mercredi 16 novembre 2016

Un magistral périple tellurique : les Red Woods et les lacs de Rotorua, le chamarré Wai-O-Tapu Thermal Parc, et le grandiose Tongariro Alpine Crossing



Salut le monde!

Le voilà enfin... Le récit de notre vadrouille des plus beaux sites que nous ayons vu jusqu'à présent. Vous avez rêvé sur les jungles verdoyantes des Pinnacles? Vous avez adoré les étendues sablonneuses de la Ninety Miles Beach? Attendez de voir ce qui suit...

C'est en effet une digne conclusion que nous avons vécu. Pourquoi conclusion? Et bien il s'agit de nos dernières vadrouilles dans l'île nord du pays! Les sirènes de sa soeur australe ont été trop tentantes, et nous l'avons rejoint il y a peu pour parcourir ses étendues légendaires!

Mais pour le moment, nous vous laissons decouvrir nos ultimes pérégrinations sur l'île nord, qui nous ont montré des merveilles uniques au monde. La Terre nous a laissé admirer ses trésors, et nous avons passé une semaine très colorée, minérale et volcanique, entourés en permanence d'une odeur de soufre et de fumerolles!

Que ce soit à travers les entrailles d'une forêt rougeoyante ou au milieu d'un désert de rocaille et de lacs acides multicolores, nous en avons pris plein les yeux. Sans parler de notre dernière mission, qui nous a tout simplement conduit, après un trajet memorable, à l'une des plus belle randonnée qui nous ait été donné de faire! Accrochez-vous à vos rétines, il y a du lourd dans les lignes qui suivent!

Nous vous avions laissé la dernière fois à Rotorua, où nous nous sommes prélassés quelques jours avant de nous remettre en route. Sur le coup, nous ne tenons plus en place!


C'est que le programme des prochains jours n'annonce que du fantastique, et va nous faire passer par des destinations prévues de longue date, celles que nous attendons le plus sur l'île nord : nous voulons voir les sites fameux des alentours de la ville, à savoir le Blue Lake et le Green Lake, avant de rejoindre l'un des parcs thermaux comptant apparemment parmis les plus impressionants au monde, le Wai-O-Tapu Thermal Wonderland et ses lacs bouillonants et multicolores. Encore que pour ce dernier, nous nous tâtons encore, l'entrée étant facturée pas moins de 32$ par personne... En bons Arpagons que nous sommes, nous voulons nous assurer que la chose vaille vraiment le coup avant d'y claquer nos deniers chèrement acquis, même si nous n'en avons lu que des avis positifs sur les forums et les blogs.

Nous rejoindrons ensuite Taupo, en plein milieu de l'île, et son lac, le plus grand du pays. La ville nous servira de base de départ pour la balade que nous attendons depuis longtemps, celle qui fait briller nos yeux dès que nous y pensons et à propos de laquelle nous rabâchons les oreilles de Flo presque quotidiennement : le Tongariro Alpine Crossing. Plus de détails dans les lignes qui suivent...


Du rouge, du bleu, du vert et du blanc


Mais avant tout, nous nous mettons en route pour rejoindre les Red Woods et la Whakarewarewa Forest, immense forêt recommandée par les gens croisés sur la route, à quelques kilomètres au sud-est de Rotorua.

Nous quittons notre camping pour ravitailler les stocks de vivres, puis nous parcourons à pied les quelques bornes qui nous séparent de la lisière des Red Woods, sous un ciel qui s'est malheureusement rechargé en nuages gris... Et bien disons qu'au moins nous ne suerons pas sous un implacable soleil!

Sur place, nous découvrons quelques cartes, et partons pour une balade de 6 kilomètres à travers des décors de rêve, aussi incroyablement variés que d'habitude.

Nous traversons d'abord une impressionante forêt de séquoias géants (le plus grand fait 64 mètres de haut!), le nez en l'air, ne baissant les yeux que pour observer l'écorce rouge-ocres des arbres qui a donné son nom aux Red Woods. A noter que les séquoias ne sont pas des espèces natives néo-zélandaises : ils ont été amenés de Californie à la fin du 19ème siècle, afin d'étudier leur croissance sous ces latitudes.



Nous avançons ensuite dans un sous-bois à l'atmosphère rendue surnaturelle par les rivières argentées qui le parcourent...



Et oh! Quelle surprise! Une jungle touffue et luxuriante! Non, sérieusement, on ne s'en lasse pas! Et pour le coup, les espèces ici sont natives du pays.



Nous terminerons cette grandiose balade dans une clairière pour le déjeuner, avant de rejoindre la route et de lever l'arme ultime du voyageur sauvage en Nouvelle Zélande : le pouce! Direction : le Blue Lake et le Green Lake, célèbres pour la beauté de leurs couleurs et des étendues de verdure qui les entourent.

Promis, c'est la dernière fois que j'en fais des tonnes sur l'auto-stop, mais vraiment, il est amusant de constater que la plupart du temps, nous attendons moins longtemps un lift ici qu'un bus à Lyon!

Exemple en image : nous patientons une dizaine de minutes, pour qu'une femme sorte du garage de la maison voisine, nous demande de l'aider  à décharger des siège-bébés de sa voitures, et propose de nous emmener, pour le plaisir, au Blue lake! Nous lui demandons son avis sur le parc de Wai-O-Tapu, et elle nous le décrit comme un inratable... Nous allons bien finir par y aller!

Elle nous dépose une vingtaine de minutes plus tard, sous le soleil, au bord du lac.

Alors sans vouloir chipoter, le coin offre un panorama magnifique, le lac aux eaux d'une incroyable clarté est entouré de collines couvertes de forêts de sapins, mais avec un nom pareil, nous nous attendions à un bleu disons plus... flashy. Qu'ils sont exigeants ces petits baroudeurs!

Arrêtons de faire les fines bouches, la balade autour du lac vaut le coup, alternant passages en forêt et plages. Pour la petite anecdote, le Blue Lake, appelé Tikitapu en maori, tient son nom d'une légende locale qui veut que la fille d'un chef de haute naissance y ait perdu un collier de jade sacré appelé tikitapu.



Nos pas nous emmènent jusqu'à un point de vue surélevé qui nous permet d'admirer le Blue Lake d'un côté et son frère, le Green Lake, ou Rotokakahi, de l'autre. Ce dernier étant sacré pour les maoris, il est interdit d'y approcher pour le voir de plus près.



Que faire à présent? Il est encore tôt, et nous sommes plus ou moins tombés d'accord sur le fait que nous n'allons pas rater le parc de Wai-O-Tapu, situé à une vingtaine de kilomètres au sud, sur la route de Taupo. Taupo tiens, parlons-en... A force de recherches, nous y avons déniché le graal, la chose que nous n'attendions plus dans ce pays : il s'y trouve un camping gratuit, le Reids Farm Free Campsite, ouvert à tous, situé à seulement quelques kilomètres du centre-ville!

Quelque soit notre décision concernant le parc thermal, sa visite demande au moins deux heures, plus le temps de trajet en pouce... La suite de l'après-midi ne va pas suffire. Nous décidons de rejoindre Taupo, à 80 bornes au sud de Rotorua, pour nous caler tranquillement au camping, et de lever le pouce pour faire l'aller-retour sans les sacs à Wai-O-Tapu le lendemain.

Nous attendons 20 minutes le pouce en l'air, et nous ouvrons des yeux ronds quand une voiture se rapproche et ralentit : le jeune homme au volant, en bon bourrin, s'arrête pour nous prendre alors qu'il trimballe déjà deux énormes chiens... Flo et Léonore sont obligés de les faire grimper sur leurs genoux, en essayant de ne pas se faire trop baver dessus, mais les molosses s'avèrent finalement gentils comme tout.

Lorsque nous le questionnons à propos du parc thermal, notre ami nous annonce que Wai-O-Tapu est juste la plus belle chose à voir dans la région! Ca va, on commence à piger...

Nous franchissons un bout de chemin avec lui. Et lorsqu'il nous dépose, nous explosons magistralement notre record néo-zélandais d'attente minimum en auto-stop : nous n'avons même pas fini de décharger nos sacs qu'une autre voiture se gare déjà à nos côtés, et son conducteur, devinant que nous voyageons en pouce, nous demande directement si il peut nous emmener quelque part! Mieux, il passe par Taupo! Quel pays...

Notre bienfaiteur ne s'arrête pas là : sur la route, il nous demande si nous comptons passer voir les Huka Falls. Les Huka Falls? Jamais entendu parler... Ainsi donc, ce sera la découverte surprise du jour! Et vous allez voir que notre homme place la barre très haut...

Il quitte l'autoroute pour nous emmener sur le site en question, au bord de la rivière Waikato. Et c'est là qu'on se dit que nous sommes vraiment dans les choux niveau renseignement... Heureusement que les locaux sont là!

Il s'avère que les Huka Falls constituent tout simplement le site naturel le plus visité et photographié de Nouvelle Zélande! En fait de chutes, nous nous retrouvons plutôt face à un espèce de long goulot d'étranglement naturel, qui fait brusquement passer l'énorme volume d'eau de la rivière Waitako, qui peut atteindre une largeur d'une centaine de mètre en amont des chutes, entre deux falaises de roche dure d'origine volcanique espacées de seulement 15 mètres, la transformant en véritable machine à laver géante, en torrent déchaîné, agité de remous, de vagues, de gerbes d'écume et de rapides. L'eau s'y gorge de bulles et devient bleu ciel, voir blanche par endroit. "Huka" signifie d'ailleurs "mousse" en maori.



A la sortie de ce chaos aquatique, ce sont 200 000 litres de flotte par seconde (de quoi remplir 5 piscines olympique par minute!) qui jaillissent dans un geyser surpuissant pour se jeter 9 mètres plus bas dans un vacarme de tous les diables... Sous la chute, les tourbillons, les courants contraires qui se téléscopent et l'agitation de l'eau sont si puissants qu'ils empêchent la migration des poissons. Impressionant!



Bon, et bien en effet, ça aurait été bête de la rater celle-là...

Nous voilà à seulement quelques kilomètres du camping. Nous remercions mille fois notre guide providentiel, avant de demander une dernière fois si le Wai-O-Tapu vaut le coup. Histoire d'être sûr, vous comprenez?

Si nous nourrissions encore quelques doutes à ce sujet, sa réponse de connaisseur les balayent définitivement : "il est inutile de venir ici si vous n'allez pas visiter le parc"... Voilà qui a le mérite d'être clair!


Le pays des merveilles thermal, et l'attente...


Il nous dépose au Reids Farm Campsite. Nous découvrons un vaste terrain d'herbe au bord de la rivière, parsemée d'arbres. C'est sympa comme tout! Evidemment, le coin est connu des voyageurs, et de nombreux vans et autres camping-cars sont déjà posés. La place ne manque heureusement pas, et nous trouvons une belle prairie inaccessible aux véhicule pour monter le camp. Nous sommes ravis : C'est la première fois que nous trouvons un spot camping gratuit, sympa, et proche d'une ville, et après toutes les difficultés que nous avons éprouvé à trouver des coins où dormir, nous sommes bien décidés à profiter de l'endroit.

Petit bain dans la rivière, détente... Nous sommes bien, jusqu'à ce que la nuit tombe et que la température chute brusquement. Il se met à cailler, et nous engloutissons notre dîner en vitesse avant de nous réfugier au chaud.

Au matin, cette satanée méteo décidera une fois de plus de notre programme... Nous nous levons sous de lourds nuages, et quittons le camping pour descendre à Taupo, 4 kilomètres plus loin. Lorsque un petit mais bien énervant crachin se met à tomber, nous levons le pouce en marchant, et sommes récupérés par une voiture qui nous dépose en ville. Pour quatre malheureux kilomètres... Bande de fénéants va!

Nous débarquons à la bibliothèque pour squatter le wifi gratuit, tandis que dehors le temps se déchaîne... Il pleut des cordes, Wai-O-Tapu attendra demain! Nous restons bien à l'abris, en positivant : au moins nous savons où nous dormons ce soir, et nous avons de quoi nous occuper pour la journée en ville.

Nous bossons sur le blog, travaillons les articles, et nous renseignons sur la suite.

En effet, le début de l'été, dans quelques semaines, sonnera pour nous la fin des vacances, et nous commençons à nous pencher sur les nécessités administratives préliminaires à la recherche de taf, à savoir les modalité d'ouverture des comptes en banque et la déclaration au bureau des taxes. Et l'affaire semble plus compliquée qu'en Australie : pour travailler, il faut d'abord obtenir un numéro IRD, pour Inland Revenue Declaration, l'équivalent du TFN australien attestant que nous sommes bien en règle au niveau des impôts et autres sournoiseries gouvernementales. Sans ce numéro, il est presque impossible de trouver du travail, et quand bien même, nous serions taxes à 45% de nos salaires dès le premier dollars...

Pour obtenir notre numéro IRD, nous devons disposer d'un compte en banque fonctionnel. Problème, dans la plupart des banques, il est nécessaire d'avoir une attestation de logement fixe dans le pays (style facture de téléphone) pour ouvrir un compte... Ah les filous! Vous comprenderez aisément l'ironie de la nécessité de disposer d'une adresse fixe quand on est en working holiday visa, donc en voyage, donc en déplacement permanent... La chose nous apparaît d'autant plus absurde qu'en fouinant sur divers forums, nous découvrons que certaines banques acceptent comme justificatif de domicile une simple lettre d'hôtel ou de guest house, et qu'il suffit donc pour contourner le système de passer une nuit en piaule quelque part et de demander au tenancier une lettre certifiant qu'il nous héberge... Apparemment, tout dépend de la banque et de l'endroit où l'on se trouve.

Nous verrons cela en temps voulu, mais nous sentons venir la petite arsouille administrative...

Sans trop nous gâcher la surprise, nous cherchons des aperçus du Wai-O-Tapu Thermal Parc, et les photos que nous découvrons promettent une visite extraordinaire! Espérons que demain, le temps soit plus clément...

En fin d'après-midi, nous profitons d'une accalmie pour rentrer à pied au camping, un brin refroidis par le temps exécrable et nos découvertes administratives du jour. Nous aimons bien ce pays, mais décidément, niveau réglementation, la loi est un tantinet restrictive dans pas mal de domaines...

Le lendemain, nous sortons le nez de nos tentes avec appréhension... Pour découvrir un beau ciel bleu! Il faut profiter du créneau : nous partons à pied vers le nord, rejoignons le highway et levons le pouce pour le Wai-O-Tapu. Une jeune fille nous récupère, et nous pose à quelques kilomètres de l'entrée du parc. C'est fois, c'est sûr, le soleil est avec nous, un impératif pour profiter pleinement du déluge de couleurs que promet la visite du parc thermal.

Avant d'attaquer, quelques mots sur l'endroit : comme je le disais, depuis Rotorua, nous nous trouvons dans une région volcanique, présentant une intense activité géothermale, et celle-ci se manifeste sous différentes formes. Sur la route, hier, nous avons par exemple pu observer de nombreux panaches de vapeurs qui s'élevaient dans la campagne. Des nombreuses centrales géothermiques profitent d'ailleurs de la manne énergétique pour produire de l'électricité.



Mais comme nous allons le voir, notre planète possède bien des manières de montrer qu'elle est bien vivante, pour le plus grand bonheur de nos yeux émerveillés! Le parc de Wai-O-Tapu ne répresente qu'une petite partie des 18 kilomètres carres que comprend la plus grande zone thermale de la région, déclarée réserve naturelle. Il y a 150 000 ans, de violents tremblements volcaniques secouèrent la zone, tandis que les premiers signes d'activité hydrothermale apparurent il y a plus de 15 000 ans. Aujourd'hui, le Wai-O-Tapu Thermal Wonderland, témoin de ses événements, présente des piscines d'eau chaude et froide, des cratères, des mares de boue en ébullition, des fumerolles, le tout richement coloré grâce aux différents composants chimiques qui jaillissent ici des entrailles de la terre.

Je m'aperçois que les mots ont bien du mal à décrire l'endroit incroyable dans lequel nous nous apprêtons à plonger... Lançons-nous donc. Je me connais, je vais encore tomber en rade de qualificatifs, je me contenterai donc de quelques explications en laissant le soin aux photos de vous décrire à quelle point le site est extraordinaire.

Pour faire simple, disons que nous n'avons jamais vu une chose pareille. Lorsque nous entrons dans le parc, nous avons l'impression de débarquer sur une autre planète. Une planète désolée, sans autre traces de végétation que quelques buissons et forêts aux arbres noueux. Une violente odeur d'oeuf nous monte à la tête, tandis que nous avançons dans un désert de rocailles blanc, croisant une multitude de panaches de fumée qui s'échappent de cheminées jaunies par le soufre, cernés par les clapotis des sources chaudes qui bouillonent de toutes parts (quelle intro!).

Le premier cratère que nous croisons, La Maison du Diable, a été creusé par l'action acide souterraine. A l'intérieur, les paroies sont couvertes de cristaux de soufre.



Le Cratère Arc-en-Ciel doit son nom aux cristaux de soufre et aux veines de minéraux colorés présents dans la roches de ses paroies.



Nous tombons ensuite sur les Encriers du Diable, une série de piscines de boue en ébullition dont la couleur est dûe à des particules de graphite et de pétrole qui remontent à la surface.



La Palette de l'Artiste est l'un des sites les plus impressionnants et magnifiques que nous verrons ici. C'est un ensemble de piscines et de bassins multicolores, aux teintes surnaturelles qui changent constamment en fonction de la température où encore de la direction du vent. D'épais nuages de vapeurs se dégagent de la palette, reflétants ses couleurs et rendant le panorama encore plus irréel.



La Piscine d'opal, toute proche, est une source sulfureuse bordée d'une terrasse de silice.



Nous arrivons ensuite sur le Chemin Sacré, appelé ainsi car il passe à côté d'un ancien cimetière. Le chemin nous fait traverser une belle forêt, et offre de formidables panoramas sur le parc.



Nous débouchons dans la Poêle à Frire, un ancien cratère rempli aujourd'hui de sédiments. De nombreuses sources chaudes jaillissent encore à sa surface.



Nous atteignons ensuite la Piscine à Huître, reposant au milieu d'un terrain instable et torturé.



Après une nouvelle marche en forêt, nous débouchons sur le lac Ngakoro, forme il y a près de mille ans apres une éruption, et présentant des eaux d'un vert éclatant.



Nous traversons ensuite l'incroyable décors de la Forêt Indigène. Là, pour le coup, nous avons vraiment l'impression de nous trouver dans quelques bois ensorcelés! La coloration des arbres aux formes torturées est dûe à une algue verte qui accroche un pigment orange provenant des émanations gazeuses du parc, mais le rendu visuel est extraordinaire, proprement surnaturel. C'en est presque dérangeant...



Le bois abrite des tertres de soufre qui se sont formés sous l'eau avant d'être exposés à la surface lorsque la région s'est asséchée.



Nous revenons près de la Palette de l'Artiste, pour admirer la source qui l'alimente, la Piscine de Champagne. C'est la plus grande de la zone, avec ses 60 mètres de diamètre et ses 60 mètres de profondeur. Formée il y a 900 ans par une éruption, les minéraux contenus dans son eau d'un bleu profond continus de se déposer sur les bords, les colorant en orange. L'eau qui remonte de la source atteint les 74 degrés, et d'épais nuages de vapeur à l'odeur soufrée nous recouvrent parfois, poussés par le vent.



Nous terminons notre tour par le Cratère de l'Enfer, au fond de boue qui bouillonne violemment...



La Grotte à Soufre, au fond de laquelle se trouvent des piscines de chloride...



Et puis, histoire de finir en beauté cette fantastique balade, nous passons le Bain du Diable, un lac d'un vert étonnant, littéralement fluo, dû à la présence d'arsenic dans l'eau. Les bordures jaunes proviennent de dépôts de soufre. Encore une fois, on a du mal à se persuader que la chose est naturelle! Non mais regardez ça...



Nous quittons le parc pour aller grignoter un morceau, des images plein la tête. Le Wai-O-Tapu Thermal Parc, nous avons hésité avant d'y aller. Nous nous sommes renseignés, nous avons réfléchi... Et finalement nous y sommes allés. Et selon nous, la visite vaut définitivement le coup. C'est un voyage sur une autre planète, désertique mais pleine de couleurs et de formes étranges, uniques, dans un décors surréaliste, mais qui donne en même temps l'impression que c'est ici la Terre qui parle, et pas la biosphère qui se trouve dessus. Et la bougresse en a des choses à dire!



Et ce n'est pas fini! Nous traversons deux kilomètres de campagne pour rejoindre les Mud Pool, les piscines de boue.

La voilà enfin, cette fameuse campagne néo-zélandaise!

Sur place, nous découvrons un grand bassin de boue fumant, agité de petits geysers, qui se produisent à intervalles réguliers aux endroits où des poches de gaz éclatent à la surface.



Avant de partir, sur le chemin qui nous ramène près du highway, nous découvrons un bassin d'eau chaude où nous baigner. L'endroit est alimenté par deux rivière, l'une d'eau chaude, l'autre d'eau froide, et il suffit de se déplacer dans le bassin jusqu'à trouver la température idéale! Je profite de ce bain chaud providentiel pour me laver à l'aide du sable qui couvre le fond du bassin.



De retour sur le highway, l'auto-stop pour retourner au camping, 60 kilomètres plus loin, vire au gag...

Il faut savoir qu'à part en de rares occasions, les camping-cars et autres campervans ne nous récupèrent pas. Quand il s'agit de van aménagés conduis par des voyageurs, le problème vient le plus souvent de la place disponible dans le véhicule : la plupart du temps, l'arrière du van est occupé par un lit et/ou par tout le fatra nécessaire à la vadrouille. Plus d'une fois, un van de voyageurs s'est arrêté à nos côtés non pas pour nous prendre, mais parce que ses occupants voulaient nous expliquer pourquoi ils auraient adoré le faire, en s'excusant de ne pas pouvoir faute de place, avant de nous souhaiter bonne chance! Ca fait toujours plaisir. Quant aux gros et étincelants camping-cars, ils sont presque toujours équipés de sièges avec ceintures à l'arrière, mais sont la plupart du temps conduits par de vieux couples pas forcément emballés par la perspective d'accueillir trois vagabonds pouilleux et puants dans leur beau véhicule de location à 800$ la semaine...

Bref, nous voilà au bord de la route, cheveux au vent, depuis une trentaine de secondes, et un des sus-nommés palaces sur roues arrive à l'horizon. Je demande à mes deux compagnons de lever le pouce. "Ca ne sert à rien, c'est un camping-car!" me rétorquent-ils. "Je sais, justement, je veux prendre une photo de vous en train de stoper en étant sûr que personne ne s'arrête!"...

Je n'ai pas le temps de lever mon appareil que le véhicule se gare et qu'un couple d'allemands propose de nous poser à Taupo, dézingant toutes nos déductions en la matière... Ca nous apprendra à faire nos langues de vipère...



Nous décidons de ne pas rejoindre le camping tout de suite. Nous n'avions pas prévu que le pouce fonctionne aussi bien, l'après-midi est encore jeune, et nous voulons passer en ville pour commencer à préparer la suite.

Et la suite, nous en frissonnons rien que d'y penser. Le célèbre, le grandiose, le fantastique, l'inégalé Tongariro Alpine Crossing nous tend les bras. Il est temps d'en dire plus sur cette mythique randonnée d'une journée, considerée comme la plus belle de Nouvelle Zélande et l'une des plus belle du monde.

L'Alpine Crossing est un itinéraire de marche de 19,4 kilomètres, qui traverse le nord-ouest du Tongariro National Park. Le parc en lui-même possède une double classification au patrimoine mondiale de l'UNESCO, d'une part pour son riche héritage culturel maori et d'autre part pour ses incroyables paysages issus d'une intense activité volcanique.

L'itinéraire relie en 6 à 8 heures de marche Mangatepopo, 1100 mètres d'altitude, du côté ouest du parc, aux sources chaudes de Ketetahi, 760 mètres, au nord. Il grimpe à travers des terrains volcaniques jusqu'à 1900 mètres avant de redescendre, croisant au passage lacs hydrothermaux, cratères en tous genres, et surtout le Mont Ngauruhoe, qui n'est autre que la Montagne du Destin dans le Seigneur des Anneaux! Et oui, nous allons visiter le Mordor!

Le Tongariro Alpine Crossing, ça fait 4 ans que nous l'attendons. Pendant que nous préparions notre Petit Tour en 2013, nous l'avions déjà inscrit sur notre liste des immanquables que nous voulions absolument voir dans le monde. Et aujourd'hui, nous en sommes tout proches, la bave aux lèvres, impatients et surexcités, comme des gosses un soir de noël.

En ce qui nous concerne en tout cas. Flo, qui n'apprécie finalement pas les longues marches, et qui n'est pas tellement intéressé par les paysages et la nature, décide de ne pas nous accompagner dans cette entreprise. Nous irons donc tous ensemble à l'entrée du parc, puis il trouvera un endroit où nous attendre le temps que nous nous enfilions la balade.

Un site de cet envergure, si unique, ayant sucité tant d'attente, qui va de plus nous faire rejoindre un climat montagnard, ne peut se parcourir que dans des conditions parfaites. Ainsi, lorsque nous débarquons à Taupo, nous nous rencardons fébrilement sur la météo des prochains jours, et... C'est la déconfiture. Nous sommes vendredi, et les prévisions les plus optimistes prévoient de la pluie pour les trois prochains jours... Le week-end s'annonce bien pourri! Prochain créneau de beau temps : mardi prochain. Punaise...

Encore une fois, nous positivons : nous avons un camping gratuit où squatter, une ville pour nous ravitailler, et rien ne nous empêche de prendre notre mal en patience et d'attendre les beaux jours pour partir dévorer la fameuse rando sous le soleil. Lorsque nous rentrons, nous passons une colline qui nous offre un beau point de vue sur le lac de Taupo, et loin vers le sud, nous voyons effectivement les montagnes surplombées d'un épais couvercle de nuages noirs. Tu ne perds rien pour attendre, Tongariro...

De retour au camping, tandis que nous préparons le thé, une jeune fille vient nous aborder. Elle nous explique s'être sentie obligée de venir nous voir, étant donné qu'elle nous croise un peu partout, le pouce en l'air au bord de la route, depuis les Hot Water Beach dans les Coromandels! N'ayant pas suffisament de place dans son van, elle s'excuse de n'avoir jamais pu nous prendre... Elle nous prend pour des magiciens, capables de se téléporter et d'être partout à la fois!

Nous faisons ainsi la connaissance de Caroline et de son amie, Anna, deux allemandes en working holiday visa, qui ont plus ou moins suivi depuis leur arrivée le meme itinéraire que nous. Nous passons une bonne soirée avec elles, à parler voyage, avant que la température glaciale ne nous envoie sous les guitounes.

Nous passerons le week-end à slalomer entre les averses, glandouillant au camping en buvant des litres de thé, en jouant au tarot et en discutant avec Caro et Anna, ou profitant des rares accalmies pour descendre en ville.



Nous vérifions chaque jour la météo, et le créneau de mardi se confirme.

Nous faisons aussi une petite balade le long du lac de Taupo, formé par la super explosion du volcan du même nom, phénomène supposé apocalyptique s'étant déroulé il y a 26 500. Selon les volcanologues, il s'agit de l'explosion volcanique la plus violente jamais mise en évidence!



Nous nous achetons des cartes sims et nous ouvrons des lignes téléphoniques néo-zélandaises en prévision de la recherche de travail. Nous faisons aussi l'acquisition de fil de pêche et d'hameçons. Notre première tentative pour attraper un poisson est déplorable : la rivière ne nous donne rien, mais ne se gène pas pour nous prendre les clefs de l'un de nos cadenas que j'ai utilisé pour plomber la ligne! Ridicule...

Nous faisons également la connaissance de Constantine, un jeune allemand de 18 ans qui vadrouille le pays à vélo. Nous passerons pas mal de temps avec lui. C'est fou le nombre d'allemands que nous croisons de partout!

Le manque de mouvement nous ronge, l'attente devient obsédante, et chaque jour, quand nous remontons au camping, nous jetons un oeil au sud, pour apercevoir les montagnes surplombées de nuages...



Nous décidons de mettre les voiles lundi, pour avoir le temps de rejoindre le départ de l'Alpine Crossing dans la soirée afin de l'attaquer mardi matin de bonne heure. Dimanche soir, nous ne tenons plus en place! La mission Tongariro débute dans quelques heures...


Mission Tongariro


Et nom de nom, la météo dégueulasse ne nous lâche pas... Il se met à pleuvoir dans la nuit, en continu jusqu'au matin. C'est pas vrai! Nous attendons que ça se calme sous nos tentes. Le temps passe, nous ne pouvons pas partir trop tard si nous voulons arriver avant la nuit à l'entrée du parc, à 80 kilomètres, et il est hors de question de perdre une journée et de rater le créneau de mardi. Dieu sait si le temps se maintiendra après... A midi, nous ne tenons plus. Il pleut encore, mais l'inactivité, la matinée sous la tente, la peur de rater un jour de beau temps, l'attente, tout cela nous rend dingues.

Ah c'est comme ça? Et bien soit. Il est temps de communier un peu avec Dame Nature, qui a visiblement oublié à qui elle avait à faire. Nous décidons de lancer l'opération. Vas-y le temps, balance nous tout ce que tu veux sur le coin du pif, nous en avons vu d'autre. Ce soir, nous dînerons devant l'entrée du Tongariro! Nous rentrons la tête dans les épaules, plions bagages dans le crachin, descendons à Taupo, traversons la ville sous les averses et nous posons à la sortie pour lever le pouce.

Et le temps continue de nous martyriser sans aucune pitié : il se met à pleuvoir des cordes, un véritable déluge nous trempe jusqu'aux os, et nous sommes contraints de battre en retraite et de nous réfugier sous un abris... L'ambiance n'est pas au beau fixe, et nous restons silencieux... Jusqu'à ce que la déferlante s'arrête aussi vite qu'elle avait commencé! Pays de tarés... Nous voilà en 5 minutes sous un beau ciel bleu, et nous sommes en prime récupérés par une femme qui nous pose une vingtaine de kilomètres plus loin.

La pluie s'est arrêtée. Nous marchons un peu moins d'une heure sur une route déserte, pour rejoindre la nationale 47 qui passe devant l'entrée du parc. Il n'y a pas un chat, à cette heure-ci tout le monde est descendu de la montagne, et bien sur, la pluie se remet à nous harceler, à grand renfort de vent. Finalement, une voiture s'arrête enfin, et sa conductrice nous emmène jusqu'à l'entrée du chemin de gravier qui monte au départ de la balade. Avec toutes ces humides histoires, il est près de 19h, et nous poussons un soupir quand nous voyons qu'il nous reste 7 kilomètres de marche pour atteindre le début du treck... Flo, qui ne va pas nous accompagner sur la traversée, décide quand même de rester avec nous jusqu'à demain.

Il ne pleut plus, mais la nuit tombe, un épais brouillard se lève, nous sommes détrempés, épuisés, et nous traînons nos savates en silence pendant près d'une heure sur le chemin, au milieu d'une plaine vallonée couverte de buissons ocres, de touffes d'herbes jaunes et de petits arbres noueux. Nous ne voyons pas à plus de 20 mètres à cause de la brume, et à nouveau nous nous retrouvons en pleine atmosphère onirique et surréaliste.

Nous nous apercevons qu'emportés par la fougue de ce trajet de dingues, nous en avons oublié de réfléchir à l'endroit où nous allions passer la nuit... Il est trop tard pour faire machine arrière, le brouillard s'épaissit tandis que la lumière baisse, et je quitte la route pour partir en reconnaissance à travers les buissons, remontant le lit d'un ruisseau en me trempant un peu plus, si c'était possible. Je découvre quelques petits replats dégagés au milieu de la cambrousse, retourne chercher Léo et Flo, et nous montons le camp tant bien que mal tapis dans les fourrés. La nuit s'annonce sportive : Flo coince sa guitoune entre deux buissons, et nous devons poser la nôtre sur un carré beaucoup trop incliné de gadoue humide et de caillasses...

La nuit tombe, nous sommes au milieu de nulle part, cernés par le brouillard, le vent s'est tu et la pluie s'est arrêté. Tout est calme et silencieux, contrastant avec l'après-midi que nous venons de passer. Nous avons pris de l'altitude, et il fait un froid de canard tandis que nous cuisinons à la frontale les pieds dans la boue et que nous engloutissons nos nouilles debout en essayant de nous réchauffer.

Il est tard lorsque nous nous couchons, mais nous ne parvenons pas à fermer l'oeil : déjà, d'un point de vue technique, il est fort difficile de trouver une position confortable sur un sol couvert de cailloux et en pente où le moindre mouvement nous fait glisser vers le bas... Ensuite, nous baignons dans notre jus, tout humide que nous sommes, et la caillante n'arrange rien. Et enfin, nous doutons. A quelle distance sommes-nous du départ du treck? Et surtout, est-ce que les prévisions météorologiques se vérifierons demain ou est-ce que nous allons marcher 8 heures dans la tourmente sans rien voir des superbes paysages que nous ont fait miroiter nos recherches sur l'Alpine Crossing? Dans tous les cas, nous nous disons une chose : elle a vraiment intérêt à envoyer le pâté cette balade...

Lorsque nous commençons enfin à nous assoupir, vers 1h du matin, la situation vire à la blague, quand une tempête éclate et se charge de nous maintenir éveillés. Cette fois, les éléments se déchaînent véritablement. De violentes rafales secouent la tente dans tous les sens, la toile se couche quasiment sur nous tant le vent est fort, tandis que des trombes d'eau s'abattent dans un vacarme d'enfer...

Après ce que nous avons pris dans la figure hier, il est presque comique de voir les choses empirer encore... Sur le coup, nous en rigolons!

A 5h du matin cependant, nous n'avons dormi que deux ou trois heures, la tornade ne s'est toujours pas calmée, et nos espoirs de voir une accalmie commencent à battre de l'aile. Nous restons assis la tête dans les genoux comme deux pauvres malheureux, fouettés par la toile de la chambre. C'est tout de même un comble : notre propre tente nous tape dessus! Existe-t-il de meilleurs conditions pour attaquer un trek?!

Après deux heures de catatonie silencieuse et morose, la pluie se calme un peu, et nous relevons la tête, plein de détermination : baste, nous n'avons pas fait tout ce chemin pour rien. Nous y allons. Nous verrons bien comment évoluent les choses.

Nous émergeons dans les rafales, tandis que Flo vient de finir de plier, transit de froid. Nous lui proposons de rejoindre le parking à l'entrée de l'itinéraire et de nous attendre à l'abris. Les dents serrées, nous renfilons nos habits trempés, remettons nos chaussures gorgées d'eau et glacées (un vrai délice!), puis nous replions difficilement la tente dégoulinante de boue, craignant par avance le temps qu'il va nous falloir pour nettoyer et faire sècher tout ça. Quel bazar... Ah, c'est pas facile tous les jours!

Nous nous mettons en route, couvert de presque tous nos vêtements, au milieu du crachin... Et la situation s'améliore enfin, lentement mais sûrement : les nuages s'effilochent, le vent se calme un peu, et le ciel s'éclaircit tandis que nous découvrons les abords du parc, tout en buissons et en collines.

Et au détour d'un chemin, les nuages se dispersent à l'horizon, et nous l'apercevons enfin. Le Mont Ngauruhoe apparaît devant nous, majestueux.



Nous voyons de nos yeux la Montagne du Destin! Je saute sur place, cette simple vision nous rend fous, et nous nous remettons à espérer une belle journée. Nous sommes tout regaillardis, et atteignons bientôt l'entrée du parc tandis que quelques timides rayons de soleil tentent difficilement de percer les nuages. Nous préparons le thé sous un abris à deux pas du chemin, répartissons le matériel entre les sacs, remplissons les bouteilles d'eau et nous donnons rendez-vous pour le soir à National Park, le petit bled le plus proche (oui, le village s'appelle vraiment "Parc National"!). Florian repart sur la route de graviers que nous venons de suivre, tandis que nous nous tournons face à la montagne, un sourire jusqu'aux oreilles. Nous y sommes. Nous allons enfin dévorer le mythique Tongariro Alpine Crossing!

Encore une fois, je vais laisser les photos parler à ma place. Pour résumé, je dirais juste que nous venons de débuter ce qui va être l'une des plus magnifiques, contemplatives et originales randonnées que nous ayons jamais faites. Et ceux qui nous suivent depuis le début savent que nous en avons deux ou trois dans les pattes!

Nous traversons d'abord une vaste plaine volcanique, couverte de buissons et de roches noires, ravis de voir le ciel se dégager de plus en plus! Le panorama possède un petit côté désolé mais magnifique, et nous multiplions les arrêts contemplatifs.



Après une heure de marche en plein Mordor, nous attaquons une côte bien violente qui doit nous amener 200 mètres plus haut, au pied du Ngauruhoe. Et nous ramassons... Le problème dans notre situation de vagabonds à pied et en autostop, c'est que nous devons garder en permanence nos affaires sur nous. Nous n'avons pas la chance de disposer d'un coffre de voiture ou de van pour déposer notre barda! C'est ainsi que nous retrouvons à grimper en trimballant, comme à l'accoutumée, une vingtaine de kilos de matériel dont la plupart sont inutiles... C'est le tarif!

Nous avançons à une allure d'escargot, en admirant la vue grandiose dont nous jouissons sur la vallée que nous venons de traverser.

Malgré la violence de l'effort, nous explosons soudain de joie. Le miracle tant attendu et espéré depuis ces trois satanés derniers jours s'accomplit enfin : le soleil apparaît! LE SOLEIL!!! Dame nature nous récompense enfin de nos efforts! En revanche, nous pensons à notre petit Flo quand nous voyons de gros nuages noirs au loin. De notre côté, la pluie qui tombe à l'horizon nous offre un bel arc-en-ciel au-dessus de la vallée.

Y'a pas, avec la Montagne du Destin en décors de fond, c'est quand même la classe!


Quand nous arrivons, suants, au sommet de cette côte de timbré, nous découvrons les yeux écarquillés le South Crater, qui s'étend entre le Mont Tongariro et le Ngauruhoe. La vue est formidable, et nous voyons nos premières neiges depuis longtemps.



Nos pas nous font passer sur les pentes du Mt Ngauruhoe. C'est fait, nous avons marché sur la Montagne du Destin! Et puis... Et bien le temps nous rappelle que nous sommes en milieu alpin, à près de 2000 mètres d'altitude, lorsque nous passons d'un beau ciel bleu à un épais brouillard en l'espace de quelques secondes... Nous attaquons la deuxième grimpette violente de l'itinéraire, sur un chemin très escarpé, en espérant que le vent glacé qui s'est mis à souffler chasse tout ça rapidement...



Nous progressons sur les pentes qui surplombent la vallée du South Crater, et le chemin étroit donne de chaque côtés sur du vide rempli de brouillard. Nous rageons en imaginant les vues que nous sommes en train de rater à cause de cette satanée bouillasse blanche, quand le sentier devant nous se dégage brusquement. Après quelques minutes, le ciel bleu réapparaît, je me retourne afin de voir ce qu'il en est derrière nous, et...



Je pousse un cri qui arrête les quelques marcheurs qui nous précèdent. Les acclamations fusent : Le Mont Ngauruhoe offre un spectacle fantastique, au milieu des nuages qui se dissipent, et les couleurs que nous voyons sur ce versant, s'étalant du rouge sombre au jaune, se dégradent depuis le noir pour donner l'impression que la montagne est incandescente.

A savoir que le mont, culminant à 2291 mètres, est un volcan toujours en activité aujourd'hui. Sa dernière éruption date d'ailleurs de 1977!

De l'autre côté du chemin, un point de vue aride et rocailleux s'étale.



Nous voilà déjà au sommet du parc, à 1900 mètres d'altitude. Nous arrivons au Red Crater, dont la couleur est due à l'oxidation sous haute température du fer contenu dans la roche. Derrière, nous découvrons un nouveau panorama sur la vallée.



Et les choses commencent à devenir intéressante. Lorsque nous atteignons le point culminant de l'itinéraire, un vent violent nous fouette. Et quand je dis violent, c'est violent. Un courant d'air surpuissant nous bloque, nous ne pouvons plus avancer, et nous devons enfoncer nos pieds dans les gravats pour ne pas tomber. En baissant la tête pour nous protéger, nous voyons des pierres de la taille d'un petit poing emportées par les rafales...



Nous débouchons au-dessus d'un vaste plateau volcanique où apparaissent de magnifiques lacs aux couleurs vives. Nous voilà au départ d'une descente mémorable, sur une ancienne morraine beaucoup trop étroite et balayée par une véritable tornade. Le point de vue sur les lacs en contrebas est formidable, mais sur le coup nous n'avons pas tellement l'occasion d'en profiter... Les photos ne montrent pas l'anarchie que constituent les quelques 500 mètres de descente, surtout avec nos gros sacs sur le dos qui nous déséquilibrent!



De grands ravins s'ouvrent de chaque côté du chemin, le vent redouble d'intensité, et tous les 3 mètres nous nous arrêtons, par peur de la chute. Sans rire, nous n'avons jamais vu ça!

Certains marcheurs ne peuvent tout simplement pas continuer, et s'arrête dans la pente pour fourrer leur visage dans leur blouson.

De notre côté, nous arriverons en bas laborieusement, titubants, le visage fouetté par les graviers, pesant chacun de nos pas, pour atteindre le plateau et voir ses lacs d'un peu plus près. Si le vent s'est un peu calmé, il est toujours difficile de progresser correctement.



Nous traversons finalement le plateau, passant quelques névés... 




...pour atterir au bord du Blue Lake, et découvrir le plus beau cadre de pique-nique du monde! Nous nous affalons derrière une grosse motte de terre, relativement abritée du vent, et grignontons un frugal repas en nous disant que décidément, on en voit de ces choses! Oui, nous, quand on part pique-niquer, on choisit ce genre d'endroit :



Nous repartons en début d'après-midi pour rejoindre les hauteurs du plateau et profiter d'un dernier craquage de rétine sur le Mt Ngauruhoe et le Red Crater. Je vous en remet une rafale, ça fait beaucoup, mais punaise que c'était beau!



Nous passons de l'autre côté de la montagne, pour en reprendre encore plein les mirettes. Quelle balade!



Voilà plus de 5 heures que nous marchons, et pour être franc, passée la première claque visuelle de ce dernier panorama, le looong chemin que nous suivons devient un peu répétitif... Notre dernière heure de descente est même franchement ennuyeuse, nous sommes sur les rotules et les sacs nous pèsent.

Nous finissons la marche en forêt. Il ne manquait plus que ça pour que notre bonheur soit parfait! Quelques heures plus tôt, je chipotais en effet en disant que toute cette caillasse manquait un peu de verdure.



Nous arrivons bientôt sur le parking qui marque la fin de la balade, sur la route du nord, et nous nous affalons, épuisés, les pieds en feu, le dos douloureux, avec une incoercible envie de nous taper une bonne sieste là, tout de suite... C'est que nous venons de nous enfiler une vingtaine de kilomètres de marche en 7 heures sur 2000 mètres de montées-descentes, le tout avec deux ou trois heures de sommeil dans les pattes et 20 kilos sur le dos! Mais nous avons des étoiles dans les yeux.

L'Alpine Corssing s'est montré à la hauteur de sa réputation, cela faisait longtemps que nous n'avions pas fait une balade aussi grandiose et unique au monde, où nous devons nous arrêter tous les 10 mètres en poussant un grand "whouaaa" tant le décors est beau et jamais vu auparavant. Si l'on ajoute en plus le petit côté alpin et la neige... Côté physique, la marche est accessible mais reste intéressante avec quelques bonnes grosses montées et une longueur conséquente pour une rando d'une journée. Pour le moment, sans conteste, il s'agit du site qui nous a le plus décroché la mâchoire dans le pays. Et même si nous le comparons avec ce que nous avons pu voir au cours de nos voyages, il reste dans le haut du panier!

L'heure n'est pourtant encore au repos. Il est 16h, et il nous faut encore lever le pouce pour rejoindre Flo à National Park, à une quarantaine de kilomètres au sud-ouest. C'est pas une vie!

Plein de flemme, soupirants, nous soulevons laborieusement nos sacs et nous résignons à lever nos derrières pour rejoindre la route. Un couple de marcheurs nous récupère bien gentillement dans leur voiture pour nous poser sur le chemin de National Park, et la galère commence... Une heure passe sans que nous soyons pris... Je trouve une cabine téléphonique pour appeler Flo, mais il ne répond pas, et nous continuons à lever le pouce au bord d'une route désespérément déserte. 17h30... 18h... Il est temps d'anticiper et de trouver un coin où camper si besoin. Lassés, nous marchons (encore...) pour nous poster à côté d'une forêt. Si l'auto-stop échoue, nous nous y réfugierons.

Nous espérons que notre petit Flo a réussi à rejoindre National Park et qu'il s'y soit trouvé un endroit où dormir. Nous nous inquiétons en l'imaginant seul en pleine nuit au milieu de nulle part...

Finalement, un touriste chinois nous récupère. Lorsqu'il nous dépose un peu plus loin, il est temps de reconsidérer les choses : la nuit tombe, il est près de 20h, et Flo ne doit plus nous attendre. Il est inutile de tenter de le retrouver ce soir en ville, nous risquerions de nous retrouver bloquer dehors alors qu'un camping du DOC se trouve à quelques encablures. Lorsqu'un homme bien sympa nous récupère, nous visons le camping. De mon côté, je m'inquiète encore et toujours pour mon ami...

Sur place, le camping coûte... 13$!!! 13$ alors qu'il n'y a rien d'autre qu'un abris et des toilettes sèches! Nous lisons partout que les campings du DOC sont non-commerciaux, donc moins chers que les autres, mais jusqu'à maintenant nous trouvons plutôt que les filous se gavent en profitant de l'attrait de certains endroits pour gonfler leurs prix... Cette sensation que le pays, sous pretexte de maintenir et d'entretenir ses espaces naturels, se remplit les poches, n'est pas nouvelle, et nous tiquons souvent sur la politique tarifaire du gouvernement concernant le secteur touristique.

Sur le coup, nous sommes trop harassés pour nous résoudre à nous remettre en marche pour aller poser la tente dans la pampa, mais le tarif nous pousse au boycot, et nous décidons quand même de tenter une méthode de resquille assez connue dans le milieu : le camping fonctionne sur donation. Il faut placer les 13$, 26 pour nous donc, dans une enveloppe que l'on glisse dans une boite, tandis qu'on accroche sur sa tente un genre de ticket montrant que la somme a bien été réglé. Un ranger passe régulièrement pour vérifier que tout le monde a bien payé. De notre côté, nous mettons un billet de 50$ dans l'enveloppe, mais ne la glissons pas dans la boite, sous pretexte que nous ne disposons pas de monnaie... Nous trouvons un coin où poser la tente, dressons le camp, puis attachons l'enveloppe à l'entrée. Si un ranger se pointe d'ici demain, il n'aura qu'à nous réveiller pour nous rendre notre monnaie, et nous serons en règle. Sinon, nous récupérerons notre argent avant de partir. Quand on peut s'arranger...

Un petit bain dans la rivière, un plat de nouilles, et nous nous écroulons sous la tente, après cette épuisante mais formidable journée.

Au matin, sous le soleil (ouiii!), nous mettons les voiles très tôt, notre enveloppe est toujours là, et nous déguerpissons vite fait bien fait pour rejoindre la route. Une nuit d'économisée!



Nous entamons les 10 bornes qui nous séparent de national Park, mais trouvons un lift pour le village à mi-chemin pour le bled, qui n'est en fait un simple regroupement de maisons. Nous nous mettons en quête du Flo, passant au café du coin, où on nous informe que notre ami a passé la journée de la veille ici. La cabine téléphonique du village est en panne, et nous sortons l'ordi pour essayer de le contacter par mail... Où est-il?

Nous le voyons enfin débarquer, et nous nous contons nos aventures de la veille avec enthousiasme. De son côté, il a du redescendre les 7 kilomètres de gravier sous la pluie après nous avoir quitté. Il a ensuite été récupéré presque instantanément pour National Park (un comble quand on sait que nous avons nous-même passé plus de deux heures le pouce en l'air la veille sans y parvenir...), et il a passé sa journée au café avant d'aller faire un tour, pour rencontrer une fille qui lui a indiqué un camping tout proche. Il a donc pu trouver un endroit où passer la nuit, avec cuisine et tout le tremblement, pour 15$! Il s'est beaucoup inquiété pour nous de son côté en entendant que tous les tours organisés dans le Tongariro étaient annulés à cause du vent. Quand on y songe, c'est grâce à ça que nous avons pu profiter de la balade sans nous retrouver à la queue-leu-leu derrière des troupeaux de visiteurs!

Nous nous accordons un café en terrasse, puis planifions. Il n'y a plus grand chose à voir ici, et nous décidons de ne pas attendre plus longtemps pour rejoindre l'île sud, tout sourire à la perspective de découvrir enfin ce que tout le monde nous a décrit comme la quintescence des espaces naturels incroyables!

Nous levons le pouce en pleine cambrousse, à la sortie de National Park. 300 kilomètres nous séparent de Wellington, la capitale du pays, d'où partent les ferries pour l'île sud, la journée est déjà bien entamée, et nous espérons trouver un coin sur la route pour nous poser aujourd'hui, sans savoir vraiment où chercher...

Le conducteur du mini-bus qui nous récupère nous offre la solution : l'un de ses amis tient un bed and breakfast à Ohakune, un village situé non loin d'ici, et nous pourrions poser la tente dans son jardin pour 10$, tout en profitant de la douche, de la machine à laver, du wifi, de la cuisine... Et j'en oublie! Un bon plan providentiel que nous nous dépêchons d'accepter!

Sur place, nous faisons la connaissance de Paul, qui nous emmène chez lui. Un grand jardin, une maison en libre accès, un fantastique spot camping en bord de rivière, face à la montagne, et toutes les facilités imaginables pour un prix ridicule... La découverte de cette fantastique île sud qui approche à grands pas... Et ce ciel, ce ciel d'un bleu éclatant qui nous inonde de soleil après tous ces jours de pluie... Nous sommes aux anges!



Surtout après tout ce que nous venons de voir au cours des derniers jours. La bonne surprise des Red Woods de Rotorua, ses lacs, les Huka Falls... Le formidable et surréaliste parc de Wai-O-Tapu... Et la digne, grandiose et bien méritée conclusion, qui nous a vu arpenter le célèbre et mythique Tongariro Alpine Crossing, pour l'une des plus belles balades que nous ayons jamais faites!

Nous avons vécu un trip unique, très minéral et volcanique, toujours débordant de variété et de couleurs, traversant les improbables créations de notre planète qui nous rappellent qu'il n'y a pas que la verdure qui peut nous faire briller les yeux!

On en oublierait presque la météo anarchique qui nous en a envoyé plein la figure plusieurs fois, et qui commence à devenir fatigante...

Après ces quatre premières semaines, les habitants nous ont conquis. Je ne cesse de comparer notre expérience ici avec ce que nous avons pu vivre en Australie, mais il est vrai que le degré de similitude entre les cultures de ces deux pays est tel qu'il met encore plus en évidence leurs différences. Et puis la légendaire et gentille rivalité opposant kiwis et kangourous ne fait qu'encourager les comparaisons. Avec toutes les piques, les blagues et les moqueries que nous ont lancé les australiens à propos de la Nouvelle Zélande, il est légitime que nous donnions notre avis! Pour le moment, nous pouvons dire que nous apprécions beaucoup plus l'attitude des habitants ici. Les néo-zélandais que nous rencontrons au fil de nos vadrouilles ont ce côté très amical et franche camaraderie, mais sans être aussi exubérants, faux et fermés que leurs voisins de l'ouest. Passée la chaleur du premier contact, ils sont plus réfléchis, plus calmes, plus à l'écoute, et surtout plus authentiques et francs, ce qui nous permet la plupart du temps d'avoir d'intéressantes et profondes conversations avec chacune des personnes que nous rencontrons. Ce n'était pas forcément le cas de l'autre côté de la Tasman Sea...

Bref. Ainsi s'achèvent notre premier mois en Nouvelle Zélande, et notre vadrouille de l'île nord. Nous y retournerons probablement, mais pour l'heure, les incroyables étendues du sud nous attendent!

A la prochaine!

3 commentaires:

  1. bon !
    comment dire ...
    en fait sans la présence de Florian et le fait que je vous connaisse, je ne lirai pas ce blog, il y en a surement des milliers de ce type .
    mais quand même ! bon sang qu'elle a l'air bien votre virée, j'imagine que ce n'a pas toujours été aussi bien par le passé ( je n'ai pas lu vos publications passés ) mes quelques expériences de pouce levé, deux fois une semaine , n'ont jamais eu cette qualité là, mais là ça à l'air franchement bien .
    J'admire ce que que vous vivez et le récit que vous en faites.
    c'est vraiment touchant pour moi de vous savoir là bas , à vivre de si belles expériences.
    j'attends la suite avec impatience !
    Je vous embrasse de tout coeur
    Philippe Brottet

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    1. Bonjour! Ce message nous fait énormément plaisir!

      Notre vadrouille est effectivement formidable, et de notre côté nous sommes presque soulagés de nous retrouver à nouveau sur la route. Concernant le voyage en pouce, il est vrai que la chose est beaucoup plus efficace qu'en Europe. Il nous est arrivé de traverser des pays où l'auto-stop fonctionnait encore mieux, en Albanie ou en Turquie par exemple, où les gens s'arrêtaient d'eux-même sans que nous ayons besoin de lever la main! Parfois, c'était même deux ou trois voitures en même temps! Nous avons aussi tenté le coup au Laos, avec beaucoup de succès, ce qui nous a permis de faire le tour du plateau des Bolovens uniquement en pouce.

      En Italie ou en Grèce, c'était autre chose... Dans ce dernier pays, il nous est arrivé de patienter des journées entières au bord de la route, et nous parcourions souvent moins de 50 kilomètres par jour...

      Je pense qu'en Europe, les gens sont peut-être plus effrayés par les inconnus que dans nos confins. Ici, les personnes que nous croisons sont systématiquement très amicales et toujours prêtes à aider spontanément alors qu'elles ne nous connaissent pas. Enfin tout ça fait partie de l'histoire ancienne. Et oui, en exclusivité, nous annonçons que nous sommes dorénavant véhiculés!

      Je suis très touché que le blog vous intéresse! Effectivement, il y en a des milliers, et celui-ci était au départ seulement un moyen de tenir informer nos proches. Je tenais un journal écrit à côté. Finalement, j'ai arrêté d'écrire et le blog est devenu mon journal. Voilà d'ailleurs pourquoi j'en mets des tartines, écrivant parfois des détails sans grand intérêt pour le lecteur de passage : c'est un moyen de partage et d'information, mais c'est aussi notre carnet de voyage perso. Et puis nous serons bien content de retomber dessus dans une vingtaine d'années! Si des expériences pareilles laissent des souvenirs impérissables, les détails s'oublient avec le temps.

      Nous continuerons donc d'écrire des paves pour vous faire partager tout ça!

      Encore merci pour ce beau message, et à bientôt dans ces lignes!

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