mercredi 7 octobre 2015

Luang Prabang, un joyau d'un bout à l'autre





Bonjour le monde!

Et bien il aura pris son temps pour sortir celui-ci...

Nous publions depuis Pakse, que nous nous apprêtons à quitter pour la mission de la mort qui tue : 200 kilomètres autour du plateau des Bolovens à pied et sous tente... Rlan.

Le Laos, c'est fort. Très fort. Cela faisait longtemps que nous n'avions pas eu autant envie de trainer dans un pays. Depuis le Népal en fait. Nous nous sentons bien ici, et nous n'avons pas à chercher longtemps pour trouver ce que nous cherchons, nous contentant de nous laisser couler, un sourire benet aux lèvres. Ce qui explique peut-être le retard que nous avons pris sur l'écriture...

Parce que avant Pakse, nous nous sommes évadés à Kong Lo, un petit village paumé au milieu des rizières et des falaises, depuis lequel nous avons fait un peu de spéléologie, en pirogue dans une grotte. Mais c'est une autre histoire... Avant ça, nous avons travaillé dans une crèche à Vientiane, accueillit par une famille formidable... Mais c'est encore une autre histoire. On a le sens du suspens chez nous...

Et avaaant tout ça, nous sommes allés dans une ville... Mais une ville... Un endroit qui nous aura scotché les yeux et le coeur, un endroit que nous passions juste voir après nos escapades montagnardes, emplis de la célèbre crainte du haut lieu touristique, et dans lequel nous sommes finalement restés près d'une semaine tant il était merveilleux. Un des plus beaux joyaux de l'Asie du sud-est et de l'Asie en général, serti dans l'atmosphère et la verdure laotienne que nous ne voulons plus quitter. La cité de Luang Prabang.

Préparez-vous à en prendre plein les mirettes, avec une petite tirade finale à pas piquer des annetons. Deux ans de voyage, il fallait bien ça!


Arrivée et découverte


Luang Prabang. Ce nom fait partie de ceux qui résonnent dans le coeur de tout voyageur lorsqu'on parle du Laos, et la réputation de la ville qui se cache derrière n'est plus à faire

Connue comme l'une des plus belles cités du sud-est asiatique, célèbre pour ses dizaines de temples, dont certains comptent parmis les plus beaux édifices d'Asie, son authenticité et son atmosphère unique, haut lieu du bouddhisme en Asie, Luang Prabang était la capitale du royaume du million d'éléphants. Après une histoire houleuse emplie d'envahisseurs, de pillages et d'incendies, le royaume et sa capitale passèrent sous le protectorat français, qui dota la ville d'un brin d'architecture coloniale. Après l'ouverture du Laos au tourisme, nombres de programmes de préservation et de restauration furent mis en place, et la ville fut finalement classée au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1995.

Très alléchant tout ça. Avec un palmares pareil, nous nous attendons à découvrir un lieu très fréquenté, mais comme d'habitude, si les histoires que l'on raconte sont vraies, la ville doit valoir son pesant de cacahuètes!

Encore faut-il s'y rendre... Luang Prabang se trouve au bord du Mékong, à quelques 300 kilomètres de Nam Tha, et par les petites routes sinueuses du Laos, le trajet prend près de 9 heures...

Nous embarquons à 8h, et quittons bientôt Luang Nam Tha, achevant ainsi notre petite semaine montagnarde pour aller faire un peu de tourisme.

Comme à l'accoutumé, la route nous fait traverser des étendues plus somptueuses les unes que les autres, mais nous commençons à nous y habituer. C'est définitivement normal ici!

En revanche, nous nous apercevons bien vite que si l'estimation du temps de trajet est valable sur le papier, la réalité est bien différente... Rien de bien étonnant dans un pays comme ça me direz-vous, sauf que dans notre cas le voyage va durer beaucoup, mais alors beaucoup plus longtemps...

Il faut savoir que les routes se construisent dans tout le Laos à un rythme effreiné. Un peu trop effreiné, sans faire attention à tout, et surtout sans consolider les abords de la route grandement destabilises par la construction. Ainsi, durant la saison des pluies, des glissements de terrain se produisent un peu partout, recouvrant des portions entières de route de terre et de gravats, que les pelleteuses s'acharnent à dégager. De plus, certaines parties de route sont toujours en construction.

C'est ainsi qu'après une dizaine de kilomètres, nous nous retrouvons bloqués derrière une file de véhicules, face à une chaussée couverte de caillasse, de boue et de troncs d'arbre éclatés que des engins de chantier tentent de dégager. Nous nous attendons à tout lorsque nous voyons les autres passagers du bus s'assoire sur le bas côté et commencer à sortir le pic-nic... Nous resterons en plan plus de vingt minute avant d'enfin repartir.



Et ce n'était qu'un début. Pour faire court, cette situation va se répéter environ tous les quarts d'heure, et ce tout au long de la journée. Nous resterons bloqués parfois 10 minutes, parfois trente, et même 1 heure... A la fin, malgré le paysage, nous regressons au stade du légume.

Au final, nous mettons plus de 14 heures (14 heures!!!) à rallier Luang Prabang. Soit grosso modo du 20 km/h de moyenne...

Notre arrivée n'est pas glorieuse... Nous sommes épuisés, il fait nuit, et nous négocions un tuk-tuk pour le centre-ville. Nous arrivons à côté d'une place de marché animée et lumineuse, avant de nous enfoncer dans une jolie petite ruelle illuminée de lampions et bordée de dizaines de mignonnes guest houses en bois. Nous avons entendu dire que malgré l'affluence que suscite le coin, il y a tellement d'hébergements qu'il est finalement facile de trouver une chambre à moins de 60000 kips, mais nous sommes visiblement dans la rue huppée du bled. Toutes les chambres sont à 120000, environ 12 euros. Nous en passons une dizaine, épuisés par le voyage, ne désirant qu'une chose : nous poser.

Finalement, la réceptionniste d'un des établissements, visiblement en manque de sous, nous coupe son prix en deux. Rien que ça! Nous voilà dans une chambre magnifique pour 60000 kips. Nous chercherons moins cher demain.

Durant cette interminable recherche, nous avons rencontré une jeune fille française avec qui nous discutons un moment avant de partir en quête de nourriture tous ensemble. Vu l'heure tardive et l'endroit, nous craignons un peu le prix de la boustifaille, mais non : les stands de rue abondent, et nous dégotons de bon gros sandwichs à 10000 kips. Pour les visites, nous attendrons demain, il est près de minuit et nous allons nous effondrer!

Au matin, nous partons fouiner dans les petites ruelles du centre-ville à la recherche d'une guest moins chère. Nous y rencontrons un pêcheur de crabe qui nous montre quelques-unes de ses prises, et nous passons les 5 minutes suivantes à courir après les crabes qui en ont profité pour se faire la malle!

Le gars, en plus d'être pêcheur, est aussi le fils du proprio de la Padichith Guest House, et il nous présente son père, Kae, un papito souriant qui en plus parle français! Il nous propose une piaule à 50000, avec thé, café, bananes et eau à volonté et surtout gratos! Nous déménageons.

Après avoir discuter un peu avec Kae autour d'un café, nous partons explorer la vieille ville au petit bonheur la chance, histoire de nous impregner un peu.

Et force est de constater que Luang Prabang est à la hauteur de sa réputation. Avant même de croiser le moindre temple, c'est déjà un plaisir de se balader dans ses ruelles et ses avenues. La formidable patte architecturale de la ville est formée d'un mélange entre du traditionnel en bois et du colonial, le tout couvert de massifs de fleurs colorés. Les petites rues pavées et labyrinthiques sont bordées de maisons en bois, tandis que la présence française à l'époque de l'Indochine est plus marquée autour des grands axes.














Nous croisons effectivement beaucoup de touristes, mais le calme si particulier du pays semble être toujours de rigueur ici!

Nous remontons la vieille ville, mais nous nous arrêtons souvent. Et pour cause, il n'y a pas moyen de faire un pas sans trébucher sur un temple! Et quels temples... Nous avions décidé de les visiter demain, mais lorsque nous tombons dessus par hasard, il est impossible de ne pas nous y arrêter! A savoir que les temples sont désignés par le terme lao ''wat'', que nous utiliserons à présent.

Nous passons ainsi le Wat Sene Souk Haram, littéralement ''le temple aux cent milles trésors'', construit en 1718 par le roi Kitsarath à partir de 100000 pierres arrachées au Mékong





















Le Wat Siboun Heuang, l'un des rares à ne pas avoir été rénové.



Et le Wat Khili












Entre autres... Nous ne croisons personnes durant nos explorations, hormis quelques moines en robe orange qui nous saluent discrètement.

Après ces magnifiques découvertes, nous échouons dans un parc à la pointe de la vieille ville, à l'endroit où la Nam Khan se jette dans le Mékong, avant de remonter ce dernier pour profiter du coucher de soleil depuis la rive.

La journée se termine, les gens se rassemblent aux terrasses pour boire un verre, quelques pirogues sillonent le fleuve. Derrière nous, la ville ralentie, tandis qu'en face la jungle renvoie les cris de milliers d'insectes tandis que des colonnes de fumée s'élèvent des villages où l'on doit commencer à cuisiner le diner.

L'atmosphère déjà calme de la journée devient encore plus paisible, et tout se mélange, la beauté de la ville et des rives du Mékong, la tranquille activité du crépuscule, le bruit de l'eau et de la nature... Il faut le voir.




Nous nous arrachons difficilement de ce cocon pour rejoindre un centre ville non pas plus agité mais en tout cas plus occupé. Sur toute la rue principale de la ville s'est installé un immense marché artisanal, dans lequel nous vagabondons un moment avant de passer dans un autre marché, local cette fois, nous acheter quelques tomates et concombres pour le diner, puis de rentrer. Vivement demain!







Et comme si la journée n'était pas déjà suffisament bonne, une surprise nous attend à notre retour sur notre boite mail : Marianne, la directrice de la crèche de Vientiane en recherche d'animateurs volontaires et auprès de qui nous avions postulé à Oudomxai nous a répondu, et nous sommes embauchés! Nous démarrons quand nous voulons, pour une durée de deux semaine, et en prime nous serons logés et nourris. Que du bonheur! Comme nous l'avions déjà dit, en bons masochistes passionnés, l'animation fait partie des choses qui nous manque le plus depuis le début de cette épopée, et après bientôt deux ans, la perspective de passer quelques semaines à nous occuper de titous nous ravie! Nous décidons de rejoindre Vientiane dès que nous aurons fait le tour de Luang Prabang. Mission trouver du travail accomplie!


Des temples merveilleux...


Au réveil, nous établissons un plan pour la journée, histoire de ne pas rater une miette des merveilles de cette ville. Aujourd'hui, nous allons manger du temple et du monastère à la pelle!

Nous attaquons sur la rue principale avec le Wat Mai, bâtit au 18è siècle, l'un des plus beaux et vastes temples de Luang Prabang. Le Wat Mai jouit d'une réputation particulière auprès des habitants du coin : après la destruction de la ville par les chinois à la fin du 19è, il servait de temple pour la famille royale. Il a également accueillit durant longtemps le plus haut dignitaire bouddhiste laotien, Pra Sangkharat.




Nous continuons avec le Wat Phon Xay



Vient ensuite celui que nous attendions le plus, le symbole religieux de la ville et son plus célèbre temple : le Wat Xieng Thong.

Construit en 1560 pour commémorer la mémoire du Chanthaphanith, premier roi légendaire du royaume du million d'éléphants, le temple, dont le nom signifie littéralement ''monastère de la cité d'or'', est l'un des lieu les plus sacrés du bouddhisme laotien, ce qui explique d'ailleur pourquoi les chinois l'épargnèrent, tout comme le Wat Mai, durant le sac de la ville en 1887.

A savoir que l'entrée vous coutera 20000 kips

Architecturalement, c'est un joyau. Xieng Thong est qualifié par beaucoup comme le plus beau temple de Luang Prabang et du Laos en général. Et de notre côté, nous ne pouvons qu'approuver! Nous n'avons jamais rien vu de tel.


L'arbre de la vie, tout en mosaïque de verre coloré


Les intérieurs sont sublimes.




Dans l'enceinte se trouvent, en plus du temple, de nombreux autels, stupas, et autres chapelles (en tout plus de vingts édifices!), sans parler des jardins, qui font de l'intégralité du site un monument formidable.

Chapelle funéraire
Char de crémation royal


A savoir que Xieng Tong servait de porte d'entrée symbolique pour les rois nouvellement couronnés, avant de devenir le lieu de couronnement. Aujourd'hui, après plusieurs rénovations, il accueille nombre de festivales et de fetes bouddhistes.

C'est beau, c'est grandiose, et encore une fois, il faut le voir! Nous nous en souviendrons de celui-ci...


Nous sillonons ensuite les ruelles de la ville historique, passant le Wat Nong Sikhounmuang...



...le Wat Xieng Mouane...






...Et le Wat Choum Khong, construit en 1843. Nous passerons un bon moment dans ses jardins calmes et luxuriants, au milieu des statues de bouddha.














Il y a trop de temples dans cette satanée ville, nous sommes submergés!!!

A peine le temps de nous enfiler quelques ban baos, ces petits beignets bouillis fourrés à la viande, et nous mettons le cap sur le sud de la ville et le Wat Visounnarath. Construit en 1512 ou 1513 (?), reconstruit en 1898, ce temple représente le style architectural le plus ancien de Luang Prabang. C'est d'ailleur le plus ancien Wat encore en activité de la ville.

A l'intérieur nous attendent des centaines de vieilles statues de bouddha, pour la plupart en bronze et centenaires. La plus imposante, qui domine toutes les autres, est particulièrement impressionante.




Décidément, quelle ville! Et il nous reste encore beaucoup de choses à voir. Nous nous dirigeons vers... Comment ça le soleil se couche? Pas déjà! Il faut nous rendre à l'évidence, une journée, même pour le seul centre historique, c'est très loin d'être suffisant. Nous nous y remettrons demain. 

Le fait est que, fidèles à nous-même, nous ne nous pressons pas. Déjà en temps normal, nous n'aimons pas courir, mais alors ici, où tout transpire le calme et la sérénité, au milieu de dizaines de temples bouddhistes, autant dire que nous tournons à un rythme très ralenti!

La soirée, posée, est à l'image de la précédente, mais nous ne trainons pas avant de nous mettre au lit. Demain, nous devons nous lever très tôt, car nous voulons assister à un événement très particulier qui se tient tous les jours à l'aube avant de continuer notre exploration de cette ville de dingue...


...Mais pas que


L'événement en question est le Tak Bat, l'aumône des moines, leur quête quotidienne et matinale de nourriture auprès des habitants dans les rues de la ville. Si ce rituel est courant dans tout le pays, il est particulièrement impressionant à Luang Prabang, de par le nombre de moines qui vivent dans la cité.

Quelques explications pour les profanes. Les moines bouddhistes, pour gagner leur seule assiette de riz quotidienne, ne peuvent compter que sur l'aumône. Leur vie est consacrée aux tâches spirituelles et à la méditation, et ils n'ont pas le droit de gagner ni de dépenser d'argent. Pour vivre, ils dépendent donc entièrement de la générosité des dévots. A savoir que les moines, ici, sont vénérés et très respectés. 

Ainsi, chaque matin se déroule un rituel séculaire, immuable et hautement sacré.

Pour avoir la chance d'y assister, il faut faire péter le réveil. Nous nous tirons du lit à 5h30 du matin, pour nous glisser un peu groggys dans la nuit fraiche. La ville est encore endormie, seule une faible lueur à l'est annonce l'aube qui approche, et nous rejoignons le centre ville désert et silencieux. 

Nous avons lu pas mal de choses sur le Tak Bat de Luang Prabang, et nous avons été attristés d'apprendre qu'apparement, la célébrité du rituel l'a transformé en attraction touristique, avec son cortège d'absurdités, de manque de respect et de hordes de boeufs en bermuda vissés à leurs appareils photo qu'ils agitent devant le visage des moines sous le regard méprisant et dégouté des habitants.

Les débordements de la part des touristes ont été tels que la municipalité et les services de sauvegarde du patrimoine ont été obligés de placarder des affiches dans toutes la ville, qui rappellent la signification de la cérémonie et incitent les visiteurs à la réserve, à la discrétion et au respect d'une tradition religieuse très importante et sacrée pour le peuple Lao. Nous verrons ce qu'il en est.

De notre côté, nous allons nous faire tout petits. A notre arrivée, les premiers habitants sont déjà en train de s'installer pour la quête, et nous trouvons un bout de trottoir de l'autre côté de la rue, à bonne distance, histoire de ne gêner personne. Bien sûr, vu la distance à laquelle nous étions, la qualité des quelques clichés que nous avons pris en abusant du zoom s'en ressent! A noter qu'au début, nous ne voulions même pas prendre de photos.

Alors, comment ça se passe tout ça? Les dévots étalent un tapis par terre et s'y agenouillent, habillés en blanc pour la cérémonie. Le riz, tout chaud du matin, attend l'arrivée des moines dans des casseroles et des paniers en osier. Pendant l'installation, certains parlent à voix basse, mais c'est un silence absolu qui s'installe peu à peu, tandis que le ciel s'éclaircit. Il est rassurant de voir qu'il n'y a pas grand monde. Et surtout pas de hordes de vacanciers ni de groupes bruyants ou envahissants, seuls quelques autres voyageurs respectueux qui comme nous sont assis en silence et à bonne distance. L'atmosphère est déjà sacrément spéciale!  


Les moines arrivent alors en petits groupes, pieds nus, en file indienne, sans aucun bruits.

 

Ils passent lentement devant les dévots en présentant leur gamelle que chacun va garnir d'une poignée de riz, de friandises ou de fruits.

A savoir que l'aumône est porteuse ici d'une grande valeur spirituelle. Elle ne constitue pas seulement un geste de générosité ou de respect, mais s'accompagne aussi d'une profonde réflexion : le dévot qui offre doit méditer sur le don gratuit et désintéressé, le moine qui reçoit doit de son côté réfléchir sur la pauvreté, sur la générosité et sur la valeur spirituelle de l'offrande.




Le Tak Bat ne dure pas longtemps, mais l'instant est incroyable, complètement figé dans le temps, nimbé d'une ferveur presque palpable. Le plus intéressant est peut-être la communion qui s'établit entre les moines et les habitants, complète, puissante et intemporelle. L'un de ces rares moments où, même de notre point de vue de païens bien terre-à-terre, nous sentons quelque chose.

Jusqu'à ce qu'arrive le pavé, ou plutôt la bouse immonde, dans la marre. Le truc tellement ressassé que ça ne pouvait pas être vrai. C'était trop gros, trop dégueulasse et trop évident... Et bien si.

Nous avons d'abord le gros Robert (qui, je le jure, portait vraiment un bermuda sous son gros ventre) qui vient se poser juste devant les moines, les bloquant tandis qu'il les mitraille avec son grand angle brandit à moins de trente centimètres de leur nez.

Suivent tout de suite derrière les non-moins célèbres braillardes en mini-short et leurs perches à selfies, sacrément gratinées aussi, qui grimpent littéralement sur des hommes qui ont fait voeux de célibat pour se tirer le portrait avec eux en rigolant bien fort. C'est tellement trop exotique quoi!

Bon, après, des groupes débarquent, et c'est la foire au pâté, façon parade de disneyland, sauf que les moines ne sont pas trop à la fête, impassibles et résignés devant la marée. C'est à vomir. Pourquoi fallait-il que ça se passe? Etait-ce tellement obligatoire? C'était déjà tellement cliché, annoncé, écrit de partout, fallait-il rendre la chose bien réelle pour ne pas faire mentir les rumeurs? Et dire que c'est probablement la même chose tous les jours...

Nous ne pouvons malheureusement pas faire grand-chose en dehors du fait de ne pas participer à l'attraction. Le Tak Bat demeure quand même quelque chose à voir, et nous ne sommes pas déçus, même si la fin du rituel a constitué une nouvelle preuve du fait que l'imbécilité n'a pas de frontières...

Il est encore tôt, et nous confectionnons un petit itinéraire qui devrait nous permettre de voir ce que nous voulons.

Nous nous dirigeons vers le sud de la ville, où nous attend le Wat That Luang, construit en 1818 durant le règne du roi Manthaturat. Il est resté pendant longtemps un lieu rituel important chez les bouddhistes, et il s'y tenaient également des fêtes et des festivals royaux. En plus du temple à proprement parlé, nous y découvrons le Grand Stupa, dont on dit qu'il contiendrait des reliques de Bouddha lui-même...




Nous continuons avec les Wats Phramahathat et Ho Xieng.












A ce niveau là du récit, j'ai décidé d'arrêter avec les superlatifs. Vous avez saisi l'idée générale!

Nous passons ensuite voir le Wat Haw Pha Bang, situé dans l'enceinte du palais royal de la ville. Littéralement une montagne d'or et de mosaïques en verre qui étincelle au soleil...



L'après-midi avance, et il est temps pour nous de suer un peu. Nous nous lançons dans l'ascencion d'un autre des plus fameux sites de Luang Prabang (nous nous rendons compte que ce qualitif s'applique à tout ici!) : le Mont Phousi, culminant à 150 mètres au-dessus de la ville, couvert d'une jungle luxuriante abritant temples, statues, monastères et stupas. A noter que le site est payant, 10000 kips.

Une volée de marches nous conduit au sommet...



...Où nous attend le stupa Chomsi, construit en 1804, le pilier de Luang Prabang, grande flèche dorée qui domine la ville du haut de ses 21 mètres. Ville que nous admirons d'ailleur dans son entier depuis le magnifique point de vue que constitue le sommet.




Après avoir bien profité du panorama et du cadre, nous redescendons de notre perchoir par l'autre flanc de la montagne. La jungle se parsème alors de tout un tas de statues, d'autels, d'alcoves creusées dans la roche, de représentations de Bouddhas, le tout dans une verdure tachetée de l'orange des robes des moines qui s'activent autour de petits monastères en bambou.





Nous trainassons dans la jungle sous le regard paisible des dizaines de bouddhas qui nous entourent, tant et si bien que nous quittons la forêt alors que le soleil décline. Une journée de plus s'achève dans cette ville de rêve que nous ne voulons plus quitter...

Après avoir une nouvelle fois profité du crépuscule au bord du Mékong en soupirant d'aise, un sourire aux lèvres, nous décidons de nous faire plaisir. Ba oui, depuis que nous avons quitté Muang Khua il y a plus d'une semaine, nous avons repris notre régime spécial Asie : chaque jour, un repas en extérieur à 1 euros, et un repas de nouilles déshydratées ou de légumes achetés au marché. Assez frugale comme alimentation donc. Pour notre diner d'aujourd'hui, nous rejoignons une minuscule rue dont nous avons entendu parlé. Sur place, des dizaines de buffets qui font monter la bave aux lèvres proposent la même formule : 15000 kips pour une grande assiette creuse que l'on remplit de ce que l'on veut du moment que ça ne déborde pas! Autant dire que nous nous cassons le ventre allègrement et que nous repartons pliés en deux...



Nous nous sentons vraiment bien ici, c'est indéniable. Nous nous réservons encore deux jours avant de rejoindre Vientiane et la crèche, que nous souhaitons mettre à profit pour visiter les alentours de Luang Prabang. Parce que oui, non seulement la ville est merveilleuse, mais ses alentours comportent aussi des sites dignes d'intérêt! Il y en a deux qui nous titillent particulièrement, qui vont un peu nous changer des édifices religieux que nous visitons sans interruption depuis près de trois jours et nous permettre de vadrouiller un peu la campagne : les grottes de Pak Ou et leurs milliers de bouddhas, à une trentaine de kilomètres au nord, et les chutes d'eau de Kuang Si. à une trentaine de kilomètres au sud.

Comme d'habitude, on se débrouille, et nous cherchons les solutions les plus économiques pour réaliser seul notre programme. Il n'y en a pas 50 : louer des vélos, faire les grottes demain et les cascades le jour suivant. Et en tout, pédaler quelques 120 kilomètres en deux jours... Ca promet!

Malheureusement, au matin, un violent mal de ventre terrasse Léonore et nous ne pouvons pas bouger. Nous profitons de la journée pour activer sur le blog et nous reposer les pattes après ces derniers jours de marche. En revanche, nous devons reconsidérer nos plans. Nous avons déjà prévenu Marianne de notre arrivée à Vientiane, il ne nous reste plus qu'un jour à passer à Luang Prabang, et nous voulons absolument passer voir les deux sites... Une seule chose à faire si nous voulons éviter de dépenser une blinde en tuk-tuk, louer un scooter. Je passe une bonne partie de l'après-midi à écumer les agences pour trouver un bon prix, et le soir venu je mémorise les cartes de la région et les itinéraires.


Et autour


Le lendemain, nous nous levons aux aurores, louons une monture, enfilons nos casques et partons en pétaradant dans les rues de la ville!

C'est reparti pour une chevauchée sauvage en direction des grottes de Pak Ou sur des routes beaucoup plus calmes que celles du Vietnam. Nous devons longer le Mékong jusqu'à sa jonction avec la Nam Ou river, au village de Ban Pak Ou, où une pirogue devrait nous permettre de traverser le fleuve pour rejoindre les grottes situées sur l'autre rive du fleuve.

Nous nous dirigeons de mémoire, et tout se passe bien, la route est bonne, jusqu'à ce que nous débarquions dans un village pour apprendre que nous sommes aller trop loin. Nous avons visiblement raté notre sortie et nous sommes enfoncés à l'intérieur des terres sur plusieurs kilomètres...

Heureusement, les habitants sont là, et nous apprenons vite que nous pouvons couper à travers la forêt pour rejoindre les rives du Mékong et Ban Pak Ou.

Notre escapade devient sportive : en suivant les indications qu'on nous donne, nous nous retrouvons sur un pauvre chemin de terre rongé par la pluie, couvert de trous et de bosses, en pleine forêt, au milieu d'une zone vallonée pleine de hauts et de bas complètement déserte, sur un vieux tromblon affichant plus de 500000 kilomètres au compteur dont les pneus sont presque lisses...

Quand le terrain devient vraiment trop pentu, nous mettons pied à terre et poussons. Dans l'ensemble, tout va bien, mais nous ne savons pas du tout où nous sommes, et craignons de nous perdre dans cette région sauvage. Et puis la balade commence à grandement remuer. En revanche, le décors est grandiose!

Et puis non, dans les rares petit villages de paysans que nous traversons, les habitants souriants nous guident, nous sommes bien sur le bon chemin!

Après une bonne heure de sport tout-terrain, à rebondir dans tous les sens en pleine forêt vierge, nous atteignons finalement notre embarcadère au milieu d'un minuscule village, montons sur une pirogue, et 5 minutes plus tard nous voilà au pied d'une falaise. Nous longeons son flanc par un escalier qui nous ammène à la grotte basse de Pak Ou.

J'annonce tout de suite, il n'y a aucune photos des grottes. En bon branquignoles, nous n'avons vérifié l'état de nos batteries d'appareil qu'une fois sur place, pour constater que tout était à plat... Deux appareils photos et pas fichus d'en avoir un qui marche...

Les grottes de Pak Ou (l'un des plus beaux sites et blablabla...) sont formées d'un ensemble de deux cavités, creusées directement dans une falaise karstique au milieu de la jungle.

Elles constituent un haut lieu de pèlerinage bouddhiste depuis près de mille ans, et renferment des milliers (expression à prendre au pied de la lettre) de statues de bouddha. Effectivement, dans la grotte basse, une grande cavitée ouverte, nous attend une véritable foule de représentations du seigneur, de la simple figurine de quelques centimètres à la statue de plus d'un mètre, en bronze, en pierre ou encore en bois. Chaque alcove, chaque recoin, chaque marche rocheuse en est couverte, du sol au plafond!

Nous continuons par notre escalier de pierre qui grimpe dans la jungle. Après ces quelques jours citadins, même dans la formidable Luang Prabang, nous sommes ravis de retrouver la forêt!

La grotte haute se présente plutôt façon temple perdu, avec sa voute d'entrée sculptée dans la roche et couverte de lianes. A l'intérieur, nous devons sortir la torche pour nous enfoncer dans un tunnel d'une vingtaine de mètres. De part et d'autre, ce sont à nouveau des milliers de bouddhas de toutes tailles qui nous observent depuis leurs socles rocheux.

Une visite bien sympa sans être hallucinante. Fait notoire, il n'y avait quasiment personne pour perturber notre exploration des profondeurs! Nous nous posons un moment dans la jungle au bord du fleuve (la vue est grandiose!) avant de reprendre notre pirogue et de rejoindre Ban Pak Ou.

Nous achetons un jeu de pile pour mon appareil photo, et c'est reparti, par le bon chemin cette fois! Nous décidons de ne pas nous arrêter, traversons Luang Prabang, et traçons directement vers le sud tel deux bikers fous le nez dans le guidon. La route vers les cascades est magnifique, tout en montagnes, forêts et petits villages, que nous traversons tranquillement en profitant du vent frais.

Nous nous garons à quelques kilomètres des cascades, dans un village, et nous engoufrons une platrée de nouilles dans un troquet avant d'aller voir comment tout ça se présente. En revanche, nous sommes toujours maudit de la photo : les piles que nous avons acheté sont d'une sous-marque chinoise et n'ont pas tenu la charge au delà de trois clichés...

Les cascades de Kuang Si forment un réseau aquatique de bassins reliés entre eux par des chutes d'eau, au coeur d'une végétation luxuriante.

On y accède à pied, par un sentier forestier qui traverse tout d'abord... une réserve d'ours à collier! C'est la bonne surprise du jour! Le bestiaux en question est en voie de disparition, et le district de Luang Prabang a mis en place ici une réserve destinée à la sauvegarde de l'espèce.



Nous ne nous attendions pas à voir des ours, et en bon fanatiques d'animaux nous restons un bon moment à les observer, avant de rejoindre les chutes.

Pour décrire Kuang Si, on pourrait faire un parallèle osé avec le parc de Krka que nous avions exploré en Croatie : de grandes piscines creusées par l'eau, des ruisseaux qui se séparent, se rejoignent et se croisent de partout autour d'ilots de verdure, et des chutes d'eau plus ou moins impressionantes. L'ensemble forme trois niveaux de bassins, et culmine avec une impressionante cascade de 50 mètres de haut.




C'est d'autant plus grandiose que nous arrivons à la fin de la saison des pluies : le moindre ruisseau a été transformé en torrent par plusieurs mois de mousson!

Nous nous asseyons face à la dernière chute, assourdissante, crachant des geysers d'eau dans un nuage d'écume, avant d'être interrompus dans notre rêverie par un groupe de chinois qui envahit bruyamment la zone... Qu'importe, Kuang Si, c'est magnifique!

Pour ceux que ça intéresse, voici le coût de notre petite journée : nous avons négocié la location de notre scooter à 90000 kips la journée, soit environ 9 euros. Beaucoup moins cher que de tout tirer en tuk-tuk! Le prix de la visite de Pak Ou, qui comprend la traversée en pirogue et l'accès aux grottes, est de 33000 kips. L'entrée pour les chutes de Kuang Si coûte 10000 kips.

Il est temps de rentrer. Nous roulons tranquillement jusqu'à Luang Prabang pour nous affaler, après cette journée très remuante, et profiter des rives de ce cher Mékong une dernière fois, avant de rentrer nous coucher.

Demain, décollage à 6h30 pétante pour attraper le bus et rejoindre Vientiane!

Luang Prabang nous aura tapé dans l'oeil. Et pas que dans l'oeil d'ailleur.

Tout ici est jouissif, les édifices sont formidables (et il y a teeellement de temples!!!), la ville en elle-même, son architecture générale et ses rues sont un rêve à parcourir, et il suffit de rejoindre les rives du Mékong pour apprécier d'un côté toutes les merveilles citées ci-dessus et de l'autre le fleuve et sa vie, ses abords verdoyants, et un horizon de collines et de forêts. Comme si tout cela ne suffisait pas, les alentours de la ville comportent eux aussi leur lot de sites sympas en pleine campagne.

Et l'apotéose : tout ça baigne dans l'atmosphère si particuliere laotienne, sur laquelle nous ne tarirons pas d'éloges. Cette impression de calme et de nonchalance qui imprègne chaque moment de la journée, dans laquelle on se laisse couler avec plaisir dans un magnifique lâcher-prise, sublime un tableau déjà extraordinaire à l'origine. Il faut y ajouter la ferveur religieuse palpable et la spiritualité qui s'élèvent de cette cité couverte de temples, de stupas et d'autels, de statues de bouddha et de nagas, de gongs et de tambours, parcourue par des moines en robe safran.

Les touristes? Il faut le dire, il y a du monde, mais à aucun moment la popularité du lieu ne parvient à entamer le reste (ou alors rarement...). Pour les visites, il faut quand même s'arranger pour tomber entre deux cars de vacanciers... Même si on sent bien que beaucoup de choses tournent autour du tourisme, on ne ressent pas vraiment cette impression de parc d'attraction accompagnant généralement ce genre d'endroit, et la vie suit son cour, même en plein centre historique.

Les habitants vaquent à leurs occupations, et le local côtoit l'aménagé. Ils n'ont pas l'air d'en avoir grand-chose à faire des étrangers, mais ce n'est pas désagréable. Ce qu'on pourrait prendre pour de l'indifférence à première vue s'avère être plus de la réserve, ou quelque chose comme ça. Ici, on reste discret, on importune pas, ou plutôt on ne prend pas le risque d'importuner. Nous aimerions parfois nous faire un peu plus embêter, mais nous nous contentons avec plaisir des sourires, des signes de main rapides et des petites conversations à la sauvette. C'est comme ça que ça marche. Nous avons bien compris qu'au Laos, on aborde pas de but en blanc, on garde sa curiosité pour soi et on intériorise, le tout avec le sourire. Comme quoi il est possible de faire ça tout en ayant une attitude agréable! Encore une fois, la prédominance du bouddhisme ne doit pas être étrangère à cet état d'esprit.

Pour en revenir à nos moutons, quand on mélange les gens et l'atmosphère, propre à tout le pays, au joyau qu'est Luang Prabang, on obtient un lieu comme nous n'en avons que rarement croisé, complet, qu'on ne veut pas quitter, parce qu'il rassemble à peu près tout ce qu'on aime. La sauce prend, tout simplement.

Et nous songeons à notre prochaine destination, Vientiane, et surtout à ce que nous allons y faire. Animateurs volontaires dans une crèche! A savoir que nous parlons animation, évoquant nos souvenirs et tirant des projets, au moins une fois par semaine depuis le début de cette aventure... Punaise que la vie est belle!

Nous évoquerons notre formidable expérience en tant que bénévoles et notre petite vie dans la capitale dans notre prochain billet. Et nous parlerons aussi plus en detail de la suite du programme de notre petit tour...


Et en bonus : après 2 ans sur la route...


En revanche, nous allons aborder ici un autre événement de taille qui aura marqué notre séjour dans la capitale. Comme beaucoup le savent déjà, la journée du premier octobre marquait la fin de notre deuxième année de voyage!

730 jours de vadrouille. 2 ans à parcourir la planète à travers 13 pays. Ca commence à faire une bonne petite tranche de vie, et c'est passé bien vite. Et d'un autre côté, nous avons l'impression d'en avoir vécu plusieurs, des vies, avec tout ce qu'il s'est passé durant ces deux années.

Alors non, nous n'allons pas dresser un bilan de ces deux ans. Rien que le mot ''bilan'' nous file des boutons. Comment résumer un truc pareil? Comment réfléchir posément alors que nous sommes encore, et pour de long mois, en plein dedans?

Et pour dire quoi de toutes façons? Nos motivations n'ont pas changé, et nous évoquons nos ressentis bruts dans chaque article.

Si on réfléchit sur l'année qui vient de s'écouler, on se rend compte qu'elle est un peu particulière, étant donné que nous en avons passé la majeur partie en Australie. Même si, comme nous l'avons déjà dit, ce pays est loin de faire partie de ceux que nous avons préféré, l'année que nous y avons passé fait quand même figure de charnière dans notre grand petit tour.

Nous allons partir d'une constatation très matérialiste, pour ensuite prendre un peu de recul et explorer les tréfons de nos esprits, pareils à ce qu'ils étaient avant notre départ mais finalement bien chamboulés quand on y réfléchit.

L'Australie. Arrivés avec rien, plein de doutes, nous avons finalement réussit à quitter le pays avec de solides économies, et même un ordinateur. Pas de quoi fouetter un chat, mais quand même suffisament pour terminer sereinement notre vadrouille asiatique. Et dans nos têtes, il faut le dire, nous ne partions pas gagnants, et le spectre de l'échec s'est fait sentir jusqu'au bout, avant d'être pulvérisé par l'évidence.

Parce que même après un an de voyage, à rabâcher que tout est possible, il nous restait visiblement une part de doute sur la question. Et le pognon c'est quand même, il faut le dire, la grande problèmatique dans ce genre d'entreprise, sur laquelle nous nous serons bien pris la tête durant nos longs mois australiens. Est-ce que ça va le faire? Pour le coup, le ''tout est possible'', nous n'en étions visiblement pas si sûr que ça...

Chose étrange après un an de voyage et plein de beaux discours. S'en faire à cause de l'argent, n'est-ce pas en désaccord total avec les valeurs que nous prônons? Après, ce n'est pas tant la question de l'argent que la perspective de devoir mettre un terme à notre petit tour qui nous angoissait. Il ne faut pas se leurrer, l'argent n'est pas une fin, mais c'est quand même un sacré moyen!

Et puis finalement... Débarqués avec 100 euros pour deux, nous avons quitté le pays avec près de 7000 dollars, et sans trop nous fouler. Cet état de fait a balayé les dernières incertitudes que nous avions. Pour le court terme et pour le long.

Il ne s'agit pas ici de notre unique expérience en Australie, pour la simple et bonne raison que nous n'avons pas fait suffisament pour terminer notre voyage. C'est pour cela que cette année australienne joue le role de charnière : elle aura définitivement éradiqué le problème de l'argent qui occupait encore nos esprits (le mien surtout...) tandis que nous parcourions le Népal et l'Inde en voyant nos comptes en banque se vider progressivement.

Nous savons à présent que l'argent, ça se trouve sans trop s'embêter du moment qu'on est près à trimer dur, et nous savons ce qui nous attend et ce que nous devrons faire la prochaine fois que nous toucherons le fond des comptes en banque.

Avec la réussite de cette expérience test, s'en va notre dernier questionnement matériel majeur. Et là dessus, nous retournons en Asie, traversons le Vietnam et nous perdons au Laos... Et le bonheur est total, après un retour en occident qui nous a derangé plus que ce que nous craignions...

Prenons encore un peu de recul, et partons à présent sur les chemins spirituels des voies de l'esprit. Nous disions que nos motivations étaient toujours les mêmes. On pourrait ajouter que le voyage nous apporte toujours autant, et toujours d'une manière différente et sans cesse renouvelée. Au point qu'au delà de la découverte, c'en est devenu un mode de vie. C'est peut-être une des choses qui ont changé.

Le fait d'assimiler le changement perpétuel intrinsèque au voyage à une sorte de routine peut paraitre contradictoire, pourtant nous avons acquit des habitudes et une façon de raisonner qui se répètent, indépendament du pays, du moment, de la situation ou de l'état d'esprit.

Quand on s'attend à tout, quand on arrête de se demander ce qu'il va se passer, le mot ''imprévu'' perd tout son sens. Il n'y a que des événements qui s'enchainent, événements que nous devons traiter, et... et puis c'est tout.

Nous en arrivons à un stade de lâcher-prise complet, nous laissant emporter, reprenant tranquillement la barre quand c'est nécessaire, donnant un coup de rame dans telle ou telle direction, mais sans plus. C'est inutile. Et il y a une certaine stabilité là-dedans, finalement plus jouissive que n'importe quelle autre, même si la petite pointe de pression qui accompagnait notre appréhension du changement arrive à manquer de temps à autres.

Au delé de la relativisation, on pourrait même discerner un brin de fatalisme dans notre façons d'appréhender les choses depuis que nous avons quitté l'Australie, comme si la pire des crasses n'était finalement qu'un aléa comme un autre. Déjà en Europe nous en parlions comme ça, mais nous étions portés par l'exaltation du début du voyage. Cette résignation est maintenant beaucoup plus profonde. Rien n'est un problème.

Merci à vous d'avoir tenu jusque là. Parce que ce n'est pas fini.

Il y a le reste dans tout ça. Le reste dont nous avons déjà parlé. Non, je blague, nous allons nous arrêter là, ce qui fait déjà pas mal, même si il y aurait encore tant à dire.

Bref, nous attaquons notre troisième année en tant que terriens, peut-être un peu plus posés, mais toujours émerveillés, toujours en attente d'en voir plus. Au voyageurs qui nous suivent, continuez de profiter, aux autres, nous ne le répéterons jamais assez, le monde est merveilleux, l'humanité est formidable, tout est possible, et il ne faut pas se contenter des photos d'un pauvre blog pour s'en rendre compte.

Nous finirons par dire merci à notre Terre de nous offrir ce dont nous n'osions même pas rêver, de nous faire évoluer comme nous ne pensions même pas que cela soit possible, et de réussir en même temps à nous rappeler qui nous sommes.

Et merci à la Terre d'être ronde, ça permet de ne jamais en voir le bout!

2 commentaires:

  1. En pleine lecture je tombe sur le gros Robert et les troupeaux de bœufs!! on en a tous rencontrés et on a honte d'être voyageurs à ce moment précis, on a envie de crier aux habitants: "on est pas comme çà excusez les, ils se croient évolués mais sont à des années lumières de votre manière de vivre, de vos traditions, de votre respect" Ces gens là ne comprennent rien, sont méprisables et ne méritent pas de voyager
    Gilbert

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    1. Exactement. On est en plein dans le voyage carte postale, le monde n'est qu'un parc d'attraction avec ses personnages rigolos et ses scenes de spectacle exotiques. Une fois la photo prise il n'y a pas de raisons de s'y attarder, on a pas que ca a faire non plus... Il y a plusieurs facons de voyager, nous les respectons profondement pour la plupart, mais pas ca. Il fallait voir la tete des moines et des habitants...

      En deux ans, nous avons eu notre lot d'abrutis, mais c'est toujours aussi desesperant d'en croiser.

      Et nous sommes au Laos! Un tel comportement est inacceptable quel que soit l'endroit, mais encore plus dans un pays ou le calme, l'interiorisation, la discretion et le respect sont les bases de la maniere de penser et d'agir.

      Tout ce que nous pouvons faire, c'est nous consoler en nous raccrochant a notre ligne de conduite. C'est bien le seul chemin que nous tenons a ne jamais quitter!

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