vendredi 17 mars 2017

Apple thining, la Golden Bay et le Nelson Lakes National Park : Un travail en forme de fabuleuse opportunité, des vacances à la mer et une randonnée exceptionnelle

Salut à vous, peuples du monde!

Encore une histoire qui aura pris son temps. Afin de resituer les événements, posons quelques dates : le présent récit s'étale du 3 décembre 2016 au 22 janvier 2017.

 Une période à cheval sur deux année, qui a vu se dérouler pas mal de choses.

A commencer par la reprise du travail. Je rappelle que si nous sommes venus en partie pour explorer ce que beaucoup considèrent comme le plus beau pays de la planète, nous avons aussi pour objectif de mettre suffisamment de réserves de côté pour aller fureter un bon moment en Amérique du sud. Après un mois et demi de formidables vadrouilles, il a donc été temps de nous retrousser les manches et de gagner notre croûte présente et future!

Comme je le disais dans le précédent article, nous avons dégoter un job dans un verger, en apple thining. Traduisez "éclaircissement de pommes". Sur place, nous avons découvert une activité laborieuse, ennuyeuse au possible... Secondée par tout un tas de choses qui ont fait de ce travail une aubaine en or! Je ne vous en dis pas plus.

Nos semaines de labeur ont connu une pause salvatrice à noël. Nous avons pu explorer la fameuse Golden Bay, dans le nord du pays, faire nos touristes à la plage, et faire des rencontres qui nous ont fait nous demander pourquoi nous nous sommes tant extasiés de voir des phoques depuis le sommet d'une falaise dans l'Abel Tasman...

Et puis il y a eu l'Angelus Lake, dans le Nelson Lakes National Park. Je n'en suis qu'à l'intro, mais j'ai déjà envie de vous parler de ce trek dans les montagnes. Tous les détails dans les lignes qui suivent.... Disons qu'il s'agit sans aucun doute d'une des plus belles randonnées que nous ayons faites, et pas seulement en Nouvelle Zélande. Durant tout notre Petit Tour (non, ce n'était pas mieux que les Annapurnas. Rien n'arrivera jamais à la cheville des Annapurnas!).

Bonne lecture, joyeux noël, bonne année, joyeux anniversaire Florian, bref tous les joyeux en retard!


Le paradis et l'enfer de la pomme


Nous vous avions laissé alors que nous quittions le Queen Charlotte Track. Nous sommes sur un camping gratuit, à quelques kilomètres de Nelson, et nous partons pour rejoindre la ferme où nous allons passé les deux prochains mois...

Nous débarquons un vendredi, à 10h, au Dominion Point Orchard, grand verger situé le long de l'autoroute 60, aux environs de Mapua, au nord de l'île sud. Tracey, notre nouvelle patronne, vient nous accueillir toute souriante pour nous emmener un peu plus loin sur la route, près des entrepôts de l'exploitation, et nous montre la petite maison dans laquelle nous allons loger. Le terme "loger" n'est pas tout à fait approprié : le tarif de la location s'élève à 80$ la semaine par personne si nous utilisons les chambres, contre 60$ si nous dormons sous la tente. Dans ce dernier cas, nous pouvons quand même jouir de toutes les commodités offertes par la maison, et la décision est vite prise! A noter que ce tarif est plus qu'honnête, la plupart des fermes demandant au moins 100$ par semaine pour l'hébergement. 



Nous passons un bon moment à faire plus ample connaissance avec Tracey, qui se montre gentille, souriante, et mieux encore confiante. Elle nous annonce rapidement que le travail n'attaquera que le lundi suivant mais que nous pouvons nous installer dès aujourd'hui, elle nous offre le week-end de loyer! Un premier beau geste après seulement quelques minutes de conversation. Elle s'intéresse beaucoup à notre voyage, elle-même étant d'origine australienne, et s'enquiert de nos projets. Finalement, elle nous laisse les clefs de la maison, nous explique que nous réglerons les formalités d'embauche le lundi matin avant de commencer, et nous quitte en nous souhaitant un bon week-end et en nous laissant une excellente impression!

Nous ne nous installons pas tout de suite. Après avoir grignoté un morceau, nous partons en reconnaissance à Richmond, la ville la plus proche, à un quart d'heure de route. Sur place, nous constatons que le petit bled, sympa tout plein, dispose de tout ce dont nous avons besoin : une bibliothèque, pas mal de commerces, et surtout un sacre-saint Pack'n'Save, notre grande surface fétiche pour les ravitaillements à moindre prix. Après une grosse session de courses destinée à couvrir toute la semaine suivante, nous rentrons nous installer dans notre nouvelle maison. Entre-temps, Tracey nous à tondu un carré de pelouse derrière la maison pour que nous puissons y poser nos tentes, à quelques mètres seulement des pommiers.



Depuis notre départ de chez Craig, nous avons vécu uniquement en extérieur, et c'est la première fois en un mois et demi que nous disposons du confort fonctionnel d'une maison en dure. L'ameublement est basique, mais après plus de six semaines passées à camper, nous avons l'impression de débarquer dans un château! Nous passons le week-end à retrouver les joies d'une douche chaude, du rasage, de l'eau au robinet et de tout un tas d'ustensiles de cuisine, sans parler du luxe suprême que constituent chaises, table, fauteuil et canapé. Les vêtements se lavent tout seul dans la machine, et la vaiselle au produit et à l'éponge est tellement facile qu'au sable... Les plaques de cuisson entraînent quant à elles une véritable révolution gastronomique, assistées d'un four que nous découvrons la larme à l'oeil. Et ça, qu'est-ce que c'est?! Un réfrigérateur??? Whouaaa...



A côté de ça, nous bouquinons, buvons des thés, regardons quelques épisodes de séries sur l'ordinateur. Et nous discutons boulot, nous demandant comment tout ça va se dérouler. Le fait est que nous nous sommes à peine renseignés sur les horaires et les jours de travail, les congés, la politique en cas de pluie, le salaire. A dire vrai, nous ignorons même les modalités de paiement. A l'heure? Au rendement? Nous supposons que serons payé sur une base horaire, le fait de nettoyer des arbres n'étant pas vraiment quantifiable, encore que nous savons qu'en Australie, certaines fermes payent à la rangée d'arbres. Bref, comme d'habitude, nous sommes dans les choux et fiers de l'être. Nous verrons tout ça lundi matin.

Dans tous les cas, nous nous préparons mentalement à replonger dans la répétitivité et l'ennui innérants à ce genre de boulot. L'avantage d'avoir déjà trimé dans les vergers en Australie, c'est que nous savons à quoi nous attendre et pouvons nous y résigner beaucoup plus facilement.

Lundi matin, nous passons voir Tracey chez elle, en plein milieu des interminables rangées d'arbres. Nos contrats sont près, et nous ne devons plus que les signer et remplir les déclarations d'embauches et de taxe, tout en écoutant les explications de notre patronne. Nous y voyons plus clair, et tout s'annonce plutôt bien : il y a donc environ un mois de travail pour le thining, nous serons payés à l'heure, au salaire minimum comme il fallait s'y attendre, ce qui nous va parfaitement si nous pouvons faire beaucoup d'heures. Le contrat stipule un nombre d'heures quotidien, mais Tracey, fidèle à l'impression qu'elle nous avait laissé le vendredi précédent, nous dit de ne pas nous embêter avec ça, nous pouvons faire plus si nous le désirons. Là, ça commence à sentir vraiment bon! Concernant l'organisation de la journée, nous démarrerons à 7h30, et nous sommes tenu de prendre une pause de 10 minutes le matin, et une l'après-midi, qui ne sont pas retirées de notre temps de travail. En revanche, la pause repas d'une demi heure n'est pas payée. Pour les jours de pluie, nous retrouvons à peu près la meme politique qu'à la Scott Bros en Tasmanie : nous ne travaillerons pas en cas de mauvais temps persistant, mais quelques petites averses passagères au cours de la journée ne sont pas considérées comme du mauvais temps.

10h approche, et notre patronne nous montre sur une carte un bloc d'arbre où nous devons rejoindre Brian, sont mari, qui nous expliquera exactement en quoi consiste le taf.

Sur place, face aux rangées de pommiers, nous découvrons trois échelles et faisons bientôt la connaissance de Brian qui nous rejoint en quad. Nous papotons un moment, le gars attire tout de suite la sympathie et se présente comme un maraîcher expérimenté. Il a littéralement passé toute sa vie dans les pommes, ayant grandi dans les vergers avant de reprendre l'exploitation. Il nous dit rêver de voyage, malheureusement le travail lui dévore tout son temps libre...



Nous entrons ensuite dans le vif du sujet lorsqu'il nous explique ce que nous devons faire. Nous savons que le thining, ou "éclaircissement" en français, consiste grosso modo à retirer les mauvais fruits des arbres pour que les bons puissent grossir correctement au cours des quelques semaines restantes avant la cueillette. Dans la pratique, ce n'est pas bien plus compliqué : comme à Sparte, nous devons jeter les petits, les faibles, les rachitiques, les malformés... Certains fruits sont trop petits pour pouvoir grossir suffisamment avant la cueillette, d'autres ont été attaqués par le gel durant l'hiver et se sont couvert d'une croûte marron. La grêle, véritable calamité dans la profession, a frappée plus tôt dans la saison, et certaines pommes présentent des traces d'impacts. Tout cela fini par terre pour ne pas gaspiller les ressources de l'arbre dans des fruits impropres à la consommation. Enfin, certaines branches sont tellement chargées que les pommes, trop serrées, ne peuvent pas pousser correctement, et il faut alors en retirer certaines pour ménager de la place aux autres.



Et bien allons-y. Un côté par personne. On nettoie le bas de l'arbre, puis on prend l'échelle pour faire le haut. Et on passe au suivant. La chose n'est pas vraiment compliquée ni fatigante, il faut juste bien observer les fruits et juger quand il y en a trop. Côté intérêt par contre...



Brian repasse nous voir dans la journée pour voir comment nous nous en sortons et effectuer les réajustements nécessaires. Globalement, nous nous débrouillons bien, et lorsque nous prenons le coup de patte, nous pouvons démarrer le pilote automatique et laisser nos esprits s'échapper tandis que nos mains s'agitent toutes seules dans le feuillage. A midi, nous nous affalons dans l'herbe pour grignoter un sandwich, et nous rempilons pour l'après-midi. Oui, ce n'est pas le travail le plus passionant du monde... La tâche est répétitive, le temps long, et plus la journée avance plus les heures s'étirent.

A 17h, nous rentrons chez nous, ravis de pouvoir nous affaler avec un petit thé après cette première journée de travail. Le thining correspond à peu près à l'idée que nous nous en faisions : facile et très, très ennuyeux.

Les jours suivants, nous adoptons une routine dévastatrice qui va pourtant nous suivre plusieurs semaines. Lever 6h30, café, 2h30 de thining, pause, 2h30, repas, 2h, pause, 2h, retour à 17h, thé, repas devant une série, dodo.



Ce n'est pas la joie... Et puis les premiers salaires, versés à la semaine, tombent, et bientôt plusieurs choses apparaissent : le thining, c'est chiant comme la pluie, abrutissant, parfois déprimant, et on se retrouve souvent à maudire ces satanés pommiers incapables de produire des bons fruits tout seuls. Les journées se suivent et se ressemblent jusqu'à l'écoeurement le plus total. Mais ça, nous le savions avant de venir. 

L'autre chose, c'est que ce taf est une aubaine phénoménale et une opportunité quasi miraculeuse. Je m'explique.

7h30-17h, moins la pause de midi. 9h de travail par jours. Le salaire minimum net correspond à 12.60$ de l'heure. Mais surtout, nous pouvons travailler tous les jours, du moment qu'il ne pleut pas. Et nous sommes dans la région la plus ensoleillée du pays, en plein été. Résultat? Nous nous enfilons trois jours, avant que la pluie nous fasse perdre une journée, et... nous travaillons 15 jours d'affiler sans interruption. Peu importe que le salaire horaire soit faible, nous ne comptons pas comme ça. Peu importe la charge de travail à fournir, du moment qu'en fin de semaine le salaire fasse plaisir. Et à grand coup de 9h par jour, 7 jours sur 7, nous rentrons, après retrait du loyer, environ 730$ chacun (près de 500 euros) par semaine.

En plus de ça, nous accumulons des congés payés sous forme de bonus, à raison d'une soixantaine de dollars supplémentaires par semaine, et nous pourrons probablement réclamer, à la fin de l'année fiscale, un rembousement d'une partie de nos taxes.

Et ce n'est pas tout. Bientôt, Brian nous confirme que nous pouvons tirer toute la saison chez lui, ce qui signifie qu'après le thining et une petite pause de quelques semaines, 2 mois de cueillette nous attendent. Nous avons à coup sûr du travail jusqu'en avril!

Alors nous faisons des prévisions, de la budgétisation, des simulations. Nos calculs les plus pessimistes nous montrent déjà qu'après ça, nous n'aurons tout simplement plus besoin de travailler, les 15 000$ que nous nous sommes fixé comme objectif à atteindre pour la suite de notre voyage aurons déjà été engrangés. Et normalement, nous allons même dépasser cet objectif.

Bref, c'est la fête, la liesse, l'apothéose. Oui, je sais, il ne faut pas vendre la peau de l'ours, mais nos calculs sont fiables et réalistes, et nous pouvons être presque sûr que la question du travail et de l'argent est d'ors et déjà réglée. Alors oui, on se réjouit!

Et il faut bien ça, parce que sur le terrain, c'est vraiment la mort de l'esprit... Nous enchaînons les blocs, encore et encore. Coxies, fijis, poires... Interminable.

Visiblement, c'est vraiment une très mauvaise année pour les pommes et les poires. Pour citer Brian, "la grêle, c'est 2 millions de dollars perdus en 2 minutes...".



Les consignes de thining varient un peu suivant les variétés. Ne pas laisser plus de 2 fruits côte à côte, 3 si ils sont vraiment gros, et sur une autre variété s'assurer que chacun des fruits est isolé d'au moins une largeur de main des autres. Laisser une pomme, même si elle est abîmée, à côté d'une autre pour qu'elle ne grossisse pas trop. Certaines variétés, comme les fijis, nécessitent beaucoup place pour pousser, et les arbres sont tellement surchargés que nous devons retirer des centaines de fruits, dont beaucoup sont intacts, transformant le sol en véritable bassin à boules sur lequel il est impossible de marcher sans déraper.



Honnêtement, je ne sais pas s'il s'agit uniquement de calibrer les pommes selon les exigences du marché dans un but purement esthétique ou si l'absence de thining joue réellement sur la qualité et la bonne maturité des pommes, mais je ne veux pas le savoir. Si le premier cas est vrai, le gaspillage est proprement ahurissant.

Les poiriers ont particulièrement ramassé à cause de la grêle, et seuls quelques fruits pendent aux branches. Malheureusement, beaucoup sont déformés, et les blocs de poires n'échappent pas au nettoyage.

Je ne pensais pas dire ça un jour, mais très franchement, nous attendons le picking avec impatience. Au moins, il y a de l'action, du challenge, l'envie de remplir le plus de caisse dans la journée! Et en même temps, on remarque qu'il y a vraiment pire comme travail. Nous sommes en extérieur, le cadre est magnifique, tout en collines, nous profitons d'une belle vue sur la mer, il y a des oiseaux partout, et la tâche est loin d'être éreintante. On est quand même mieux ici qu'à l'usine ou au McDo!

De plus, Brian est un excellent manager. Il nous fait confiance sur les heures que nous déclarons et n'est pas sans cesse sur notre dos. Il passe deux ou trois fois par jour pour jeter un oeil à notre travail. Si tout va bien, il ne manque pas de nous féliciter, et en cas d'erreur, il vient nous voir, nous montre et nous réexplique patiemment, sans jamais nous faire de reproche.

Bref, dans son aspect purement technique, le job n'est pas top, mais tous les à-côtés sont au petits oignons, et c'est bien ce que nous cherchons. Avec nos yeux de pickers australiens, nous constatons que les arbres sont bien taillés, facilement accessibles, et annoncent une cueillette efficace.

Encore une fois, tout est parfait, pas un couac, pas un problème, et dans cette mission travail cela signifie qu'il n'y en aura normalement plus avant quelques temps. Ce job rassemble tout ce que nous cherchions, et nous sommes satisfaits. Une très, très bonne chose de faite! Et déjà, des rêves d'Amérique du Sud apparaissent... Qu'ils sont pressés ces petits!

Si nous sommes seuls dans nos blocs d'arbres, ils y a d'autre travailleur dans la ferme, et un beau jour frappe à notre porte Calen, maori, qui nous invite à boire un verre chez l'un des autres employés de la ferme. Nous faisons ainsi la connaissance de Dave, australien, qui bosse dans les pommes depuis 24 ans, et de David, néo-zélandais, qui habite une petite bicoque en face du verger. De sacrés phénomènes avec lesquels nous passons une bonne soirée et qui viennent régulièrement nous rendre visite par la suite. En revanche, nous avons un peu de mal avec l'anglais néo-zélandais de la campagne, et nos amis sont parfois perplexe face à notre romantique accent français, mais nos incompréhensions sont plutôt un prétexte aux éclats de rire.

Pendant trois semaines, nous continuons à ce rythme, essayant de ne pas trop penser, de ne pas trop focaliser sur la routine ou le manque de stimulation et d'enrichissement. Il ne faut surtout pas réfléchir à ce que nous sommes en train de faire, seulement au pourquoi. Les journées sont toutes identiques, à la minute près, mais nous n'oublions pas que nous devons en passer par là pour justement avoir les moyens de nous en mettre plein les yeux et l'esprit par la suite. Quand on se dit qu'un mois de travail nous permet de voyager pendant environ la moitié de l'année... Le temps s'écoule doucement, mais finalement que sont 3 semaines dans un voyage de plusieurs années? Ca vaut le coup.

Finalement, Noël approche, et Brian nous offre un cadeau en avance : les 25 et 26 décembre ainsi que les 1er et 2 janvier sont des jours de congés obligatoires, mais il sont quand même payés! Bon, quand je dis qu'il nous offre un cadeau, il s'en serait en fait volontier passé considérant la charge de travail qu'il reste, mais c'est la loi qui veut ça... En revanche, histoire de nous libérer suffisament de temps pour vadrouiller un peu, il nous donne aussi les jours entre Noël et le jour de l'an! Nous arrêterons le 24 au soir et reviendrons pour le 3 janvier. Nous voilà avec une semaine et demi de vacances dont quatre jours payés! Nous accueillons la nouvelle avec des soupirs de soulagement. C'est mignon de faire des sous, encore des sous, mais notre santé mentale vacille dangereusement depuis quelques jours... Léonore a passé sa première nuit à rêver de thining, je me suis surpris à lancer rageusement une pomme par terre avec la volonté sincère de lui faire mal, et Flo zappe des branches entières...



La météo nous donne même un petit coup de pouce! Le 23, il se met à pleuvoir des cordes à partir de 11h. Nous continuons vaillamment le travail jusqu'à 12h30, puis rentrons, transis et trempés, lorsque nous nous apercevons que le temps ne va pas s'améliorer de la journée. Le lendemain, de gros nuage s'amoncèlent à l'horizon, et Brian nous annonce en début d'après-midi de ne pas insister s'il pleut. L'averse débute à 16h, et nous rejoignons notre chaumière, un sourire jusqu'aux oreilles, pour passer la soirée avec David et fêter les vacances.


Noël au soleil


Au matin, lorsque nous ouvrons les yeux, nous sommes totalement démotivés à l'idée d'aller dans les vergers... Avant de nous souvenir que nous ne travaillons pas aujourd'hui! Douce béatitude...

Notre état extatique monte encore d'un cran lorsque nous entamons le programme de la journée. Nous passons à Richmond et nous posons sur le parking du McDo, seul endroit du coin où nous pouvons trouver du wifi en ce 25 décembre, pour que Léonore et Flo puissent skyper avec leurs familles. Avec nos 12h de décalage, ils les trouvent en plein réveillon!

Ensuite, direction Nelson et son cinéma pour le nouveau Star Wars. Vous cernez à présent la cause de l'état extatique sus-mentionné... Oui, je sais, mais très sincèrement, ils en sortiraient un par semaine que j'irais quand même tous les voir, quel que soit l'endroit où je me trouve, et ce "Rogue One" qui a suscité tant de craintes, de doutes et de grognements dubitatifs m'intrigue... Mes compagnons ont bien du mal à me tenir, et les choses ne s'arrangent pas à la sortie de la projection, parce que cette cuvée 2016 est diablement bonne, bien meilleur que celle de l'année précédente!

Et Noël dans tout ça? Ne vous inquiétez pas, nous allons le fêter ce soir.

Noël, pour nous, signifie deux chose : la famille et la bonne boustifaille. Nous pouvons difficilement profiter de nos familles depuis nos confins, mais il est hors de question de faire l'impasse sur la ripaille, et nous rejoignons Richmond pour y faire quelques courses et nous concocter un festin digne de ce nom : saumon, kumaras (les patates douces du coin), pommes de terre au four, fromage local (et les bougres ne sont pas mauvais!)... Nous passons le début de soirée à cuisiner tout ça, et passons un excellent réveillon. A trois, on peut dire que nous formons dans un sens une petite famille!

Le lendemain, nous profitons de la journée pour préparer notre départ : lessive, rangement, nettoyage, et planification d'itinéraire pour nos premiers jours de vacances. Comme je le disais la dernière fois, nous avons dû, pour rejoindre la voiture après l'Abel Tasman, mettre un orteil à Takaka, dans une fameuse région du nord : la Golden Bay. Il est temps d'aller fureter un peu plus profondément dans la zone!

Nous comptons également profiter de ce long congé pour nous dégourdir les pattes dans les fantastiques et sauvages étendues néo-zélandaises. Dans notre dernier article, je vous disais que nous avions deux parcs en ligne de mire : la Richmond Forest Reserve, juste à côté de Nelson, et le Nelson Lake National Parc, à quelques 70 kilomètres au sud-ouest de Richmond. Le premier présente des itinéraires de randonnée qui ne montent pas trop vers les hauteurs et se parcourent sans problèmes en toutes saisons. Le deuxième en revanche offre de traverser des environnements alpins, ce qui nécessite piolets et crampons en hiver. Nous décidons donc de profiter de l'été pour parcourir le Nelson Lake dans de bonnes conditions (non pas que la perspective d'aller cramponner en montagne ne nous fasse pas envie, mais nos compétences dans le domaine sont loin d'être assez développées...) et remettons le Richmond Forest à l'automne. Nous consultons la météo, pour constater que tout le Nelson Lake est sous la pluie pour les deux prochains jours... Ce sera donc la Golden Bay en premier, en espérant que le temps s'améliore pour la suite.

Au matin, nous récurons la maison du sol au plafond, passons dire au-revoir à Tracey, et mettons donc le cap vers le nord.

Nous passons Motueka, avant d'attaquer la montée pour Takaka Hill, le col qui donne sur la Golden Bay. La vue de là-haut est apparemment fameuse... Malheureusement, quand nous débouchons au sommet, les nuages nous gâchent un peu la vue.

En revanche, derrière nous, la vue est dégagée, et nous tombons sur quelques points de vue sympas. 



Nous décidons de revenir nous percher ici en redescendant vers le sud, et débaroulons dans la vallée tandis que le ciel se dégage. La vue devient sublime : la Golden Bay étire son arrondi à perte de vue, d'immenses plaines s'étalent au bord de la mer, et l'horizon se cache derrière de longue chaînes de montagnes qui se découpent au loin. Alors que nous descendons au milieu d'une campagne verdoyante piquetée de fermes, des faucons nous survolent, et l'un d'eux nous accompagne même sur quelques centaines de mètres, volant au-dessus de la pente à hauteur de la voiture!

Arrivé en bas, il fait grand soleil, et nous jubilons. Ca y est, c'est les vacances! Nous suivons une route sinueuse à travers la campagne pour rejoindre Takaka, et décider de la suite. Nous nous sommes plus ou moins rencardés sur la zone, et arrêtons une destination : Farewell Spit, sur la pointe nord de l'île, à une cinquantaine de kilomètre de Takaka. Il s'agit d'un immense banc de sable de 26 kilomètres de long qui délimite le nord de la Golden Bay, classé réserve naturelle pour la richesse de sa faune : on y trouve de nombreuses espèces d'oiseaux, et il est apparemment possible d'y observer des phoques à fourrure et des otaries. Notre première rencontre avec les mammifères marins, dans l'Abel Tasman, nous a un peu laissé sur notre faim à cause de la grande distance qui nous en séparait, et nous espérons cette fois pouvoir les approcher de plus près.

Avant de continuer vers le nord, nous traversons doucement le bled, réputé haute place hippie de Nouvelle Zélande, pour petit à petit nous rendre compte, sans trop de surprise, que sa réputation est plus une vitrine et un argument touristique qu'autre chose. Les "peace'n'love", arc-en-ciels, visages de Bouddha et autres drapeaux vert-jaune-rouges s'étalent de partout mais... Ca sent juste le pognon. Après Thamel, Kasol, Goa, Byron Bay et j'en oublie, nous commençons à avoir l'habitude de ce genre de coin estampillé pseudo-hippie où sont allègrement mélangées et dénaturées des dizaines de références culturelles sans aucun rapport les unes avec les autres dans l'espoir d'appâter le roots naif. Ce sont plutôt les nombreux bars, restos, guest-houses, et autres magasins de vêtements en laine de chanvre et de souvenirs en bambou taillé made in China savamment décorés de drapeaux de prières tibétains entourant le portrait de Bob Marley qui sautent aux yeux, saturant la rue principale, surfant sur la vague pour faire tourner leur business.

Nous nous retrouvons face à des panneaux rappelant que le camping sauvage est STRICTEMENT interdit sur toute la côte à partir d'ici. Aucun camping gratuit à l'horizon. Nous nous mettons au parfum, pour apprendre que le seul camping de la zone facture ses emplacements 18$ par personne... Avec tout ce qu'on nous avait raconté sur Takaka et sa culture baba cool, nous ne nous sommes même pas posé la question de trouver un coin où dormir pour ce soir : nous nous attendions à trouver des champs entiers où poser les tentes. Enfin bon, c'était prévisible.

Nous verrons ce soir. Nous longeons la côte jusqu'à l'entrée du Farewell Spit, à Puponga, et étudions un peu les cartes et les plans du coin. La quasi-totalité de la réserve est protégée et inaccessible au public en l'absence de guide, mais une belle boucle de 5 ou 6 kilomètres permet d'avoir un aperçu des plages et des dunes.

Le début de la boucle nous conduit à travers une magnifique campagne tout en verdure et en collines. Des dizaines de moutons vaquent tranquillement à leurs occupations, agrémentant le décors du blanc de leur laine.



Nous traversons une petite zone de brousailles et de forêt...



...Et après une petite marche tranquille, nous débouchons sur la plage, immense, côté mer de Tasman. A droite, l'horizon disparaît derrière les dunes et le rideau d'écume qui jaillit de la mer, très agitée, et a gauche, la plage s'achève sur des falaises frangées de brousailles. En revanche, pas la moindre trace de phoques... Nous scrutons la mer, en vain.



Avant de poursuivre vers les dunes, nous partons jeter un oeil du côté des falaises, près des nombreuses grêves rocheuses qui apparaissent à marée basse. Et là, près des rochers...



Un phoque à fourrure, étalé comme une loque à se faire dorer la pillule au soleil, à quelques dizaines de mètres de nous! Nous approchons doucement, et la bestiole daigne relever un peu la tête, ouvre péniblement un oeil, puis, constatant sans doute que nous sommes pacifiques et décidément trop fatigants d'agitation, laisse retomber son museau dans le sable pour poursuivre sa sieste.



Et nous ne sommes pas au bout de nos surprises. Nous continuons notre petit tour, pour tomber sur trois, quatre, cinq phoques qui glandouillent paresseusement sur le sable!



Nous qui voulions voir des phoques de près, nous voilà servis!

Rappelons tout de même les quelques consignes à respecter pour observer ces animaux sans danger et sans les déranger. A savoir que les phoques profitent de leurs longues siestes sur le sable pour réoxygéner leurs muscles et reconstituer leurs réserves de graisses, indispensables à la plongée en eau froide. Les effrayer, c'est prendre le risque de les faire fuir vers le large alors qu'ils ne sont pas en état d'y survivre. Et puis accessoirement, n'oublions pas que les bestioles en question pèsent tout de même jusqu'à 150 kilos, possèdent des crocs et peuvent être étonnamment rapides s'ils se sentent en danger... Il ne faut pas s'en approcher a moins de dix mètres, et surtout ne jamais se retrouver entre eux et la mer. L'eau constituant leur échappatoire, ils attaquent immédiatement si leur voie de fuite est coupée.

Nous sommes en mesure de confirmer cette dernière affirmation... Dans les falaises, nous repérons une cavité. Florian part en exploration dans les profondeurs, et je m'apprête à le suivre lorsque j'entends un rugissement résonner dans la grotte et que je vois le Flo ressortir en courant! Se faire charger par un phoque, ça n'arrive quand même pas tous les jours...

Nous partons ensuite vers les dunes pour passer de l'autre côté du Farewell Spit, traversant de belles étendues de brousailleuses.



Nous arrivons sur la plage du côté de la Golden Bay. Ici, la mer est beaucoup plus calme, et nous profitons d'une belle vue sur la baie.



L'après-midi est déjà bien entamé, mais nous avons le temps de passer voir un autre spot fameux du coin : la Wharariki Beach, une plage située à quelques encablures à l'ouest du Farewell Spit, dont les formations rocheuses valent visiblement le coup d'oeil.

La marche d'approche, d'une vingtaine de minutes, traverse de nouvelles étendues de campagne vallonées, où les moutons mènent une vie paisible et insouciante, loin des problèmes du monde...



Nous quittons ensuite la campagne pour parcourir une plaine plus sauvage mais tout aussi belle.



Bientôt, nous arrivons en vue des Archway Islands, les fameuses formations rocheuses qui se dressent dans la mer.



Nous descendons sur la plage, bordée de falaises et de rochers que l'eau a façonné au fil des millénaires, créant d'improbables reliefs et creusant cavités et autres tunnels.



Nous allons observer de plus près les Archway islands...



...Puis retournons dans les terre à travers les dunes. La balade est magnifique!



La journée touche à sa fin, et un petit problème se pose : nous ne savons pas où nous allons dormir ce soir. En retrournant à la voiture, nous sommes accostés par deux allemands, qui nous demandent si nous pouvons les emmener à Collingwood, une petite ville située à mi-chemin sur la route de Takaka. Nous les embarquons, et profitons de la route pour leur demander si ils ne connaissent pas un coin ou poser les tentes dans les parages. Apparemment, il y a un camping gratuit et facile d'accès au sud de Takaka, sur la route vers le col que nous avons franchi ce matin. Nous posons nos compagnons et continuons vers l'endroit qu'ils nous ont indiqué.

Nous passons Takaka, et après une vingtaine de bornes nous découvrons la route secondaire sur laquelle est censé se trouver le camping... Mais il n'y a rien. Nous sortons notre brochure répertoriant tous les camping du Departement Of Conservation, pour nous apercevoir que le coin en question, le Cobb River Campsite, se trouve bien plus loin que l'entrée de la route, au fin fond d'une vallée, au bout d'une voie en graviers d'une trentaine de kilomètres... Facile d'accès qu'ils disaient...

Maintenant que nous y sommes, autant continuer. Pendant plus d'une heure, nous roulons dans une forêt sur une minuscule route en lacet poussièreuse qui serpente entre deux chaînes de montagnes. Un trajet éprouvant, qui s'achève sur un beau lac au bord duquel nous découvrons le camping.



Nous nous posons, satisfaits de la journée. La découverte du cap nord de l'île nous a plu, avec ses courtes balades faciles, ses somptueux décors et surtout sa faune. Nous avons enfin pu approcher de près des phoques à l'état naturel, et c'est une expérience que nous ne sommes pas près d'oublier!

Le soleil se couche, et nous montons les tentes avant de nous préparer le classique thé du soir. Nous sommes loin de tout, cernés par les montagnes et la forêt, et l'endroit serait parfait si de véritables nuages de sandflies ne nous tournaient pas autour...

Les sandflies! Je ne vous ai pas encore parler des sandflies! Sachez que durant la quasi-totalité des événements décris dans nos articles depuis que nous sommes ici, nous sommes toujours plus ou moins en train de nous gratter quelque part à cause de ces saletés de sandflies. C'est un désagrément avec lequel il faut composer durant un voyage en Nouvelle Zélande. Les sandflies, ou mouches des sables, aussi appelées blackflies, se trouvent absolument partout dans le pays en plus ou moins grand nombre, près des étendues d'eau, des plages ou des rivières. Il s'agit d'une petite mouche, pas plus grosse qu'un moucheron, qui se nourrit en percant la peau et en buvant la goutte de sang qui se forme au niveau de la piqûre, injectant par la même occasion un coktail d'enzymes digestives et d'anticoagulants qui provoque des démangeaisons intenses. Seul la femelle pique, car elle a besoin des protéines qui se trouvent dans le sang des mammifères pour produire ses oeufs.

Les lecteurs fidèles se souviendrons de ma première et douloureuse rencontre avec ces satanées bestioles en Australie... Pour les autres, vous pouvez découvrir cette croustillante histoire parmis d'autres ici.

Les réaction aux piqûres dépendent de la personne. Florian ne se fait quasiment pas attaquer, Léonore se fait mordre de temps à autres... Et comme d'habitude, je montre une affinité toute particulière avec les bestioles buveuses de sang. Dès que je met le nez dehors sans répulsif, je me fait dévorer en quelques minutes. Et chaque morsure m'occasionne un bouton qui gratte terriblement pendant 5 à 6 jours...

Au final, dès que nous nous posons quelque part, nous nous aspergeons copieusement de répulsif, passons pantalons et manches longues, et cachons le moindre centimètre carré de peau. A savoir que les insectes, minuscules, ne résistent pas au vent et que le simple fait de marcher les empêche de se poser.

Bref, quand vous ferez votre liste de matos pour la Nouvelle Zélande, le répulsif doit se trouver en tête!

Fin de parenthèse.

Au matin, nous retournons au bord de la mer après une bonne grasse matinée. Le soleil est radieux et nous nous accordons une journée de bronzette et de baignade dans une eau encore fraîche mais parfaitement acceptable.



Pic-nic au bord de l'eau, marche dans le sable, grand soleil et chaleur... Vive l'été!

Nous repartons vers le sud en début d'après-midi, pour grimper au sommet de la Takaka Hill et profiter de son point de vue sous ciel bleu. Après une quarantaine de minutes de sympathique crapahute, nous sommes récompensés par un formidable panorama à 360 degrés.



Nous redescendons à Motueka. Nous aurons apprécié la Golden Bay dans le genre petite excursion du week end, mais à présent il est temps de passer aux choses sérieuses et de nous attaquer à un morceau que nous attendons depuis longtemps et pour lequel nous trépignons d'impatience : un bon gros treck dans le Nelson Lake National Park!


Un trek à classer parmis les meilleurs


Le parc en question est situé dans la partie nord des alpes du sud, et il est réputé pour la beauté de ses environnements montagnards, ses sommets enneigés, ses forêts, ses rivières, et bien sûr ses lacs.

La chaîne des alpes du sud, qui traverse l'île sur sa partie occidentale, se trouve sur une faille entre les plaques tectoniques américaine et australienne, en pleine zone de subduction. Durant les 45 derniers millions d'années, la tectonique a ainsi poussé la croute terrestre vers le haut pour former les Alpes du Sud. Durant la dernière ère glaciaire, le massif était couvert de neiges éternelles et de glaciers, dont les mouvements ont sculpté vallées et gorges, entre autres reliefs particuliers. Au nord, dans la région du Nelson Lake National Park, leur fonte a ainsi laisser apparaître un grand nombre de creux et de dépressions, qui se sont remplis d'eau pour donner autant de lacs de formes et de tailles variées, dont les deux principaux, Rotoiti et Rotoroa.

S'il est possible d'y faire de nombreuses balades à la journée, le coeur du parc ne se révèle qu'en plusieurs jours de marche sur des sentiers assez difficiles et escarpés, souvent peu aménagés et traversant un milieu alpin présentant un climat montagnard qui peut être rude, même en plein été.

La météo dans les hauteurs du Nelson Lake est très capricieuse, et il y neige toute l'année à partir de 1200 mètres.

Bref, il ne faut pas se lancer là-bas dedans sans être un minimum en forme et équipé.

Pour plus d'information sur le parc, voyez ici (en anglais)

Avec sa centaine de millier d'hectares, le parc propose de nombreux trecks de plusieurs jours. Au fil de nos recherches, pendant que nous étions coincés à Nelson, nous sommes tombés sur de nombreux forums de randonnée et d'alpinisme qui faisaient les éloges d'un endroit apparemment magnifique : l'Angelus Lake, situé entre Rotoiti et Rotoroa, à 1650 mètres d'altitude. Nous avons lu de nombreux récits de randonneurs qui décrivaient les marches pour s'y rendre comme les plus belles et intéressantes balades de Nouvelle Zélande, au-delà des great walks, et qui faisaient état d'itinéraires peu fréquentés et méconnus bien que grandioses. Sans parler du lac, qui présente un des plus beau panorama du pays.

Durant notre passage à Nelson le jour de Noël, nous sommes passés au bureau d'information du DOC pour papoter un peu avec un ranger et établir un itineraire qui nous convienne. Au programme donc, départ à St Arnaud, petit village situé au bord du lac Rotoiti, pour une première journée de marche relativement plate sur le Lakehead Track, tracé qui longe le lac pour aboutir au pied du Hukere Stream, une gorge débutant à 620 mètres d'altitude. Le deuxième jour doit nous faire prendre un peu plus de 1000 mètres de dénivelé à travers la forêt et les hauteurs, suivant le Cascade Track, qui remonte la gorge jusqu'au lac Angelus. Nous grimperons ensuite jusqu'à 1800 mètres pour rejoindre le Robert Ridge Route, sentier qui suit la crête du Mont Robert pour redescendre dans la vallée à quelques kilomètres de St Arnaud. Nous verrons sur place où passer notre deuxième nuit avant de boucler la boucle le troisième jour.

Parce que oui, l'information qui fait plaisir, c'est que le bivouac est autorisé dans le parc! Nous pourrons donc poser la tente où nous voudrons, quand nous voudrons! Enfin!

Un itinéraire difficile, varié, comportant de nombreux avantages du côté de la tranquillité : le Cascade Track est loin de tout, particulièrement raide, et présente des sections à peine balisées et des passages ardus en pierriers dans les hauteurs, promesse de solitude. De plus, nous allons suivre la crête du Mont Robert dans le sens de la descente, à l'inverse de la plupart des visiteurs. Enfin, l'un des avantages du bivouac libre, c'est que nous pouvons organiser nos coins camping et nos heures de départ de façon à marcher entre les pics de fréquentation.

Plus d'infos sur le lac Angelus et les randonnées alentours disponibles ici (en anglais).

Inutile de décrire l'enthousiasme que sucitent chez nous toutes ces informations! Parmis toutes les choses que nous attendons en Nouvelle Zélande, les montagnes de l'île sud figurent dans le haut du panier.

Reste le problème de la météo. En arrivant à Motueka, nous nous garons sur le parking du McDo, et allumons l'ordinateur, fébriles. C'est que nous n'avons pas non plus beaucoup de temps avant de rattaquer le thining... Et nous bondissons : dès demain, grand soleil pour trois jours sur tout le Nelson Lake National Park! Nous consultons plusieurs sites, tous unanimes... Voilà notre créneau, il nous faut partir dès demain matin!

Un peu précipité tout ça, mais le beau temps ne va pas se maintenir, et de toutes façons nous avons développé au fil des vadrouilles certains réflexes en ce qui concerne la préparation efficace des escapades sauvages... Nous filons acheter trois jours de provisions plus un petit rab en cas de pépin, et du temps que nous sommes en ville, nous en profitons pour vérifier tout notre matériel, nos réserves de gaz, etc... Tandis que la journée touche à sa fin, nous voilà parés, et nous rejoignons le Mc Lean Campsite.

Je profite de la rivière pour me rincer, nous préparons et bouclons nos sacs, et nous couchons tôt.

Au réveil, à 5h30, nous ne traînons pas. Nous devons rejoindre St Arnaud, à 2 heures de route.
Nous décollons aux aurores et mettons le cap vers le sud.

Les étendues campagnardes et gentillements vallonnées des alentours de Nelson cèdent peu à peu la place à des forêts de sapins tandis que la route commence à grimper, et l'horizon dévoile bientôt un spectale qui nous plaque un grand sourire sur les lèvres : de majestueuses chaînes de montagnes aux sommets enneigés se découpent au loin dans un ciel d'un bleu éclatant. Terre en vue!

Nous arrivons à St Arnaud, aux allures de petit village alpin, en milieu de matinée, nous passons au bureau du DOC histoire de nous procurer cartes et autres mises à jours météorologiques de denière minute (zut, peut-être quelques nuages demain...), et filons à l'entrée du Lakehead Track.

Lorsque nous débouchons sur les rives du lac Rotoiti, nous nous prenons le premier aperçu du Nelson Lake National Park en plein dans la vue, et le bougre donne directement dans le sensationnel.



Ca promet! Nous profitons un peu de la plage et de son panorama, hissons nos sacs et nous mettons en route, nous sentant pousser des ailes. Ca y est, nous attaquons la crapahute, la vraie, et qui plus est dans une région du monde qui nous fait rêver depuis des années!

Bon, côté crapahute, on ne peut pas dire que le début de notre boucle soit éprouvant. En bons randonneurs du dimanche, nous démarrons vers 11h -ce qui nous permet de ménager un sympathique décallage avec les autres hypothétiques promeneurs- sur un chemin large et plat qui suit la rive est du lac vers le sud, à travers une forêt plutôt jolie mais finalement assez quelconque.

Le véritable intérêt de ces premières heures de marche tient plutôt dans les magnifiques points de vue sur le lac qui apparaissent régulièrement à travers les arbres, et nous nous dénichons bientôt une petite berge pour grignoter un morceau face au paysage avant de nous remettre en route.



Plus nous descendons vers le sud, plus la forêt s'éclaircie. Bientôt, nous franchissons nos premiers torrents au milieu des pierriers, tandis que nous atteignons les rives sud du lac sur un sentier qui se fait de plus en plus petit.



A chaque fois que nous avons mis les pieds dans un parc en Nouvelle Zélande, nous avons fait la même constatation : les premières heures de balade sont rarements exceptionnelles, et ce qui vaut vraiment le coup se dévoile toujours après quelques kilomètres. Les décors de rêve, ça se mérite, et Le Nelson Lake ne déroge pas à la règle : tandis que nous atteignons l'extrémité du lac, en milieu d'après-midi, nous sortons de la forêt... Et le craquage de rétine commence!

Nous marquons un temps d'arrêt pour nous gorger du panorama fabuleux qui s'ouvre devant nous, et profiter du frisson qui nous parcourt le dos à la vue des montagnes qui s'élèvent au fond de la vallée.


Le sentier s'éloigne des rives, et plonge dans une vaste et formidable plaine dorée d'herbes hautes. Nous suivons la piste le nez en l'air, admirant les montagnes qui se dressent de tous côtés.


Après quelques courts passages en forêt, nous longeons la Travers River, la rivière principale qui alimente le lac. Dans son lit coule l'une des eaux les plus pures au monde, et de l'autre côté nous apercevons les pentes et les gorges qu'il va nous falloir gravir demain...


Nous atteignons bientôt un pont suspendu qui nous mène de l'autre côté du cours d'eau, et nous replongeons dans la forêt tandis que la journée touche à sa fin. Pour le coup, cette forêt là est du genre enchantée!

Nous arrivons à la jonction avec le Cascade Track en avance, et nous décidons d'attaquer son ascension histoire de prendre un peu de hauteur avant de poser le camp pour la nuit.


Le chemin commence à grimper doucement parmis les arbres, et nous constatons avec plaisir qu'il s'agit... Et bien d'un chemin de rando, tout simplement. Pas un boulevard, pas une route de 2 mètres de large bien nivellée couverte de graviers pour ne pas se faire mal à ses petits pieds douillets. Nous avançons sur une piste forestière gentillement escarpée et accidentée, en enjambant des racines ou des troncs, en prenant appuis sur les rochers qui affleurent, en sautant de pierre en pierre pour franchir les quelques torrents qui coulent au milieu des arbres, tout en cherchant la suite du parcourt des yeux, matérialisée par de simples poteaux plantés tous les vingt mètres dans la forêt.

 Dès que la fatigue commence à pointer le bout de son nez, nous cherchons un endroit où poser la tente. Une grosse journée nous attend demain, et nous voulons nous économiser.

Nous découvrons bientôt un replat au bord d'une rivière à quelques mètres du chemin, posons le camp et sirotons un thé en profitant de l'instant. C'est tout ce que nous demandons : être autonomes, pouvoir nous balader librement, et pouvoir poser notre guitoune quand et où nous voulons. C'est à ces conditions que le sentiment de liberté et d'échappée sauvage se fait pleinement et délicieusement ressentir.



 Nous nous réveillons tôt, et après le thé et le repliage, nous attaquons notre grimpette dans la forêt vers 7h30. Le ciel est malheureusement chargé... Au moins nous monterons au frais!

 La journée s'annonce significativement plus violente que la précédente : nous devons être à peu près à 700 mètres d'altitude, et nous devons grimper par le Cascade Track jusqu'à l'Angelus Lake, 1650 mètres, avant de rejoindre la partie terminale de la crête du Mont Robert, à plus de 1800 mètres, à partir de laquelle nous commencerons à redescendre dans la vallée. Nous comptons marcher jusqu'à épuisement, nous verrons bien où nos limites nous mènerons. Quoi qu'il en soit, d'après nos topographies de l'itinéraire, ce sont quelques 2000 mètres de dénivelé positive qui nous attendent aujourd'hui.

 L'ascension jusqu'au lac, toujours d'après les topos, va se dérouler en deux parties : une première grimpette progressive en pente douce jusqu'à un premier replat juste avant la bushline à 1200 mètres, et... un mur. Sans rire, la deuxième moitié de l'ascension a l'air de se faire quasiment à la verticale, et nous allons prendre les 400-500 derniers mètres sur une distance horizontale ridiculement courte.

Effectivement, le début de la grimpette est plutôt tranquille, et nous montons doucement dans la forêt sur un sentier escarpé formé par les racines des arbres et les rochers.



Un bien bel échauffement dans une forêt magnifique qui nous amène bientôt au pied d'un énorme ébouli, surplombé par de hautes falaises dont les paroies disparaissent dans le brouillard loin au-dessus de nos têtes.



Nous longeons le pied de l'ébouli, suivant pendant environ une heure le Hukere Stream, la rivière qui sépare le chaos de roches de la forêt et qui a contribué à sculpter la gorge que nous sommes en train de remonter, avant de déboucher sur le replat, qui s'avère être un large plateau couvert de hautes herbes et cerné de falaises, au milieu duquel serpentent de petits cours d'eau. Quelques bosquets d'arbres se dresse ça et là.

De l'autre côté du plateau apparaît le fond de la gorge, et nous mettons une image sur le trait vertical qui figure sur la topo : un mur de roches et de falaises ponctué de pierriers s'élève dans les nuages vers les sommets. Mur qu'il va nous falloir gravir...

 La traversée du plateau offre un magnifique paysage et de sympathiques passages en forêt, mais le ciel reste désespérément couvert...



Et puis il va être temps d'arrêter la rigolade. Ca va bien, les balades en bord de lac et les petites promenades forestières... Vient l'heure d'attaquer l'ascension finale vers le lac.

 Nous plongeons dans la dernière frange d'arbres qui couvre le flanc de la montagne, et la côte attaque directement très fort. Nous devons littéralement nous hisser à travers la forêt en nous accrochant aux racines qui dépassent du sol. Nous ne nous pressons pas, et passons bientôt la bushline à 1200 mètres, quittant la forêt, tandis que le chemin se transforme en piste rocailleuse bordée de buissons traversant un décors beaucoup plus minéral.

Côté raideur, nous sommes servis : le chemin s'élève droit dans la pente, qui se dresse à quelques dizaines de centimètres de notre nez, et nous devons parfois carrément escalader deux ou trois mètres de paroie rocheuse quasi-verticale. Avec nos chargements sur le dos, nous prenons tout notre temps, et finalement nous ne peinons pas trop, l'aspect technique de l'ascension ralentissant le rythme.



Nous nous ménageons quelques pauses en cours de route pour profiter du panorama qui se dévoile tandis que nous prenons de la hauteur sur un terrain à présent dégagé. Le brouillard disparaît et les nuages commencent à se lever, révélant les alentours et les nombreuses cascades qui justifient le nom du chemin que suivons.

En contrebas, le plateau et la gorge que nous venons de quitter se dévoilent enfin, et la vue est fantastique! Nous nous mettons à espérer un ciel clair pour notre arrivée au lac.



Aller, on fait chauffer les cuisses! Histoire de pimenter un peu plus la chose, le sentier disparaît, et nous nous retrouvons à crapahuter au beau milieu d'un pierrier, nous dirigeant grâce aux quelques poteaux qui jalonnent ce chantier en essayant de ne pas y laisser une cheville.



Et bien il faut dire que jusqu'à maintenant... on s'éclate! Elle est géniale cette ascension, tout en variété, la nature du terrain change tous les 10 mètres, le dosage technique est parfait, et la progression est intéressante sans être ni laborieuse ni trop difficile. Au final, on s'amuse comme des fous! Et s'il n'y avait que ça...

 Lorsque nous sentons à nouveau de la roche stable sous nos pieds, à quelques dizaines de mètres de la fin de la côte, nous levons le museau et nous retournons... Pour apercevoir un soupçon de bleu au-dessus de nos têtes! Le soleil tente une timide percée, et nous l'encourageons. Et comme si les éléments décidaient soudainement de nous exaucer, le ciel se dégage brusquement et totalement au moment précis où nous franchissons un dernier raidillon et débouchons sur le plateau du lac Angelus! La nature nous a à la bonne aujourd'hui...

A partir de cette instant, notre balade va prendre une tournure majistralement contemplative : le massif va se dévoiler dans toute sa splendeur, magnifié par le ciel bleu et les rayons du soleil, pour nous arracher les yeux sans interruption jusqu'au soir en nous balançant en continue des paysages tous plus grandioses les uns que les autres.

Derrière nous, les montagnes se débarrassent élégamment de leurs derniers nuages, qui s'effilochent en essayant désespérément de s'accrocher aux crêtes et aux arrêtes...



Nous profitons une dernière fois du panorama sur les gorges du Hukere Stream avant de découvrir le lac Angelus.

Il est 10h, et nous voilà perchés à 1650 mètres d'altitude, sur un petit plateau d'herbes rases et dorées, entouré d'un cirque de montagnes, de morraines, de crêtes torturées et de pentes abruptes couvertes d'éboulis et de quelques névés. Nous longeons un premier petit lac et passons un refuge qui se dresse au sommet d'une colline pour rejoindre les rives de l'Angelus...



Sur les berges du lac, assis dans l'herbe, nous nous préparons un petit thé et profitons de la beauté de la montagne. Il fait bon, nous sommes seuls au monde, le calme règne et le temps s'arrête tandis qu'en silence nous écoutons le murmure du vent dans les sommets.

Nous sentons cette impression de complétude qui fait partie des choses que nous recherchons avec le plus d'ardeur, durant ces moments précis et jouissifs durant lesquels tout est parfait et où il n'y a plus rien d'autre que le ici et le maintenant. 



Nous passons presque une heure dans le coin, à crapahuter sur les collines du plateau, à tourner autour des lacs, découvrant sans cesse de nouveaux et magnifiques point de vue.

Le décors, minéral, a quelque chose de très alpin sans se départir d'une touche différente de nos montagnes françaises.



Il est bien difficile de s'arracher à ce décors pour se remettre en route! Nous passons remplir nos bouteilles d'eau au refuge, et attaquons lentement un sentier escarpé qui grimpe dans la caillasse jusqu'aux crêtes qui surplombent le lac. Tandis que nous nous élevons, nous profitons d'une vue d'ensemble du plateau...



...Avant d'atteindre le sommet de la crête que nous suivons quelques minutes pour découvrir ce qui se cache derrière. D'un côté comme de l'autre, c'est grandiose!



Nous sommes à présent à plus de 1800 mètres, au pied de l'arrête terminale du Mont Robert, qui se dresse juste au-dessus de nous. Nous effectuons la jonction avec le Robert Ridge Track, sentier d'un peu plus de 12 kilomètres qui suit une longue crête en descendant dans la vallée, passant plusieurs sommets dans la foulée.

Le progression se fait plus sportive, les montées et les descentes se succèdent. A plusieurs reprises, il nous faut avancer sur plusieurs centaines de mètres dans des éboulis bien casse-pieds, en faisant attention au moindre de nos pas tout en veillant à ne pas perdre de vue le balisage pour ne pas nous retrouver bloquer trop bas ou trop haut en plein pierrier. Marrant, mais assez éprouvant! Les rafales de vents et nos gros sacs n'aident pas...

Côté craquage de rétine, on reste dans l'exceptionnel : Qu'elle suive le flanc ou le sommet de la crête, la voie est très aérienne, et offre de fantastiques points de vue sur la vallée à l'ouest et sur le massif à l'est. Chaque virage, chaque montée donne sur un nouveau et grandiose paysage. 



Nous passons le Julius Summit, 1794 mètres, et nous cassons la croûte perchés dans le ciel, sous un rocher à l'abris des bourrasques, avant de continuer.

La piste très exposée et escarpée, le vent violent et les passages en pierrier, intenses tant physiquement que psychologiquement, nous usent, et la fatigue commence à s'insinuer.

Heureusement, le sentier devient plus fréquentable au fil de l'après-midi, la dénivelé se calme un peu, et nous conservons suffisamment d'énergie pour nous rincer l'oeil avec le panorama. 


Durant la descente, nous voyons apparaître au loin une grosse silhouette qui vient rapidement vers nous. Lorsque la chose se rapproche, nous constatons qu'il s'agit d'un sac à dos énorme, porté par une petite vieille dame au chapeau à larges bords, aux grosses chaussures de montagnes et aux mollets musculeux. La ranger du Departement Of Conservation Nathalie, à vue de nez 65-70 ans, nous demande avec entrain si nous pouvons l'aider à remettre son sur-sac, mis à mal par les rafales de vent. Nous papotons un moment, elle nous demande si nous profitons bien de notre journée dans ce parc magnifique, avant de repartir en galopant sur le versant que nous venons descendre pour aller prendre ses quartiers au refuge du lac Angelus... Nous observons, abasourdis, ce gros sac avec deux jambes qui dépassent en-dessous cavaler droit dans la pente avant de nous remettre en route.

Nous accueillons la fin de la crête, tandis que l'après-midi touche à sa fin, avec une pointe de soulagement : Nous avons bien avancé, plus loin que prévu, et nous n'aurons pas à passer une nuit inconfortable à nous casser le dos sur les rochers de la Robert Ridge.

Nos pieds sont en feu et nos jambes crient grâce, mais nous décidons de descendre encore un peu, et nous débaroulons sur un plateau bien dégagé avant de replonger dans la forêt, enfin à l'abris du vent, pour commencer à chercher un endroit où passer la nuit. 


Nous ne sommes pas loin de la fin de la boucle, mais si le sentier a repris sa largeur de boulevard, il n'en reste pas moins abrupte, descendant en zigzagant parmis les arbres. A chaque virage, nous posons les sacs pour quitter le chemin et faire un petit tour de reconnaissance dans la forêt en quête du moindre carré à peu près plat où poser la tente. Très pentu tout ça...

Finalement, après une heure de recherche, nous dénichons un spot relativement potable, dans les sous-bois à une quarantaine de mètres du sentier. Sous une épaisse couche d'humus, nous sentons de grosses racines, des creux et des bosses, mais le coin fera l'affaire.

Nous montons le camps, préparons le thé et nous affalons enfin, après cette bonne grosse journée de plus de 8 heures... Au total, nous aurons parcouru plus de 20 kilomètres aujourd'hui, pour nous enfiler près de 2000 mètres de dénivelé positive...

 Nous ne sommes pas près d'oublier notre virée au lac Angelus. Notre petite boucle a rassemblé tout ce qu'on demande à une randonée : intéressante, variée, sauvage, et surtout somptueuse. Nous la plaçons sans hésitation parmis les meilleurs balades que nous ayons faites! Le plaisir que nous avons eu à parcourir les sentiers du Nelson Lake National Park renforce ce qui commence à être une véritable fascination pour les étendues naturelles de ce pays. Il reste tant à voir, et si tout est plus ou moins du même acabit... Vivement les vacances!

Au matin, nous obtenons la confirmation qu'effectivement, le créneau de beau temps était bref, lorsque nous sommes réveillés par la pluie qui tambourine sur le toit de la tente... Nous attendons une accalmie pour replier et achever la descente dans le brouillard et le crachin. Nous quittons la forêt, mais il nous reste quelques 3 kilomètres pour rejoindre St Arnaud, et nous passons une portion de route qui fait bien pâle figure après le sentier d'hier, avant de longer le lac et de rejoindre la voiture, achevant cette royale et formidable crapahute.

Avant de rentrer à Nelson, nous faisons un petit détour pour aller prendre le petit dèj au bord du lac Rotoroa, le grand frère de Rorotoiti. La vue depuis ses berges est connue pour être magnifique... Mais c'était sans compter sur la météo qui s'est beaucoup dégradée : lorsque nous arrivons, la rives opposée et les montagnes sont cachées sous d'épaisses couches de brouillard et de nuage... Nous mettons les voiles après un petit déjeuner au bord de l'eau, nous promettant de repasser à l'occasion.



Nous retournons nous poser au Mc Lean Campground près de Nelson. Nous sommes le 31 janvier, et nous décidons de retourner à la ferme le lendemain.

Le réveillon de la nouvelle année s'achève tôt pour nous, éreintés que nous sommes après le trek, et quand sonnent les douze coups de minuit, voilà déjà deux heures que nous dormons à points fermés... De vrais petits vieux!



Après quelques jours de repos passés soit à la maison, soit à la bibliothèque de Richmond, le thining rattaque, et nous nous enfilons 10 jours de travail d'affilée! Nous commençons à trouver le temps long, mais les dollars pleuvent littéralement et nous sentons que la fin est proche.

Nous passons quelques soirées avec Callan et David, à discuter de tout et rien. Ce dernier nous invite un soir au pub de Mapua, le petit bled de pêcheurs du coin. Nous passons une soirée bien rustique à jouer au billard et aux fléchettes sur fond de country avec les habitués du coin, tres sympas.

 Bryan nous donne le week-end du 14 janvier, ce qui tombe à pic étant donné que Florian célèbre justement son trentième anniversaire le 15. Nous fêtons ses trois dizaines d'années (punaise, trente ans!) en bonne et due forme, sans avoir à nous lever le lendemain, avec une petite soirée entre amis à la maison et un dîner au restaurant du coin, judicieusement recommandé par Tracey. Que du bonheur!



Côté travail, nous en sommes aux finitions, au nettoyage de dernière minute. Finalement, le matin du 21 janvier, Bryan nous demande de repasser une dernière fois sur quelques rangées, après quoi... Le thining sera fini! Nous accueillons la nouvelle avec joie. Allégresse. Folie furieuse dégénérée et extatique de béatitude cosmique vers un nouvel âge réminiscent.

Quelques heures plus tard, c'est fait. La dernière pomme tombe au sol, rebondit au ralenti et roule dans la pente pour finir sa course dans un nuage de poussière au milieu des cadavres de ses congénères... Nous avons vaincu ces saletés. Nous en sommes sortis!

L'heure est au bilan. Pour ceux qui veulent se faire une idée avant de se lancer dans thining : Nous aurons travaillé en tout 31 jours, à raison de 9 heures par jours la plupart du temps, pour un salaire total net de 3838$ par personne. Selon toute vraisemblance, nous ferons le double durant le picking.

Ce petit tour en Nouvelle Zélande continue d'être un gros chamallow tout doux, sans problèmes, sans accros. Tout est simple ici. Notre job au Dominion Point Orchard va nous mettre à l'abris du besoin pour les deux prochaines années. Nous voulons un travail et de l'argent, nous avons un travail et de l'argent. Nous voulons une voiture, nous avons une voiture.

 On trouve tout de suite tout ce que l'on cherche ici. Le pays est minuscule et il n'y a pas assez de routes pour s'y perdre. Même à pied en pleine montagne, il faudrait vraiment être une bille pour réussir à se paumer. Je vous parle des cartes du Nelson Lake National Park, mais en vérité il n'est pas vraiment nécessaire de s'encombrer d'une carte autrement que pour se rassurer. Tous les chemins, même les escarpés, même quand ils sont couverts de caillasses, sont balisés, chaque tournant est marqué d'une flèche, chaque intersection est plantée d'un joli poteau portant un panneau indiquant clairement direction, nom du sentier, temps de marche et kilomètrage.

Nous ne rencontrons aucune résistance, et pour tout dire l'ensemble manque un peu de stimulation. L'esprit reste sagement à sa place, et côté choc culturel, chambardement psychologique et grand huit existentiel, on est dans le platonique, le sans surprise. Pour être franc, le secouage de cervelle nous manque.

Peuvent pas s'empêcher de râler ces petits voyageurs... Tout ça, nous le savions. Nous sommes en Nouvelle Zélande, pas au fin fond du Népal ou de l'Iran. Nous ne sommes pas venus ici pour faire trembler nos idées et nos conceptions, nous sommes venus pour travailler et pour crapahuter dans des environnements qui comptent parmis les plus beaux de la planète. Et de ce côté là, la réussite est pour le moment totale, et va finalement bien au-delà de ce que nous attendions.

Trois semaines de vacances nous tendent à présent les bras avant le picking, et nous comptons bien les rentabiliser au mieux pour explorer ce joyau d'île sud. Quelles nouvelles et grandioses surprises nous attendent dans ce pays de rêve?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire