fois sur l'ile, nous posons le camp avant de partir directement à la recherche de marsupiaux... Qui comme la dernière fois se montrent par dizaines, wombats, wallabies et pademelons! C'est un vrai plaisir de revenir ici et de retrouver toutes ces boules de poils qui bondissent et trottinent de partout!







Nous profitons de cette première journée pour aller crapahuter au nord de l'ile.



Nous passons la fossile cliff, littéralement la falaise aux fossiles, dont l'exploitation au 19ème siècle a permis d'y dégager moult traces de coquillages fossilisés, avant d'attaquer la grimpette du mont Bishop and Clerk.





L'ascencion d'une heure et quelque nous fait longer une série de falaises avant de nous plonger dans la forêt. Apres quelques éboulis et une petite session d'escalade, nous arrivons au sommet du mont qui domine toute l'ile. Encore un sacré point de vue, d'un côté sur la Maria et la côte tasmanienne, de l'autre sur l'océan pacifique.








Au retour, une surprise nous attend. En contrebas des falaises, un groupe d'une vingtaine de dauphins croise près de la côte! Nous nous posons un moment pour les observer, ce n'est pas tous les jours.




Nous mettons un bon moment à rejoindre le camp. En effet, le coucher du soleil correspond à l'heure de pointe des marsupiaux, qui envahissent complètement chaque mètre carré d'herbe. Il y'en a littéralement de partout, pour notre plus grand bonheur.









Que ça fait plaisir de marcher au milieu des kangourous et des troupeaux de wombats!

Avant de rentrer, une petite promenade sur la plage où nous attend un coucher de soleil comme on en fait plus...



Une fois la nuit tombée, nous nous rappelons en frissonnant que nous sommes en automne... La température chute rapidement, et nous battons en retraite vers la tente après le diner... pour trouver un régiment d'oppossums venu chercher quelques chose à manger dans notre campement! Il faut les voir, s'infiltrer dans notre dos, se cachant dans l'ombre pour mieux nous contourner.



La nuit est fraiche, et marquée par l'impact violent d'un wombat, fuyant probablement un diable de Tasmanie, qui s'écrase sur la toile de la tente,..

Au matin, direction le sud en passant par les célèbres painted cliffs, les falaises peintes. Sur notre chemin, nous observons, émerveillés, la nature qui s'éveille...






Nous longeons plages et récifs couverts d'anémones, et atteignons les falaises.




Les Painted Cliffs et leur forme improbable due à l'érosion, que nous n'avions pas vu la dernière fois, doivent leur nom au différentes nuances de jaune, d'orange et de rouge qui s'étalent artistiquement sur leur paroie. C'est l'eau, filtrant à travers la roche poreuse, qui y a déposé les oxydes de fer responsables de cette coloration.

 




Nous continuons notre route vers le sud, traversant forets et plaines, marecages et plages de sable blanc. Certains cliches presentent les meme points de vue que la derniere fois, c'est quand meme mieux sous le soleil!

Bien sur, nous croisons a nouveau une pelletee de petits n'animaux trop meugnons.










Arrive au centre de l'ile, nous posons le camps dans une plaine puis partons explorer les plages des environs. Il n'y a pas ame qui vive en dehors des bestioles, nous sommes les seuls etres humains a des kilometres, et c'est jouissif!






Nous profitons du soir et du fait que nous sommes seul au monde pour nous tapir dans les fourres en esperant surprendre un diable de Tasmanie sortant pour sa chasse nocturne... Malheureusement, nous n'aurons que des wombats au menu ce soir...



Apres une nouvelle nuit fraiche et revigorante, nous rejoignons le nord de l'ile par un sentier forestier, pour attendre notre bateau.


Nous quittons l'ile en fin d'apres-midi, des images plein la tête. Chaque tour de la Maria Island est formidable, chaque plongee dans cette environnement preserve laisse des souvenirs imperissables. Et pour achever de la plus belle facon qui soit cette magnifique escapade, nous avons droit a une escorte de dauphins qui entourent le navire durant la traversee! La totale!


Apres une nuit enfin chaude dans le cocon du van, nous partons pour la prochaine etape, et pas des moindre.


Freycinet National Parc




Depuis le temps qu'on nous en parle du célèbre parc national de Freycinet... Rendu incontournable par la fameuse Wine Glass Beach (ci-dessus), que beaucoup classent parmis les 10 plus belles plages du monde, il attire les touristes du monde entier.

Nous suivons la côte est vers le nord et la Coles Bay pour aller faire une petite reconnaissance de l'entrée du parc. Le ciel est chargé, mais la météo sera apparement plus clémente demain. Nous décidons donc de laisser passer une journée, et rejoignons un spot de camping aux alentours du village de Swanwick, à quelques encablures du parc, pour passer un après-midi à nous goinfrer au chaud dans le van tandis que la pluie tombe.

une accalmie nous permet quand même de mettre le nez dehors, pour vivre l'événement de la journée : sur la plage qui jouxte le camping, nous découvrons un rassemblement de milliers de petits crabes attendant la marée haute! Il y en a de partout, qui s'enterrent dans le sable à notre approche. 






Au matin, soulagés de découvrir un beau ciel bleu, nous attaquons notre exploration du parc, grimpant dans la forêt au milieu d'imposant blocs de granit rose, pour atteindre un point de vue sur la celebre plage et son arrondi presque parfait.

Point de vue sur la Coles Bay












Wine Glass Bay
Nous dégringolons du point de vue pour rejoindre la plage. Sable blanc et eau turquoise, cadre montagneux et forestier... Oui, c'est beau!






Nous traversons ensuite une jungle pour atteindre la Hazard Beach et ses kilomètres de sable doré.
Et l'eau est tellement claire!



S'ensuivent deux petites heures de marche durant lesquelles nous croisons de petites criques paradisiaques, traversons la bush et longeons des falaises offrant une vue magnifique sur la Coles bay. Nous apprécions la balade et son cadre à la fois montagneux et maritime.





Apres nous être bien decollés les rétines dans le parc, nous finissons la journée en écumant les plages et les points de vue des environs.

Honey Moon beach











Friendly Beach
Sleepy Bay
Cap Tourville

 Nous trouvons à la Friendly beach un coin où nous poser pour la nuit après une journée fantastique à parcourir des endroits tous plus turquoises, blancs, verts et dorés les uns que les autres!

Le moins que l'on puisse dire, c'est que nous sommes plus que ravi de la tournure que prend jusqu'a maintenant notre petite vadrouille. Le soleil est toujours avec nous et nous voyons des endroits uniques au monde et merveilleux dans une nature dont nous avons suffisament vante les merites.

Nous decidons de continuer vers le nord pour aller marcher dans les Cradle Mountains, un autre site internationalement reconnu de l'ile, avant de partir faire un tour sur la cote ouest, reputee sauvage et quasi-vide de toute presemce humaine.


Les Cradle Moun... Pardon, L'automne en Tasmanie... 



Et bien oui, nous sillonons l'ile tel deux chiens fous, cheveux au vent et sourires aux lèvres, mais nous aurions du nous douter que tant de soleil cachait quelque chose...

A partir de notre départ de Freycinet, la météo va nous rappeler brutalement que nous sommes en Tasmanie, et que l'hiver arrive...

La fin de notre périple ici n'est malheureusement pas très intéressante, et n'aura servi qu'à consommer de l'essence pour rien.

Nous quittons la côte est sous la pluie, pour passer à Launceston au nord et nous diriger vers la Cradle Valley, toujours sous la pluie. Quand nous nous posons pour la nuit dans les montagne, c'est sous la pluie, et lorsque nous repartons le lendemain pour la Cradle Mountain... Devinez...


Nous allons quand même jeter un oeil aux abords enneiges du parc, et la pluie se transforme durant le trajet en prodigieuse tempête de neige.

Nous passons quelques jours vers Devonport pour travailler sur l'article, tandis que les alertes météo se succèdent et que le vent déracine les arbres, et nous prenons l'habitude de dormir dans un van secoué par des rafales très violentes.

Notre redescente sur la côte ouest est rythmée par les orages, les pluies diluviennes et un vent à dépoiler les wombats, tous les jours, sans interruption.

Après quelques jours, nous nous résignons, et reprenons la route de la cote est en direction d'Hobart. Une fin de voyage en Tasmanie bien pitoyable, mais nous ne pouvons pas y faire grand chose.

Nous effectuons un dernier passage au camping de Campania (oui, encore) pour un brin de lessive et de nettoyage.

Nous en profitons pour squatter la bibliothèque de Sorell et réaliser une avancée majeur... Nous faisons nos demandes de visas pour le Vietnam et achetons nos billets d'avion pour Ho Chi Minh. Nous sommes surexcités à l'idée de voir se profiler le retour en Asie que nous attendons depuis si longtemps! Il reste quand même deux mois et demi avant de retourner sur ce continent qui nous a tant marqué dans tous les sens du terme, nous devrons encore prendre notre mal en patience...

Leonore me pose le 12 au soir à l'aéroport et part pour Devonport où l'attend son ferry. De mon côté, je plante la tente à proximité du terminal et m'envole au matin vers Melbourne. Après 4 mois ici, il était quand même temps!

De retour sur la main Island, nous rejoignons Torquay, où j'avais passé le jour de l'an, pour terminer cet article.

Nous avons prévu de passer quelques jours sur la Great Ocean Road, puis nous disposons de deux alternatives. Ou bien nous remontons vers Mildura dans le nord de l'état pour la cueillette des agrumes, ou bien nous profitons d'un nouveau plan : plusieurs de nos amis ont travaillé à Melbourne dans... une usine de donuts! Un travail fastidieux, mais qui apparement rapporte gros, et qui sera probablement notre premier choix.

Nous voilà enfin à jour sur la rédaction!

Pas beaucoup d'aventures ces derniers mois donc, mais comment pourrait-il en être autrement? Entre le van, le travail et... Et bien ce pays, nous vivons plutôt tranquillement. Même les parcs, malgré leur beauté, sont désesperant de tranquillité. Vous avez du remarquer sur les photos tous ces jolis chemins en planches qui parcourent les parcs et qu'il faut suivre... Adieu les surprises, les explorations gratuites, les imprévus. On suit un rail, et même si le décors est beau, ça fait un peu parc d'attraction. Quand il s'agit d'empêcher les gens de piétinner une végétation fragile, ok, mais quand il s'agit d'éviter au randonneur délicat de marcher dans la boue ou d'enjamber une rivière... L'ambiance en prend un coup. Bref.

La Tasmanie, c'est terminé, et nos objectifs sont réalisés. Après nous être retrouvés, l'apple picking nous a vraiment permis de renflouer les caisses, et même si nous avons du mal à retrouver du travail d'ici notre depart, nous avons de quoi voyager encore quelques temps.

Notre Petit Tour a encore une longue vie devant lui, surtout à présent que nous avons nos clefs pour le Vietnam. Dire que nous sommes impatients tient de l'euphemisme. La seule chose que nous voulons, c'est nous noyer dans le travail sans penser au temps qui passe et vite, très vite décoller d'ici. Dès le départ l'Australie ne nous emballait pas plus que ça, alors après presque un an... Et il reste encore deux mois et demi!

Pour finir, on peut dire que la Tasmanie, c'est cool. En Tasmanie, on est tranquille, il n'y a personne, les paysages sont formidables, et il y a presque plus de parc nationaux que de terres cultivables. Et quels parcs nationaux! En Tasmanie, le ciel est beau, et la nuit on peut voir le bras de la voie lactée traverser le ciel même par temps nuageux sous un lampadaire. Même les petits villages historiques ne manquent pas de charme, avec leurs maisons en bois colorées ou en briques qui fleurent bon la période coloniale. Forcément, dans un pays qui a 200 ans, il suffit qu'un bâtiment ai un demi-siècle pour pouvoir y placarder le panneau ''historical''. Pour peu qu'il y en ai 5 ou 6 comme ça dans le centre ville, et vous avez votre village historique. Ce n'est pas Carcassone, mais c'est mignon.

Good bye Tasmania!

lundi 27 avril 2015

Une alternative : La permaculture

Bonjour à tous! Ca faisait longtemps, je sais...

Léonore et moi sommes dans la Huon Valley, dans le sud de la Tasmanie, où nous achevons une saison de picking de pommes très productive, après nous être retrouvés fin février lorsque j'ai quitté la ferme où je travaillais.

Sans dire que nous sommes complètement refais, nous avons tout de même mis de côté une somme conséquente, et ce n'est pas fini! En revanche, il vous faudra attendre le détail de ces laborieuses dernières semaines.

En attendant, voici l'article consacré à mon expérience de la permaculture.

En effet, je vous avait annoncé une histoire en deux partie, ce sera finalement en trois. 

Nous avons beaucoup travaillé ces dernier temps, et le temps consacré à la rédaction s'en est forcement ressentit. Et il y a beaucoup trop de choses à raconter!

J'ai donc décide de consacré un article à part entière sur l'experience de la permaculture, tant le concept m'a parut intéressant et prometteur. Il faudra encore attendre pour la suite des aventures!

Revenons là où nous nous étions arrêter, il y a deux mois.

Après le fractangular festival, j'ai donc fais la connaissance de Paul qui m'a offert un job dans sa ferme.

J'y ai découvert, grâce aux personnes formidables que j'y ai rencontré, un mode de vie alternatif basé sur l'écologie, le développement durable et la vie en communauté, dont les principes m'ont parlé par les ouvertures et les alternatives qu'ils prônnent pour l'avenir.

Mais commencons par le commencement : je suis de retour à Campania, déposé par Paul après le festival, pour une courte nuit avant de rejoindre la ferme...

Au matin, me voilà donc embarqué pour de nouvelles découvertes. Le monde appartenant apparement toujours à ceux qui se lèvent tôt, je jaillis de ma tente à 4h30 du mat, au beau milieu de la froide nuit tasmanienne. L'effet du manque de sommeil est compensé par l'impatience, et je remballe en vitesse pour aller lever le pouce au lever du soleil à la sortie de Campania.

Comme d'habitude, le plus dur, surtout à une heure aussi matinale, est de sortir du bled, paumé en pleine cambrousse et traversé par une voiture toutes les 20 minutes... Je reste plus d'une heure et demi le pouce en l'air avant qu'Emesha, jeune fille toute souriante et complètement électrisée par mes histoires de voyage, ne m'embarque pour Buckland. Elle est tellement emballée et adorable qu'elle me donne son numéro et m'annonce que je n'ai pas à chercher de coin où dormir si je repasse par Hobart : sa maison est désormais la mienne!

La ferme de Paul, nommée la Tiger Hill Permaculture, se trouve quelque part dans les forêts alentours, et j'appelle mon nouveau boss pour qu'il vienne me chercher.

Quelque minutes plus tard, le voilà qui arrive, accompagné de l'un des membre de l'équipe, Francesca, une italienne qui travaille ici depuis plus de trois mois. Paul doit partir pour la journée, et il me remet entre les mains de ma collègue, qui va m'expliquer le fonctionnement de la ferme. Nous embarquons, et sur le chemin de terre qui nous entraine au coeur de paysages de plus en plus sauvages de bush et de plaines verdoyantes (ouiiii!!!), elle m'explique accumuler les aller-retours entre l'Italie et l'Australie, en prenant soin de s'arrêter à chaque trajet durant quelques mois en Inde. Elle se sent plus touriste dans son propre pays que dans celui de Gandhi. J'adhère!

Nous débarquons bientôt à la ferme, qui s'étale sur une clairière à flan de colline. Le décors est à tomber, je commence à être vraiment plus qu'emballé par ce qui m'attend! 


La Tiger Hill Permaculture




Avant de rentrer dans le vif du sujet et de vous expliquer le projet ainsi que les tenants et aboutissants de la permaculture, laissez moi rapidement planter le décors et présenter les acteurs.

Je fais la connaissance de l'équipe, ou plutôt la joyeuse communauté avec laquelle je vais vivre durant les deux prochaines semaines. 




Nous avons de gauche à droite Sarah, Andrea et Ivan, originaires également d'Italie et travaillant ici depuis trois semaines. Vient ensuite Yoshi, japonaise, à la perma depuis 2 mois. J'ai déjà parlé de Francesca, et il reste Antoine, la tête qui dépasse, francais arrivé ici il y a plus de trois mois et manager de la ferme en l'absence de Paul.

En parlant de Paul, le voilà, aux côtés de l'un de ses projets dont je parlerai plus en détail par la suite :



Francesca m'accompagne ensuite pour le tour du propriétaire. La partie centrale du domaine est la maison de Paul, qui constitue l'espace commun où nous cuisinons, mangeons et nous reposons.


oui, nous sommes bien!


Autour de la maison se trouvent le potager, les toilettes à compost, divers hangars et entrepots, ainsi qu'une cuisine extérieur encore à l'état de projet.

Au sommet de la colline, surplombant la ferme, je découvre mes appartements, sous la forme d'un petit chalet que je partage avec Ivan. La vue depuis la terrasse est formidable!




Tout ceci a poussé petit à petit depuis 2012 sous l'initiative de Paul. Mineur dans le sud-ouest australien, il a passé deux ans à investir de l'argent dans ce projet pour réaliser son rêve : établir une permaculture opérationnelle, y accueillir des volontaires et enseigner les principes et les concepts de la permaculture.

Et nous y voilà. Qu'est-ce donc que cette permaculture?

J'y viens j'y viens.


Les principes et les voies 



Voici quelques explications sur la permaculture, nécessaire selon moi pour poser les bases d'un concept très intéressant mais assez difficile à saisir dans son essence. Je m'excuse par avance pour le ton un brin fromel... Vous n'avez pas besoin de prendre de notes. Les citations... Dites-donc les deux dans le fond, on se tait et on écoute!

Les citations en italiques sont tirées du livre Permaculture : principles & pathways beyond sustainability de David Homgren, cofondateur de la permaculture, parut en 2002. Les traductions ont été effectuées par mes soins (ça se la pète) ou tirées du résumé en français de l'ouvrage (disponible en téléchargement gratuit ici).

En plus de l'ouvrage cité ci-dessus, j'ai aussi lu les pages wikipedia sur la permaculture (que vous pouvez consultez ici en anglais et en francais), ainsi que les articles d'un très bon site français élaboré par une équipe de permaculteurs passionnés, basé sur les travaux de Bill Mollison et David Homgren, Les principes de la permaculture.

Je vous encourage vivement à consulter tout ça sans modération pour des informations plus détaillées que celles, bien maigres et non-exhaustives, que je livre ici. En dix jours, je n'ai pu qu'effleurer l'immensité de cette discipline. Je souhaite enfin ajouté que bien que je me retrouve dans pas mal d'aspect de la théorie, je n'adhère pas forcément à tous les principes exposés ci-après...

Le terme ''agriculture permanente'' existe depuis le début du vingtième siècle, et sous-entend l'utilisation de méthodes d'agriculture permettant aux sols de conserver leur fertilité naturelle. 

Le concept de permaculture a été élaboré dans les années 70 par deux australiens, Bill Mollison et David Homgren. On ne parle alors plus d'agriculture permanente mais bien de culture permanente, tant son impact est globale et concerne tous les aspects de notre société. 

La permaculture est presentée comme ''une réponse positiviste à la crise environnementale et au déclin des ressources'' (appelé de facon très optimiste ''descente énergétique''), une alternative écologique et durable à l'ère post-industrielle, et regroupe un ensemble de principes éthiques simples : 

-Prendre soin de l'homme

-Prendre soin de la Terre

-Poser des limites à la consommation et à la reproduction, redistribuer l'excédent

Ces bases éthiques vont définir des principes techniques de conception et de design, d'inginierie, de construction, qui vont définir une nouvelle façon de vivre et de considérer notre place sur la planète bleue et notre avenir ainsi que celui des générations futures. 

Donner une définition précise de la permaculture n'est pas chose aisée au vu du nombre de domaines couverts par le concept, relativement complexe au demeurant. Partons de la vision de ses cofondateurs : 

A l'origine, le mot permaculture décrivait ''un système évolutif et integré de plantes pérennes, vivaces ou qui se perpétuent d'elles-même et d'espèces animale utiles à l'homme.''  

Mais comme je l'ai dit plus haut, son champs d'action est devenu tellement vaste qu'une définition plus actuelle est : ''La conception consciente de paysages qui miment les modèles observés dans la nature, visant à obtenir une production abondante de ressources pour satisfaire les besoins locaux.''

On ne parle plus ici d'agriculture permanente, mais bien d'une ''culture de la permanence et de la durabilité [...] qui regroupe les diverses idées, aptitudes et modes de vie qui doivent être redécouverts et développés afin de pourvoir à nos besoins tout en accroissant le capital naturel pour les générations futures''.

Simplifions un peu tout ça (que les oficionados me flagellent allégrement pour mes erreurs et mon hérésie) : la permaculture s'inscrit certe sous certains aspects dans une démarche écologique de développement durable, mais va aussi bien au-delà, ces deux notions n'étant finalement que deux facettes d'une discipline qui en comporte des centaines. 

Il s'agit de définir un mode de vie non plus respectueux de l'environnement mais integré à son environnement en observant et en imitant les modèles présents dans la nature en adoptant une approche systémique. Voilà pourquoi il est si difficile de définir précisément la chose : il n'y a pas de principes concrets à proprement parlé, plutôt une manière de réfléchir à comment utiliser ce qui nous entoure de manière durable de façon à faire partie de son environnement comme l'un de ses éléments constitutifs.

La notion d'écosystème est fondamentale ici, puisqu'il s'agit justement de s'intégrer à un écosystème, voir d'en créer un.

J'aime bien l'idée : le fait de respecter l'environnement nous place d'entrée à côté de ce dernier, tandis qu'ici l'objectif est de s'y intégrer, au même titre que les plantes ou les animaux. Pour moi, la permaculture replace l'homme à la place qui est la sienne : un être vivant parmis d'autres, devant participer également au fragile équilibre de la biosphère.

On comprend ici aisément pourquoi il n'y a pas vraiment de méthodes précises et définitives de permaculture, chaque milieu possédant un écosystème et un équilibre particulier. Deux environnements situés à seulement quelques centaines de mètres l'un de l'autre vont pouvoir présenter des écosystèmes complètements différents, c'est pourquoi il y a en fait autant de moyens opérationnels qu'il y a de milieux.

Apportons un peu de concret tout de meme, à travers les principes de bases qui vont guider la réflexion permaculturelle :

Les principes permaculturels sont des outils conceptuels qui, lorsqu'on les utilise conjointement, permettent de réinventer notre environnement et notre comportement de façon créative dans un monde de descente énergétique et de ressources en déclin.

Ces principes se veulent universels, mais les méthodes employées pour les mettre en oeuvre seront très différentes selon les régions et les situations.

On peut envisager chaque principe comme une porte ouverte sur l'approche de pensée systémique et holistique, chacun offrant une perspective différente qu'on peut interpréter à plusieurs niveaux de profondeur et de mise en oeuvre.

-observer et interragir

-collecter et stocker l'énergie

-obtenir une production

-appliquer l'autorégulation et accepter les rétroactions

-utiliser et valoriser les services et les ressources renouvelables

-ne pas produire de déchets

-raisonner depuis le global jusqu'au détail

-intégrer plutot que séparer

-utiliser des moyens à petites échelle et lents

-utiliser et valoriser la diversité

-utiliser et valoriser les interfaces et leurs éléments

-utiliser le changement et y réagir de manière créative


Pour des explications détaillées de chacun de ces principes, je vous renvoie aux pages 10 a 25 du résumé donné en lien plus haut.

En extrapolant à partir des principes énumérés ci-dessus, David Homgren a conçu la fleur permaculturelle, qui montre certain des moyens pratiques pouvant être mis en place pour répondre à ces principes.





Dans l'absolue, une permaculture parfaite fonctionne en autosuffisance, et en tant qu'écosystème autoréguleé, peut techniquement, une fois mise en place, perdurer sans intervention de l'homme.

La permaculture, dans le fond, propose donc de réapprendre à faire soi-même, à réfléchir par soi-même, de mettre en place des solutions locales et durables sans être assisté en permanence comme comme nous le sommes dans la société industrielle moderne, sans dépendre des industries, de la grande production et des énergies non-renouvelables. C'est d'ailleur pourquoi la permaculture s'inspire non seulement du fonctionnement des sociétés pré-industrielles, mais aussi de nombreuses cultures tribales actuelles qui vivent en autarcie en restant proche de la nature.

Une chose m'a d'ailleur amusé : ce mode de vie, ce retour aux sources, plus proche de la nature, n'est-il pas sous bien des aspects celui que nous avions adopté au Nepal dans notre village? Un mode de vie présenté comme alternatif ici est ailleur... Et bien le mode de vie normal. C'est d'ailleur ce point, pour moi, qui ridiculise un tantinet le concept de permaculture... Si nous le considérons à travers le prisme de notre expérience au Nepal, on se rend compte à quel point ce mode de pensée a été conçu par des esprits élevés et vivant dans la culture occidentale des pays dis développés à destination de gens issus de cette même culture. Nos amis du village de Sarangkot vivent comme ça depuis toujours, sans se poser de questions et sans s'embarasser de réflexions phylosophico-éthiques. Et quand nous leur demandions ce qu'ils voulaient pour l'avenir, la réponse était sans appel et à l'opposé des objectifs de la permaculture... Chacun rêve de la vie de son voisin à travers la vision déformée qu'il en a. Un problème récurent que nous avons de nombreuses fois constaté durant notre periple. Mais nous nous égarons.

Le concept reste intéressant si l'on reste dans le modèle de nos sociétés occidentales, que le monde a visiblement décidé de suivre. Il est résuloment optimiste, et peut paraitre utopiste, dans la forme il l'est, mais il n'est finalement présenté que comme une alternative, pas comme un moyen absolue. Un ensemble de solutions et de méthodes de réflexion sur lesquelles méditer pour construire un avenir durable en ces temps de déclin énergétique et de surconsommation.

Une image m'a particulièrement parlé : l'air industrielle est comparé à un voyage en ballon. C'était enivrant, excitant, mais à présent il est temps de redescendre sur terre.

Voilà pour les grandes lignes. J'invite tous les permaculteurs qui liraient ces lignes à me faire part de mes erreurs et de leurs avis.


En pratique

Rapportons à présent le concept sur le terrain. Comment tout ça s'organise à la Tiger hill?

 Voyez le récit qui va suivre comme l'exposé de quelques exemples non-exhaustifs illustrant sommairement les principes évoqués précédement. Encore une fois, je n'ai passé que 10 jours à la ferme, durée bien trop courte pour appréhender en profondeur la permaculture.

La ferme est relativement jeune, et est encore loin de fonctionner en autosuffisance complète. Malgré tout, à mon arrivée beaucoup de choses ont déjà été mises en place, que je découvre grâce à l'équipe que j'innonde de questions.

Toute l'eau que nous utilisons provient uniquement de la pluie, récupérée et stockée dans deux énormes réservoirs. A savoir que ce procédé est courant en Tasmanie, et en Australie en général. 

Le potager, entièrement biologique, a été en premier lieu fertilisé selon une methode naturelle. Dans un écosystème forestier, les végétaux en décomposition forme un humus qui fourni tout ce qu'il faut aux nouvelles plantes, et le principe a été repris tel quel : sur le terrain destiné à acceuillir le future potager, l'équipe a d'abord cultivé des plantes locales, qu'ils ont laissé mourir afin d'enrichir le sol en substances organiques et en azote, avant de planter des légumes et des herbes. L'arrosage demandait encore une pompe, mais un projet d'irrigation naturelle utilisant la gravitée comme seul moteur était en cour. 



En ce qui concerne l'engrai, on rejoint les principes de non gaspillage : du compost, élaboré à partir des déchets.

Les déchets en question proviennent bien sur des épluchures et autres restes de cuisine, mais aussi d'excréments. Et pas des excréments animaux... On apprecie ici le concept du ZERO gaspillage : nous faisons nos affaires dans des toilettes fabriquées à partir de bennes à ordures, qui permettent de tout récupérer pour enrichir le compost. La chose est poussée tellement loin que nous récupérons même nos urines dans un réservoir séparé, où ils sont transformés en matière compostable. 

Le potager ainsi élaboré presente déjà un bon rendement. A côté, une zone d'expérimentation sert de banc d'essais aux nouvelles méthodes de culture.

La cuisine extérieure accueille un four à bois fait maison. Rappelons nous que le but du jeu ici est d'utiliser les ressources qui nous entourent, et que nous sommes en pleine forêt. Pour répondre à l'objectif de limiter au maximum les consommations énergétiques, la construction du four et son isolation ont fait l'objet d'une réflexion poussée. Je vais laisser Antoine vous expliquer le processus ici (en anglais). 
Voici quelques exemples parmis tant d'autres qui viendrons étayer le récit de mes quelques jours ici.
Il est maintenant temps de se mettre au travail. A mon arrivée, il y a du pain sur la planche : Paul va accueillir dans sa ferme des étudiants pour une session de cours sur la permaculture d'ici une dizaine de jours, et tout doit être fin près.

L'équipe a déjà achevé la construction d'un dortoir pour les étudiants et les futures employés de la ferme, et je débarque pour participer à la fin de son aménagement et à la création d'un bloc abritant des douches et des toilettes communes.


Je passe les trois premiers jours à travailler avec Andrea pour poser les murs en tole du bloc, dont la charpente est déjà dressée. ''Assister'' serait un terme plus exact, si l'on considère les très maigres compétences en bricolage que j'ai pu acquérir à la Gordon Country en travaillant avec Marc.

Architect de son etat, je lui laisse volontier les travaux de conception et de mesure, pour m'atteler docilement, en bon manutentionnaire, aux taches de decoupe, de vissage, de perçages et de soutient qu'il me demande. Effectivement, monter des cloisons ne m'apporte pas beaucoup de notions de permaculture, mais niveau bricolage la chose est très formatrice.


Les fenêtres sont des bouteilles intégrées dans une dalle de torchi


Pendant ce temps, Antoine et Ivan s'occupent du système de canalisation, du toit et des douches. 
Et chaudes les douches s'il vous plait! Mais comment chauffer cette eau efficacement sans consommer d'énergie fossile? Hors de question d'utiliser du gaz ou du fuel bien entendu.

C'est l'occasion pour moi de présenter un projet qui tient en haleine toute l'equipe depuis près de trois mois, et dont j'assiste durant ces premiers jours à l'inauguration : un chauffe-eau artisanal à bois.


Le principe est somme toute assez simple : le dispositif est composé d'un bidon renfermant un réservoir étanche rempli d'eau. Deux circuits indépendants traverse le tout, l'un y fait circuler l'air et est relié à la base du système à un four en brique accueillant un foyer, l'autre à l'arrivée d'eau. 

La chaleur générée par le four va réchauffer l'air, qui chauffe l'eau du réservoir en le traversant, qui à son tour chauffe l'eau du deuxième circuit.

Un quatrième tuyau, au sommet du dispositif, sert à évacuer l'excédent de pression.




Dans le principe donc... Et bien c'est un chauffe-eau : on obtient de l'eau chaude en continue pendant plusieurs heures, tant que l'eau du réservoir reste chaude.

L'intérêt, comparé à des machines élaborées en usine, tient dans le mode de conception et le rendement énergétique qu'il permet.

Tout est dans l'isolation : le réservoir est isolé du bidon par de la laine de verre, et les briques du four minimise les pertes calorifiques, permettant un chauffage maximum avec un minimum de bois. 
Le début du premier test est plus que concluant : avec un simple fagot, la température à l'interieur du foyer atteint rapidement les 900 degrés. En 20 minutes, nous obtenons de l'eau brulante dans les douches. Juste avant que le scotch maintenant la laine de verre autour de la cheminée commence à fondre, prenne feu et que tout le bâtiment manque de s'embraser... Il y'a de plus quelques fuites à l'intérieur du dispositifs.

Enfin l'essentiel est que ça marche, seul quelques petits ajustements sont nécessaire. Mes amis me parle d'un francais qui a détourné un dispositif de ce genre pour en faire une fonderie. Sa conception était tellement bonne que la température grimpait à 1400 degrés à l'interieur de son foyer, ce qui lui permettait de fondre son propre aluminium, tout ça en faisant brûler... quelques poignées d'herbes verte.

Je passe ma fin de semaine à couper du bois pour alimenter le chauffe-eau durant la session de cours, et à construire un toit pour protéger le chauffe-eau avec Andrea.



Entre construction et experimentation, le temps passe vite. Nous tirons de sacrées journées, travaillant 9 a 10h par jour. En bon patron de woofing, Paul est adorable,  passionné, et bien sur nous fait travailler comme des forcenés sans forcément s'en rendre compte... Pour moi qui suis encore tout frais, il n'y a pas de problème, mais le reste de l'équipe commence à se lasser de la pression constante et contagieuse du boss. Après plusieur mois de dure labeur, je les comprends.

Lorsque nous ne travaillons pas, nous vivons toujours en communauté dans la maison de Paul. Le partage des tâches est de rigueur, et à tour de rôle chacun s'occupe du repas, de la vaiselle, du nettoyage etc...

Nous mangeons tous ensemble, et nous mangeons bien. Très bien même. La ferme étant jeune, tout ne provient pas du potager, mais les produits que nous cuisinons sont toujours issus de l'agriculture biologique locale et achetés au marché. Le pain est fait maison, tout comme la confiture, les jus de fruits, le yaourt et j'en oublie. Bien évidement, notre regime est essentiellement végétarien. Je l'ai dit, je voulais du vert, me voilà servis!

Côté accomodation, pour la première fois depuis que j'ai quitté la Gordon Country, je retrouve avec délectation des luxes dont j'avais presque oublié la saveur : un lit et des douches chaudes. Après plus d'un mois et demi à dormir dans le froid sous la tente et la pluie, à me laver à l'eau glacée des robinets, toilettes publiques et autres rivières, ma redécouverte de ces ''petits'' plaisirs s'accompagne d'une sensation d'extase assez indescriptible. Lorsque je me glisse sous la couette le premier soir, après avoir pris une douche brûlante, je touche du doigt le nirvana!

Inutile de dire que je me sens plus que bien ici après mes semaines de vagabondage. Mes amis sont formidables, ouverts, réfléchis, et la vie en communauté avec des personnes aussi fabuleuses est sources d'échanges et de partage comme j'en ai rarement connu. 

Nous avons deux jours de congé par semaine, et si le premier, pluvieux, est l'occasion de nous reposer apres une semaine chargée, Fransesca, Yoshi, Antoine, Ivan et moi profitons du deuxième pour aller crapahuter dans un parc proche et aller voir des grottes proches de la ferme.

L'accès aux grottes est sportif, et nous progressons à travers une forêt dense pour arriver aux falaises dans lesquelles s'ouvrent les cavités creusees par l'érosion.






La semaine suivante, nous commencons par nettoyer et débrousailler la zone en vue de l'arrivée des étudiants, après quoi je m'attèle avec Antoine à la fabrication d'un système de filtration pour récupérer et réutiliser l'eau des douches du bloc.

Nous placons un bidon sous l'évacuation d'eau, que nous garnissons d'abord de graviers, puis de charbon actif, et enfin de sable, chaque couche étant séparée de la suivante par des morceaux de bache perméable. La base du bidon est reliée a un tuyau qui permet de récupérer l'eau purifiée par son passage dans le dispositif.





Des amis de Paul, intervenants, professeurs et étudiants sont arrivés en avance pour prêter main forte aux derniers préparatifs. Ils s'occupent du système de récupération des toilettes à compost, utilisant à nouveau des bennes à ordures placées sous le bâtiment.




Les problèmes du chauffe-eau fixés, nous le remettons en place, et Antoine se charge de remplacer la laine de verre de la cheminée par un coffrage en brique. Les essais qui s'ensuivent ne montrent aucun problème ni disfonctionnement.




Le bloc de douche est terminé la veille du début des cours.


En parallèle, nous nous organisons avec Léonore. Nous avons décidé de nous retrouver le plus rapidement possible en Tasmanie pour une petite semaine de vacances avant d'attaquer la saison des pommes que j'attends depuis si longtemps. Leonore est en train de cueillir des fraises à Stanthorpe, dans le Queensland, et pour me rejoindre elle doit redescendre a Melbourne, et embarquer avec le van dans le Spirit of Tasmania, le ferry qui effectue la traversée de Melbourne à Devonport, sur la côte nord de la Tasmanie. Elle prend son billet pour le lundi 23, et nous commencons à compter les jours, plus qu'impatients de nous retrouver.

A la ferme, nous terminons les derniers preparatifs. La veille de l'arrivée des étudiants, nous profitons d'une soirée pizza grâce au four fabriqué par l'equipe. Ca carbure!



Et la cavalerie débarque. Une trentaine de personnes en tout, principalement des australiens, mais aussi un couple tout droit débarqué de Singapour, venu trouver des idées pour apporter un peu de verdure à la cité-état. De notre côté, nous sommes chargés de l'organisation, et pour ce premier soir c'est à moi qu'il incombe de faire tourner le chauffe-eau pour sa première utilisation publique.
Ca fait beaucoup de monde et d'agitation, et je décide de mettre les voiles, trois jours avant l'arrivée de Léonore, histoire de profiter d'un week end de repos bien mérité.

Au matin du deuxième jours de cours, je remercie tout le monde pour l'accueil et l'expérience formidable que j'ai vécu ici. Encore des gens que j'espère de tout coeur recroiser un jour!

Je vais m'arrêter là pour le moment.

C'est la fin d'une nouvelle expérience géniale. Après dix jours à la Tiger hill et beaucoup de lecture, et bien j'adhère.

J'ai retrouvé des valeurs qui me sont chères dans le mode de vie permaculturel, et ses tenants et aboutissants offre des perspectives et des réflexions intéressantes. Dans un monde dominé par la surconsommation où les énergies fossiles tendent à s'épuiser, la permaculture propose de modifier radicalement notre mode de vie, et ses perspectives optimistes pour l'avenir sont autant de solutions possibles pour résoudre des problèmes de plus en plus graves, et qui ne vont pas aller en s'arrangeant.

La vie à la ferme a été plus qu'enrichissante, même si la Tiger Hill fonctionnait de façon un peu spéciale... Les lecteurs attentifs aurons d'ailleur probablement remarqué certaines contradictions entre les principes évoqués en première partie et l'expérience que j'ai vécu.

Des contradictions, il y en avait quelques-une. Les générateurs au fuel qui tournent toute la journée pour alimenter les scies sauteuses et autre meuleuses, les trajets en voiture pour 500 petits mètres, et j'en oublie.

Et elles n'étaient pas que matérielles... Si l'équipe était formidable, certains étudiants m'ont interpellé. Que dire de ce gars qui nous fait l'apologie de la compassion, de la vie et des valeurs de l'hindouisme et du boudhisme pour à la nuit tombée aller tirer des wallabis à la carabines?

Enfin bon, je chipotte. Ces quelques jours de découverte d'un domaine dont j'ignorais tout et où je me suis retrouvé par bien des aspects n'appellent qu'une chose ; recommencer et approfondir!

Au prochaine épisode, nos retouvailles avec Léonore, un peu de vacance, et enfin du travail, du vrai, du lourd, du long! 

Un dernier mot : il y a exactement un an, jour pour jour, nous attendions notre visa indien dans le centre de Kathmandu, au Népal, qui n'est aujourd'hui que ruines et décombres. Nous sommes de tout coeur avec le pays le plus merveilleux qui nous ai été donné de traverser, et qui n'avais vraiment pas besoin de la calamité qui lui est tombée dessus aujourd'hui.

See you!